Marbrume


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 Des renforts inattendus

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Lazare de MalemortComte
Lazare de Malemort



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MessageSujet: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMer 25 Mai 2022 - 15:57



Des renforts inattendus | Juin 1160

La sombre époque de la Fange n’a pas toujours été. Cependant, les flots alentour de Marbrume et du duché de Morguestanc dans son ensemble n’ont jamais été des plus sages. Taxes impayées, barrages forcés, tentatives d’invasion, le comté de Malemort et Malerive a cent fois essuyé ces initiatives extérieures, flanchant temporairement au gré des forces jetées contre son détroit en attendant les renforts de la capitale. De Maerle, ancêtre de ces terres inhospitalières pour qui les accosterait par les courants marins, avait osé braver cette difficulté en réclamant le cap pour toute récompense de sa bravoure…

Les ridules agitées de la Mer du Nord ont vu bien des horreurs, corps gonflés par la noyade, bleuis par l’asphyxie, troués par un carreau d’arbalète reçu lors d’un abordage n’ayant pas tourné à leur avantage. Caisses au contenu moisi par l’humidité, éventrées par la coque fendante d’un navire, déversant blé et orge en granules boursouflés semés sur l’écume par un facétieux coup du sort. Rien de tel pour nourrir les poissons que les déjections quelconques des bâtiments voguant vent arrière dans le maigre canal de ces côtes rocheuses, peau d’orange, pelure de pomme de terre ou tabac à chiquer alimentent les étrangetés dissimulées dans les cavités aquatiques. Certains pêcheurs téméraires n’ont pas suffisamment froid aux yeux pour ne pas s’attaquer aux créatures les plus goûtues sous la surface, las de ne capter que les bancs d’aloses desquels les Marbrumiens ont bien assez de réserves à cette période printanière de l’année.

Ce jour, au fort d’une aube douce par sa température, parfaite pour frayer la poiscaille, d’autres débris dériveront jusque dans les filets des sardiniers de haute mer ; planches brisées en plusieurs points, échardes de toute taille, jusqu’à un chapeau en feutrine venu s’égarer entre les écailleux sautillants sur le pont d’un navire proche des côtes. À bien y regarder, d’autres vestiges forment un cheminement serpentant le long du littoral jusqu’à mener à la pointe de Ventfroid et plus à l’ouest encore. Les vagues auraient-elles ramené jusqu’aux ruines d’une vieille embarcation ? À en croire l’état du couvre-chef trouvé parmi la récolte du jour, il ne s’avère pas encore dévoré par l’humidité et les sédiments marins, ce qui trahirait un naufrage récent. Marin-pêcheur échoué sur les plages potentiellement infestées de Fangeux à cette petite heure du jour ? Manœuvre infortunée dans le détroit de l’ouest ?

☙ • ❧

Lambert ! Moucheur à tribord sur la hune de misaine !

L’arbalétrier posté sur la plateforme du second mât ne manque pas de tenter d’abattre son homologue d’un carreau qui fend le bois à ses côtés plutôt que son crâne exposé derrière sa cervelière de cuir, mais le surprend assez pour le faire chuter sauvagement dans la liesse en contrebas. La descente sera amortie par un bastingage protégeant la trappe des cales, et lui brisera le dos sans autre forme de procès. L’abordage sur deux fronts n’est pas un exercice auquel nous nous adonnons bien souvent, plus encore lorsque nous le subissons. Les deux ketches venus nous accoler de part et d’autres vomissent leur bordée de marins étrangers, et nous prennent en étau comme deux coquillages à leur rocher de fortune. Arbalètes, sabres, dagues et écus se confrontent sur le pont de la Manticore, tandis que nous tentons d’attirer l’un des équipages sur nous en nous rapprochant du suivant. L’échange est brutal, mais leurs deux cortèges valent au moins le nombre du nôtre, si bien que nous ne sommes pas en si mauvaise posture qu’il n’y paraîtrait.

Les torches de la routine nocturne sont encore embrasées aux quatre coins du brick aux voiles cramoisies, en référence au corps carminé mythique des manticores, créatures des légendes lointaines rapportées par mon ancêtre à la peau de bronze. Et le capharnaüm de hurlements et d’exclamations de se répercuter sur les falaises des comtés de Malemort et Ventfroid, se poussant l’un et l’autre à donner la mort et la soumission à l’ennemi. Parmi ces hommes, moi, Lazare de Malemort, capitaine de ce bâtiment majestueux, me devait me défendre aux côtés de mon quartier-maître des assauts répétés que ces sauvages des territoires hors de Morguestanc nous portent. Un coup de surin, une parade, la valse des lames nous fait zigzaguer, virevolter d’un côté ou de l’autre de nos attaquants afin de protéger la nuque de notre compagnon d’armes. L’éclat d’un carreau avait déjà fendu ma hanche droite, et mon poignet était douloureux de bloquer le tranchant de lourdes lames de longues minutes durant.

L’autoproclamé capitaine de chaloupe que nous avions envoyé quelques dizaines de minutes plus tôt ne devrait plus tarder à alerter Marbrume, si rien ne lui est arrivé en chemin…





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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyJeu 26 Mai 2022 - 17:20
Barral aimait particulièrement ces expéditions au long cours. Un brin d'inconscient flottait surement encore dans la tête de cette branche mal dégrossie qui avait encore beaucoup à apprendre sur le métier de marin et de pêcheur. Mais une chose était certaine, il aimait la mer et il n'était pas prêt de renoncer, n'en déplaise à son beau-père qui n'avait jamais voulu de lui comme apprenti, ici, à bord du Rieur le vieux capitaine lui avait donné sa chance. Et il ne comptait pas le décevoir.
Cela faisait déjà de longues semaines que le bateau avait quitté le port de Marbrume essuyant son lot de tempêtes et parfois de rencontres peu amicales. Le capitaine était un vieux de la vieille, sachant comme préserver la vie de son équipage quitte à devoir se séparer d'une bonne partie de leur pêche ou de leur provision. De même, nul besoin pour lui de cartes pour tracer sa route, tout était savamment mémorisé depuis des années dans sa caboche. S'il avait été seul à bord, nul doute qu'il aurait été en mer et loin des terres plus des trois-quarts de l'année, mais ses hommes d'équipage avaient femmes et enfants à terre.

Pour le jeune Trell, chacune de ces expéditions était synonyme de découverte, d'apprentissage, d'évasion et de liberté. A bord, il n'était plus qu'un membre d'équipage à part entière. Bien qu'étant le plus jeune, il avait sa place et son rôle. Et si les membres d'équipage le taquinaient, il avait fini par comprendre qu'ils en auraient fait de même avec n'importe quel autre jeune. Le capitaine veillait à la bonne cohésion de son petit monde n'hésitant pas à élever la voix lorsque cela était nécessaire. Ce qui n'était pas le cas à terre. Railler en permanence à cause de ses yeux, délaisser en partie par sa mère au profit de ses jeunes frères, le brun s'était trouvé livrer à lui-même. Il avait tenté de se crever un œil, sans grand succès, mais depuis il le cachait sous un bandeau. Les cicatrices parlant d'elles-mêmes, personne ne le questionnait depuis. Personne ne connaissait la vérité. Seul le capitaine le savait mais Barral l'avait supplié de ne rien dire.
Son métier lui plaisait. Le brun ne se plaignait jamais de la dureté des taches à accomplir qu'importe si tous les muscles de son corps étaient douloureux ou si ses mains le faisaient souffrir à cause des ampoules. Il s'était mis en tête de devenir le meilleur à ouvrir le poisson. La première fois, il s'en souvenait très bien, il avait failli y laisser sa main, trop presser, trop peu sur de ses gestes, à présent il avait le coup de main mais Léandre le devançait encore. Et pour cause, les années d'expériences et de pratique faisaient encore la différence. Le soir venu, Barral était bien content de retrouver sa couchette dans l'étroite cabine. Bien que les premières fois, il était resté les yeux grands ouverts terrorisé par la promiscuité, les ronflements et autres bruits de ses collègues.

