--Ma Famille--
Je suis l'aîné d'une fratrie à six enfants, Morrigane, Adamantine d'Ascalon
Ma première sœur, Isabelle, Vaillante, à vingt-six ans.
Mon seul et unique frère, Balian en a vingt-trois.
Ma deuxième sœur, Bérénice, Délivrance, dix-huit ans.
Ma troisième sœur, Isaure, Céleste, quinze ans.
Et enfin ma quatrième sœur, Eliane, Aimée, a fêté son dixième printemps.
- Arbre généalogique:
Je n'ai jamais eu de conflit particulier avec Isabelle, nous nous entendons très bien toute les deux, j'admets que parfois on a pu s'amuser à tourmenter Balian durant son apprentissage de la vie... Pour son plus grand bien, j'en reste persuadé.
Nous aimions nous retrouver toute les deux le soir derrière la grande tour à l'abri des regards pour s'adonner à notre petit plaisir : le tir à l'arc.
Balian, ce pauvre Frère qui s'est retrouvé catapulté au milieu d'une meute féminine prête à tout pour arriver à ses fins. Notre père était aux portes du désespoir tant nous lui rendions la vie dure avec nos enfantillages... Plus sérieusement il était soulagé qu'un fils fasse son entré dans la famille, notre ligné pouvait ainsi perdurer pour une génération de plus. Cette idée l'obsédait tellement qu'il ne perdit pas de temps pour condamner Balian à vivre entre les mains de nos précepteurs. Il était presque coupé du monde. Malgré cela c'est le seul héritier d'Ascalon, il est hors de question qu'il lui arrive quoique ce soit. Nous ne sommes pas des foudres de guerre, nous n'avons pas d'armée professionnelle et cela notre père en a bien conscience.
Eliane venait de naître quand mon père nous a pris Isabelle et moi entre quatre yeux : Il savait qu'on s’entraînait à l'arc au-delà du loisir, il nous demanda de veiller sur Balian non le temps que jeunesse se fasse mais d'y veiller jusqu'à trépas, faute de quoi notre maison se retrouverait sans avenir et ce qui fut autrefois le symbole du rassemblement des Maisons de la Vire deviendrait une ombre sans intérêt laissant la place à une lutte démesuré pour le pouvoir de ces vallées.
Bérénice et Isaure sont devenues des inséparables avec Eliane et très rapidement Balian s'est senti le devoir de les protéger. Depuis il est leur « ange-gardien » même si les affaires du pays et les responsabilités le mobilise loin d'elles, il cherche toujours à avoir de leur nouvelles.
--Mon passé--
Je me souviens du temps où Balian, le troisième né de notre fratrie, est venue au monde. C'était un hiver assez rude, je venais de passer mon cinquième automne. Pour la première fois, à travers les épais flocons de neige qui tombaient, j'ai vue ce qu'était un arc, je ne me rappel plus du tireur mais j'étais fasciné par sa maîtrise. Et ce bruit, quel bruit ! Le sifflement bref de la flèche fendant l'air suivit du « toc » dans la cible en bois. Depuis ce jour je n'ai plus eu qu'une chose en tête : tirer à l'arc. Alors que je m'amusais à tirer des brindilles je compris que pour apprendre il me fallait aller en forêt...
J'ai continué à prendre des leçons diverses de lectures, de diplomatie, d'étiquette avec ma sœur Isabelle, mon frère Balian et mon autre sœur Bérénice.
Dès qu'Isaure ma troisième sœur naquit, J'ai demandé à mon père si je pouvais dresser un faucon en guise de loisir il accepta à condition que je continue les leçons d'équitation et de lettre avec Isabelle. Ainsi je savais que bientôt j'irais en forêt...
Les cloches sonnèrent pour la sixième fois en dix années, ma quatrième sœur était là : Eliane.
Le soir après le dressage de Rodes mon premier faucon, j'allais, avec Isabelle, derrière la grande tour. Cette fois ci nous y sommes allé avec Balian : « Regarde, bientôt tu apprendras à t'en servir... Tu veux essayer maintenant ? » Le jeune Balian pris l'arc et manqua de me rendre borgne. Comme ma toute première fois il ne réussit qu'à envoyer péniblement le projectile quelques mètres plus loin en terre. Ses efforts pour tirer correctement montraient déjà la ténacité qui allait faire de lui un meneur d'Hommes. Il ronchonnait déjà, mécontent de son résultat : « Arrête de pleurer, tu y arriveras crois moi, un jour tu chasseras en forêt ».
Les années passèrent et il arriva un automne où nous chassions presque en famille : notre père et Balian, avec quelques autres nobles d'Ascalon en tête de la troupe que nous suivions Isabelle, Bérénice et moi même. Isaure s’entraînait toujours à la monte et Eliane était encore trop petite.
J'aurais préféré revêtir ma tenue de cuir et tirer le gibier mais les dames qui accompagnent restent en retrait. Rodes avait fait son temps et c'était Ulys qui nous accompagnait, un jeune faucon sacre qui parfois me ramenait un petit rongeur avant de le gober sur ma main. C'est surprenant la première fois.
