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 Oncle'Ansgair

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Ansgair de Mir
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MessageSujet: Oncle'Ansgair   Oncle'Ansgair EmptyMar 7 Déc 2021 - 22:03
Avril 1167


Le coq chanta à tue-tête, s'époumonant fièrement aux premières lueurs du jour. Dans une petite chaumière de Genevrey, dans la partie sud du village endormi, Ailyde émergea des laines lui servant de couverture. Elle rampa, ses cheveux blonds en pagaille et s'affala sur le corps inerte de son oncle. Un grognement étouffé accusa la charge sans bouger. L'enfant vint se blottir, fourrant sa tignasse sur le visage d'Ansgair. Un nouveau râle souffla sur les mèches chatouilleuses, avant que l'homme ne fasse un mouvement.
- On dit "bonjour", bredouilla-t-il à travers sa barbe hirsute.
- Bonjour ! Lança la petite voix déjà animée. La fille se redressa aussitôt, un sourire naissant sur son visage polisson. T'es réveillé ?
- Non.

Ansgair décrocha l'échelle du mur jouxtant leur paillasse surélevée et la cala contre le rebord afin d'en descendre. Il passa le premier. Le bois grinça sous son poids, puis il tendit les bras quand il eut posé les pieds parterre.
- Non, toute seule ! s'exclama Ailyde en se positionnant à son tour. Son oncle baissa les bras sans rien dire, mais ne la quitta pas des yeux.
Quand ils étaient arrivés au village, deux ans plus tôt, cette bicoque en bois et en torchis leur fût donnée tout à fait nue. Ils avaient dormi au sol plusieurs mois, avant que l'ancien Chevalier ne finisse d'y édifier un demi-étage sous le toit en chaume. Si Genevrey possédait une palissade et une garnison de miliciens, il était bien plus rassuré de dormir en hauteur avec la petite.
- Moi j'ai faim, moi, déclara-t-elle sur un ton chantant, alors qu'elle s'installa près du foyer chaleureux.
Les braises mourraient doucement après une nuit de combustion. Le printemps amenait des jours plus cléments, mais les nuits restaient fraiches. Il fallait encore adoucir la pièce avec une peu de bois, le soir.
Ansgair dénicha un morceau de pain dur puis alla remplir un bol d'eau de la marmite posée à coté. Il tendit le tout à sa nièce qui s'empressa de dévorer la miche en la trempant.
- Merchi ! lança-t-elle la bouche pleine. Il la regarda un instant, soupirant de satisfaction de la voir si guillerette. Il pausa brièvement une main caleuse sur sa petite tête, puis il poussa le volet de l'unique fenêtre pour amener de l'air et plus de lumière. Le soleil se levait à peine.

A l'extérieur, sur le coté de la bâtisse, Ansgair souleva la planche de bois qui couvrait un tonneau rempli d'eau de pluie. Comme son voisin, il avait confectionné ici une gouttière rudimentaire lui permettant de recueillir une partie des précipitations quand elles frappaient la toiture. Une cruche à la main, il la plongea dans la flotte pour s'en verser sur le visage, veillant à ne pas inonder sa chemise de lin. Il termina sa toilette revigorante en coiffant ses cheveux en arrière.
- Oncle'Ansgair, lui lança Hilaire qui partait déjà aux champs. L'homme trapu de dix ans son ainé vivait juste à coté. Ansgair accueillit son salut d'un hochement de tête forcé et d'un sourire sans conviction. Il suivit le regard bourru du paysan, s'adoucir vers le palier de la chaumière. Ailyde apparu innocemment. Bonjour, petite, adressa-t-il d'un signe de la main.
- Bon-Jour, lui répondit-elle en dodelinant vers son oncle. Hilaire sourit, croisa de nouveau le regard distant d'Ansgair, puis se résolu à poursuivre son chemin avant que le malaise ne s'installe.
- A ton tour. La cruche fut remplie d'eau fraiche.
- C'est très froide, l'eau !

