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| Les joies de la famille [Aymeric] | |
| Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Les joies de la famille [Aymeric] Dim 22 Mar 2020 - 18:06 | | | 15 août, domaine Pessan Le soleil brillait dans le ciel bleu. Les chants des oiseaux emplissaient l'air pur, les mercenaires, à travers la fenêtre, s'entrainaient gaillardement, avec entrain. Après être rentrée au Labret, les jours suivant le Bal donné par le Roi où elle s'était tant amusée, la jeune Alix, qui avait désormais neuf ans, avait repris sa vie quotidienne. Elle ne voyait pas les heures, les jours et les lunes passer tant ses journées étaient devenues occupées ; car ses leçons lui prenaient désormais tout la plupart de son temps. Elle s'était lancé à corps perdu dans l'apprentissage de la lecture, de l'écriture, de l'art délicat de se comporter en dame même au domaine Pessan - ce qui n'était pas sans heurt, car elle avait mis des semaines avant de pouvoir marcher avec un livre sur la tête sans le faire tomber. Désormais plus pointilleuse sur son apparence, l'enfant avait demandé à leur servante de lui apprendre à faire des jolies tresses, et elle avait tenu à apprendre à coudre les robes des femmes de toute la maison, pour apprendre de son mieux à tenir la maison. Le seul problème qui lui restait était le calcul. Bien qu'elle ait commencé à apprendre les multiplications, la jeune bâtarde s'embrouillait avec les chiffres - mais elle était bien décidé à aider son père du mieux qu'elle pouvait. La dame de la maison devait aider à tenir les comptes après tout, rester invisible et s'arranger pour que tout tourne comme il le fallait, comme si elle tournait par magie. Mais comment faire, lorsque l'on avait neuf ans ? Après tout, Alix n'était pas sans ressources. Son père allait bientôt être déclaré veuf, car son ancienne épouse n'avait pas reparu ; et la petite fille, investie de la mission que lui avait confié la Dame de Pessan, était bien décidé à aider son cher papa à choisir la future femme qui dirigerait le domaine, et qui deviendrait sa maman. C'était pour quoi, ce jour-là, la petite fille avait délaissé sa leçon de maintien. Elle allait agir en vraie demoiselle noble ! Habillée d'une robe verte en coton léger, les cheveux attachés d'un ruban assorti, elle vint frapper doucement la porte du bureau de son père, les joues roses, et le cœur gonflé d'espoir. - "Papa...? Est-ce que je peux entrer ...? Je... je voudrais te parler, s'il te plait !" |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Mar 24 Mar 2020 - 10:50 | | | Bon sang que ce séjour à Marbrume lui avait paru long, à deux rares exceptions. Le Bal, tout d'abord, où il a eu le plaisir de danser avec une dame de bonne famille et avec Alix, puis l'avant veille de son départ, où il a revu cette dame et réalisé qu'il était un peu trop bien avec elle. Mais entre ces deux moments, ce fut un peu l'enfer pour notre Comte, qui déteste toujours autant la ville, et peut-être même encore plus maintenant que rien ne l'oblige à y rester. Mais ils ont là une excellente bibliothèque, où il a pu trouver les plans du fumoir qu'il compte fabriquer et quelques notes explicatives, et recopier ce plan lui a pris du temps, puis il y a son commerce dans les faubourgs, où heureusement tout se passe assez bien, la Compagnie des lames effectuant de l'excellent travail. Encore heureux vu le prix qu'il les paie, alors qu'il héberge l'autre moitié de la Compagnie au domaine. Il y a eu les contacts à la Milice, pas en tant qu'ancien, mais en tant que fournisseur en viande et fromages de chèvre, et avec Estelle, la tenancière de la Chope sucrée, qui lui achète régulièrement ses surplus de production. Puis il y a eu Apolline, partenaire commerciale, et Alix, qui y a reçu des leçons de mondanité que son illustre et rustre père est incapable de suivre.
Au retour de cette quinzaine, il a fallu faire quelques réparations et quand vient le moment où il peut commencer à fabriquer son fumoir, il se blesse au dos. Oh, une simple contracture, mais qui l'ont obligé à quinze jours d'un relatif repos pour laisser reposer le muscle. L'heure du travail administratif avait sonné et ça n'a pas été le moment le plus joyeux dans le domaine. Un Aymeric qu'on enferme se referme. Mais il lui restait les pièges, les visites, dont une chez Mathilde, les projets dont l'ébauche de la sauvegarde des chevaux de trait. Sans compter que ces lapins se font ultra nombreux. Il va pouvoir en vendre un paquet à la milice et récupérer les peaux. Il y aura de quoi faire un vêtement chaud pour Alix.
Le temps est magnifique et Aymeric devrait être en train de travailler sur son fumoir, mais il y a des jours où on a besoin de souffler, et ce jour est un jour comme ça. Alors il s'est réfugié dans son bureau pour y travailler son écriture, qui reste relativement enfantine malgré ses efforts. Et il en profite pour mettre ses idées et projets en place, se fabriquant une sorte d'agenda des tâches à faire et à prévoir. Ses deux chevaux, ceux de la Compagnie dont un poulain à naître qu'il compte négocier, sa vache, son taurillon, un boeuf à acheter, ses quatre cochons, sa centaine de lapins qui vont bientôt devenir adulte car dans le lot il y a beaucoup de lapereaux, ce qui permettra l'abattage des plus vieux, ses quelques poules, ça en fait, du boulot. Et il compte continuer à capturer des lapins sauvages, pour éviter que les petits ne soient consanguins, même si là il lui est impossible de dire s'il y a eu fricotage entre cousins lapins. C'est le moment que choisit Alix pour entrer dans le bureau.
- T'es pas censée avoir cours de maintien, toi ?
C'est plus une question qu'un reproche, sa fille se montre très sérieuse dans ses apprentissages et ses progrès sont spectaculaires. En matière de survie aussi, elle apprend et fait la fierté de son père.
- Bien sûr que tu peux entrer, j'suis pas dans un jour où je travaille bien, moi non plus. De quoi veux-tu me parler ? C'est important ? |
| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Sam 4 Avr 2020 - 17:57 | | | La porte du bureau s'ouvrit sur la silhouette familière de son père. En voyant ce profil à la fois rude et bonhomme, dont les traits semblaient toujours sur le point de sourire et de rire, de s'étirer en un fasciés de tendresse qui lui donnait envie de se réfugier entre ses bras, elle soupira de bien-être, étira, à son tour, un sourire détendu, un brin malicieuse.
Peu importait sa leçon de maintien - même si pour son avenir, pour l'avenir du domaine, devenir une parfaite petite noble était capital.
- "Je.. j'avais plutôt envie de parler avec toi, papa."
Son interlocuteur l'invita à entrer dans son bureau, et elle en profita pour se serrer brièvement contre lui. Il n'arrivait pas à bien travailler, lui aussi, et l'enfant plissa le front, brièvement préoccupée par ce qui pouvait assombrir les pensées de son père.
- "J'espère que tout va bien, papa ? En fait.. je me faisais... enfin... moi aussi, un peu de soucis. Ce n'est pas très important, enfin, si... C'est juste que..."
Elle commençait à avoir mal au ventre. Il lui avait clairement signifié que la question de qui il épouserait n'était pas son problème ; sauf que si, un peu. Après tout, elle serait sa maman. Et si cela se passait mal comme avec son ancienne femme ? S'il devait faire un choix à nouveau, et qu'il préfère une femme duquel il serait tombé amoureux ? Les démons de l'angoisse revenaient la hanter à chaque fois qu'ils en avaient l'occasion, et elle finit par s'asseoir, pour se donner une contenance.
- "Je sais que bientôt, tu seras déclaré veuf. Je sais aussi que c'est de ma faute, parce que je suis apparue dans ta vie, et que... je t'ai forcé à faire un choix. Et elle est partie. Et... euh.. je sais que ce n'est pas mes affaires, mais j'aurais voulu savoir.. si une femme... si tu avais en tête un projet de te remarier. J'aurais voulu la connaitre avant. Enfin, si tu veux bien ? Apolline dit que c'est à moi de t'aider à choisir une épouse, mais.. tout ce que je voudrais, c'est savoir si une dame t'as plu ! J'aimerai lui écrire une lettre. Pour qu'on devienne amies."
L'enfant leva des yeux remplis d'espoir en direction de son géniteur. Qu'allait-il répondre ? Allait-il se mettre en colère..?