J'étais bien, entouré des gens que j'aime... En forêt.
--Le début de la Fin--
Vint un jour où l'on ignore comment et pourquoi, des rumeurs funestes commencèrent à se propager au sein des murs d'Ascalon. Une menace inédite ferait revenir les morts à la vie, ceux-la même qui étaient destinés aux funérailles. Aucun ne voulait croire à pareil fabulation jusqu'au jour où des réfugiés arrivèrent catastrophés aux portes de la ville : Un village entier venait d'être pris d'assaut par des créatures apparemment humaines et couvertes de boue.
Notre père ne perdit pas de temps et s'empressa de mener son ost vers cette menace qui ne tarda pas à devenir un fléau.
Jour après jour les nouvelles des villages à l'extrémité de la Vire se voulaient alarmantes. Les rangs des combattants se clairsemaient à vue d’œil, si nous voulions continuer le combat il ne restait qu'une chose à faire : Combler les rangs. Nous ne sommes pas reconnus pour être des fines lames mais l'ardeur et la rancune coulent dans nos veines. C'est donc avec ferveur que les veuves prirent les armes de leur maris, permettant ainsi de continuer les combats. Je n'ai pas attendu de me faire prier pour monter en celle. Avec Isabelle nous avons rejoint Balian dès que possible.
Alors qu'il se préparait pour un affrontement, nous l'avons rejoint sans nous faire annoncer.
Notre père était resté sans voix et Balian n'a eu le temps que d'ouvrir la bouche pour tout de suite la refermer : « Essaie un peu de nous renvoyer à Ascalon … Tu ne voudrais pas que tes hommes voient leur commandant humilié par ses deux grandes sœurs non ? » j’esquissai un sourire taquin.
Isabelle on remit une louche pour être bien certaine d'avoir été compris : « Et je te rappel qu'il y a des femmes dans ton armée. Les paysannes pourraient porter la vouge et les dames nobiliaires devraient attendre en jouant à la paume ? S'il te plaît... »
« Tu as besoin de nous Balian, que tu le veuille ou non. Ce qu'il te manque c'est du moral. Quoi de plus galvanisant que de voir tes sœurs, les nobles dames d'Ascalon qui plus est, chevaucher l'arc à la main avec l'héritier de la Vire. » à ces mots il se renfrogna et parti au galop préparer les troupes pour le combat imminent.
Mon père ne m'a pas lâcha du regard : « Morrigane tu as certainement raison mais je te demande à toi et Isabelle de retourner à Asca... »
« Nous sommes ici pour respecter une promesse, aujourd'hui est le moment propice, plus que n'importe quand. À l'issue des combats cela en deviendra davantage un serment qu'une simple parole. »
Il fut surprit à l'écoute de ces mots, son regard était presque vide, j'ignore si en nous demandant cela jadis, il avait réaliser qu'un jour nous le prendrions au dépourvu de la sorte.
« Vous n'étiez que des enfants, je pensais à bien des choses mais pas à de tels extrêmes. »
Isabelle surgit de derrière lui sur son destrier brun « Vous n'auriez jamais pu prévoir un tel chaos. »
Merci ma chère sœur pour cette tranchante transition : « Personne ne mourra aujourd'hui, père. J'aimerai en dire autant pour les braves du premier rang. »
C'est ainsi qu'Isabelle et moi avions chevauché pour la première fois à la bataille. Pour cette première, pas une fois nous n'avons dégainé notre épée, qui est d'ailleurs plus un accessoire d'apparat qu'autre chose. Nous avons fait comme tout les nobles, vider nos carquois sur des bêtes farouches.
C'était également la première fois que je voyais ces immondices damnés communément nommés fangieux.
La difficulté était bien réelle, jamais auparavant je n'avais pratiqué l'archerie monté. Il m'a fallu un certain temps pour comprendre comment compenser les va et vient de haut en bas durant un galop.
En plus de ça il me fallait regarder sans cesse autours de moi pour ne pas quitter le groupe et me perdre je ne sais où. C'est beaucoup plus compliqué à réaliser qu'à en croire les récits et les contes.
Durant tout l'affrontement je n'ai visé juste, touchant rarement un fangieu se trouvant derrière ma cible. J'ai pour ainsi dire survécu à un baptême du feu à la seule hargne de Horion, mon cheval sans qui je ne serai certainement plus là. La tâche sera hardi mais je n'ai pas le choix, si je veux pouvoir survivre et ne pas dépendre d'autrui, je vais devoir m'accrocher à ce défi qui est de taille.
La bataille fut rapide et nous servions plus à gagner du temps pour le repli qu'à renverser le cours des événements. Je garde les détails de cette journée enfouis au plus profond de mon être.
Aucun cavalier ne mourut, nous ne pouvions pas en dire autant des vougiers...
Je n'oublierai jamais cette vision d'horreur.
Les mois passèrent et les choses allaient de mal en pis. Au final toute la population survivante des vals s'est retrouvée retranché à Ascalon. Nous aimerions avoir eu de grands murs de pierre infranchissables. Mais il n'en était rien.