Ils traversèrent tous deux le village qui s'éveillait. Sur la petite place, les gens se croisaient déjà, partis pour une nouvelle journée de labeur. L'homme et la fille gagnèrent l'écurie, et elle s'anima de plus belle à l'idée de retrouver la jument.
- Bise ! s'exclama-t-elle en approchant.
Lorsqu'ils avaient fui l'Ouest du Royaume, Bise était du voyage. Elle appartenait à Blandine, la mère d'Aildyde. Cette dernière ne pouvait en avoir aucun souvenir car elles s'étaient séparées quand elle eut cinq mois à peine. Pourtant, Ansgair parlait de sa mère et de son père. Simplement, depuis qu'elle savait parler, il veillait à ne pas mentionner d'informations sur leur situation passée à la châtelainie. De Mir était un nom inconnu à Genevrey, de même que celui des parents d'Ailyde. Et l'ancien Chevalier ne tenait pas à attiser la rancœur des paysans du coin. Il avait eu le reflexe d'enterrer les restes de son équipement en arrivant dans ce bourg renaissant. Depuis l'invasion des fangeux, le monde semblait s'être effondré, et avec lui Ansgair avait baissé les armes ne pouvant les sauver. Il avait dit à qui voulait l'entendre avoir récupéré la jument dans un village de pêcheur, au Nord d'ici. Ce qui était vrai. Il avait dit qu'elle avait appartenu à une châtelaine en exile, ce qui était vrai aussi. Tant qu'il le pouvait, Ansgair disait la vérité. Par principe, mais surtout pour donner plus de crédit à son récit, il défaisait simplement les liens entre les autres et lui. Il était juste Ansgair le paysan, pour eux un ancien palefrenier: Oncle'Ansgair.
- Je donne à manger à Bise, moi. Ailyde ramassa une poignée de foin qu'elle présenta au museau de l'animal, comme à chaque retrouvaille.
- C'est bien, lui répondit son oncle qui s'attela au brossage de la robe brune. Si le palefroi était devenu une bête de trait, elle demeurait le seul bien de la mère légué à sa fille.
Ansgair lui enfila la bride, le collier et sangla la sellette qui accueillait d'habitude les montants de la charrue. Le labour était passé. En cette saison, il convenait surtout de semer. Alors le cheval ferait la mule, cette fois. Il hissa la fillette sur le dos de l'animal, puis le guida vers la sortie.

Les granges. On l'attendait. Un groupe de travailleurs patientait l'arrivée d'Ansgair. Baptiste, en coordinateur distribuait ses consignes habituelles. D'énormes sacs de graines étaient entassés sur une charrette, à coté des hommes qui feintèrent l'impatience en le voyant venir.
- Allez, au galop ! lança l'un d'eux à la petite qui agrippait la crinière. Il ricana, mais le groupe ne manqua pas la mine fermée de l'oncle qui se contenta d'un hochement de tête en guise de salut pudique.
Les brancards furent sanglés aux bracelets de la sellette, et l'équipe se mit en marche vers l'une des sorties du village.
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MessageSujet: Re: Oncle'Ansgair   Oncle'Ansgair EmptyMer 22 Déc 2021 - 21:37
Harassé le soir venu, Ansgair dû porter la gamine qui s'endormait sur son dos. Fine comme une tige en fleur, Ailyde ne pesait pas bien lourd. Elle mangeait peu, mais Ansgair veillait à lui remplir l'estomac tous les jours. Elle gardait ainsi une vivacité surprenante. Lui alla retirer sa paye journalière, avant de rentrer directement. Avoine, fèves et navets avaient été planté ce jour, comme d'autres semences en cette saison. Comme tous les mornes jours que l'ancien chevalier supportait.

D'une main caleuse, Ansgair déposa les sous un à un sur le comptoir de la boulangère.
- Trois ? s'assura la femme qui avait l'habitude de les voir passer. Il acquiesça, tout en ajustant la position de la gamine. Il ramassa ensuite les miches de pain, avant de tourner talons.
- A demain, Marguerite, fit la voix lasse.

Il déposa la fille à la chaumière, avec le pain et une poignée d'avoine sortie d'une poche de sa tunique en laine. Il ralluma le foyer et referma la porte derrière lui. Ansgair s'engagea entre les maisons à la recherche d'un voisin qui possédait des poules. Mais sur place, le type n'avait plus d'œuf. Il pu toutefois lui échanger une grosse poignée de fèves contre un peu de fromage de chèvre.

La bouillie d'avoine n'avait aucun goût, mais Ailyde la mangea avec appétit. Pensif, Ansgair mâchouillait son pain en fixant les flammes. S'ils avaient eu des œufs... Mais le Joseph n'en avait quasiment plus. La plupart du temps, le type se contentait de lui répondre qu'il avait tout vendu ou échangé, avec son air de fouine. Ansgair souffla par le nez, incrédule.
- Une poule, lâcha-t-il dans sa barbe. La fille leva des yeux interrogatifs sur son visage. Il prit un air de défis face à elle. Demain, je nous ramène une poule.