- "Tu es fâché contre moi ?" |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Dim 5 Avr 2020 - 20:59 | | | Il est plutôt content de la voir mais finit par s'inquiéter quand elle hésite autant à parler. Et ce qu'il entend n'est pas pour lui plaire. D'abord, Alix imagine toujours qu'Aalicia est partie par sa faute à elle. Ensuite, qu'il aurait fait comprendre qu'elle n'avait pas son mot à dire. Ce n'est pas le cas. Et quand elle lui demande s'il est fâché contre elle, il répond :
- Franchement ? Oui !
Il la fixe, fait une grimace puis soupire.
- Parce que j'ai déjà expliqué certaines choses, que j'ai pris le temps de le faire et que je t'ai demandé si c'était clair pour toi et que tu m'as répondu oui. Alors que, visiblement, non, tu n'as pas compris. Alors, tu vas avoir face à toi le papa chiant, qui explique, qui blablate, qui insiste, qui pose des questions, qui joue au professeur si tu préfères. Et tu ne quitteras pas la pièce tant que ça ne sera pas clair, quitte à ce que ça prenne une semaine !
Regard sévère, apparemment il n'y a pas place à la négociation. Il s'assied du bon côté du bureau, croise les mains sous son menton et garde le silence quelques secondes, avant de se lancer.
- Tu n'as rien à voir avec le départ d'Aalicia. Quand on se marie devant les Trois, on prend son époux ou son épouse dans son entièreté, avec son passé, son présent et son avenir. Le fait de t'avoir découverte a été une source de joie pour moi. Aalicia, en te rejetant, a prouvé qu'elle ne voulait pas que je sois heureuse. Et en quittant la maison pour me forcer à choisir, elle a rompu notre serment de mariage. La seule responsable de la mort d'Aalicia, c'est Aalicia. Bien qu'elle ait porté notre nom, elle n'a jamais été une Beauharnais. Ni foi, ni force, ni honneur. Le fait qu'elle soit morte aujourd'hui n'en fait pas une meilleure personne. Les morts ne sont pas lavés de leurs fautes, ils emportent leurs actes avec eux. C'est aussi pour ça qu'il est important d'avoir des valeurs. Toi, à neuf ans, tu l'as compris. Elle est partie sans le comprendre. Il n'y avait aucun choix à faire, Alix. Tu es ma fille et rien ne changera cela. C'est bien compris ?
Son regard n'a pas dévié, sa voix n'a pas tremblé. Il a les accents de la sincérité. Non seulement il ne la tient pas responsable, mais il n'y a même pas songé un seul instant. Reste un autre point, tout aussi important.
- Je t'ai effectivement dit que je n'avais pas besoin que tu m'aides pour mes entreprises de séduction et que la séduction était une affaire d'adultes. Et que ce que je faisais dans mon lit ne te concernait pas. Et mon opinion ne change pas à ce sujet. Par contre, si j'envisage de me marier, là, il est évident que tu es concernée. Cette dame partagera nos vies à tous les deux et ton avis compte. Je choisirai, au final, parce que, si les Trois nous prêtent vie, je vivrai encore avec quand toi tu vivras avec ton mari. Mais tu as le droit de me parler de tout, quand on est nous deux. Toujours. Au pire, j'aurai le droit de dire que ça ne te regarde pas. Mais ma future épouse te regarde. Et là, les réprimandes sont finies, on va pouvoir discuter de choses plus joyeuses
Il lui fait un sourire et se penche un peu vers elle, sous forme de confidence.
- Puisqu'Apolline pense que tu pourrais m'aider, faisons-lui confiance. J'ai réduit ma liste d'épouses potentielles à trois. Et la première, justement, c'est Apolline. Elle présente pas mal d'avantages. Déjà, si je l'épouse, on est certain de ne pas perdre le domaine, puisqu'il sera mien. Elle est riche, elle a le sens du commerce, elle a les qualités que je n'ai pas, la maîtrise de l'étiquette, les intrigues, comment bien paraître en société et toutes ces choses dont je me fiche. Seulement, voilà...
Evidemment, une candidature ne peut pas avoir que des avantages.
- Elle est stricte et chiante. Je pense qu'elle pourrait même nous reprocher de rire. Alors, qu'une demoiselle noble ne fasse pas ceci ou cela, je l'entends, mais on a quand même le droit de s'amuser, merde ! Puis elle est autoritaire, et moi aussi. Cela annonce des disputes homériques et je déteste avoir à rappeler que c'est l'homme qui décide, parce que mon rôle n'est pas d'éteindre mon épouse et la rendre malheureuse. Puis, outre qu'elle n'a pas la meilleure réputation, ce qui pourrait la pousser à m'accepter comme époux, ma réputation est devenue positive après le Chaudron, je ne suis pas convaincu d'avoir envie que ça soit elle qui partage ma couche. Pour un mariage, c'est quand même important.
Il l'a dit en termes galants, mais il sait qu'Alix comprendra. Il sait qu'elle est une enfant, mais c'est aussi une petite dame et parfois Aymeric est perdu entre ces deux aspects. Elle a grandi trop vite sur certains plans, il ne va pas agir comme si ça n'était pas arrivé. C'est là qu'il aurait l'impression de trahir sa fille.
- La deuxième, et la troisième aussi d'ailleurs, tu la connais. C'est Mère Céleste. Elle te donne des cours concernant le Culte et aide à soigner ici. C'est une belle âme, puisqu'elle est prêtresse et niveau réputation, cela serait bien vu. Epouser un membre du clergé est toujours bien vu, de la noblesse et du peuple. Puis elle est d'ici, ça plaira au Labretan. Elle n'a aucun avoir, par contre et elle risque de passer plus de temps au Temple qu'avec nous. Mais, des trois candidates, c'est sans doute celle avec qui ton vieux père s'amuserait le plus, la nuit. Il y a juste que ça n'est pas un coup de coeur, c'est juste que j'imagine mieux la supporter dans cette maison qu'Apolline. Mais de ton point de vue, les deux ont des avantages et des inconvénients comme instructrices. Céleste peut t'apprendre les soins, le Culte, Apolline la vie de noble. Reste la dernière.
La dernière de la liste, mais certainement pas la dernière dans son cœur. Mais il n'a pas envie de mentir à sa fille ou de la manipuler.
- Tu m'as déjà dit qu'elle te plaisait bien, au bal, et je t'avais répondu qu'elle me plaisait bien aussi. On s'est revu, peu avant notre retour le mois dernier. On a parlé, bien une demi journée, on a mangé sur le port aussi, avec sa domestique. Elle, je me vois bien vieux et gris, si elle est à mes côtés. Si seul le cœur devait décider, ça serait elle. Idalie d'Auvray. Mais si je l'épouse, forcément, tu ne pourras pas épouser son frère, car il sera ton oncle. Mais je doute qu'il puisse attendre jusque là de toute manière. Alors, comme Céleste, elle a peu de moyens, nous ne pouvons compter sur une dot. Mais avoir dans sa famille un sergent peut nous aider, même ici au Labret. Elle aime la campagne, du temps d'avant, et s'imagine assez bien vivre ici. Elle sera moins bonne instructrice pour toi que Céleste ou Apolline, mais sans doute plus douce. Elle aime tenir les maisons et participer à des projets sociaux, et j'en ai quelques-uns à lui proposer. Je pense qu'elle peut être heureuse, ici. Et si elle en sait encore moins que toi sur ce qui peut se passer entre époux la nuit, ça ne me gêne pas. Elle, j'ai très envie qu'elle dorme avec moi. Et niveau réputation, vu le statut de son frère et le mien, deux familles de héros qui s'unissent, ça fera du bruit tant à Marbrume qu'au Labret.
Le choix d'Aymeric semble fait. Du moins, s'il était libre de ses choix, comme le commun des mortels. La sécurité financière mais l'ennui avec Apolline, sans même être certain qu'elle vienne vivre au Labret. Tiens, ça serait pratique, ça. Céleste, une Mère, soigneuse qui plus est, mignonne, mais dont il n'est pas amoureux ou Idalie, un vrai coup de coeur qui pourrait être heureuse ici. Il regarde Alix.
