Le retour de l’héritier [Rosen x Victor]

Sujet: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Mar 1 Nov 2022 - 21:34

Le retour de l'héritier

Rosen feat Victor

26 mai 1167
Château de Sombrebois

Je le vois là, à quelques pas de moi.
L’air vibre tout autour, de sombres énergies s’agitent.
L’air semble soudain palpable, épais à couper au couteau, épais à en couper le souffle, exaltant une odeur humide de pourriture.

Je ne peux pas bouger. Je suis allongée sur le dos et ma vision est assombrie par les ténèbres. Tout autour, je peux deviner des bougies, des silhouettes encapuchonnées et je peux deviner des chants psalmodiés à sa gloire. J’entends des pleurs. Pas des pleurs de terreur ou de chagrin. Pas des pleurs de souffrance. Pas mêmes des pleurs de femmes, d’ailleurs.

Athanase !

Pour le coup, c’est dans mes entrailles que je sens la terreur prendre de l’ampleur et s’intensifier. Les pleurs prennent également de la puissance jusqu’à emplir tout mon crâne d’un brouhaha assourdissant. J’aimerais bouger mais j’en suis toujours incapable. Je me débats et soudain, les pleurs de mon fils cessent brutalement. Tout disparaît. Mais il est toujours là.

***

Je suis à présent allongée dans mon lit, sans doute toujours endormie, en proie à tous ces étranges phénomènes que je connais si bien. Du moins, mon corps l‘est. Pas mon esprit. Malgré cela, je n’ai encore jamais aussi clairement vécu d’apparition mystiques de ce genre. Juste certaines choses angoissantes et une intrusion onirique, mais je crois pouvoir dire que ce n’est pas réellement comparable. Oui, parce que cette fois, je sais que c’est lui. Je sens toute l’aura maléfique qui l’imprègne et qui émane de lui, envahissant toute la pièce. Cette aura macabre qui le caractérise si bien.

Rien. Pas un mot. Mais cela n’en est pas moins déroutant. Rapidement, je peux percevoir sa sombre silhouette devant moi, au pied du lit. Floue, incertaine. Mais non moins décelable. Je la sens plus que je ne la vois, à vrai dire.

Mon cœur s’accélère. Ma respiration aussi. J’essaie de bouger, espérant trouver l’impulsion de me réveiller en bougeant. Mais rien. Je n’en suis pas capable. Si ça se trouve, je suis en train de succomber à ma blessure et il est venu m’emporter.

Lentement, je le vois s’approcher, prendre un peu plus de consistance. Son regard se dessine, un regard presque flamboyant dans la pénombre. Et alors qu’il est de plus en plus près, je sens comme un étau glacial m’empoigner le visage. Un étau étrangement frissonnant.

Sur le coup, on pourrait penser comme des plumes ébouriffées par le vent chatouillant la peau. Finalement, c’est plus au grouillement d’asticots et autres vermines que cela me fait penser, les miasmes se renforçant à l’approche de la créature surnaturelle. Je me sens d’autant plus figée que je suis pétrifiée. Pas que j’ai peur. Peut-être plutôt une étrange fascination macabre. Ou plus exactement un mélange des deux ?

J’ai alors soudainement l’impression de ressentir le goût du sang et de la terre comme la poigne semble pénétrer dans ma bouche. C’est alors qu’après quelques secondes où j’ai l’impression de m’étouffer comme si quelque chose s’introduisait au plus profond de ma gorge, je me réveille subitement après un désagréable et puissant croassement qui emplit mon crâne jusqu’à m’en donner la migraine.

Je me redresse, tousse à en cracher mes poumons, crache finalement par terre à moitié pliée en deux sur le côté. Le goût de la pourriture restant étrangement présent dans ma bouche alors que les images elles s’estompent. Ma gorge me démange et après un tel songe l’impression d’avoir avalé une plâtrée d’asticots me donne envie de gerber.

C’est la douleur qui me fait réaliser que je viens de tomber par terre en m’agitant et essayant de me lever. Cela fait seulement deux ou trois jours, mais j’ai l’impression d’être clouée au lit depuis des mois. Il faut que je me lève. Que je marche. Que je m’occupe. Mais je ne tiens toujours pas la position assise plus de quelques secondes sans être au bord de défaillir…