Alors que les ombres dansaient contre le mur, Ailyde se lova dans la laine de sa couche. Ansgair l'embrassa sur le front, avant d'entamer la descente par l'échelle.
- Oncle'Ansgair, dit-elle d'une petite voix, l'histoire...
- De Bise ?
Elle fit non de la tête.
- De mère.
Il lui racontait l'histoire de ses parents depuis qu'il l'avait auprès de lui. Plus elle avait grandi, plus c'était devenu des histoires, brodées à partir de ses propres souvenirs. Puis il y avait incorporé les aventures de la jument, pensant que sa nièce s'en contenterait avant qu'elle ne les répète à tout va.
- Te souviens-tu à quoi elle ressemblait ?
Elle refit non, mais un sourire étira son visage. Elle savait mais voulait le réentendre.
- Ses cheveux avaient la couleur du blé, comme toi.
Le sourire d'Ailyde se fit plus grand encore.
- Ses yeux avaient la couleur du ciel froid. Elle regardait les gens comme ça, quand elle était fâchée. Il mima un air autoritaire. Puis elle souriait en te regardant, toi. Elle regardait aussi les nuages, souvent, au-dessus de sa tête, comme si ils lui parlaient. Peut-être avait-elle des amis nuages qu'elle est allé trouver... Ce qui expliquerait certaines tempêtes. Elle était douée pour nous refroidir; plus efficace qu'un seau d'eau sur la tête. Quel caractère quand elle s'y mettait. Têtue comme une...
Il s'aperçu soudain que la petite s'était endormie. Il soupira et se tue, pour descendre avec précaution de son étage.

Ansgair remit un peu de bois dans l'âtre qui crépitait. Il repensait maintenant au fameux jour de leur dispute. Il ne comprenait toujours pas ce qui lui était passé par la tête: Blandine était partie et lui avait laissé sa propre fille, son bébé. Elle n'avait rien imprimé de leur discussion, comme si Ansgair avait parlé à un mur. Elle lui avait laissé croire qu'elle avait entendu, et elle avait disparu dans la nuit.
Il serra les dents, réprimant un grognement qui le fit tousser. Ansgair sortit sur le palier en refermant la porte derrière lui, le temps de calmer sa quinte qui risquait de réveiller Ailyde. Il finit par cracher parterre en se penchant en avant, autant amer que soulagé. Il releva le regard sur une patrouille de miliciens, plus loin, dans la nuit. Leur regard s'étaient portés sur lui, sans doute à cause du silence qu'il avait brisé. Puis, sans mot ni geste envers eux, il se tourna pour rentrer en marmonnant.
- Maudit couvre-feu.
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MessageSujet: Re: Oncle'Ansgair   Oncle'Ansgair EmptyMer 26 Jan 2022 - 23:07
Il plongea ses mains dans l'eau froide et en ramassa une floppée qu'il s'envoya au visage. Il frotta vigoureusement sa peau et sa barbe, saisit par la fraicheur. Un râle de satisfaction s'échappa, tandis qu'il terminait sa toilette en coiffant ses cheveux mouillés.
- L'bonjour, voisin, lança Hilaire. Le paysan sourit en espérant la formule moins maladroite que la veille et chercha la gamine des yeux sur le pas de porte.
- Bonjour, lui répondit Ansgair, probablement mieux luné. Il vit que l'homme portait un seau lourd à deux bras. Besoin d'un coup de main ?
Surpris par la proposition, Hilaire ne su cacher sa gêne.
- Non, non, ça va bien, répondit-il aussitôt. Il n'osa pas expliquer pourquoi, pensant que c'était pourtant évident.
- Je vais mettre un poulailler, ici, ajouta Ansgair en montrant le flanc de la maisonnée. Et une poule dedans. Hilaire posa son seau et acquiesça en étirant son dos.
- Bien, finit-il par dire devant une attente manifeste de réaction. Je pourrai vous aider, si vous voulez. Son air se voulu bienveillant, mais Ansgair resta stoïque.
- J'aurai besoin de corde.
- J'en ai, c'est entendu. Entre voisins, vous savez... Il s'arrêta, sentant qu'il se lançait un peu trop vite dans un échange qu'Ansgair ne souhaitait visiblement pas poursuivre. Ce dernier se dirigeait déjà vers l'entrée de sa maison.
- Merci, conclu-t-il sans se retourner.