Une main lui secoua fermement l'épaule. Un grognement lui répondit. Le brun dormait si bien bercé par le navire. Mais la relève du quart ne pouvait attendre. Il étira sa grande carcasse comme un chat, attrapa un morceau de pain du repas du soir et grimpa à l'air libre sur le pont. C'était le moment de la journée qu'il appréciait tout particulièrement. Voir le firmament du jour prendre son envol était un spectacle qui le laissait sans voix. S'il ne se trompait pas, le temps serait beau.
Glissant ses jambes dans le vide, à la proue, Barral se mit à observer l'horizon qui s'offrait à sa vue. Il savait que bientôt, leur bateau atteindrait la limite et qu'ils prendraient alors le chemin du retour. Anür s'était encore montrée généreuse avec eux. Il se promit de se rendre au temple dès qu'il serait rentré à terre.

*chtoc*

Un débris vint heurter la coque arrachant le jeune homme à sa rêverie. Il allait se faire tirer les oreilles s'il se faisait surprendre à somnoler alors qu'il était sensé veiller. Barral sursauta et se remit debout avant d'apercevoir le long morceau de bois disparaitre sur le côté. Il n'eut pas vraiment le temps de le suivre du regard que déjà un autre morceau vint se fracasser. Puis un autre. Il attrapa une longue perche qui servait d'ordinaire à remonter le filet pour tenter de piocher un des morceaux. Alors qu'il plongeait l'instrument vers l'eau, ce qu'il vit lui coupa le souffle. Partout des morceaux de bois flottés à la surface. Et pas seulement du bois.

- Capitaine ! se mit-il à beugler comme un débile. C'était peu probable qu'on l'entende. A moins que les coups répétés contre la coque, et le bruit de sa course sur le pont n'aient alertés les autres. Le brun déboula comme un fou dans la cabine continuant à brailler qu'il y avait des débris partout.

" Du calme, du calme, petit, assied-toi et raconte-nous ce que tu as vu. Les autres, tous à vos postes pour la manœuvre en moins de deux. "

Comment pouvait-il garder son calme ? Le brun, cependant, posa ses fesses sur le banc et respira longuement avant de décrire ce qu'il avait vu à son capitaine. Le vieux ne mit pas longtemps à comprendre. Et il ne laisserait pas d'éventuels survivants sans rien faire, peu importe s'il s'agissait d'ennemis. Il y avait toujours quelque chose à gagner à sauver un homme de l'eau.

" Ecoute-moi bien Barral."

Le capitaine lui avait donné ses ordres. Les deux hommes regagnèrent le pont où tout le monde s'affairait épiant avec attention le flot de débris que leur navire fendait. Le brun avait repris sa position sur la proue, non pas exactement sur la proue, mais sur le filet plus bas, plus près des flots. Dans un équilibre précaire, et il était bien le seul à pouvoir s'y loger de par sa corpulence, il ramassait tous les morceaux que le capitaine lui désignait. Le but étant de tenter d'identifier le navire fracasser. Quand un morceau humain fut attrapé le doute ne fut plus permis. Il y avait eu une escarmouche tout récemment. Barral détourna la tête. Trop sensible encore.

" Là-bas, capitaine, ça a bougé ! "

Et il pointa le doigt vers une embarcation, ou du moins ce qui avait du être une embarcation, car elle était à moitié éventrée, gisant accroché comme à un rocher, un homme y était cramponné avec l'énergie du désespoir. Cette fois, le brun n'écouta que son courage, sa folie aussi, et il sauta à l'eau s'étant ficeler avec un bout qu'on lui avait passé. S'il y avait une chose qu'il avait voulu maitriser avant de vraiment chercher un bâteau sur lequel s'embarquer c'était bien la natation. Pour se démarquer. Pour prouver sa détermination.
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyJeu 26 Mai 2022 - 21:53

Des renforts inattendus | Juin 1160

Les vestiges de la chaloupe flottent en nombre et viennent heurter la coque du navire de pêche comme autant de coups de couteau. Les doigts sectionnés d’un homme dansent comme de petits vers à la surface troublée de carmin, livides de s’être vidés de leur contenance putrescible, et ne manquent pas de soulever le cœur du jeune Trell, téméraire mais encore jeune face aux affres de la guerre navale et ses ruines sanguinolentes. Au loin, une carcasse inerte se veut presqu’avachie sur le flanc de la barque éventrée voguant encore assez pour l’extraire de moitié des flots à peine tièdes, ses mains gelées agrippant envers et contre tout le rebord de ce radeau de sauvetage faisant contre mauvaise fortune bon moyen de survie. Il faudra au jeune matelot de longues minutes de lutte à contre-courant pour parvenir aux abords chahutés de cette embarcation de misère. Sans doute rencontrera-t-il malgré lui le corps sans vie au regard vitreux d’un homme mal rasé dont les queues-de-rat noirâtres forment une corolle autour de sa tête immergée, et à qui il manque plusieurs phalanges.

Aux abords des débris habités, Barral contemplera l’homme qui s’y est réfugié et sa blessure au flanc, à en croire l’œil écarlate s’ouvrant sur le côté de sa chemise auparavant blanche et désormais translucide. Faible d’avoir perdu bien du sang, il marmonne à répétition des mots inintelligibles, et ne se montre pas d’une grande aide en venant à être remonté à bord du Rieur. Éreinté et frigorifié par un long séjour parmi les vagues écumeuses pour éviter soigneusement les littoraux parfois infestés de Fangeux, il ne sait que réitérer sans cesse une suite de mots soufflés du bout des lèvres.

Aide… Abordage… Ouest… Aide…

Sa stature suggère un homme d’armes, capable de se défendre contre l’adversaire laissé à gésir sur les flots auroraux. Le vêtement épais mais sans fioritures laisse entrevoir un travailleur plutôt qu’un chef de rang, et ses mains calleuses font déduire la même conclusion : un marin aguerri qui ne fait sans doute pas partie des officiers de son navire. Sa vilaine plaie semble due à un mauvais coup d’estoc, ou bien à l’arrachage sauvage des planches de sa barque venues y déposer quelques échardes de plus, et ne lui laisse pas grand espoir d’en réchapper sans soins portés immédiatement.