Je me souviens encore hier lorsque j’ai demandé à être menée dehors pour participer à la cérémonie mortuaire. Le teint livide et cireux, la peau moite, le regard vitreux et absent, lointain, la mâchoire crispée par une douleur sourde et sournoise, dévorant corps et âme. Je me souviens à quel point j’ai cru que j’allais vomir ou m’écrouler de ma chaise à chaque seconde. A quel point j’ai eu du mal à murmurer clairement à l’oreille de Victor mon discours de seulement quelques phrases succinctes – un discours se voulant fort et optimiste, rassurant, autant que faire se peut dans une situation pareille. Mais je voulais rester digne, ne montrer aucune des faiblesses que l’ont pouvait me deviner – qu’elle soit physique ou émotionnelle. Le devoir de tout dirigeant quoi qu’il puisse en être. Apaiser ses gens. Je me souviens d’à quel point le peuple me gratifiait un regard inquiet et compatissant, comme si je n’étais qu’une pauvre victime innocente. S’ils savaient…

Mais au moins sait-il voir, lui, ce que j’ai fait pour lui. Même s’il est dans l’ignorance de ce qu’il se passe et s’est passé. Même s’il ne sait pas les efforts que j’ai fait, ce qu’ils m’ont coûté. Même si c’est pour Hector, pour mon fils, ou pour essayer d’être quelqu’un de meilleur qui paie la dette de ses atrocités et pas nécessairement pour sa population. Bon si, quand même quelque part. Je voulais bien faire. Mais tout est gâché.

L’indifférence de la milice, je l’ai essuyé avec nonchalance et les flammes qui s’élevaient vers le ciel m’induisaient un état de transe étrange. Les corps brûlaient, laissant derrière eux un tas de cendres et l’odeur acre et entêtante de la chair brûlée. Le corps de Marie-Ange, lui, n’a pas été retrouvé.

Se pourrait-il que personne ne l’ai reconnue et qu’elle ait été brûlée dans la masse au lieu d’avoir été inhumée dans le caveau des Sombrebois ? Je l’ignore. Si elle avait survécu, j’imagine que cela se saurait. Mais cette prêtresse - sorceresse – a toujours été pleine de mystère. Alaric lui, n’a pas été retrouvé non plus. J’espère qu’il a survécu, et qu’il n’a pas été rattrapé par le cloaque ou la fange. J’ai assez de mors comme ça sur la conscience.

***

Je regarde Victor qui est à nouveau venu me rendre visite dans ma chambre, un peu perturbée par ses derniers propos de la veille. Que les secrets étaient lourds de conséquences… de les partager avec les gens en qui j’ai confiance, d’en croire son expérience. Je me demande quelles ont pu être ses expériences qui ont dû mal tourner et leurs conséquences.

« Alors, avez-vous pu faire le tour des réparations à effectuer ? », lui demandé-je finalement d’une voix lasse et faible, enrouée.

Je me sens fiévreuse. J’essaie de me redresser un peu, mais ce n’est pas la meilleure des idées que j’ai pu avoir aujourd’hui, alors j’évite d’insister trop et je reste allongée. Chester monte sur le lit et s’approche pour me renifler avant de s’allonger contre moi, fixant le gouverneur de Sombrebois d’un regard quelque peu méfiant. Je ne me souviens pas de l’avoir vu hier d’ailleurs, peut-être s’était-il caché quelque part suite à l’attaque. Je le caresse distraitement du bout des doigts. Sa fourrure noire comme la nuit me ferait presque frissonner en repensant à mon songe.

« Je ne crois pas vous avoir demandé jusqu’à quand... vous pensez rester dans le bourg ? »

Parler me demande toujours un certain effort laborieux et j’ose espérer que cela finira par s’atténuer rapidement.

« D’ailleurs, je ne vous ai pas demandé. Comment vous vous en êtes sortis ? J’ai cru comprendre que vous aviez tué un ou deux assaillants ? »

Enflure.

« Me raconteriez-vous ? Comment cela s’est-il passé. »

Je tousse légèrement, mais c’est encore trop rude pour ma plaie qui reste douloureuse malgré les calmants et j’ai une courte grimace de souffrance.

Si je lui ai raconté comment cela s’est prétendument passé pour moi, lui ne m’a pas raconté comment cela s’est prétendument passé pour lui.

Tout est bien entendu dans le prétendument… n’est-ce pas ?

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Lun 21 Nov 2022 - 8:34

Si le Comte de Rougelac était ressortie indem physiquement de ces tragiques évènements, psychologiquement l'homme d'intrigue était rongé par les doutes, se rappelant successivement aux discours de Félia ainsi qu'aux avertissements de Roxanne. Où se trouvait sa place dans cet échiquier mortel d'influence et de trahison ? Une chose était certaine, le pion qu'il représentait possédait encore une certaine valeur aux yeux de qui tirait les ficelles de cette tragédie.