- Voilà, j'en suis là avec une petite préférence à l'heure actuelle. Mais, avant que tu ne me dises quel serait ton choix et si l'une des trois te déplait, n'oublions pas le plus important. Quand mariage il y aura, car il y aura, tu feras un réel travail sur la fête. Oh, je t'y aiderai, bien sûr. Et ça sera la première énorme fête au Labret. Il va falloir qu'on parle de tes idées, des miennes et du budget qu'on va dépenser. Mazette, c'est qu'un père qui se marie, ça n'arrive pas tous les jours non plus. Faudra que ça nous plaise à nous deux, déjà, puis que j'arrive à convaincre la future Comtesse de Beauharnais. Et certaines candidates seront plus faciles à convaincre que d'autres, si nos idées sont originales. Les miennes le sont.
Il lui fait un grand sourire.
- Et j'aimerais que le projet soit prêt dans les grandes lignes avant que j'aille demander l'heureuse élue en mariage, puis la numéro 2 si la première refuse ma main. Acceptez-vous cette mission, Vicomtesse ? |
| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Mer 15 Avr 2020 - 15:20 | | | Un peu intimidée par la réaction de son père, par ses gentilles remontrances alors qu'elle le savait agacé, la petite fille n'osa piper mot de toute l'algarade de son père. Elle était touchée par sa douceur, par les convictions fermes qu'il avait envers elle - elle l'avait tant détesté, tant haïe, qu'elle s'étonnait toujours de la façon dont, désormais, ils étaient liés l'un à l'autre, de la force irraisonnée qu'elle entrevoyait à travers la responsabilité qu'il avait endossé, qu'il tenait envers et contre tout.
Mais elle ne vint pas se serrer contre lui. Elle tremblait un peu, malgré la douceur de ses propos, et, finalement, vint se poser tout contre Aymeric, en essayant de réfléchir aux différentes options qu'il lui proposait. Alix n'en revenait pas d'avoir gagné le droit d'avoir le droit de donner son avis ; même si elle l'avait demandé, elle n'avait pas vraiment envisagé la réponse positive.
Aussi prit-elle l'affaire au sérieux. Il fallait que cette épouse soit parfaite et rapporte quelque chose à leur maisonnée même si les temps avaient changé - aujourd'hui, on se contentait de deux fermes en s'estimant riche par rapport au reste de la population. Il y avait trois candidates que son père avait déjà sélectionnées : la dame de Pessan, Mère Céleste, et Idalie d'Auvray, dont la vision de son frère faisait battre son cœur inexpérimenté. Elle avait vaguement conscience qu'il ne l'aimerait jamais, pas comme un amant aimait sa dame ; mais peut-être que le Roi accepterait qu'ils se marient tout deux lorsqu'elle aurait quatorze ans ! On ne savait jamais, après tout !
Néanmoins, ce n'était pas bien d'écarter les autres ainsi.
La petite fille s'assit à une chaise. Il fallait aider son papa, et elle le prenait très au sérieux.
- "La Dame de Pessan ne te rendra pas très heureux, je crois. Elle est aimable, mais... Elle est rigide aussi. Elle ne m'aime pas beaucoup non plus, mais c'est parce qu'elle a perdu sa fille, alors... ça ne lui plait pas de me voir. Elle apportera beaucoup de richesse à la maison, mais je ne pense pas qu'elle accepterait de s'installer au Labret de toute manière. Je.. si je devais te conseiller une femme... Je pense qu'Idalie d'Auvray serait mieux. Parce que tu as dit que tu serais bien et heureux avec elle, et je crois aussi qu'elle est moins calculatrice que la dame de Pessan. Et je crois que les hommes sont malheureux quand .. ils s'ennuient la nuit, avec leur femme. En plus, j'aimerai bien faire des bonnes oeuvres avec Dame Idalie !"
Elle s'arrêta de parler quelques secondes. Elle avait envie d'organiser une belle fête, comme au château royal ! Mais son père avait raison, cela demandait un budget et tout ce qui allait avec... Mais sans doute la future marié voudrait s'impliquer avec elle.
- "Je dirais quand même que le deuxième choix de Mère Céleste serait bien, parce que vous vous entendriez plutôt bien. En tout cas, mieux, je crois, qu'avec la Dame de Pessan. Mais... ça dépend si on a vraiment besoin d'argent et des ressources financières de ta future fiancée. Par contre, je crois qu'il faut attendre la réponse de la dame, parce qu'une mariée, je pense, voudra organiser sa propre fête. Mais je serai tellement heureuse de faire aussi partie de la famille d'Auvray ! Ils sont si gentils !"
C'était une qualité indéniable - et, se rendait-elle compte enfin, prédominante dans ses aspirations. L'amour lui était devenu totalement indispensable ; bien au-delà de toute condition financière. |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Mer 15 Avr 2020 - 17:15 | | | - Donc, on va dire Idalie en numéro 1 et Céleste en numéro 2, c'est ça ? Cela me convient. Elle est gentille, oui, comme son frère j'imagine. Deux belles personnes. Mais c'est important qu'on fixe bien ce choix, parce que ça aidera à la thématique de la fête. Et si c'est Idalie, j'ai la thématique.
Il fait une pause, pour ménager ses effets, mais on peut sentir qu'il est impatient comme un enfant et sa fille assise sur ses genoux ne le dérange visiblement pas du tout.
- Quand la campagne épouse la ville !
C'est qu'il est fier de l'idée, mais sans l'expliquer, ça peut paraître un peu stupide. Aussi se lance-t-il sans les explications.
- Pour les gens des bonnes familles, le Labret, c'est l'inconnu, c'est la campagne, c'est le dépaysement. Ils nous aiment, nous les campagnards, parce qu'on est le grenier de Marbrume, mais pour eux, on est aussi des rustres. Et côté campagne, où on aime travailler la terre, où la solidarité n'est pas un vain mot, les nobles, c'est un peu des gens prout prout, qui pensent surtout à être bien habillé et à bien parler. Et dans notre mariage, le campagnard, c'est moi, le "héros venu du Labret", et celle de la ville, c'est Idalie, la soeur du Héros du Chaudron. Mais ça sera l'occasion que les deux mondes se rencontrent.
Et découvrent ce qui les rassemble. L'idée d'Aymeric est là. Les nobles ont rarement l'occasion de découvrir la vie de la campagne, les campagnards voient rarement le raffinement des nobles.
- Tu vois, pour toi qui viens de la rue, ma maison à l'Esplanade était un émerveillement. Mais quand tu as découvert le Labret, ses champs, ses arbres fruitiers, ses animaux, ça a été une découverte aussi. Et au bal, tu as vu les belles soieries, les plats raffinés, les pâtisseries. Mais est-ce que ça vaut une de nos tourtes un bon lait de chèvre venant directement du pis ? Le vrai thème de la fête, ça sera la découverte. Mais j'ai envie que nos artisans de chez nous puissent se comparer aux artisans de là-bas. Alors, imagine !
Cette fois, il s'est levé, posant sa fille sur le sol, et il désigne des zones imaginaires de la main.
- Le papa de Pyo, qui est mon forgeron et quelque part le forgeron d'Usson, ferait un concours avec un forgeron venu de Marbrume. Une occasion sympa pour refaire quelques armes pour nos miliciens ou un joli chandelier et ils pourront montrer leur savoir-faire. Chaque famille du Labret viendrait avec un plat : une tarte, une tourte, des fruits et légumes du jardin, pourquoi pas une petite fermette avec des animaux pas loin pour que les citadins voient une vache ou un cochon ? On pourrait imaginer un concours d'éloquence, où les gens décriront leur vie dans ou hors des murs. Il y aura les danses des villes, on pourrait inviter Danyel Frappeseigle par exemple, puis les danses des campagnes, comme la gigue. Il y aurait des pains qui cuiraient au four commun, des bons potages de légumes. Nos artisans pourraient montrer leur savoir faire et nous aussi. J'abattrai un cochon pour faire de la cochonnaille et la faire goûter durant mes noces, histoire de faire connaître les produits Beauharnais-Pessan. Cela ferait de la publicité. Il y aurait une partie dans la salle des fêtes, je sais pas si tu l'as déjà vue, mais elle est tellement grande qu'on peut la chauffer du sol en faisant cuire certaines viandes comme sur un feu de bois, et ne pas être étouffé par la fumée. Et dehors, il y aurait les stands de la campagne, avec la petite fermette, des grandes toiles et la musique d'ici.
Il a le regard qui pétille, attendant l'approbation de sa fille.