Ailyde chantonnait, perchée sur les épaules de son oncle. Ils firent un crochet vers la maison de Joseph, avant de gagner l'écurie. Arrivé devant la porte, Ansgair décida d'abord de faire le tour. Il fit descendre sa nièce et ils se faufilèrent tous deux derrière la maison dans un étroit passage entre les murs extérieurs.
- Où va-t-on ? Fit la petite qui sembla se prendre au jeu.
- Silence.
Une palissade leur barra la vue. Mais les jointures, par endroits larges comme un doigt leur permis de voir à travers.
- Et il me fait croire qu'il n'a pas assez d'œufs... Renforcé dans ses suspicions, il continua de penser Joseph faux, même s'il pouvait pourtant dire vrai.
- Je veux voir !
Ansgair souleva la gamine pour lui montrer le poulailler rempli de volailles. Puis ils rebroussèrent chemin jusque devant la chaumière. Il frappa à la porte. Finalement, c'est une femme qui leur ouvrit. Elle portait un simple voile pour couvre-chef et une robe en futaine typique du coin. Elle planta un regard incisif. Ses lèvres fines et son visage creusé la faisait paraitre sévère et plus âgé que Joseph.
- Oui ? Fit-elle sans douceur en levant son nez pointu. Ansgair la dévisagea un instant, posant machinalement sa main sur l'épaule de la fillette blottie contre sa jambe.
- Je viens voir Joseph.
- Il est parti. Elle laissa glisser son regard sur la fille qu'elle ne rassurait pas.
- Je dois lui prendre une poule, annonça l'ancien chevalier, comme s'il n'avait pas entendu la réponse de la femme.
- Il est parti à ses affaires, j'vous dis.
Devant la raideur de la femme, Ansgair lui répondit d'un bourdonnement du fond de la gorge.
- Dites-lui donc que je suis passé, qu'il me la mette de coté pour ce soir.
Elle força un sourire en opinant, avant de les saluer et de refermer la porte.

Un vent frais soufflait ce matin sur le champs nu. La tunique de laine n'était pas de trop sur les épaules. Le poing serré sur les guides, Ansgair tirait la jument en avançant doucement sur toute la longueur de la parcelle, meublant la terre à la herse. Ailyde était installée sur la scelle, contente de chevaucher agrippée à la crinière.
Le palefroi n'était pas dressé pour ce genre d'exercice. Il valait mieux le tenir près de la bride et le guider ainsi. Et si le manque d'exercice et des grands espaces auxquels il avait été habitué des années avec son ancienne propriétaire pouvait parfois le rendre revêche, Ansgair avait la poigne suffisante pour l'assagir. De temps en temps, toutefois, il l'emmenait galoper sur les sentiers du Labret, ceinturant la fillette contre son ventre.
Au-dessus de leur tête, les corbeaux tournoyaient avec les autres oiseaux attendant de pouvoir se servir en graines fraichement jetées. Les gars semaient dans les sillages, jetant par poignées à droite et à gauche. De temps en temps, certains chassaient les opportunistes, mais d'avantage dans l'espoir d'en capturer un pour le souper.
Ansgair cherchait un bosquet à proximité. Il voulait aller chercher du bois avant la nuit, mais pour cela, il devait avancer rapidement. Hilaire le croisa plus tard avec une bobine de cordelette. Il avait tenu parole.