Tragédie face à laquelle la Baronne de Sombrebois semblait la plus impactée et ce n'était évidemment pas en une journée ou deux que la jeune femme convalescente pouvait se remettre physiquement et mentalement sur pied. Le Gouverneur avait donc prit la décision de retourner à son chevet en sa qualité d'allié et Gouverneur. La sphère officielle primait suite à ces événements qui venaient de toucher la couronne indirectement et Victor retrouva donc une femme toujours affaiblie mais soucieuse de se battre pour elle, pour son domaine et ses gens et sans doute dans l'espoir de retrouver son fils sein et sauf.

Ainsi, ce fut dans une posture des plus humble, mains jointes dans son dos, que Rougelac s'avança à hauteur de lit pour répondre aux attentes de Rosen.

- L'évaluation des dégâts à été faite et je ne manquerais pas de rendre rapidement mon rapport à la Couronne afin que les travaux démarrent au plus tôt pour consolider la protection du bourg. Quelques ouvriers sont déjà mobilisés pour colmater les brèches les plus importantes, mais cela reste des réparations provisoire.

Non sans porter un regard méfiant au félin que la Baronne caressait du bout des doigts, le Comte rajouta.

- Plus tôt je rejoindrais la capitale, plus tôt Sombrebois sera ravitaillé en matériaux. N'oublions pas également que la nièce du Roi et le capitaine de la garde de Sombrebois sont portés disparut et mes fonctions de Gouverneur m'obligent à en avertir de vive voix sa majesté.

Les obligations dues à son rang et à ses intrigues officieuses de cœur le contraignaient à un retour rapide à Marbrume mais pour autant il lui fallait garder un œil sur la situation de la place forte.

- J'ai encore quelques hommes de mains, malgré la perte de Ser de Rochemont. Vous l ai je dis d ailleurs ? Il a trépassé au combat, même si quelques rumeurs contredisent ce fait. Je laisserais donc à votre disposition l'un de mes hommes, le temps de régler mes affaires à la capitale.

Face à la curiosité de la sang bleue, Victor avait évidemment préparé une histoire cousue de telle sorte qu'aucune hésitation n'en transpirait, ni même la moindre incohérence.

- Je tiens tout d'abord à souligner qu'Hilde c'est battue avec héroïsme. Sans son sacrifice je ne serais sans doute pas là à vous parler. Et pour tout vous avouer c'est lorsque l'on est dos au mur, que l'on a plus rien à perdre, que se révèle notre âme de guerrier. Menti-t-il avant de rajouter. Tout est allé très vite vous savez... je n'ai pas réfléchi, j'ai frappé, le sort de femmes et d'enfants innocents étaient en jeu, il me fallait faire acte de bravoure. Menti-t-il encore. Et c'est soudainement que nos assaillants semblaient alors porter étrangement leur attention ailleurs dans le château, comme s'ils étaient à la recherche d'un unique objectif. Vous ? Votre fils ? Un objet ? Nous tenterons de faire la lumière sur les desseins de cet ennemi masqué.

En avait il trop dit ou pas assez ?

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Lun 21 Nov 2022 - 17:54

Le retour de l'héritier

Rosen feat Victor

A aucun moment Victor ne me donne de date précise sur son départ. Il explique juste qu’il va devoir repartir au plus vite. Qu’il doit aller donner des nouvelles à cette maudite couronne, tout le tintouin logique. Il m’informe que le village a été sécurisé au mieux provisoirement, certainement à l’image de cette porte défoncée qui est maintenue fermée par une caisse.

Alors que je le regarde parler, je ressens juste au fond de moi l’envie de saisir mon poignard pour le planter. Une image un brin perturbante d’autant plus que je ne ressens pas de haine. En fait, j’ai juste envie de planter quelqu’un. N’importe qui. Plus ça va et plus ma folie prend de l’ampleur, hein ?

C’est quand il me parle de Desmond que mon attention se détourne de ma lame pour se reporter sur ses propos, et mon regard vide porté sur lui se réveille quelque peu. La perte de… ?

Je n’ai pas le temps de demander stupidement s’il était parti, qu’il explique qu’il est mort au combat. Desmond est mort ? Je n’arrive pas à comprendre la nouvelle. Ai-je entendu son nom hier matin pendant l’inhumation des corps ? Ça ne me dit pourtant rien. Bon, ce n’est pas comme si j’étais super attentive après tout. Je luttais pour rester droite sur ma chaise… et je crois avoir été ramenée à mon lit avant la fin, mais le souvenir reste flou.

Ah si je pouvais avoir ma lame sous la main… je ferais bien couler du sang. Juste un peu… Une petite blessure. Une toute petite entaille sur mon bras ferait l’affaire. J’aurais bien besoin d’une bonne saignée, mais j’ai perdu trop de sang pour qu’Edwige n’accepte de m’en faire une pour le moment.