☙ • ❧

Je n’ai qu’une petite trentaine d’années encore, rendu comte quelques annés plus tôt au décès précipité d’un père rompu à l’effort de guerre et à la navigation en eaux troubles. Et la Trinité sait qu’aujourd’hui, nos eaux le sont. Ce brick, ainsi que sa sœur la Deiva, ont été partie intégrante de mes classes d’armes et de l’enseignement familial, et ce jour, en cette aube naissante, je pouvais risquer d’y perdre non seulement la vie, mais aussi cet héritage naval. La bataille fait encore rage, et une majeure partie de nos forces y sont encore engagées. Le croisement du fer tinte dans le corridor rocheux du canal menant au détroit, tandis que des cris vont et viennent de part et d’autre des bastingages accolés. L’on grimpe aux galhaubans, saute de pont en pont, et parfois chute par dessus bord, touché par un cruel destin et un sabre en travers du torse. Alentour, les cadavres forment une mare stagnante d’horreurs éventrées, reposant paisiblement dans l’ondée de leur dernier souffle.

DeBréhant, couvrez-moi !

Je repère sur mon propre pont l’approche de ce qui semble être un officier du navire accosté à tribord, et m’enfonce dans la mêlée aux côtés de mon second, bretteur de renom ayant su maintes fois faire ses preuves. Ma blessure suinte, irrigue mes tempes d’une douleur sourde, mais l’adrénaline gonfle mes veines d’une vigueur renouvelée alors que je me jette, main-gauche brandie — ironie du sort, en main droite — afin de fondre sur mon ennemi…



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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMar 31 Mai 2022 - 20:03
Sur le coup, le brun n'avait pas réalisé, ou plutôt sa tête avait fait semblant de ne pas voir les horreurs qui l'entouraient. Il devait atteindre ce naufragé, lui porter secours. Un homme ne pouvait survivre éternellement sur un demi-morceau de chaloupe. Ce n'est que lorsqu'il arriva près des restes de l'embarcation que tous les détails lui sautèrent à la figure. La main mutilée, les yeux vitreux du mort, et la tache pourpre qui souillait la chemise du rescapé. Survivant pour combien de temps encore d'ailleurs ? C'était déjà beaucoup pour des yeux trop jeunes. Certes il avait déjà vu du sang, le sien notamment, se faisant assez souvent passé à tabac, la vie au Goulot avait aussi son lot d'horreur, mais ce n'était rien comparable aux dégâts d'un abordage.

Les lèvres de l'homme bougeaient, signe qu'il était toujours en vie, murmurant une psalmodie sans fin. Le bruit des vagues couvrait en partie cette supplique. Barral du, malgré ses bonnes oreilles, se rapprocher au plus près pour discerner distinctement les quatre mots qu'il répétait inlassablement. Il sentit aussi sa main se refermer sur son avant-bras avec force.

" Doucement. Je suis là pour te sortir de l'eau. Courage. "

Que pouvait-il lui dire d'autre ? Pas grand chose hélas. Les minutes étaient précieuses. Il n'avait pas le temps de s'éterniser en discours interminable sachant qu'en temps normal, le brun ne lui aurait probablement pas dit un seul mot à moins d'en avoir besoin. Avec adresse, il se détacha de la corde et la passa autour de la taille de l'homme avant de tirer un coup sec dessus pour avertir ses camarades qu'ils pouvaient l'aider à revenir à bord avec le naufragé.
Après avoir bu un certain nombre de fois la tasse, le brun ne fut pas mécontent de retrouver le plancher du pont. Epuisé. Trempé. Il resta à genoux de longues minutes à reprendre son souffle et ses esprits. C'est alors qu'il prit conscient que ses vêtements étaient imbibés eux aussi des vestiges poisseux du combat. Et s'en fut trop, pris d'un haut-le-cœur, il dégobilla le peu qu'il avait dans l'estomac.

" Leandre occupe-toi du petit "

Pendant qu'on lui donnait à boire et lui laisser le temps de se remettre de ses émotions, le capitaine examina le survivant. Le bougre avait besoin de soin. Et même si le laisser ainsi sur le pont ne lui plaisait pas, c'était l'endroit qui disposait de la meilleur luminosité. Le capitaine et son second allèrent s'isoler pour discuter. Barral revint sur le pont se tenant un peu à l'écart mais bien vite se fut sa curiosité qui l'emporta. Du moment que ce n'était pas lui qui mettait ses doigts dans la plaie pour en sortir les échardes. A moins que...

" J'vais pas y arriver " glapit-il quand il entendit son nom. C'était une blague d'un bien mauvais gout que de lui demande de faire ça. C'était bien sa veine ça. Comme s'il avait des tonnes de vêtements de rechange.

- Aller Trell, tu te débrouille bien avec la poiscaille, c'est à peu près pareil
- T'es jeune, t'as encore de bon yeux
- Je t'ai vu réparer les filets, t'es habile avec tes mains.


De telles éloges ne pouvaient que l'encourager et le pousser à se dépasser car il y avait bien une chose qu'il voulait à tout prix éviter c'était les décevoir. Il s'appliquait la plupart du temps dans toutes les taches qu'on lui confiait même si c'était dur ou qu'il n'y connaissait rien. Pourtant c'était vrai, ils avaient raison. Ca n'était pas plus compliqué que de vider un poisson. Seulement, il avait la pétoche. Peur de se rater. Peur d'aggraver la blessure de cet homme. Peur de ce qui pourrait lui arriver ensuite. Une grande claque dans le dos acheva de le propulser sur le devant la scène.

********

" Ecoutez-moi tous. Après en avoir discuter avec le second, j'ai pris la décision de nous porter vers les lieux du combat. Nous ne sommes pas équipés pour nous battre mais je connais suffisamment bien mon navire pour savoir de quoi il est capable. Armez les harpons et préparez-vous. Si des marins sont aux prises avec des pirates et que nous pouvons les aider, nous devons tenter de le faire. Petit, tu vas rester bien sagement veiller sur notre hôte. "
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMer 1 Juin 2022 - 12:50

Des renforts inattendus | Juin 1160

Le marin, bien trop affaibli par la plaie suintante de flots rubescents dégoulinant contre son flanc, expire un souffle timide. Il peine, tant par l’effort fourni afin de rejoindre le pont et s’y allonger que par la charcuterie en cours dans sa chair alors que les pêcheurs s’essaient à le libérer des épines de bois insinuées dans son corps. De temps à autres, dans son délire balbutiant, l’homme blessé élève un bras mou vers tribord, où que cela puisse diriger les regards, tout en marmonnant un incompréhensible fatras de mots semblables à ceux qu’il répétait déjà lorsque secouru. Pointait-il seulement la bonne direction, mais il était certain qu’une forme d’urgence harcelait ses pensées désaccordées d’un délire de mort imminente. Le pauvre hère grelottait, gémissait de douleur, et il était ardu de déterminer s’il allait pouvoir survivre à telle blessure sans être aussitôt amené au port de Marbrume et pris en charge par un quelconque guérisseur ou prêtre rompu à l’art de la médecine de guerre.