La journée fut longue. Ansgair venait de déposer la gamine dans la chaumière et se dirigeait d'un pas vif chez Joseph. Il avait coupé du bois à la hâte, avec la hache qu'il gardait sous sa paillasse. A présent, il n'avait plus beaucoup de temps.
Joseph lui ouvrit cette fois, et feinta le plaisir de le voir.
- Je suis passé ce matin, mais tu semblais déjà parti.
- Ah ?
Ansgair fronça les sourcils à la surprise du type. Il avait chargé sa femme de lui transmettre le message. Soit cette dernière ne l'avait pas fait, soit Joseph se jouait de lui. Il ne s'attarda pas là-dessus, et en vint droit au but.
- Je viens t'acheter une poule. A ces mots, il sortit une poignée de sous de sa poche. Il venait de retirer sa paye du jour. Joseph s'y attendait, alors il pris un air désolé.
- Hélas, je vends pas de poule.
- Pourquoi ? lui asséna Ansgair aussitôt. Joseph sentit l'agacement poindre dans l'œil du visiteur.
- Je produis des œufs, et je réserve quelques coquelets à ceux qui en offrent un bon prix. Ansgair le dévisagea un instant, sans mot dire. Le silence pesant qui s'installa dû cette fois mettre Joseph mal à l'aise. C'est pourquoi il ajouta avec un peu moins d'assurance:
J'ai des œufs si tu veux.
- Aujourd'hui tu en as ? Il fit oui de la tête. C'est hier que j'en voulais. Joseph s'apprêtait à reprendre son air faux, mais Ansgair renchérit. Tu possèdes des dizaines de poules, la derrière, et tu veux me faire croire que t'as des œufs pour moi une fois sur quatre. Passons. Je viens pour une de tes poules, celle que le prochain prédateur viendrait te croquer dans la nuit en passant par une brèche de ta clôture. Ca arrive, malheureusement. Bah moi, je viens t'en donner des sous. Quel est ton prix ? Il soupesa sa monnaie dans un bruit de métal.
Jospeh ne pu cacher sa surprise. On lui forçait la main sans complexe, l'accusant à demi-mot de mentir. Il pouvait lui claquer la porte au nez sur le champs. Et en même temps, il arrivait fréquemment qu'une poule disparaisse, n'y laissant que ses plumes. C'était peut-être une menace voilée, auquel cas il aurait du soucis à se faire. En plus des renards et des fouines, Joseph n'avait pas envie de craindre un vol. Et s'il se plaignait d'Ansgair à qui voudrait l'entendre, il savait ne rien pouvoir prouver. Une esclandre sur les bras serait fâcheuse. En quelques secondes, Joseph se sentit soudain devenir vulnérable, ne voulant aucune histoire. Il se pinça les lèvres.

Quand Ansgair entra chez lui, Ailyde sortit sa tête de la rembarde. Elle l'avait attendu. Son oncle tendit ses bras chargés en guise de présentation.
- Dis-lui bonjour. Le visage de la gamine s'égaya et elle voulu descendre immédiatement.
- Bonjour ! S'appelle comment ?
- Poule, lui répondit-il sans manière.
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MessageSujet: Re: Oncle'Ansgair   Oncle'Ansgair EmptyJeu 28 Avr 2022 - 22:29
Mai 1167


Les deux voisins avaient bien travaillé. Hilaire s'avérait être bon formateur, et ses talents de bricoleur leur avait permis de refaire le poulailler entièrement. Celui-ci n'avait rien à voir avec sa première version. Ansgair se dit qu'ils pourraient même y mettre deux ou trois chèvres de la bergère, compte tenu de la place et de sa solidité. Ils avaient suivi les conseils de la femme, formant des fondations d'argile et de paille à l'enclos de noisetier. Ainsi, aucun prédateur ne pourrait creuser pour passer dessous, et le toit solidement construit empêcherait les rapaces de plonger dedans. La porte était rudimentaire. Un simple panneau encastré dans la palissade, démontable pour pouvoir accéder à l'intérieur. Le reste avait été fabriqué avec les premiers bois récupérés. Et les deux hommes avaient aménagé plusieurs espaces. C'était décidé, les deux voisins voulaient mettre leurs moyens en commun: ils investiraient tous deux dans l'achat de plusieurs poules afin de se partager les œufs équitablement.

- Elles seront bien, ici, pour sûr ! Hilaire paraissait en joie, satisfait du travail accompli. Mais plus que la perspective d'en récolter les fruits, ce dernier semblait content de collaborer avec Ansgair. Et le taciturne se surprit également à prendre plaisir dans le lien d'entraide qu'ils entretenaient. Sa confiance était certes dure à gagner. Mais il devait reconnaitre qu'Hilaire se révélait être un brave type.
Un sourire s'esquissa sur le visage buriné de l'ancien Chevalier, contemplant leur œuvre.
- Reste les poules, maintenant. Si le Joseph consent à pas faire l'idiot. Le ton fleurtait entre agacement et lassitude. Hilaire savait de quoi il s'agissait. Ansgair l'avait mis au parfum, histoire de savoir si l'éleveur de poulet et sa femme étaient des connards finis avec tout le monde, ou que sa tête ne lui revenait simplement pas.
- J'irai moi-même, le rassura-t-il. Je suis sûr qu'il ne fera pas tant d'histoires.
- Hmm.