« Je comprends qu’il vous faut repartir rapidement et que vous ne pouvez pas rester jusqu’à ce que je sois en état de reprendre mes fonctions correctement, je me débrouillerai. »

Quant à son histoire rocambolesque… passons. Mais je ne saurais toujours pas quoi répondre à la grande question.

« Je… je sais pas. »

Qu’avait dit Roxanne, déjà ? Qu’ils avaient pas besoin de la nièce du roi, alors qu’ils ont sans doute dû la tuer rapidement, mais qu’avec moi et mon fils, ils prendraient leur temps pour s’amuser avec nous ?

Je n’ai absolument aucune idée de pourquoi tout ça. Mais oui, pour l’autre face de cadavre, je sais bien qu’elle n’aura de cesse de me persécuter par tous les moyens possibles aussi longtemps qu’elle en aura l’occasion.

« Ils voulaient mon fils. Peut-être avez vous une bonne idée du pourquoi. »

Je déglutie avant de demander ensuite :

« Dites moi. Pourquoi la châtelaine se méfiait tant de vous, déjà ? »

Voilà une question lourde de sens.

« Vous vous justifiiez hier pour me dire que vous n’étiez… en rien en lien avec cette attaque. Comme si j’avais des raisons de vous soupçonner. »

Après tout, n’est-ce pas ce qu’a sous entendu Roxanne ? Je prends une grande respiration pour reprendre mon air.

« Je me fiche bien de savoir que vous êtes d’une façon ou d’une autre impliqué malgré vous dans cette attaque, Victor. Je ne cherche pas à vous coincer, je veux juste comprendre ce qu’il se passe et retrouver mon fils. Je ne suis pas assez stupide pour vous attirer des ennuis alors que vous êtes peut-être bien le seul en mesure de m’aider, puisque vous êtes visiblement au plus près de ceux qui en ont après moi. J’espère que vous en avez conscience. »

Je reprends une grande inspiration. Chaque mot est tellement épuisant, étouffant.

« Il faut que cette folie se termine, maintenant. Assez de sang à coulé, ne trouvez-vous pas ? »

Nulle hostilité dans mon regard. Je cherche juste de l’aide. Mais il est si dur d’en trouver.

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Mar 22 Nov 2022 - 9:51

Comme le Gouverneur pouvait s'en douter, la Baronne le questionna au sujet des relations tendues entre lui et Roxanne après qu'elle lui ai affirmé que les évènements chaotique étaient en lien avec la disparition de son fils. Rosen avait besoin de comprendre les tenants et aboutissants de cette tragédie à la fois familiale et communautaire et son seul interlocuteur était debout en face d'elle, lui qui avait enfin retrouver les faveurs de la Cours. Pourtant l'exercice allait être difficile pour le comte de Rougelac pour la simple et bonne raison qu'il n'avait été qu'un pion dans cette affaire et que la situation le dépassait également. Faute de transparence, il ne pouvait pourtant pas laisser la dirigeante de Sombrebois sans quelques éléments de réponse.

- J'ai conscience de bien des choses mais comprenez que l'on m'a sans doute éloigné de plus d'information pour justement éviter que je ne mène moi même des investigations plus orientées. La châtelaine a toujours été une énigme pour moi, tantôt proche du pouvoir tantôt dissidente. Je me demande d'ailleurs si au cœur même du château royal, plusieurs mouvances de n'affronte. Roxanne n'est sans doute pas innocente à ce jeu que je qualifierais d'influence politique, tantôt me menaçant, tantôt me délivrant conseils. Mais jamais elle n'a su être franche avec moi d'où ma perpétuelle méfiance à son endroit. Savait-elle juste me rappeler qu'elle agissait pour le bien du royaume...

Victor prit une pause le tant que son interlocutrice assimile ces mots avant de reprendre d'un ton toujours aussi calme et mesuré.

- Il me semble évident en tout cas qu'en visant votre fils, les investigateurs de cette affaire visent la légitimité et la pérennité de la place forte de Sombrebois. Mais au sein même du pouvoir tous peuvent être considérés comme des suspects, tout autant que des groupuscules extérieurs cherchant à instaurer le chaos total. Le sang ne coule jamais assez pour ceux qui cherchent à atteindre leurs propres ambitions, aussi démesurées soient-elles, hélas.

Il finit par un aveux.

- L'on souhaite que je regagne ma place à la Cours Royale et c'est déjà le cas depuis quelques semaines maintenant, d'où ma distance avec Sombrebois. Je ne sais pas de quoi demain sera fait après ce qui s'est déroulé ici, mais je ne manquerais pas de vous informer si d'aventure j'en apprenais plus sur cette affaire. Nous devrons échanger dans le plus grand des secrets et brûler toute preuve de nos contacts qui porteraient sur d'éventuelles pistes ou indices, ceci est ma seule condition afin que je puisse vous aider dans la tragédie qui vous frappe. Ma place ne doit pas être remise en question.