☙ • ❧

Ma course en direction du gaillard d’avant s’achève sur un freinage catastrophé quand le sabre adverse s’en vient à l’encontre du mien, qui le heurte d’une force phénoménale dans un crissement d’acier désagréable. L’officier avait été alerté par l’un de ses hommes, sans doute, de ma charge assassine tandis que je progressais parmi les combattants bien occupés déjà avec leurs propres adversaires. Le choc, résonnant encore en répliques sismiques dans mon bras gauche, ne manque pas de réveiller la plaie dans mon dos tel un aiguillon électrique. L’autre partie n’était guère plus en forme, son épaule entamée par un mauvais coup d’épée ayant imbibé sa chemise grisâtre d’une tâche carminée. S’ensuit alors un affrontement pour le moins isolé de la cohue du pont principal, entouré seulement de barils et caisses, ouverts ou éventrés par les carreaux d’arbalète ayant fusé quelques minutes plus tôt. L’ennemi n’était pas ce que je m’attendais à apercevoir ; richement vêtu, ayant opté pour un rouge écarlate plutôt que notre vert familial, les ornements dorés de sa brigandine juraient avec les arabesques argentées de ma cotte. Nous étions fort heureusement reconnaissables, mais aussi bien malencontreusement différenciables. Cependant, si je le savais étranger au duché de Morguestanc, je ne pouvais que supposer aussi sa potentielle ascendance nobiliaire dans sa façon de manier l’arme. Que faisait-il au milieu de cet équipage de coupe-gorges, était-ce une ruse de leur part ?

Ses coéquipiers m’avaient tout l’air de brigands des fonds marins, vêtus majoritairement de teintes sombres, à moins que le sang n’ait déjà trop coulé jusqu’à couvrir leurs chemises d’un pétrole noirâtre en cette aube qui se lève à la lueur de nos torches. Aucun pavillon ne flottait à la cime de leur mât, et je regrettais ne pas savoir à qui j’avais affaire, car celui du comté de Malemort et Malerive flottait haut dans ce canal. Mais je n’avais finalement que peu l’occasion de m’épancher en songes et supputations que nous croisions le fer. Évitant de peu son coup d’estoc embrochant un pan de ma cotte de coton noir, je cherche à repousser sa lame en la parant de ma main-gauche et à le tailler en oblique. Mais le bougre est plein de ressource, et oppose à mon sabre une petite hachette pour la bloquer.

Dans mon dos, le combat fait rage. Les hurlements des blessés, les cris des hommes passant par dessus bord, l’impact des carreaux depuis les huniers, d’autres individus remontant les échelles de chaque bordé pour mieux rejoindre de nouveau le champ de bataille, je n’avais que peu conscience à cet instant de qui avait l’avantage, bien que je soupçonne, dans mon orgueil, que nous l’ayons. Mes officiers sont des hommes aguerris au combat, capables de prouesses stratégiques les qualifiant pour ce type d’opération, et je leur faisais toute confiance pour nous dépêtrer de cette embuscade. Bien sûr, mon propre rôle jouait sur nos chances de nous tirer de ce faux pas, en particulier en l’absence de renforts qui ne tardaient déjà que trop… car les deux navires misérablement accrochés au nôtre se devaient, un jour ou l'autre, de couler par le fond.



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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyJeu 2 Juin 2022 - 22:32
Barral fit de son mieux pour extraire les longues échardes fichées dans la chair du survivant. C'était surprenant de le voir si concentré alors qu'une dizaine de minutes auparavant il était en train de rendre tripes et boyaux après avoir vu l'horreur au milieu des flots. Il prenait sur lui. La vie de cet homme était entre ses mains, du moins pour cette opération là, car ensuite sa survie ne dépendrait que de sa force, de sa résistance et de sa capacité à guérir. Il l'avait recousu grossièrement comme il savait faire sur les filets, un vrai chirurgien aurait sans doute hurler, mais c'était tout ce qu'il pouvait faire. Il n'était ni médecin, ni guérisseur.

Deux marins se chargèrent de descendre le rescapé dans la cabine, inutile de le laisser sur le pont avec ce qui allait suivre, on l'installa sur une couchette libre et le brun resta, seul, à son chevet comme on lui avait dit. Qui était-il ? Contre qui se battait-il ? Une multitude de questions qui restait sans réponse pour le jeune marin. Le blessé divagait à n'en plus finir. Joyeuse navigation en perspective. Voilà qu'il devenait garde-malade par la force des choses. Avec un linge humide, il epongeait son front brûlant. Il était même allé jusqu'à prendre sa couverture, il se voyait mal se servir chez un de ses camarades, pour tenter de lui apporter un peu de chaleur.

" J'ai fait ce que j'ai pu pour ta blessure. A toi de jouer maintenant. Je peux te donner un peu de rhum si tu veux. "

Une dernière solution consisterait à s'allonger contre lui pour lui donner sa propre chaleur mais barral ne le ferait qu'en ultime recours car c'était jouer avec des penchants qu'il voulait à tout prix taire.

Pendant ce temps-là sur le pont et dans la voilure, c'était un véritable branle-bas de combat. Tous les membres d'équipage s'activaient afin de faire donner au bateau de pêche sa vitesse maximale. Chacun avait pris soin de se munir de son couteau à poisson. Le cuistot attitré avait même sorti son attirail à découper. Aucun n'était des combattants aguerris mais ces armes là, ils les connaissaient parfaitement. Le capitaine fit hisser le drapeau de Marbrume bien en vue en haut du mât pour que tous sache d'où ils venaient. C'était bien mieux que leur simple étendard de pêcheur.

Soudain au détour d'un éperon rocheux fendant les eaux à toute vitesse, le Rieur arriva comme un cheveux sur la soupe au beau milieu de la bataille. Barral, assis sur un tabouret au chevet du blessé, s'était adossé à la coque et il percevait les vagues s'écraser contre le bois.
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyVen 3 Juin 2022 - 13:52

Des renforts inattendus | Juin 1160

Dès l’instant où l’aiguille épaisse perce la chair humide du marin, ce dernier tourne de l’œil et s’effondre pleinement à même les planches usées du pont. La douleur intense le foudroie, le cloue aussitôt au plancher lavé par les seaux d’eau des pêcheurs soigneux de ne pas laisser d’humeur humaine s’imprimer sur leur sol sacré. La plaie est nette, probablement percée par la pointe d’un poignard aiguisé, si bien que l’ouvrage de suture ne se montre pas plus compliqué que le fait de rapiécer une déchirure dans un cuir encore souple. Le fait que le patient malgré lui soit désormais inerte ne facilitait que davantage la tâche du vaillant chirurgien d’appoint, qui put nouer le fil et sécuriser ce flanc dégradé. Tandis que les marins échangeaient sur la manœuvre à suivre avec cet étranger mal en point à bord, ledit malade s’éveillait tout juste de sa perte de connaissance passagère sans une plainte, le corps encore ensuqué par cette anesthésie mensongère. La tête prise en étau dans les griffes d’une fièvre d’épuisement commençant à poindre, trempé par sa baignade ou en nage sans distinction, il balbutiait, ruminait, psalmodiait des murmures inaudibles et sans doute incompréhensibles.

L’on se charge alors de l’amener sur une couchette bien spartiate, dont la paillasse dure était un supplice pour les omoplates éreintées, mais plus que l’assise, c’est le trajet jusqu’à cette cabine un brin plus chaude qui lui fut pénible. La douleur réveillée de son flanc recousu n’a de cesse de le rappeler à l’ordre, geignant, pleurant même, sans doute tétanisé à l’idée de mourir sans avoir accompli son devoir. Le linge froid s’en venant apaiser son front brûlant déchargeait un flot de frissons désagréables le long de son enveloppe meurtrie, bien qu’il puisse apprécier la fraîcheur bienvenue sur le tison rouge entre ses tempes. La couverture venue réchauffer ses frémissements tantôt terrorisés tantôt malades était d’un pâle réconfort, et s’il avait pu aisément s’exprimer, sans doute aurait-il remercié son serviteur, le jeune Trell ayant pris bien des risques pour le tirer de ce mauvais pas. Ses mots, cependant, recevront une réponse négative du marin, que l’on aurait pu s’attendre à préférer la gnôle à la souffrance en ce moment de perdition. Une main tremblante quittait le couvert de son plaid épais pour manifester un geste obscur, peut-être la volonté de ne pas passer l’arme à gauche seul.