- Les gens d'ici seront fiers de montrer leur univers, et ils ont de quoi l'être. Et les gens de Marbrume découvriront la richesse et le courage des gens qui les nourrissent, et qui ont aussi leur culture, leurs valeurs. Et si en prime ils dégotent des contrats, ça n'est pas plus mal. Mais plus important que tout, j'ai envie qu'Idalie découvre cet univers sous un angle magnifique et féérique. Et avec le fait de venir avec un plat ou quelque chose de typique, on fera des économies sur certains sujets. J'pourrai payer la moitié du cochon à la Pessan, déjà, nos costumes, les décorations, la sécurité, les musiciens. J'crois qu'on peut faire une fête énorme, inoubliable, et en plus, le Roi veut promouvoir le Labret et on lui fera une pub d'enfer. Alors, t'en dis quoi ?
Oh, il reste des détails, un paquet, dont celui d'être déclaré veuf et celui d'avoir l'accord de la mariée, mais bon sang, le projet lui plaît. |
| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Mar 21 Avr 2020 - 9:48 | | | "Nous les campagnards".
Son père semblait tellement heureux d'être ici, d'échapper à son statut de comte que l'enfant baissa les yeux. Il voulait organiser la fête de mariage la plus étrange que l'on ait jamais vu, où les paysans apporteraient leurs plats et danseraient des gigues paysannes aux noces du comte et de la comtesse.
Un évènement dont tout Marbrume se gausserait, le Roi en premier ; et qui provoquait en Alix une sensation de honte indéfinissable. Apolline de Pessan la regarderait ensuite de ses yeux froids et lui dirait qu'elle était aussi irrattrapable que son père, et renoncerait certainement à apprendre les manières correctes, puisqu'elle n'en avait pas besoin. En lieu d'une place d'une vicomtesse, elle ne serait qu'une paysanne mal dégrossie du Labret qui ne pourrait jamais épouser un homme de son propre statut.
Pour qui les prendrait Idalie ?
Un peu gênée, l'enfant fixa à nouveau son géniteur. Il lui était toujours difficile de renoncer à la propre emprise qu'elle avait sur sa vie, mais elle décida d'abonder dans son sens, pour rester la bonne fille qu'il aimait.
- "Je... je croyais que je devrais tout organiser... mais euh... j'imagine que c'est bien. Je ne sais pas si elle va aimer... tu sais. Elle aussi, elle est noble. C'est étrange de demander aux paysans d'apporter des plats à votre propre mariage. Mais si tu le dis... Mais tu sais... je.. j'aurai préféré faire une réception comme l'a fait le roi. Ca fait plus ... "comte et comtesse"... C'est pas rien de l'être. On est pas des paysans, nous. Je... si j'avais vraiment à choisir, je préférerais la sécurité de Marbrume et de l'Esplanade qu'ici. Mais tu as décidé, alors on fait comme tu voudras. On aurait pu dire aussi qu'on fait une foire... pendant, ou avant qu'on fasse le mariage entre nobles ? C'est que, moi, je veux être vicomtesse, pas une campagnarde ou une paysanne. Sinon, à quoi ça sert d'avoir un père comte ? Si on se comporte comme des paysans, on en deviendra aux yeux de la noblesse. Et alors on ne pourra pas me trouver de mari noble."
Malgré toute la confiance qu'Alix portait en Aymeric, la bâtarde avait un peu peur de sa réaction. Il allait se vexer, c'était sûr, et elle serra ses mains autour de son ventre, toute pâle, en attendant la taloche qui ne manquerait pas pour son insolence. Alors elle s'empressa d'ajouter :
- "Mais c'est surtout avec toi que je suis heureuse ! Ne m'abandonne pas, s'il te plait. Je veux rester près de toi, ici ou ailleurs. Je sais bien qu'il faut faire des corvées et ça ne me dérange pas de les faire ! Et c'est plus facile de se nourrir ici, c'est sûr. En tout cas, tu créeras une jolie fête, et celle que tu aimes va aimer, et tout le monde aussi !"
Elle a éteint les étoiles dans les yeux de son père, et s'en sentait terriblement malheureuse. Il valait mieux sortir et aller travailler dans son coin, et laisser son père faire, comme d'habitude.
- "Je... Je crois que tu sais déjà ce que tu veux faire, alors je vais te laisser organiser les choses. Je ne sais pas comment faire, de toute façon." |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Jeu 23 Avr 2020 - 10:00 | | | - Je ne vous ai pas autorisée à quitter la pièce, jeune fille !
Il n'a pas haussé le ton, mais Aymeric a une autorité quasi naturelle. Il se fait obéir assez facilement, parce qu'il dégage une sorte de force tranquille. Mais il a pris dix ans sur le visage. Aymeric est comme en état de choc.
- Un paysan ? C'est ainsi que tu me vois ? Que tu nous vois ? Tu penses réellement que mes attitudes n'ont rien de noble ? Ou que parce que je prends en compte les gens du peuple, ceux de la noblesse me rejetteront ?
Il inspire profondément, avant d'expirer bruyamment, signe qu'il tente de se calmer. Puis il revient à sa fille et dit d'une voix affirmée :
- Vicomtesse, je réalise que tu n'as pas grandi comme moi dans une époque avant la fange avec un père qui avait soldats et domaine, et que donc tu ignores les contingences qui m'occupent. Alors, Alix, bienvenue dans un cours magistral d'histoire, et particulièrement celle de la famille de Beauharnais. Et je ne sais pas pourquoi, je me dis qu'elle va t'intéresser. Alors, il était une fois
Oui, autant la commencer comme un conte de fée.
- Un territoire lointain, aux frontières entre ce monde et celui de nos ennemis. Quand on vit sur une frontière, on est les premiers attaqués si l'ennemi veut s'emparer de nos terres. Cela s'appelle une guerre. Et pour gagner les guerres, il faut des soldats et des gens qui les commandent. Le rôle du soldat est facile, il doit se battre. Celui du commandant est plus compliqué. Il doit pouvoir payer ses soldats, sinon ils désertent. Il doit pouvoir les nourrir, sinon ils se révoltent. Pour les nourrir, il faut des fermiers. Il faut des armes aux soldats, alors il faut aussi des forgerons, et des mines. Il faut loger tout ce monde. Et il faut aussi des gens qui peuvent dire sans mentir que le commandant, il a les dieux de son côté car il est pieux. Etre un commandant, c'est compliqué. C'est pour cela qu'il y a des nobles guerriers. Depuis tout petit, ils apprennent à gérer tout ce merdier. Parce que le danger ne vient pas que de l'extérieur.
Il fixe sa fille et lui pose des questions qui sont tout sauf innocentes.
- Si les soldats dont il dispose se révoltent contre le commandant, en sachant qu'il y a plus de soldats que d'officier, qui va gagner ? Si tous les fermiers viennent, avec fourches et torches, pour incendier le manoir de leur comte, qui va gagner ? Si les prêtres décrètent que le Comte est un hérétique, aura-t-il encore la moindre légitimité ? Non évidemment ! Alors, comment faire pour que les gens ne se révoltent pas ? Quand tu es comte sur une frontière, c'est... facile
Il mesure ses effets.
- Si l'armée déserte, elle ne peut que franchir la frontière et en face, ce sont des gens avec lesquels tu t'es déjà battu. Nos déserteurs seront maltraités là bas. Déserter n'est pas une option. Les fermiers, les artisans, leur peur, c'est que l'armée d'en face gagne. Il y aurait massacre des hommes, les femmes violées, les enfants égorgés. Le Comte est vu comme un protecteur. S'il ne fait pas payer de trop lourdes taxes et qu'il n'affame pas ses gens, le risque de révolte est nul. Mon père, ton grand père, feu le Comte de Beauharnais, était un bon commandant, il a gagné ses batailles et cela suffisait à son peuple.
Il a un sourire calme.
- En prime, l'héritier était bâti comme un ours et avait tout du guerrier qui fait peur, ce qui en faisait aussi un bon protecteur. Les gens étaient rassurés et la population n'avait pas à se rebeller. Dans d'autres Comtés ou dans des territoires plus petits, non frontaliers, la protection est un souci moindre car si l'ennemi attaque, il doit conquérir d'autres territoires. Alors le baron aide le Comte, il a une armée moindre qui coûte moins cher et fait des affaires avec ses voisins. Il doit être plus habile gestionnaire, mais des gens vivant en paix ont peu de raisons de se rebeller, pour autant que le chef ne les affame pas. Et tu as les nobles de Cour. Ils ont peu ou pas de territoire, peu ou pas d'utilité. Leur fortune vient du travail de leurs gens, qu'ils exploitent. Et pour garder leur petit pouvoir, ils doivent plaire au puissant noble. C'est un jeu que nous n'avons jamais eu à jouer... avant aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle je n'y suis pas doué. Mais une question se pose. Comment se faire aimer de nos gens et éviter une révolte ?