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Mar 22 Nov 2022 - 22:33

Le retour de l'héritier

Rosen feat Victor

Restant toujours égal à lui même, Victor semble cependant faire l’effort de lâcher un peu de lest sur les maigres explications qu’il accepte de me donner. Des explications n’expliquant somme toute rien de bien croustillant, il va de soit. Mais au moins fait-il mine de bien vouloir m’aider.

Faire mine, c’est bien. Être sincère, c’est mieux. A qui peut-on bien se fier en ce bas monde ? Le monde de la haute est bien trop épuisant. Bien trop compliqué quand on ne souhaite que mener une vie simple avec son enfant. Un monde de petits joueurs et de tricheurs. Un monde amusant et fascinant, mystérieux, qui a pourtant tout pour me plaire, tout aussi dangereux que celui des bas fonds.

Mais moi, je n’ai plus envie de jouer. Pourtant, la guerre que l’on m’a déclaré ira loin. Puisqu’on ne me laisse pas le choix, je vais jouer. Oeil pour œil, dent pour dent. Non, je rendrai le double, le triple. Le sang coulera partout sur mon passage… le feu léchera chaque arbre, chaque brin d’arbre, chaque ruine dans mon sillage.

Ils verront… oui, ils verront.

« … Savait-elle juste me rappeler qu'elle agissait pour le bien du royaume... »

…

Son maudit royaume. Je m’en vais te le foutre à feu et à sang moi, son putain de royaume de merde ! Encore une fois, les mots de Victor me ramènent dans l’instant présent où mon esprit a tant de mal à s’ancrer. Maudite Roxanne et son royaume de pacotille !

« Bien évidemment que la couronne est… désunie et en totale opposition… murmuré-je faiblement. En doutiez-vous... réellement ? »

Faut-il croire que j’en sais plus que lui en fin de compte, que ce soit sur Roxanne, sur la couronne ou le cloaque. Ou alors cache-t-il bien son jeu… ce qui n’est absolument pas à exclure.

« N’y a-t-il personne dans votre entourage qui s’intéresse à Sombrebois, de près ou de loin ? »

Des partisans de la reine, que disait Roxanne. Que la reine ne voulait pas nécessairement aller aussi loin… Mais qu’elle ne pourrait pas contenir le raz de marée qu’elle a engendré.

« Quelqu’un qui faisait mine de prendre des nouvelles du bourg par curiosité… par exemple. Ou autre. Quelqu’un qui a besoin de vous… avec qui vous faites affaire, peut-être… Ces personnes impliquées dont la châtelaine du Val d’Asmanthe semblait insinuer qu’elles vous feraient épargner… réfléchissez, pour l’amour du ciel… »

J’expire un peu brusquement, quelque peu agacée. L’air se fait si rare. Ma voix si basse et chevrotante.

« Je ne vous demanderai pas de nom, n’ayez crainte. Juste de m’aider à déjouer cette ou ces personnes… et à savoir où peut être mon enfant. Si vous pouviez entendre la moindre rumeur à son sujet… même la plus folle... dites-le moi je vous en prie. Aucune n’est à exclure. »

Je fixe le plafond, toujours aussi essoufflée.

« Quant à la correspondance… je gage que beaucoup de nos pigeons risquent de tomber prochainement. Ce ne serait sans doute pas le plus prudent d'en parler… mais si jamais... n’oubliez pas de me proposer une partie de chasse pour... lorsque je serais rétablie, hein ? Vous avez ma parole que je ne ferai rien d'inconsidéré. Ou d’irréfléchi qui puisse vous nuire d'aucune façon que ce soit. Je sais que je ne suis pas l'image même de la stabilité mentale... que j'ai trop agi sur de stupides coups de tête... mais vous pouvez me faire confiance je vous le jure. »

Et qu’il ne me prévienne pas le matin même si une nouvelle attaque se prépare !

Ma voix se brise presque malgré moi. Je suis à bout... Ah, maudite Roxanne… pourquoi m’as-tu fait ça ?

Son flamboyant visage si froid flotte à mon esprit, son visage qui serait si beau ruisselant de sang… comment vais-je réussir à surmonter ça ? Ce n'est qu'un mauvais moment à passer. Juste un mauvais moment, tout va bien aller. Je le sais. Tout va bien aller.

Je m'en remettrai. Comme toujours. Mais chaque seconde qui passe me donne l'impression de sombrer un peu plus bas dans la folie et la destruction. Chaque seconde qui passe loin de mon bébé est une torture insupportable. Est-il seulement toujours vivant ? Va-t-il seulement bien ?! Je vais devenir folle à me le demander toutes les cinq minutes.