À la lueur d’une lanterne, il devait tout juste s’approcher de la fin de sa vingtaine d’années, une mâchoire anguleuse et carrée, une barbiche de trois jours et une crinière brune mi-longue jetée en langues serpentines autour de sa tête, une gorgone bien inoffensive. La pâleur de son teint après cette funeste péripétie ravivait l’éclat rougeâtre cernant ses yeux épuisés, dont les longs cils courbes se confondaient lorsque ses paupières se plissaient d’inconfort.

☙ • ❧

Pris dans le feu du combat sur la proue de la Manticore, je n’avais pu remarquer l’étrange bâtiment franchissant le cap de Ventfroid et s’approchant de notre échauffourée par la poupe de nos navires agglutinés par un abordage en belle. De si loin, alors même que l’astre du jour forçait son passage par delà l’horizon pour embraser le firmament de ses rais incendiaires, une vigie n’aurait pu déceler la nature du pavillon brandi à la cime de leur mât. Cependant, l’approche d’un navire qu’ils n’attendaient pas pousse l’une des vigies ennemies à alerter ses compatriotes.

Ennemi par la poupe !

L’homme s’égosillait bien que ses comparses assoiffés de conquête ne semblaient pas tous réagir à son appel, brûlants de rage et d’avidité. Sur le bâtiment arrimé à tribord, quelques hommes défont tant bien que mal les grappins les retenant à nous, arrachant les échardes du bastingage dans la manœuvre. Peu sont ceux à sauter sur le pont adverse, ou même à réaliser que leur navire quittait les lieux sans eux. Car les voiles de se gonfler une fois déployée, profitant d’un vent arrière pour dépasser notre proue et fuir par l’ouest. La confusion régnait parmi l’équipage restant, se retrouvant en sous-nombre, mais nos propres blessés étaient nombreux. Parfois suffisamment pour ne plus pouvoir tenir leur sabre assez haut ou parer une attaque.

L’officier que j’affrontais encore se moquait éperdument de cette fuite précipitée, pestant contre la lâcheté des matelots ayant battu en retraite si facilement devant l’approche d’un ennemi qui, de plus près, ne semblait pas si menaçant. Lui n’avait guère l’intention d’abandonner, et ses coups s’en faisaient plus vils à mesure que je les repoussais, d’une façon ou d’une autre. Je sentais néanmoins que je m’épuisais, la plaie me lézardant le dos jetait ses vomissements chauds le long de mon échine, imbibait ma cotte. Un baril éventré transportant du sel depuis d’autres rivages du duché attira mon attention alors que je l’effleurais dans notre ronde, et quand bien même l’honneur prévalait, ma vie était autrement plus précieuse que celle de ce parvenu. M’emparant d’une poignée de cristaux blancs, je la jetai au visage gravé d’aigreur du belligérant qui recula d’une traite, les yeux fermement clos par les grains s’étant introduits sous ses paupières. Un grognement. Il ne me fallait que cela pour conclure notre échange d’une taille de sabre fendant son torse de part et d’autre, ajoutant à cela un brusque coup d’épaule destiné à le faire passer par dessus bord. Je captais d’une oreille le son claquant d’un corps s’écrasant de face à la surface des flots, et bien peu de pataugeage…

Des alliés ! me hurlait un jeune matelot, dont l’engouement venait de prendre un tout autre tournant à l’approche des renforts.

Restait à bord une vingtaine de combattants de chaque camp, l’autre goélette abandonnée par son moucheur et sa vigie pour mieux rejoindre leurs forces en difficulté. Nous tenions encore, opiniâtres bien qu’épuisés, mais pour combien de temps ? Les corps étaient dispersés tant sur le tillac que sous le tirant d’eau, enjambés parfois par les bretteurs encore debout à lutter pour leur gagne-pain ou bien leur liberté, ballottant de çà de là contre la coque dans une percussion glaçante.




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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyVen 10 Juin 2022 - 19:24
Le rescapé refusa le rhum. Ce n'était pas commun qu'un homme refuse un peu d'alcool. Le brun l'avait proposé sans arrière pensée. Lui-même n'étant pas un grand buveur. Du moins, la picole ne l'avait pas encore atteint. Et s'il se joignait de temps à autre à quelques virées en taverne avec l'équipage ce n'était que pour mieux s'intégrer.

Barral était tout de même un peu frustré tout de même de ne pas participer à la manœuvre. Même s'il n'avait rien d'un combattant, - il ne le deviendrait probablement jamais, l'avenir lui prouvera le contraire, il détestait la violence en général. Il était tout à fait capable de donner un coup de main pour hisser une voile ou grimper dans le mat. Sur ce point là, d'ailleurs, son poids plume et sa taille étaient de vrai atout. Mais il ne remit pas en question l'ordre du capitaine.

" Tu viens d'où ? Parce qu'on était pas certain de naviguer jusqu'ici, encore moins de croiser du monde, seulement on a suivi un banc de poissons plutôt rares et gouteux..."

Barral continuait de tenter de le soulager avec le linge humide. Il avait saisi la main tendue constatant leur différence. Ses petits bobos à lui n'étaient rien comparés aux cals qu'il sentait. Il avait encore les mains jeunes même si elles commençaient à être marquées par ses trois ou quatre années de navigation. Il faisait la conversation ne sachant pas s'il obtiendrait une réponse.

Sur le pont, on était prêt. Le second put constater que l'une des goélettes semblait prendre la fuite. Sa jumelle restant accroché à l'infortuné navire qui portait les couleurs du Royaume. Il était inutile de la poursuivre. Le Rieur se ferait distancer sans peine malgré sa pointe de vitesse non-négligeable pour un navire de pêche. Le capitaine se mit à brailler des ordres pour la manœuvre. Il avait réfléchi et il était hors de question pour lui que son bateau se fasse trop amoché ou qu'il perde bêtement des hommes dans un assaut frontal avec les assaillants. Petit joueur surement, mais bien conscient que son équipage n'était pas entrainé au combat. C'est prudemment qu'il se rangea sur le bord laissée libre. Bien entendu, si le fuyard revenait, cela ferait une belle tenaille...

- Allez les gars, bonne chance !