Il la regarde, la laisse réfléchir et lui propose des réponses.
- Certains usent de la peur. Soit ils sont cruels, condamnant à mort celui qui émet la moindre opposition. C'est relativement efficace. La peur peut être instillée par la force, ou le machiavélisme. Nous connaissons quelqu'un qui fonctionne comme ça. Le pouvoir militaire est la seconde option. On concentre tout sur l'armée, ils sont très bien payés, très bien nourris. Et avec l'armée, on exploite les autres. Ou on a une petite armée, toute petite, et on mise sur la richesse. On exploite au mieux nos ressources, les artisans sont payés grassement, ils paient leurs mercenaires eux-mêmes et finalement tout le monde est content. Mais pour ton père ? Que faut-il faire ? Je n'ai pas d'argent, enfin, à peine de quoi payer cent hommes un an, et cent hommes ne font pas une armée. Je n'ai pas de terres. Et je ne sais pas comment on charme un Roi par les mots. Alors je tente d'exploiter mes atouts.
Alix les connait, mais c'est utile de les énumérer.
- Je suis un bon guerrier et un meneur d'hommes. Quand il a fallu aller combattre dans le Chaudron pour le Roi, je l'ai fait, et bien. D'autres ont eu du courage aussi, mais pas la même efficacité. C'est grâce à cela, grâce à ce titre de Héros, que je suis connu, positivement, du roi. Etait-ce suffisant ? Oh, juste un temps. Mais, et si tu y réfléchis bien, le Roi a un gros problème et sera reconnaissant envers ceux qui l'y aideront. Et c'est là que moi, j'avais une carte à jouer.
Marbrume est en guerre, contre la Fange. Les gens ont faim. Et vivre dans le grenier de Marbrume fait peur. Il manque aux gens l'espoir. Cela, il lui a déjà expliqué, du moins pour la seconde partie.
- Le Roi se retrouve dans une situation qu'aucun commandant n'a jamais connu dans l'histoire de l'humanité. Aucun ! Jamais ! L'humanité est attaquée par un mal dangereux et inconnu, la fange. Et cette guerre, c'est la fange qui la gagne. Alors, certains pourraient lui reprocher qu'on perd cette guerre. Et d'autres qu'on a faim. Et c'est quoi le danger ? C'est que finalement, ça se révolte. Que la Milice en ait marre de voir ses miliciens mourir. Que les agriculteurs en aient marre d'être taxé à 80% et qu'ils ont du mal à vivre alors qu'ils bossent plus que les autres. Et si, dans Marbrume, il y a des nobles qui font des actions charitables ou qui aident à faire tourner les commerces, au Labret, il n'y avait rien, ou presque. Personne parmi les sangs-bleus n'osait venir ici. Et le message, pour les labretans, était le suivant : Il n'y a plus d'espoir. Le Roi avait besoin de gens qui remontent le moral du Labret, parce que, si, ici, les gens n'ont plus l'envie ou le courage de travailler, le monde meurt. Et comment, moi, le petit Aymeric, bien que Comte, je pouvais aider le Labret. Je n'ai pas une fortune. Je n'ai pas une armée. Je n'ai pas d'autorité. Je n'ai qu'un titre, et une magnifique fille.
Un petit compliment ne fait pas de mal.
- Je devais gagner la confiance des Labretans. Je n'avais pas et je n'aurai jamais la fortune pour acheter leur amour. Je n'ai et je n'aurai jamais l'armée pour les défendre, même si je peux parler avec les Sergents, d'égal à égal. Mais je suis Comte, et pour les gens, je suis la main du Roi au Labret. Le simple fait de venir, pour beaucoup, représentait l'espoir. Si un Comte installé à l'Esplanade choisit de venir vivre ici, au Labret, c'est qu'on peut espérer, non ? Et puis, avant de partir au Tournoi du Roi, pour son couronnement, on m'a demandé de porter haut les couleurs du Labret. Moi, Aymeric, au départ, je leur appartiens. Ils sont fiers de moi. Je suis "le Comte du Labret".
Et vu que le Roi avait besoin de promouvoir le Labret, le choix d'Aymeric a été bien perçu. Pour preuve, il a permis que le Comte utilise un bateau pour son déménagement et pour transporter Alix, Guillaume et quelques affaires importantes.
- Alors, le premier apriori nous concernant, nous les de Beauharnais, était positif. Et avant cela, ma fille, sache que le nom même des de Beauharnais n'était pas connu. Ni à l'Esplanade, ni du Roi, ni ici. Cela faciliterait ton mariage, d'être d'une famille au nom inconnu ? Les d'Auvray étaient à peine plus connu avant le Chaudron et les exploits de Zephyr d'Auvray. Mais maintenant que le nom est connu, la soeur de Zephyr devient un parti intéressant. Et c'est ton père qui a les plus belles chances de l'épouser. Alors, c'est quoi le mieux pour se marier. Inconnu là-bas ou connu ici ?
Les de Beauharnais n'existaient pas, maintenant le nom représente quelque chose.
- Alors, ma réputation après le Chaudron, ça n'était pas attendu mais c'est un joli bonus. Ton père devient apprécié, ici. Parce que j'ai résolu le problème de la forge, et pour les paysans, avoir des outils affutés, c'est important. Et parce que, comme je vis un peu comme eux, je les comprends. Je travaille, je répare moi même les choses. J'accueille comme domestique une fille mère. J'ai du mal à faire tourner mon commerce. Comme eux. Je suis utile et je leur ressemble, alors ils pensent que ma présence ici est une bonne chose. Et comme je suis la main du Roi au Labret, quand ils ont des doléances, c'est moi qu'ils viennent voir. Et je peux leur dire que j'en glisserai un mot au Roi. Oh, ils se doutent bien que le Roi a des tas de problèmes à régler et que leurs problèmes ne sont pas forcément prioritaires. Mais ils ont l'impression d'être entendus. Et ça, par rapport à avant, c'est énorme. Le Roi les écoute, tu imagines ?
Il a un sourire triste.
- Tu sais comme moi que je n'ai pas l'oreille du Roi ni même celle de sa cour rapprochée. Tu te doutes aussi que quelqu'un qui ramène beaucoup de taxes et donc de sous dans les coffres royaux aura plus d'influence que moi, comme Apolline par exemple. Mais c'est important pour moi de faire quelque chose qui fasse que notre nom soit respecté. Et en rassurant les gens ici, en leur donnant de l'espoir, en leur faisant croire que leurs doléances seront entendues du Roi alors que tu sais que les miennes ne le seront pas plus que les leurs. Mais désormais, et ça n'était pas le cas du temps de ton grand père, ici, à Marbrume, les de Beauharnais sont à nouveau un nom connu. Et pour qu'il le reste, moi, je dois faire du bon travail, ici. Je dois soutenir la population et éviter une révolte. Je dois aider la Milice. Je dois laisser croire que pour Marbrume, le Labret, c'est important. Et si notre nom est connu, s'il est respecté, alors tu trouveras toi aussi un bon époux, tu feras toi aussi un joli mariage.
Commence-t-elle seulement à comprendre ?
- Je ne suis pas doué pour plaire au Roi par mes mots, mes chants, mes sculptures ou mes courbettes. Je ne maîtrise pas le jeu des intrigues, je n'ai pas l'habileté d'Apolline dans ce domaine. Mais une Apolline ne saurait pas commander des hommes dans le Chaudron. Et elle ne saurait pas se faire aimer des gens d'ici. Chacun son domaine, en quelque sorte. Mais il y a des choses qu'on attend d'un noble et que je ne fais pas. Parmi celles-ci, les œuvres sociales. Oh, je suis pieux, personne n'en doute et je donne beaucoup au Temple. De la viande, des peaux, des bois, du fromage et 24 écus/or par an, c'est énorme. Mais les gens attendent autre chose. Et c'est là que mon mariage devient important. Et c'est là que toi, tu vas encore apprendre à devenir plus noble. Parce que les œuvres sociales, c'est surtout l'affaire des femmes.