« Voudriez-vous bien... essayer de me distraire un peu ? demandé-je après un petit silence. Je... je crois que je vais devenir folle si je n'arrive pas à... à arrêter de penser. Nous pourrions faire... une partie d'échec... si cela vous dit. »

Oui, l'idée est stupide. Je n'aurais même pas la force de bouger le moindre pion, ni même de réfléchir convenablement. Mais si pendant quelques minutes, je peux me concentrer sur autre chose, ce sera toujours quelques minutes de répit.

« Il y a un échiquier à côté, sur la table de mon salon. Enfin, si ça n'a pas trop été remué l'autre nuit... »

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Ven 25 Nov 2022 - 14:33

S'il doutait que la couronne était désunie ? Non, biensure que non, cependant l'opposition semblait prendre de la consistance plus que de raison. Victor hocha par la négative de la tête à la seconde question de baronne de Sombrebois au sujet d'un quelconque personnage s'intéressant de prêt ou de loin à cette place forte perdue dans les marécages, même s'il devait tout de même concéder une information de premier ordre, tout du moins, offrir une piqure de rappel à son interlocutrice.

- Vous n'êtes pas sans savoir que je me suis attiré la sympathie de la Reine à défaut d'obtenir celle du Roi. Mes interlocuteurs sont donc proches de cette dernière, mais de là à dire qu'ils œuvrent pour ou contre Eugénie de Sylvrur, je ne me hâterais point à des raccourcis faciles et précipités. Je vous ferez savoir où mes investigations me mènerons.

Il était compliqué d'obtenir le moindre aveux du Comte de Rougelac et pour cause, son rôle de gouverneur obtenu par les faveur de la Reine, tout comme sa réhabilitation à la Cours l'obligeait tout autant à la prudence qu'à la sagesse.

- Je vais considérer votre proposition et vous faire confiance en ce sens. Nous échangerons sur mes découvertes durant une chasse à courre par exemple. Mais sachez toutefois une chose, je ferais mon possible pour que vous retrouviez votre enfant et anticiper une nouvelle menace mais point pour fragiliser ma place en déjouant un vaste complot où ma situation pourrait être remise en cause.

Rougelac était donc prêt à un compromis avec la baronne avant que Rosen ne cherche auprès de lui une forme de distraction bien étranger qui obligea l'intriguant personnage à sourire du bout des lèvres.

- C'est stupide vu votre état mais soit, si cela peut vous aider, je ne vois aucun inconvénient à vous mettre matte en une petite dizaine de coups.

Fini-t-il en adressant un clin d'oeil à la jeune femme avant d'aller récupérer l'échiquier à l'endroit indiqué pour ensuite le poser sur le lit de sorte qu'il puisse être installé, plaçant les pièces blanches du coté de la blonde après que cette dernière lui ait réclamé cette couleur.

- Le noir me sied bien plus de tout évidence.

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Ven 25 Nov 2022 - 20:09

Le retour de l'héritier

Rosen feat Victor

Évidemment qu’il nie avoir contact avec une quelconque personne démontrant un intérêt pour le bourg. Me le dirait-il seulement si c’était le cas ? Je suis prête à mettre ma main à couper que non. M’aider dans la mesure du possible seulement, évidemment. Ses intérêts avant les miens, bien entendu. Ce qui revient à peu près à une évidente certitude au vu de ce que je sais de la situation ;

qu’il pourrait bien m’aider à retrouver mon fils s’il apprenait que ce n’est ni la reine ni cet allié dont il n’a prétendument pas connaissance - qui a organisé l’attaque avec la reine ou non - qui a enlever Athanase mais le camp opposé, à savoir Roxanne et par extension assez certaine, le Roi.

Imaginer ce couple d’abrutis en train de se mener la guerre pour avoir la main sur mon fils me rend malade. C’est pas un objet, par Etiol ! C’est mon fils ! Tôt ou tard, je leur ferai payer leur stupide et puéril duel aux buts encore si obscurs, dont l’évidence semblant transparaître est pourtant si incertaine. Mettre la main sur le bourg serait si simple sans avoir à se donner tout ce mal.

Seulement, je ne peux pas prendre le risque de dire la vérité à Victor. Certes, il pourrait m’aider. Mais avant tout, ce sont ses alliés qu’il aiderait. Ce qui reviendrait seulement, au bout du compte, à changer Athanase de kidnappeur pour qu’il finisse de la main du Roi à celui de la Reine et / ou de ses alliés. Quelle aide pourrais-je donc bien espérer de Victor alors ? Aucune, il va de soit. Pas même de Roxanne.