Ils avaient l'effet de surprise encore pour quelques instants. A eux d'en profiter pour embêter un peu les pirates. Armés de ce qu'ils avaient sous la main , c'est à dire peu de chose, couteau à éviscérer, morceau de filets usagés tels des gladiateurs, ils sautèrent sur le pont du navire allié en restant à peu près groupé. L'objectif étant de neutraliser quelques pirates ou d'aider des blessés à changer de bord.
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptySam 11 Juin 2022 - 18:58

Des renforts inattendus | Juin 1160

Pour l’avoir observé de plus près que quiconque, le jeune pêcheur resté à son chevet aurait pu remarquer la richesse de sa boucle de ceinture dont l’argent travaillé suggère un minutieux travail d’orfèvre, l’apparente propreté de sa tunique blanche dont les coutures précautionneuses trahissent un savoir-faire qui se paie, ses fourreaux d’armes eux-mêmes respirent un niveau de vie autrement différent des habituels pêcheurs de Marbrume ou pirates étrangers. S’il devait appartenir à une force quelconque, sans doute aurait-elle une puissance confortable pour assurer à ses hommes un salaire de ce montant. Toutefois, cela n’empêchait guère le rescapé de souffrir le martyr, n’ayant pas davantage été protégé d’un trépas encore incertain par la lourdeur de sa bourse.

Et lorsque son protecteur s’en vient lui demander l’origine de son voyage, l’endroit d’où il provient, le blessé entrouvre ses lèvres sèches et encore bleuies un instant, mais ne parvient qu’à exfiltrer un souffle rauque. Sa paume moite éprouve de moins en moins de résistance à tenir celle de Barral, faible. Le sursaut d’énergie qu’un linge frais appliqué sur son front lui inspire obtient toutefois quelques résultats probants, en un murmure tout juste expiré.

Ouest… Ouest…

Former une phrase entière n’avait aucune chance d’aboutir.

☙ • ❧

La goélette ennemie creusait la distance avec les deux navires accotés, quittant la mer du nord pour franchir le détroit en sens inverse et s’échapper au plus loin des renforts en manœuvre dans leur direction. À l’approche du bâtiment des pêcheurs de Marbrume, le deux-mâts hostile avait déjà franchi le cap et seul sa vigie était encore ostensiblement dressée par delà les rocs noirs de la côte, jusqu’à disparaître totalement.

Où sont les renforts que nous attendions ?!

Hurlé-je aux tout frais débarqués sur mon pont, conscient qu’il ne s’agissait ni des forces que nous étions partis demander, ni même de forces au sens strict, puisqu’ils sautaient par delà le bastingage armés de filets et de coutelas. Le sentiment qui anime mes tripes à cet instant crucial est une savante alchimie de pitié et d’admiration. De pitié tant pour mes hommes aux prises avec de féroces combattants qui ne verront pas leur avantage décuplé que pour ces arrivistes et leurs maigres défenses s’apprêtant à se mêler à la cohue. D’admiration car il fallait bien de la bravoure pour se jeter corps et âme dans un combat mortel avec bien peu d’équipement pour faire une réelle différence. Tant et si bien que je leur fais signe d’aborder le pont de la Manticore, et de prêter assistance à mes plus jeunes matelots au centre du tillac, à la croisée de ma cabine et du grand-mât, et dont les réflexes martiaux ne sont pas encore assez aiguisés pour mener la lutte bien longtemps.

Car trois pirates leur faisaient face, majoritairement armés d’épées et couteaux, dont les tenues de cuir étaient détrempées par un passage sous la surface des flots, et ces jeunes hommes étaient d’ores et déjà en mauvaise posture, blessés au bras ou à la cuisse selon les combats ayant déjà été disputés.



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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyJeu 23 Juin 2022 - 11:31
" On a récupérer un de vos hommes. Il est vivant mais assez mal en point. "

Voilà tout était dit. Le capitaine du Rieur avait répondu à son homologue. A présent, le pont de ce navire devait être nettoyé de la vermine qui s'y trouvait.

" On n'est pas soldats ni guerriers. On fera ce qu'on peut. "

Des pertes, le brave savait qu'il ne pourrait les éviter mais ils s'étaient dérouté ce n'était pas pour tourner les talons maintenant. Ses gars avaient accepté de prendre se risque.

" Tenez bon les jeunes !"

Si la plupart portait des traces de blessures, ils avaient leur jeunesse pour compenser leur manque d'expérience. Le rapport de force s'inversa soudainement. Et même si les pêcheurs n'avaient que peu d'expérience, ils avaient de l'énergie à revendre. En ramassant quelques armes qui trainaient sur le pont abandonnées par leur ancien propriétaire, leur allure changea. Seraient-ils capable de tuer ? La question ne se posait pas vraiment. C'était leur vie ou celle des pirates. Et dans ces cas là, on ne réfléchissait pas beaucoup. Ils étaient bien résolus à aider cet équipage en détresse !


A bord du Rieur, on ne pouvait pas dire que le blessé était tiré d'affaire. Le brun avait beau multiplié les compresses d'eau, il sentait bien que les forces de l'homme déclinées au fil des minutes. Vivrait-il encore longtemps pour revoir son capitaine ? Barral ne savait plus quoi faire. Et surtout il savait très bien la raison de sa présence dans le ventre du Rieur. Tous le monde à bord savait qu'il ne se battait pas. Et qu'il préférait se faire rouer de coup et attendre que le déluge passe avant de prendre la fuite. Seulement, cette fois, il y aurait été à la baston, la peur au ventre, mais il aurait honoré son devoir envers ses camarades et la requête du navire abordé.

Se levant, il se dirigea vers le petit autel situé à côté de la couchette du capitaine et il ramassa les trois statuettes représentant les Divinités. Il pensait peut-être que le survivant aimerait adressé quelques mots aux Trois si jamais sa fin était proche. Il se rassit au bord du lit posant avec précaution les statuettes à la vue du malade.

" Veux tu prier ? Quand j'étais petit j'adorais me cacher dans le grand temple de Marbrume. Ma mère m'a souvent raconté qu'elle me trouvait alors dormant à poings fermés au pied d'Anur."
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyVen 24 Juin 2022 - 18:10

Des renforts inattendus | Juin 1160

Ainsi, l’éclaireur que nous avions envoyé avait bel et bien échoué sa mission, intercepté ou bien écrasé contre les arêtes coupantes du littoral. Et tristement, c’était une embarcation de marins inaptes au combat qui débarquait sur notre pont et s’armait de sabres et de surins dont l’usage n’était guère réservé à leur catégorie. Je craignais qu’ils ne blessent un peu plus l’un de mes matelots, bien qu’il aurait suffi de savoir traire une brebis ou évider une truite pour comprendre qui de nos deux camps s’affrontait et à qui prêter assistance. Devant cette aide toutefois providentielle, l’un des trois pirates sous le nez des pêcheurs et de leur capitaine empreint de courage se retourna vers eux. Face à leur inexpérience et leur façon de porter une épée, l’ennemi vit une opportunité de se débarrasser des renforts inattendus. C’est sur un des jeunots qu’il se rua, brandissant sa propre lame courbe en l’air pour s’en aller l’attaquer avidement et le faire rejoindre, peut-être la ronde des cadavres exsangues dans leurs flots aux teintes crépusculaires. Les deux autres intrus ne s’occupaient guère de ces nouveaux venus et poursuivirent leur marathon de coups donnés et reçus auprès des mathurins capables de temporiser leur assaut. Ailleurs sur le pont, la même cohue, les mêmes échanges d’acier et de cris, les mêmes exclamations d’un côté ou de l’autre, et cette quarantaine de guerriers de tenir bon.

Ne vous séparez pas et attaquez conjointement l’ennemi !