Il n'a pas perdu de vue l'éducation de sa fille et lui a rappelé subtilement que si, lui, il lui apprend à survivre, il lui apprend des valeurs, il lui apprend à se battre aussi, il lui permet aussi d'apprendre à lire, à écrire, le maintien, l'étiquette et il n'est pas idiot, via Apolline, l'une des meilleures en ce domaine, les jeux de Cour et les intrigues. Il l'arme du mieux qu'il peut. Mais Apolline n'a pas toujours raison.
- Alors, pour toi, le mieux, ça serait un mariage à Marbrume ? Des mariages, même dans la haute, il y en a eu et il y en aura encore. Cela reste une fête, mais ça n'est pas forcément un événement. Apolline aussi se remariera un jour et d'autres qui pourront faire des fêtes somptueuses. Mais, et sois-en fière, jeune fille, le mariage de l'année, si Idalie accepte, c'est le Comte de Beauharnais qui épouse la soeur du héros du Chaudron. Ce sera l'événement. Deux familles de héros qui s'unissent et feront un bébé. Le Comte a déjà une fille merveilleuse, vous imaginez si en prime la mère a un sang pareil ? Et s'ils ont un fils, issu de deux familles de héros, quel espoir ça serait !
Et bim, ses yeux pétillent à nouveau.
- Après un mariage pareil, notre nom, il sera plus connu encore, non ? Et tu en profiteras autant que moi. Parce que, même si tu ne l'as pas compris, le fait de redonner de l'aura au nom Beauharnais, c'est pour toi que je le fais. Moi, je pouvais me contenter de vivre comme un chasseur, je n'étais pas malheureux ainsi. Mais je veux le meilleur pour toi et je me bats pour ça. Alors, il faudra que les oeuvres sociales qui porteront notre griffe soient une réussite, et pour que ça soit réussi, il faut aussi de la Comtesse soit aimée des gens d'ici. Tu comprends ça ? Alors, c'est vrai, pour le lieu du mariage, j'ai tranché, ça sera ici. Et c'est toi, jeune fille, qui m'a convaincu de cette décision.
Et il espère qu'elle a compris pourquoi, et à quel moment. Le bal royal !
- Tu as dit au bal que les fêtes, c'était important pour se sentir bien et que la population en a besoin, du même que nous. Je t'avoue que ce jour-là, tu m'as impressionné, parce que moi, les fêtes, les bals, je trouvais ça inutile. Tu m'as ouvert les yeux, ma fille. Et des fêtes, au Labret, il y en a peu. Alors, imagine : Le Comte du Labret, celui que les gens aiment bien parce qu'il leur ressemble, se marie. Et il se marie à une famille dont le nom est connu même ici. Et puis, boum, le mariage et la fête, c'est à Marbrume ? Ils vont penser quoi, les labretans ? Le Comte a honte de nous ? La Comtesse ne veut pas de nous ? Et la fête qu'ils imaginent, celle dont ils ont besoin, ils ne feront que l'imaginer ? Je ne le veux pas. Si on fait le mariage ici, ça sera le premier mariage noble depuis la Fange je crois qui sera célébré ici. Ca sera l'événement de l'année. Et rien que parce qu'Idalie se marie et vient ici, elle sera aimée des gens, comme les gens m'ont aimé. Alors, imagine si en prime le Baillis venait, lui aussi, l'importance que cette visite aurait. Le Baillis, des sangs-bleus, un mariage important. Ce jour-là, le Labret sera le lieu le plus important. Et ça, ça fera du bien à tout le monde. Même si la musique est mauvaise. Même s'il pleut. Tout le monde sera content. Alors, si en prime la fête est réussie.
Oh, il a sans doute déçu sa fille sur le coup, mais son mariage est aussi politique et il est important qu'Alix le comprenne.
- Tu vois, pour le Roi, pour le commandement, pour nous aussi, c'est important que les gens d'ici aient le moral, qu'ils n'aient pas envie de se révolter. Pour nos miliciens aussi. Le Sergent héros du Chaudron qui passera les voir, qu'on leur rappelle qu'ils sont les meilleurs miliciens du Morguestanc, cela les motivera. S'il reste des choses du buffet, ça sera pour eux. Ou on partagera avec le Temple ? Je sais pas, on y réfléchira. Mais choisir de faire le mariage ici, c'est politiquement le meilleur choix possible. Et ça fait aussi que notre nom sera connu. Parce que des mariages de noble, au Labret, il n'y en aura pas tous les mois.
Il espère l'avoir convaincue.
- Maintenant, si comme tu le dis mon idée de la fête est terrible au point que je serai considéré comme un marcassin par la Cour et le Roi, tout ce que j'ai entrepris jusqu'ici tombera à l'eau. Et je ne suis pas un grand organisateur. Je n'ai même pas l'esprit de la fête. Alors, derrière, l'étiquette et tout ce merdier qui ne cesse de me faire chier, tu penses bien... Hum, pardon. Et c'est pour ça que j'ai besoin de toi. On ne fuit pas lors d'une négociation. Foi, Force et Honneur, jeune fille. Tu n'es pas d'accord, tu le dis, d'autant plus que je te demande ton avis. Je l'ai demandé pour l'épouse, je ne le demande pas pour le lieu, ça sera au Labret, mais tu sais pourquoi désormais et je te le demande plus que jamais pour la fête, parce que toi tu as l'esprit festif, même si j'avoue que tu sembles triste du coup, et que moi je ne l'ai pas. Alors, je vais vite t'expliquer pourquoi j'imaginais ça.
Il s'assure qu'elle l'écoute bien.
- Les gens qui peuvent payer ou échanger les productions du Labret, ce sont les tavernes et les nobles. Les tavernes n'ont pas le choix, si tu n'as pas de nourriture ou de bibine, tu ne vends rien et tu fais faillite. Mais pour les nobles, nos fermiers sont des gens qui ont les pieds dans la boue, qui retournent le fumier. Beaucoup ne savent même pas que ce sont souvent les mêmes qui transforment les aliments. Alors, ils achètent à des intermédiaires. Les intermédiaires, je ne les aime pas. Ils achètent pas cher pour vendre très cher et se faire plein de sous, alors qu'ils n'ont rien produit, rien transformé. Mais passons. Ici, ceux qui achètent verront le travail fait par nos artisans du Labret et pourraient leur acheter à eux. Ils paieront plus cher que l'intermédiaire, et c'est bon pour l'artisan, et le noble paiera moins cher qu'à l'intermédiaire, ce qui est très bon pour le noble. Des occasions pour les nobles de voir directement le travail des artisans est rare et ce mariage sera une de ses rares occasions. C'est pour ça que je voulais ces rencontres, tu vois ?
Cela partait d'un bon sentiment.
- Alors, tu proposes quoi ? Deux fêtes ? Par exemple, une à l'intérieur pour les nobles et une dehors pour le Peuple, comme ça s'est fait lors du bal royal ? C'est vrai que les nobles pourraient être mal à l'aise avec le peuple et inversement. Mathilde ne sait jamais comment me parler. On pourrait mettre quelques artisans qui seraient là pour répondre aux questions sur leur produit et leur donner un titre à part. Je sais pas, moi, "Fournisseur officiel du mariage" ? Ce sont des choses comme ça qui éviteraient que le mariage soit un fiasco ? Tu as d'autres idées ? Là, je t'écoute, alors profites-en pour expliquer ton point de vue, comme je viens d'exposer le mien. |
| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Jeu 23 Avr 2020 - 13:56 | | | A l'injonction, Alix se retourna, croisa les bras en une position défensive.
Elle détestait le Labret. S'il y avait parfois des incursions fangeuses à Marbrume - deux en deux ans - elle souffrait d'attendre les fréquentes alertes, cet isolement forcé, l'éloignement de tous ses amis. Elle regrettait l'époque où elle ne s'était jamais sentie aussi bien, aussi en sécurité que dans ce manoir, à l'Esplanade, au début, quand il l'avait adopté. Et elle regrettait ce bonheur paisible.
Les yeux baissés, la petite fille écouta la leçon, le cœur gros. Il aimait bien donner des leçons - ce qu'elle pouvait comprendre, c'était un travers que tous les adultes avaient. Mais elle aussi, elle avait fait partie des pauvres. Et malgré sa condition misérable, jamais elle n'aurait songé à se rebeller ; parce que la seule alternative était la mort ou les fangeux. Mais depuis que tous ceux qui étaient marqués avaient été bannis chez eux, l'enfant savait le risque de plus en plus prégnant. Un jour, l'un d'entre eux tomberait malade suite à la morsure, décanillerait, et viendrait buter tout Usson. Et ce serait leurs tour à tous ceux qui n'étaient pas en sécurité à Marbrume.