Mais les choses sont ce qu’elles sont et ouvrir encore ma grande gueule pour le braquer serait absolument tout sauf productif. Alors je dois faire ce que j’ai de mieux à faire, jouer le jeu. N’est-ce pas ce que Roxanne m’a demandé de faire après tout ? C’est encore le meilleur moyen que j’ai, la meilleure chance de pouvoir espérer dans mes rêves les plus fous revoir mon fils, un jour.

J’acquiesce donc de la tête sans mot dire supplémentaire. Tout a été dit, malheureusement, rien qui n’a pu m’avancer à grand-chose, rien que je ne savais déjà sur la situation actuelle.

« Stupide… un peu plus de stupidité de ma part ou un peu moins... je ne suis plus à cela près, dis-je avec grande désinvolture comme il se lève pour aller chercher le matériel après sa moquerie. Je prendrais bien les blancs si cela ne vous dérange pas... »

Moi aussi, j’aimerais bien lancer un assaut. Et voilà que Victor fanfaronne avec ce sourire haïssable qui lui va si bien.

« Une petite dizaine de coups… pari accepté, dis-je alors malicieusement à son retour. Je gagne quoi si je résiste plus de dix coups ? J'aimerais bien un petit massage... pour m'aider à me détendre un peu. Les pieds, les jambes... Ah, et n’essayez même pas de me faire le coup du berger. »

Et ainsi donc nous entamons la partie. Je ne prends pas vraiment le temps de réfléchir pour l’ouverture, je me contente de faire un grand classique.

« Avancez le pion qui est devant le roi de deux cases, demandé-je donc afin de libérer la diagonale droite de ma reine.

Voyant ensuite Victor avancer de deux cases son pion en avant de son fou blanc, croisant ainsi deux de nos pions avec une colonne les séparant, me fait froncer les sourcils.

« Vous ne pouviez pas faire une ouverture classique comme tout le monde en vous opposant à mon pion ? râlé-je. Vous n’êtes pas galant. Vous me forcez déjà à réfléchir... humf… »

Bon…

« Et arrêtez de sourire comme ça... bon euh… le… attendez. Vous n’êtes pas pressé j’espère… »

Mazette. Ce pion là, celui-ci ou le cavalier ??

« Avancez mon cavalier noir », me décidé-je enfin après de longues secondes d'hésitation.

Il avance ensuite le pion devant sa reine d’une case. Nom d’un… je ne sais pas si c’est la fièvre qui m’assomme ou si c’est lui qui ne sait pas faire ses ouvertures, mais il me semble que j’ai déjà l’avantage. Peut-être un peu prétentieux de ma part… Ah, ce serait bien drôle si je gagnais ! Je souris presque à cette idée. Mais non, je sais bien qu’il ne faut prendre trop d’assurance. Tout peut se jouer jusqu’au dernier coup. Cela dit, je n'ai pas de grandes chances. Je n'arrive pas à réfléchir le moins du monde et me contente de jouer un peu au hasard malgré le temps de réfléxion.

« Hmmm… le deuxième cavalier. Je vais la jouer classique, moi. »

Il sort ensuite son cavalier noir.

J’essaie de me concentrer, mais j’ai l’impression d’y voir flou, un peu comme si je venais de me réveiller. La tête me tourne un peu, aussi.

« Le deuxième pion - celui devant ma reine – placez-le à côté de l’autre. »

Son pion mange le mien, première pièce de la partie à disparaître.

« Là que j’y pense, au fait… Je ne sais plus si je vous ai demandé de faire le point. Sur la sécurité actuelle du bourg, avec les miliciens qui sont tombés… J’imagine que vous l’avez fait, le cas échéant. Il faudrait avoir de nouveaux effectifs. J’imagine que les renforts arrivés avec le prince vont rester un peu. Si vous pouviez vous en assurer ? Je ne sais pas si le prince est toujours là ? Il serait bien de voir avec lui. Si les miliciens nous ayant soutenus peuvent rester, ou s’il faut voir cela avec Morn de Sarssel. C’est lui qui supervise la milice... »

Sujet: Re: Le retour de l’héritier [Rosen x Victor] Ven 6 Jan 2023 - 22:22

Le retour de l'héritier

Rosen feat Victor

Jet pour le retour de l'héritier

Mais à peine ai-je fini de parler que j’entends des cris depuis le couloir. Je me redresse vivement, mais difficilement et douloureusement. Instinctivement, ma main cherche ma lame, la trouve rapidement. La porte s’ouvre en trombe, et la tête me tourne tellement, mon cœur bats si fort que je le sens remonter dans ma gorge. Il s’épuise, cogne à grands coup d’épuisement dans ma poitrine. Tout ce sang perdu peine tellement à se refaire…

Ma main tremble – et pas qu’elle, j’en suis sûre - je n’arrive pas à déglutir, mais je remarque Pénélope qui se précipite vers moi. Elle est bouleversée. Elle essaie de me dire quelque chose que je ne comprends pas, mais je vois les larmes couler sur son visage. Elle semble avoir peur, recule finalement. Je ne comprends pas. Elle prononce mon prénom, dit qu’ils l’ont retrouvé, mais je ne comprends pas.