Me devais-je de leur conseiller alors que je perçus deux pirates aborder le navire de pêche en prenant appui d’une botte sur mon bastingage pour, d’un saut, rejoindre le pont voisin. Aussitôt, je réalisai : le capitaine de cette bicoque flottante avait récupéré à son bord mon éclaireur, en si mauvais point qu’il n’était assurément plus en mesure de se battre. Ce que je m’apprêtais à faire était usuellement contraire à l’éthique de la marine de guerre, toutefois, il était aussi de mon devoir de gardien de ce bâtiment de protéger mes soldats, quitte à abandonner mon propre tillac l’espace d’un combat.

DeBréhant, ne me guettez pas et repoussez-moi ces forbans !
Oïl dea, Capitaine !

Sur cet accord absolu, je coupai le pont dans sa largeur pour prendre suffisamment d’élan et moi aussi user de mon garde-fou comme tremplin afin d’atterrir sur le gaillard du bateau de pêche…

☙ • ❧

Au sein des cales du Rieur, l’atmosphère était toute autre. Si les rumeurs de l’affrontement filtraient à travers les planches du tillac, il était plutôt sûr et sécuritaire de se trouver sous cette canopée craquelante au roulis amoindri par un amarrage à la Manticore. Le matelot affaibli peinait de plus en plus à respirer, et l’adrénaline retombée lui faisait souffrir un martyr de gémissements, la suture barbare de son flanc irritant sa peau comme une scie rouillée écorcherait un tronc d’arbre. Les gouttes fraîches s’écrasant sur son front et s’insinuant au pavillon de ses oreilles ou bien encore dans sa nuque s’évaporaient aussi sûrement qu’elles ne les avaient abordées depuis le chiffon mouillé qui lui était passé sur le visage afin de faire chuter la fièvre, ou du moins la maintenir à flot. Ses tremblements brutaux ressemblaient parfois à un élan épileptique, l’humidité de la cale aggravant sa condition malvenue, dents serrées et yeux bouffis par l’afflux de sang. Lorsque le jeune Barral s’éloigna, la main pendante du blessé s’agita, comme pour le rattraper, en vain. C’est lorsque le pêcheur revint avec quelques statuettes divines qu’il essaima sur une caisse de matériel à portée de vue de l’agonisant que celui-ci se mit à fondre en larmes brûlantes, tétanisé à l’idée de mourir si jeune, si bêtement, si vite.

Il acquiesce, désespéré, pour toute réponse à la question et l’anecdote de Barral, fermant les yeux pour amorcer ses souhaits déconstruits dans un mutisme religieux. Ses hoquets de terreur viscérale toutefois prirent fin lorsque deux chocs s’affalèrent sur le pont du Rieur. Ce n’était pas le courage qui soudain s’insufflait en ses veines, mais la crainte plus vicieuse encore d’être pris d’assaut et de n’avoir plus aucun rempart défensif pour le protéger d’un trépas certain. Ni lui, ni son confrère à son chevet. Un autre suivit, tout aussi lourd, alors que couraient sur la coursive menant aux cales des pas de hyènes, suivis de ceux d’un lion. Des interjections fusèrent au-dessus d’eux, lorsque la bête les poursuivant les interpela et qu’une autre série de rumeurs résonnantes s’en allèrent le contester dans des crissements métalliques. En contrebas, le marin blessé remua hasardeusement sa main pour tenter d’agripper la manche de Barral, paniqué. Ses yeux embués et exorbités par la peur invitaient le jeune pêcheur à se cacher, où que ce soit, afin de préserver sa vie au risque de condamner la sienne.

V… Va… !



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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMar 5 Juil 2022 - 13:38
Les pirates, s'ils avaient été surpris durant une fraction de seconde, ne se trompaient pas vraiment sur leurs véritables adversaires. Leur cible restait les jeunes membres d'équipage . Mais c'était sans compter les marins du Rieur. Eux ne faisaient surement pas le poids mais ensemble ils pouvaient tout de même arriver à les gêner dans leur entreprise. D'un accord commun, ils envoyèrent leur filet sur un des pirates pour l'entraver avant de le piquer au travers les mailles. Pas très réglementaire, mais pour faire le ménage, et rétablir l'ordre à bord, tous les coups étaient permis. Les marins répèteraient la technique autant de fois que nécessaire tout en restant groupé.

A bord du Rieur, c'était une autre histoire qui se jouait. Barral avait clairement perçu les trois chocs sourds sur le pont. Ce qui signifiait qu'il allait avoir de la visite. Le tableau n'était pas vraiment à son avantage : il se trouvait en compagnie d'un blessé grave et lui-même était tout sauf un combattant. Pétrifié et apeuré. Voilà ce qu'il était. Il se voyait déjà éventré comme un poisson parce que là il ne serait surement pas question de simples coups de poings ou de bottes à surmonter. Et le brun savait aussi que s'il restait dans la cabine, il n'avait aucune échappatoire. Enfin pas exactement.

" Et toi ? " glapit-il, comprenant que s'il partait, le survivant ne ferait pas long feu face à ce qui se présenterait. Il pouvait l'emmener avec lui, mais alors, il les condamnait tous les deux car le brun malgré toute la bonne volonté du monde ne pourrait trainer l'homme bien longtemps. Avisant un long couteau sur la table, il le glissa sous les draps du blessé. " Je vais les faire tourné en rond, après tout c'est ma maison. " Cela pouvait paraitre comme de l'inconscience de la part d'une si jeune personne, mais on pouvait sentir la détermination du brun. Ce navire, il l'habitait toute l'année même lors des jours sans pêche. Adossé, à la paroi, il ferma les yeux, essayant de calmer un peu les battements de son cœur pour réfléchir et il visualisa chaque objet d'après ses derniers souvenirs.

Le brun avait découvert des caches lors de ses explorations. Le capitaine du Rieur n'avait pas toujours été un simple pêcheur. Dans sa jeunesse, il avait fait des trafics en tout genre. Alors le bateau possédait quelques petites caches pour planquer la marchandise. Et l'une d'elles se trouvait justement ici derrière un panneau de la couche du capitaine. L'accès était tout juste assez large pour lui permettre de passer, un homme tout en muscle y serait probablement resté coincé. L'autre trappe débouché sur l'extérieur, par chance, sur le flanc du bateau qui n'était pas contre celui du navire secouru. Barral guetta quelques secondes avant de se lancer à l'assaut de la paroi. Il n'avait pas vraiment le choix. L'effort était intense mais il savait qu'il ne pouvait pas rebrousser chemin. A moins bien entendu de se terrer dans la cache et d'attendre.
L'air marin lui foutait le visage. Il était dans son élément. Sans bruit, il se hissa à l'avant et se dissimula derrière des tonneaux. Rien en vue mais il pouvait percevoir leur pas lourds. Comme un singe, il grimpa dans la voilure. La chute lui serait fatale, mais peut-être préférable comparé à ce qui pouvait l'attendre s'il se faisait prendre en bas. A califourchon, il observa les trois petits points qui se suivaient, non, qui se poursuivaient, sur le pont du Rieur. Ce qui voulait dire qu'un des hommes était de son côté. A lui de les faire tourner en bourrique à présent. Ils pouvaient bien tenter de grimper ! Avec son couteau, il entreprit de couper un cordage. C'était un sacrilège, mais le brun savait aussi que ce n'était pas un élément vital pour leur bateau, lorsque le cordage chuterait il ferait un bruit assourdissant et surtout il risquait de blesser.