Mais elle comprenait aussi le point de vue de son père. Il ne fallait pas être si égoïste. Une bâtarde comme elle n'aurait de toute jamais rien de tout ça - il n'y aurait ni manoir, ni mari, ni argent, ni ferme. Tout irait au fils héritier qu'il aurait avec une épouse en bonne et due forme.
A son épouse aurait la charge de faire toutce qu'une adulte pouvait faire, les bonnes oeuvres, et tout ça, et plus tard, elle emmènerait ses filles avec elle. Sans doute pourrait-elle rester coudre à la maison, pour ne pas les importuner. Elle aurait aimé prendre en main toutes ces choses ; mais ici désormais, elle n'était plus qu'une enfant qui avait des leçons et plus aucun but dans la vie. Elle avait même abandonné Pyo et Leanne, tous les deux adoptés à Usson, en plein danger.
Et c'était de sa faute. Peut-être l'enfant aurait-elle dû renoncer à son géniteur pour s'occuper des petits ? Mais sur quel argent ? C'était son échec, son atroce échec.
- "Même si les gens ont faim et qu'ils en ont marre, ils peuvent pas se révolter, papa. Se révolter, ça voudrait dire que la Fange nous tuera tous, c'est tout. On a besoin de la Milice et du Roi pour survivre. Je l'ai su dès que j'ai essayé de trouver du travail. Mais c'est une bonne idée. T'as que des bonnes idées."
La confrontation n'était pas envisageable. Il pouvait la détruire d'une phrase ; tandis qu'elle n'avait pas de carte à jouer pour rester, à part faire ce qu'on lui demandait. Alix ne se faisait pas d'illusions : quand il aurait une descendance mâle légitime, elle ne serait plus vraiment "précieuse". Même s'il l'aimait, et qu'elle le croyait - de toute son âme. Elle avait férocement besoin de lui, de son amour. De sa présence protectrice.
- "Je suis sûre que le Roi t'écoutera. Moi, je peux aller le voir et lui parler en ton nom. Je suis grande, tu sais. Je suis plus une enfant depuis longtemps, même si tout le monde dit le contraire. Je peux faire tout ce qu'une grande peut faire, tu sais. J'en suis sûre. On pourrait organiser une grande foire la journée, où chacun montrerait son savoir-faire aux invités de Marbrume. Et puis ensuite, on organisera un banquet là-bas, sur la place principale d'Usson. Et tout le monde pourra manger les produits de tout le monde, et il y aurait de la musique, pour que les gens dansent. Ensuite, on rentrerait ici, et on pourrait encore faire un petit bal dans le jardin, pour les nobles que tu aurais invité. On pourrait même inviter le Roi. Après tout, il n'a qu'une ville à gouverner... ça peut l'intéresser. Non ? Peut-être que lui aussi, il voudra s'amuser un peu."
Elle s'était rapproché de son père. Ce projet l'enthousiasmait de lui-même, et elle esquissa un sourire un peu naïf. faire la fête avec Pyo et Leanne... les retrouver, et faire semblant, le temps d'une soirée, qu'elle était encore leur mère... La mère qu'elle n'avait jamais eu, et qu'elle détestait tant. Comment cela pouvait-il se passer autrement ? En fait, elle était devenue comme Juliette.
Elle aussi, elle avait abandonné ses enfants.
- "Papa... Tu crois que Pyo et Leanne vont me détester, comme je déteste Juliette ?" |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Dim 26 Avr 2020 - 13:56 | | | - C'est cela qui te vrille le cœur et l'esprit ma fille ? Pyo et Leanne ?
Aymeric n'est pas stupide, il a compris certaines choses, mais pas tout. Alix rêve d'esplanade, de sécurité, de luxe, elle qui a connu les bordels, la rue, la famine et même le Chaudron à une époque où elle devait être protégée. Ici, elle a peur et c'est aussi pour cette raison qu'elle écoute et applique docilement les conseils que son père et d'autres lui donnent.
- Le fait que Leanne et Pyo ne soient pas avec nous, c'est ma décision, pas la tienne. Si les petits ou les Trois doivent en vouloir à quelqu'un, c'est à moi et pas à toi. J'ai choisi de t'adopter et de te donner le meilleur que je peux te donner, et je peux te jurer devant les Trois que j'essaie. Oh, je suis critiquable et ma façon de faire est loin d'être parfaite, il y a mille et un domaines où je pourrais faire mieux, mais j'essaie. Je le fais parce que tu es ma chair et mon sang. Je ne le fais pas pour tous les enfants des rues. Pas que je n'aimerais pas, mais il y en a trop, et je ne suis pas convaincu que je pourrai aussi bien m'investir pour tous que pour toi. Toi, tu m'as demandé que je m'occupe aussi de Pyo et Leanne et j'ai refusé. S'ils doivent en vouloir à quelqu'un, c'est à moi.
Etre adulte, c'est faire des choix, mais il comprend qu'elle ait le cœur brisé.
- J'essaie, tu sais, de faire au mieux. Tu as essayé aussi. Mais vous étiez tombé sous la coupe d'un homme dangereux et j'ai pris de gros risques pour les libérer tous les deux. Toi aussi, en m'avouant le danger qu'ils courraient. On les a sortis de là, tous les deux, et on a fait en sorte qu'ils ne réalisent pas par quoi ils sont passés.
Cela tient presque du miracle qu'ils aient réussi dans cette mission, mais il tient à préciser une chose.
- Maintenant, ils ont un adulte pour les protéger. Un adulte qui a la taille de l'adulte, ce que tu n'as pas, le vécu de l'adulte, que tu as aussi, et le métier d'un adulte, que tu n'as pas encore. Si dans ton cœur tu es une adulte, et leur maman, Pyo a un autre papa, Leanne une autre maman, en plus de toi, et la certitude d'avoir un toit, de la nourriture et un avenir, mais surtout de l'amour, tout comme moi je t'aime, toi. Pour Pyo et Leanne, c'est d'autant plus remarquable que le nouveau papa et la nouvelle maman, c'est pas leur enfant naturel et pour aller voir régulièrement comment ça se passe pour eux, je peux te dire qu'ils sont aimés. Ils ne sont pas battus, ils continuent d'avoir des jeux et ils sont heureux de pouvoir aider. Comme toi. Sauf que toi, tu ne joues plus...
Et ça, ça lui fait mal, à Aymeric. Alix n'a pas eu d'enfance et il ne peut pas la lui rendre.
- Cela te dirait qu'un jour toutes les lunes par exemple, je fasse venir Pyo et Leanne ici ? Parfois sans les parents, parfois avec, si les parents veulent bien. Ainsi, vous pourrez encore vous retrouver à trois, jusqu'à ce que l'un de vous trois en ait marre, ce qui arrivera forcément un jour, car ils auront leur vie à eux et toi aussi.
Il la regarde, hausse les épaules puis ajoute.
- Ils n'ont pas de raisons de te détester, tu les as protégés, aussi loin que tu as pu et ils s'en sortent bien mieux que d'autres enfants des rues. Bon, idéalement, si la maman de Leanne épousait le papa de Pyo, ça serait parfait, mais les deux grands ne se plaisent pas. Ils s'entendent bien, mais ça ne suffit pas à en faire un couple. Et même si ça me fait mal de te le dire, tu as le droit de détester Juliette. J'espère juste que tu ne me détesteras pas, moi. Je ne me pardonne pas de t'avoir privée de ton enfance, même si je n'en peux pas grand chose. Je peux reprendre mon côté prof, dis ?
Il lui sourit, elle doit réaliser que même si elle dit non, il le fera. Mais c'est pour qu'elle comprenne qu'il va lui reparler de choses bizarres, sans doute plus importantes pour lui que pour elle.
- Les gens peuvent se révolter parce qu'ils ont perdu tout espoir, et l'espoir aujourd'hui est rare. Alors, se révolter, c'est faire en sorte que les nantis aussi souffrent. Puis il y a des gens qui malgré les problèmes cherchent encore plus de richesse et de pouvoir. Pour moi, ils sont à éliminer en priorité, mais bon, ça faciliterait le travail de la Fange. Tout le monde n'est pas aussi malin que nous, ma chère Vicomtesse. Nous, on a compris que c'était vraiment le moment d'être solidaire, mais les égoïstes ont toujours existé et existent toujours.