Deux hommes arrivent dans l’embrasure de la porte défoncée qui est branlante. Je ne serais certainement pas en état de mener une lutte, mais je partirai dignement. Mon visage s’assombrit encore, je serre fort le poignard dans ma main moite. J’ai si froid…

Pénélope m’appelle encore, mais je ne comprends rien. Mon regard vitreux se fixe alors sur l’un des deux hommes qui a quelque chose dans les bras. Mon visage livide perd son expression farouche l’ombre d’un instant.

Mon…

Je crois que mon cœur va s’arrêter de battre. Mon arme tombe sur le lit, ma main l’a lâchée malgré moi. C’est là que je réalise alors.

« A… Athanase ?! » soufflé-je faiblement, horrifiée, mes lèvres parvenant à peine à remuer, se décoller.

C’est pas possible, je suis encore en train de délirer.

Il ne fait pas de bruits, il ne bouge même pas. Oh non… La suite paraît floue. Je bondis du lit par je ne sais quelle force miraculeuse que je ne suis même plus sensée possédée, mais mon pied à peine posé au sol, je m’écroule à terre de tout mon long. Mon corps ne trouve pas la force de faire le moindre pas de plus.

« Athanase ! », je m’exclame désespérément, me débattant presque contre moi même dans une veine tentative de me relever.

Pénélope se précipite sur moi.

« Rosen ! »

Je sens l’inquiétude ou la panique dans sa voix de me voir chuter de la sorte au sol, pourtant les mots qu’elle prononce ne sont pas inquiétants. Ils sont même teintés d’un timbre rassurant.

« Il va bien ! Il va bien Rosen ! Doucement, tu ne dois pas quitter le lit comme ça ! »

Finalement le deuxième milicien vient me ramasser pour me remettre au lit et mon regard se repose sur la petite forme dans les bras du premier homme d’arme.

Ce dernier s’approche alors et je tends les bras instinctivement pour demander mon bébé.

« Je suis en train de rêver… c’est ça ? je demande tristement, tout simplement choquée. C’est encore un rêve... »

Mais ça a l’air si réel... et ça fera si mal quand viendra le réveil. Un peu comme une nouvelle plaie taillée par dessus la précédente.

Je sers doucement mon fils contre moi. Oui, si réel… que c’est si réel ! Il se met à gesticuler doucement, sortant de son sommeil et je peux même sentir son odeur.

« Grands Dieux… dites… dites moi que je suis bien réveillée... je vous en conjure... »

Athanase pleure un peu, mais en entendant ma voix, il semble tout d’un coup comme surpris et cesse de pleurer, son petit regard croise alors le mien.

« Je rêve pas, c’est vraiment toi ? »

Je n’ai plus les mots. Ma gorge se serre, je craque une nouvelle fois et sens déjà les larmes affluer. Je pivote doucement sur le côté vers lui, mon visage crispé par l’émotion. J’ignore pourquoi je me mets à chialer. C’est complètement stupide…

Je remarque à peine les miliciens se retirer et Pénélope venir m’aider pour lui donner le sein. Elle m’explique qu’il a déjà pris du lait de chèvre, que ça va aller, qu’elle va aller lui donner un bon bain dans quelques minutes.

Non ! Je ne veux pas qu’on me l’enlève encore ! Non ! Je me recroqueville un peu sur lui. Si on me m’enlève encore, je ne le verrai plus cette fois ! Je le serre contre moi, faisant mine de refuser farouchement qu’on me le reprenne. Mais Pénélope me rassure, me dit que ça va aller. Elle se met alors à pleurer et je peux remarquer à quel point elle est épuisée elle aussi.

Je crois qu’on va avoir du mal à se remettre de tout ça… il faut que je me calme, que je prenne sur moi. Ca va aller… je regarde mon fils, caresse doucement sa petite tête avant de prendre sur moi et de tendre à Pénélope pour qu’elle puisse aller le laver.

C’est vrai qu’il ne sent pas la rose… j’imagine que ces idiots ne l’ont pas changé dans les marais. Je fixe alors avec angoisse la cuisinière repartir et quitter la pièce, avant de reporter mon regard éteint sur la toiture du baldaquin.