" Eh oh ! Je suis là ! " leur cria-t-il de son perchoir, et sa main gauche se saisit d'un autre cordage prêt à changer de position au cas où. Il lui serait même possible, avec un peu d'élan, de se retrouver sur un des mats de l'autre navire.
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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMer 6 Juil 2022 - 1:12

Des renforts inattendus | Juin 1160

Et les pêcheurs, attentifs aux ordres donnés et conscients de l’avantage de leur matériel malgré sa létalité discutable eurent un excellent réflexe ; entraver un pirate de la sorte sans lui laisser l’option de s’éloigner de leur zone de pêche à l’homme était une tactique particulièrement efficace. L’ennemi capturé se débattait dans ce canevas de mailles serrées s’emmanchant autour de son arme qu’il lâcha dans la mêlée. S’il tentait de s’éloigner de la traction que l’on exerçait sur toute sa stature, ses pieds emmêlés le trahirent pour l’étaler de tout son long sur le pont dans un grognement douloureux car ses côtes heurtaient la garde de sa propre lame. Si tomber n’avait en cela rien d’inhabituel à bord d’un navire dont le roulis peut être un exercice ardu à circonvenir, le sens de l’équilibre n’étant pas donné à tout le monde, c’était sans compter sur les couteaux à écailler et autres surins que les novices piquaient dans ses flancs et ses cuisses, presque plus hargneux encore que leurs adversaires. Les cris de douleur laissèrent rapidement place à des glapissements pénibles puis à un silence relatif, lorsqu’autour, les appels et les échos persistaient à se répercuter contre les flancs du détroit. Et les deux pirates restants de ce trio infernal de redoubler d’efforts sur les jeunes membres de l’équipage afin de s’échapper de l’attaque pour le moins surprenante des amateurs dans le domaine du combat naval.

☙ • ❧

Sur le pont du Rieur accosté à la Manticore, d’autres ruses se jouaient. À la poursuite de ces assaillants, je les interpellai afin d’attirer leur attention sur un ennemi unique, isolé de son équipage, et qui plus est, capitaine à en croire ma brigandine richement ornée en comparaison directe de leurs chemises grisâtres et parfois rapiécées. Je savais l’orgueil de ces énergumènes, la fierté sanguinaire qu’ils tiraient de l’éviction d’un gradé allait parfois bien au-delà de leurs prérogatives initiales, à savoir piller un bâtiment et s’échapper comme des voleurs. Et je visais juste cette fois-ci encore. Plutôt que de risquer de se retrouver captifs d’un adversaire plus coriace dans les cales de ce navire pour le moins étroit en comparaison de celui que j’avais en ma possession, ils préférèrent m’affronter en duo. J’étais confiant du haut de ma trentaine d’années et de mes farouches entraînements, néanmoins, affronter deux pirates dont je ne savais ni les compétences, ni même la provenance – ce qui aurait pourtant pu m’aider à anticiper leurs tactiques d’approche. Alors je reculais de quelques pas, tandis que l’un d’eux fomentait une feinte à mon encontre pour me frapper d’un coup d’estoc. Suffisamment en arrière, je parais son assaut d’un revers de sabre, et me retrouvai bientôt au centre du tillac.

Sous ce dernier se disputait encore la suite des opérations. Lorsque le jeune Trell s’indigna de la proposition du marin blessé et affaibli, ce dernier agita une main molle pour s’épargner ses simagrées. Il se sentait condamné à y rester, et refusait égoïstement d’être à l’origine de la perte de ce jeune homme qui n’avait rien mérité si ce n’est de la bonté pour l’avoir veillé dans ces derniers instants. Il insistait, tant que faire se pouvait, afin de chasser le pêcheur qui pourtant revenait à la charge avec un plan sournois. Le souffreteux n’avait guère l’énergie de s’embarquer dans un débat qui n’avait plus lieu d’être, étant donné la détermination pugnace de son protecteur. Alors il s’empara de la dague qu’on lui glissa sous le drap, comme raccroché à une once d’espoir, à un filament de survie, et du bout des lèvres lui souhaita…

Fais at-... attention…

C’est là qu’un appel retentit du faîte du mât, ce qui me fit légèrement lever le nez, bien qu’il fut plus prudent de le garder rivé vers cet homme armé. L’échange entre les deux pirates s’annonça bref. Celui qui m’affrontait envoya son acolyte dans les cales à la recherche de “planqués” selon ses mots, tandis que ce dernier tenta de me contourner, peut-être pour rejoindre le petit malin qui s’était perché tel un singe dans les haubans. Mon choix était fait, et en dépit de la mise en danger de cet individu, l’idée de laisser mon matelot, quel que soit son état, à la merci d’un bandit des mers me retournait l’estomac. C’est donc en direction des cales que je me jetai, m’égarant dans la coursive qui y menait, hors de vue du jeune homme s’étant proposé comme appât. Et quel appât. Le second malandrin s’en ruait en direction des galhaubans, particulièrement agile – l’on pouvait deviner qu’il puisse avoir été gabier sur son navire – lorsqu’il s’agissait de grimper ces échelles de cordages noueux sans craindre la chute. Sabre entre les dents, ses prunelles enténébrées de soif de sang se rivaient en fentes tranchantes sur la silhouette prostrée de Barral au sommet de son mât…



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MessageSujet: Re: Des renforts inattendus   Des renforts inattendus EmptyMar 26 Juil 2022 - 19:48
" On ne lâche rien les gars " fit le capitaine . Leur petite attaque avait eu raison d'un des pirates, ils n'allaient pas s'arrêter pour autant. Cela ne pouvait que redonner du courage aux jeunes marins qu'ils aidaient. Et peut-être refroidir un peu les ardeurs de leurs adversaires, à moins qu'au contraire ça ne leur donne plus de hargne. Mais qui disait plus de hargne, disait aussi plus de précipitation, et donc un peu plus d'ouverture pour les toucher. L'avantage du nombre jouait aussi beaucoup. Après leur petit exploit, il faudrait à présent se méfier d'eux et ne plus les considérer comme des éléments du décor.

Sur le mat du Rieur, en revanche, Barral ne faisait plus trop son malin. Si son entreprise d'attirer l'attention des deux pirates avaient réussi, il était en train de devenir livide en réalisant qu'un des deux s'était mis en tête de grimper pour le rejoindre et que lui ne pouvait guère aller plus haut... Et le bougre était plutôt habile. En revanche, l'autre type, celui qui portait de beaux habits, filait vers les marches qui conduisaient au dortoir avec l'autre pirate sur les talons. Chacun le sien en somme, mais le jeune marin n'en menait pas large face à un gars armé et mille fois plus expérimenté que lui.

Plus de temps à perdre à réfléchir, il devait sauver sa peau coute que coute. Il n'avait aucune envie de mourir ici ! Barral était en train de prendre conscience que tôt ou tard, il se retrouvait dans l'impasse et qu'il devrait lui faire face. Saurait-il lui tenir tête ou s'enfuirait-il comme à son habitude ? Il s'élança dans le vide, refermant de justesse ses mains sur un cordage pendant à l'autre mât du navire. L'arrêt brutal de sa chute lui coupa le souffle brièvement. Reprenant ses esprits, il remonta vers le sommet de son nouveau refuge narguant à nouveau son poursuivant. Mais pour combien de temps ?
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