Elle veut inviter le Roi et il sourit.
- Des invitations, le roi en a par paquet mais on l'y voit rarement. Il n'était même pas à son propre bal. Alors, qui sait, peut-être qu'il n'aime pas ça. Ca nous ferait un point commun, à lui et moi. Mais bon, il était à son couronnement, j'imagine quand même qu'il était aussi à son propre mariage et qu'il sera là pour celui de ses enfants. Si le Baillis, le représentant du roi si tu veux, vient, ça sera déjà un immense honneur. Alors, pour toi, c'est à l'intérieur pour la noblesse, dehors pour le peuple, avec une foire, et pour le soir un bal ici, au domaine ? J'ai un doute pour le soir, mais je peux te proposer quelque chose. Il y aura forcément nous trois, ta nouvelle maman, toi, et moi. Il y aura aussi le Sergent et Apolline. Et si on ajoutait deux personnes : Pyo et Leanne ? Et vous pourrez prolonger le mariage ici, le soir, dans ta chambre. Ça te dit ? |
| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Jeu 11 Juin 2020 - 9:41 | | | Son père était quelqu'un d'infiniment bon. A mesure qu'il parlait, qu'il lui expliquait les choses, Alix ressentait littéralement son amour croitre, son estime pour lui s'épanouir. Il était si doux ; elle en avait les larmes aux yeux.
Avec respect, l'enfant se serra contre son beau, son grand, son magnifique et adorable protecteur.
- "Papa... Je t'aime. Je n'aime personne autant que toi. Tu sais, je ne détesterai pas Juliette. Je ferai tout e que je peux pour qu'elle soit heureuse, comme toi, tu fais pour que je sois heureuse. Je sais tout ce que je te dois, et je suis contente aussi. Parce que... parce que.. Il n'y a rien de plus beau que d'avoir des parents. Si je peux voir Pyo et Leanne un peu plus, j'en serai heureuse, bien sûr. Mais je ne veux pas qu'ils se mettent en danger, je sais que les voyages sont risqués. J'irai les voir : grâce à toi, grâce aux mercenaires, je sais presque me défendre !"
L'enfant rougit. Elle surestimait évidemment ses capacités, mais elle garda le silence, tandis qu'il lui parlait de révoltes, de ce qui se passait dehors. Il lui raconta alors pourquoi le peuple réagissait ainsi, et elle plissas les yeux, en se concentrant pour mieux comprendre.
- "Je comprends. Ils nous en veulent... moi aussi, j'en voulais aux gens riches. J'avais du mal à imaginer qu'ils ... veuillent notre bien. Je croyais qu'ils nous prenaient tout ce qu'on avait pas. Et je les détestais. Pour le bal, ce serait bien que ce soit comme ça. La noblesse aura l'impression d'être en gens de bonne compagnie, les gens du commun aussi, et chacun pourra s'amuser à sa manière. Et les nobles pourront visiter les artisans et voir tout ce que le Labret a à apporter. Je pourrais coudre des décorations pour la salle, et j'ai des idées de ce qu'on pourrait faire à manger. Pour le bal des Labrétains, ils pourraient même apporter chacun un gâteau ou de la nourriture. Et on mettrait tout ça en commun. Pour la noblesse, il faudrait un buffet déjà fait. Sans doute... des mets plus recherchés. Mais des spécialités d'ici. Je suis sûre que les artisans seraient heureux de démontrer leur savoir-faire à toute la noblesse de Marbrume."
Elle se tait. Elle avait beaucoup d'idées ; mais ce n'était pas facile de toutes les exprimer. Néanmoins, il y avait un point qui était encore trop brûlant dans son cœur. La fillette fit la grimace, arborant un air dur et déterminé que son père ne lui connaissait que peu.
- "Juliette n’est pas ma mère, et je la déteste. Je ne veux plus jamais la voir. A t-elle seulement voulu savoir si j’étais vivante ? Dame Idalie, elle, elle m’aurait pas abandonné. Ça se lit dans ses yeux." |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] Ven 12 Juin 2020 - 17:35 | | | Aymeric n'hésite pas à serrer sa fille contre lui, ces moments lui font un bien fou. Mais il ne peut s'empêcher de sourire quand elle prétend savoir se défendre.
- Oh, Vicomtesse, si on compare vos aptitudes avec celles des enfants de votre âge, vous faites partie de celles qui ont appris à se défendre, un peu plus sans doute que les autres enfants du Labret et beaucoup plus que les enfants de Marbrume. Vous avez survécu au Chaudron, après tout. Mais ça n'est pas une raison pour que vous vous exposiez. Nous avons des gens pour vous protéger ou pour protéger Pyo et Leanne, je les paie assez. Alors, évidemment, il faudra que le temps soit clément, sans quoi tout voyage est trop dangereux, puis que les parents soient d'accord. Mais une ou deux journées de tranquillité, tout parent prend, aussi génial son enfant soit-il. Hey, c'est que vous consommez pas mal d'énergie, ma fille. Mais c'est de la bonne fatigue, je n'échangerai rien contre vous, absolument rien !
Il écoute les idées de sa fille, entre autre concernant la nourriture.
- J'abattrai un cochon de mon côté et ferai des charcuteries pour la plupart. On conservera de beaux morceaux de viande pour les faire cuire à la broche. Cette viande sera la nourriture commune à tous. Les labretans seront ravis de préparer du pain au four le jour même. Tu sais le goût du pain qui sort tout juste du four, non ? Puis oui, il semble qu'on soit d'accord aussi sur les "fournisseurs officiels du mariage" qui pourront défendre leurs produits. Dis, tu savais que dans la salle des fêtes, il y a des lieux pour faire cuire à même le sol ? Et alors, les produits des fermes... Les oeufs, les légumes, frais du jour, crus ou cuits. Et oui, le buffet raffiné par nos meilleurs artisans, les vins aussi. Ca en fera du monde, à voir. Mais on pourrait ne pas se limiter à ça.
Ah, le cerveau du Comte s'est remis en place.
- Ce seront de grandes pièces de couture qu'il faudra fabriquer, aux couleurs de la famille, sang et argent. Cela mobilisera plusieurs couturières. Tu aimes coudre, et si tu participais et supervisais, pour le choix des tissus, pour l'agencement dans la salle des fêtes, le Temple se chargera du Temple mais tu pourras indiquer ce qui pourrait nous plaire à ma future épouse et moi, non ? Et nos maîtres artisans, faudra y aller, déguster et ton palais est plus raffiné que le mien. N'oublions pas les lampions et les musiciens. Et tu sais quoi, je rêve que les labretans et les nobles finissent par se mélanger. Faudra qu'il y ait énormément d'enfants, aussi, tu pourras te faire des copains et des copines. Parce que, malheureusement, je serai fort sollicité. Ah, faut le ruban aussi. Tu accepterais de le porter pour nous ?
Il ne doute pas qu'elle le fera, mais là il l'implique au maximum. Son budget représentera une petite fortune, mais on ne se marie qu'une fois. Même si ça sera son second mariage.
- Pour Juliette, et c'est la dernière fois qu'on en parlera, c'est elle qui m'a prévenu de son existence, fort tard, certes, mais je suis convaincu qu'elle sait que tu vis encore, désormais. Je lui en veux pour les années perdues, mais je lui suis reconnaissant qu'on ait pu se trouver, finalement. Alors, je la déteste aussi, mais j'pourrais pas lui faire du mal, tu vois ? Et oui, je pense comme toi qu'Idalie en aurait été incapable. J'irai la voir dès que j'en aurai l'autorisation, pour la demander en mariage, pour avoir une idée d'une date, et on lancera tout le merdier à mon retour. Ton boulot sera complexe, il faudra que ça envoie du rêve ET que ça ne coûte pas trop cher. On fixera une limite, qui sera une petite fortune. Ton rôle sera que ça ne devienne pas une grosse fortune. Mais notre érudite et moi t'y aideront.
Il l'embrasse puis soupire, montrant la montagne de parchemins sur laquelle il lui faut travailler. Alix aussi doit avoir pas mal de boulot. C'est l'heure de la séparation, jusqu'au repas, mais il est possible que désormais Alix soit rassurée. Aymeric tiendra ses promesses, elle peut en être convaincue. |
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| Sujet: Re: Les joies de la famille [Aymeric] | | | |
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