Le lendemain pourtant, Hilaire eut du mal à cacher sa gêne. Il avait pensé pouvoir acheter trois volailles, mais il avait essuyé un refus de Joseph. Le fournisseur d'œufs et de poulets du village voyait d'un mauvais oeil l'établissement du grand poulailler. Il ne l'avait pas dit franchement, mais Hilaire l'avait bien compris. Gentil et résigné, le serviable voisin se sentit coupable devant la mine sévère d'Ansgair.
- Tu n'y es pour rien, tâcha de le rassurer ce dernier. Mais sa colère était lisible sur toute sa face.
- On peut pas l'obliger... lâcha Hilaire. Mais sa phrase reçu un écho qu'il n'avait pas prévu. L'œil du grand barbu flamboya. P't-être, dans quelques jours, qu'il changera d'avis, ajouta-t-il rapidement. J'lui proposerai un meilleur prix.
Mais ceci ne calma pas Ansgair qui serrait le poing.
- Et puis quoi encore ? C'est déjà du vol ! Je vais lui tordre le cou, comme un de ses poulets... promit-il entre ses dents serrées.
- Attends, pas d'histoire, surtout. Hilaire ajouta plus bas: T'aurais vite fait de te faire jeter du village avec ta gamine, et moi avec. Baptiste ne le tolérerait pas, et la milice non plus.
Ansgair considéra l'avertissement, soufflant d'agacement et de frustration. Hilaire, lui regardait parterre, cherchant une solution rapide pour apaiser la colère de son associé.
- On pourrait... lui promettre de n'pas vendre nos œufs. J'sais pas... lui expliquer que nous, que c'est juste pour manger c'qu'on produira... Il essayait, mais il semblait de ne pas y croire lui-même. C'était pourtant vrai. Hilaire et Ansgair n'avaient pas imaginé agrandir le poulailler pour troquer leur production, même si c'est ce que Joseph pouvait craindre. Simplement, le fourbe n'aurait aucune garantie de cela.
Toutefois, Ansgair tiqua. Il porta un regard intéressé aux dernières paroles de son voisin.
- Attends, il est toujours d'accord pour nous vendre des œufs ?
Hilaire digéra la question avant de répondre avec plus d'hésitation qu'il ne l'aurait cru.
- Euh... il m'semble bien. Enfin, l'a pas dit non quand j'en ai pris l'aut'fois.
Une lueur de défis aiguisa l'œil sombre d'Ansgair.
- Et bien, nous allons lui acheter des œufs, et les mettre à couver chez nous. On verra bien ce qui en sortira. Il savait pour l'avoir vu à travers la palissade, qu'au moins un coq se mélangeait aux poules de Joseph, à l'arrière de sa maison. Il en déduisait donc que les œufs qu'il vendait étaient fécondés. Peut-être un beau coquelet !

Hilaire ne voyait pas pourquoi ça ne pouvait marcher. Au fond, c'était logique. Avec leur poule, ils pouvaient faire couver les six œufs qu'il ramenait de chez Joseph. Ce dernier les lui avait vendu avec une mine satisfaite. Il avait sans doute pensé que les deux voisins renonçaient, finalement. Il s'était bien gardé d'en dire quoi que ce soit. Hilaire avait simplement feinté la résignation, sans en faire des caisses. Mal à l'aise, il était bien heureux que l'échange ne se soit pas éternisé.
- Après tout, pourquoi pas... marmonna-t-il en regardant le bout de tissus qui couvrait son panier.
Il marchait d'un bon pas, traversant la petite place tout droit vers sa maison. Il sourit même un peu, une pointe d'excitation le cueillant à l'idée de voir leur projet se concrétiser. Avec assez de poules, ils auraient assez d'œufs pour en manger tous les jours. Et avec un coq, ils auraient assez de poules, avec en prime, un poulet mâle à faire rôtir de temps en temps. Décidément, ces pensées lui mirent même l'eau à la bouche.
Ansgair était un homme sinistre et intimidant. Mais pour le moment, Hilaire était content de l'avoir aidé. Sa femme avait eu raison de l'encourager. Et c'est elle, en plus, qui lui serait reconnaissante. Hilaire avait bon espoir. Alors il était content, vraiment.
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