La cité à tenue comme elle l'a pu, retardant l'inévitable.
Un peu plus d'un an après ma première expérience martiale il nous a fallut se rendre à l'évidence :
Sur Ordonnance de notre père, nous partons en laissant derrière nous personnes âgées et nourrissons. Nos parents restant avec les blessés et les infirmes pour nous faire gagner du temps.
Ascalon était perdue.
Depuis nous suivions Balian, Comte de la Vire.
Il m'a nommé Maître du Palais, autrement dit personne ne l'approche sans que je le sache. Le comble c'est qu'il ignore totalement le serment que Isabelle et moi avons formuler le concernant.
--Le Comté de Ventfroid--
Après bien des semaines d’errances et de fuite nous vîmes enfin une ville encore debout. Ventfroid. C'était un tel soulagement, enfin nous retrouvions la civilisation.
Ce repos ne fut que de courte durée, quand diable allons nous pouvoir souffler un peu !
Les fangieux nous talonnaient depuis le début de notre fuite et nombres d'entre nous succombèrent durant le voyage, que cela soit de faim, de fatigue ou de fange. J'ignore si ils nous traquaient ou s'ils avaient le même itinéraire mais ils étaient là. Je n'ai pas compté si cela faisait des jours ou des semaines que nous étions arrivés, je ne compte plus. Le fait est que Ventfroid fut pris d'assaut nous contraignant à nouveau de partir.
« Noble dame, allez tant qu'il est encore temps. Nous ne voulons plus fuir notre destin funeste, partez et vivez pour notre salut. Je sais que vous ne nous oublierez pas. »
Las de fuir, les réfugiés étaient décidés à rester et à mourir ici. Ils n'attendaient qu'un repos bien mérité après tant de labeurs.
Je ne me suis guère occupé de nos hôtes. Étaient ils toujours en vie ? Avaient ils déjà gagné Marbrume ou sont ils allé ailleurs ? Des questions auxquelles je ne m'attarderai pas à chercher les réponses. Pour l'heure nous devons survivre, mais où est Balian ?
Ce bougre était avec nos hommes prêt à pourfendre ces rejetons du chaos, avait il conscience du déferlement de mort qui arrivait ? Se souvenait il seulement qu'un fangieu se délectait de dizaine d'âmes avant le trépas ? Qu'importe l'honneur de faire face, qu'importe la fierté, nous devons vivre pour espérer peut être un jour voir cette fange faillir.
« Balian ! Nous devons partir pour Marbrume. »
« Il en est hors de questions ! Nous allons nous battre, je n'abandonnerai personne. » Fidèle à lui même il s'était entêté à vouloir rester auprès de son peuple quitte à y rester.
« Balian regarde nous, nous n'avons rien pour repousser cette marée fangieuse... »
« Je resterai pour la mémoire de nos ancêtre. » Il hésita un instant, puis, me regarda droit dans les yeux. « Et si je meurs, venge moi. » Ses yeux brillaient, pendant un instant mon cœur s'est arrêté. Nous avons beau faire mine de droiture sur nos belles montures, nous n'en restons pas moins humain. Horion passa devant son cheval et alors que je me mettais à sa hauteur, les yeux larmoyants je lui assenai de ma main déganté une gifle. Les émotions parlèrent et cette fois ci, la marque sur sa joue gauche saigna sans attendre marqué par une bague un peu trop taillé. « Il n'est plus question d'honneur mais de survie. Jamais je ne te demanderai de te défiler... » .
Je lui pris la nuque et lui posais son front sur le mien. Un soupir presque étouffé par ma gorge serré faillit me faire perdre la voix. Pendant que les larmes caressaient lentement mon visage, j'entrepris douloureusement de réciter le serment gravé sur les portes d'Ascalon avant l'exode :
«
Alors tous se souviendront,
Que sur ces montagnes vivaient les Hommes,
Qu'ils avaient juré de s'unir face au monde,
Que la mort de l'un était celle de tous,
Que jamais ils ne se sont abandonnés,
Que jamais ils ne se sont oubliés,
Et que pas même la fin des temps ne les a séparé...Si tu restes tu condamnes notre famille à l'oubli et les gens de la Vire avec.
Ces mêmes gens on fait leur choix. Rendons leur cette honneur et cultivons leur mémoire, nous les vengerons, je le jure. Mais nous ne le pourrons si nous restons ici. »
C'est le cœur brisé que nous, mon frère, mes soeurs, les quelques cavaliers nobles restant et moi nous rendîmes à Marbrume. Comment y serons nous accueillis, cela je l'ignorai. J'étais certaine que nous avions des choses à échanger contre l'hospitalité.
Nous avions pris le temps de penser nos blessures, de nous regarnir. Quelques dizaines de tout un peuple perduraient dans l'esplanade. L'heure était venue de monter à nouveau, pour le bien du plus grand nombre face à cette infamie.
Je m'appelle Morrigane, Adamantine, Maître du Palais d'Ascalon et voici mon Histoire.