L'éternel refrain [Rosen x Victor]

L'éternel refrain

Rosen feat Victor

25 mai 1167
Chateau de Sombrebois

« A… tha… Athanase... »

Athanase... ?

Mon propre murmure me tire légèrement de mon sommeil un court instant. Ce n’est certainement pas le premier. Non, il n’est plus là, mais je le cherche toujours de longs moments dans mon inconscience. Je sombre à nouveau – si tant est que l’on puisse dire que j’ai réellement émergée. De nombreuses ombres rôdent, tournent, planent autour de moi, me retenant à l’écart de la vie et de la lumière. Mon bébé… où est mon bébé ? Il lui faut du lait. Je dois lui donner… où est-il ?? Il doit avoir si faim… Il doit avoir si froid loin de moi…

J’ai soif, j’ai si soif… émergeant un peu du sommeil une nouvelle fois, ma déglutition se fait laborieuse dans mon gosier desséché. Je tâtonne un peu, fais une grimace. Cette grimace arrachée par la douleur à chaque fois que j’ai le malheur de bouger mon corps d’un millimètre. Oh, je commence à bien la connaître, cette douleur. Elle était si douce, quand elle faisait suite à la naissance d’Athanase. Presque agréable.

Pas qu’elle l’était en elle même, évidemment. Mais elle était le symbole de l’arrivée de mon enfant, de ce combat remporté sur la vie. Et qu’importe le degré de difficulté d’une naissance, celle ci apportera toujours son lot de douleur au sein du bonheur de voir enfin son bébé – pour peu que l’on l’accepte et l’aime évidemment. Car voir enfin sa progéniture après l’avoir portée si longtemps et mise au monde reste un moment inoubliable et la douleur, au fond, n’a absolument aucune importance. On l’accepte et l’ignore, lui trouvant la fierté et la force d’avoir réussi à donner la vie. Oui, elle était agréable.

Je me rappelle mon sourire radieux à cet instant.

‘C’est mon fils ? avais-je demandé émerveillée à mon amie qui m’a accouchée et sauvée.
- Oui… c’est ton fils. Votre merveilleux fils. ’

Aujourd’hui, la douleur me rappelle juste cruellement ce moment perdu. Ce moment qui n’a plus aucun sens et que j’aimerais juste oublier pour ne plus me torturer en me demandant si mon fils va bien ou non. Ne plus y penser incessamment et obsessionnellement, encore et encore, jusqu’à en rêver à chacun de mes songes.

Me demander si Roxanne l’a tué ou non, si il peut se nourrir convenablement et comment, si personne ne les a intercepté en chemin. Qui va s’en occuper après, lui donner le sein à ma place, où va-t-il être. Me dire à quel point il doit être perdu et être terrifié loin de moi. Saura-t-il encore qui je suis si j’ai la chance de le retrouver ? Il y a peu de chance. Ce n’est qu’un nourrisson… et je ne le retrouverai pas, au mieux, avant plusieurs lunes.

J’ai beau essayer de ne pas me tourmenter avec ça c’est juste impossible. Sûrement qu’avec le temps, tristement, j’y penserai de moins en moins jusqu’à l’oublier quelque peu. Pour l’heure, je bouge un peu à droite à gauche, incapable de trouver une position confortable puis j’ouvre les yeux, fixant le plafond. Je me sens fiévreuse, tout mon corps me paraît moite et mes lèvres sont si sèches et craquelées que le simple fait de les remuer me fait mal. J’ai perdu tellement de sang que je crois qu’il me faudra plusieurs semaines pour arriver à récupérer.

Ce n’est pas Edwige que je vois à mon chevet, ni même Pénélope ou les enfants mais Victor.

Je croise son regard un peu confuse, toujours en état de choc avec ce qui vient de m’arriver. La barbe… Après me faire poignarder par ce qui est censé être mon alliée et me faire épargner parce qui est censé être mon ennemie, c’est ce qui est censé être un autre ennemis qui veille sur moi.

Et Victor qui me visite quand je suis alitée. Que dire ? Voilà qui est d'un redondant... Comme le refrain d'une bien mauvaise chanson.

Une journée s'était déjà achevée depuis les sinistres évènements qui avaient frappé la place forte de Sombrebois. Une journée et déjà des centaines de questions qui hantaient l'esprit de l'intriguant mondain. Le Comte de Rougelac, en sa qualité de Gouverneur du Sud et plus particulièrement de Sombrebois, avait été comme tout le monde affecté par les évènements, même si dans son cas personnel, les zones d'ombres semblaient d'une toute autre teneur, où sans doute, différentes influences de premières ordres avaient jouer un rôle dans cette affaire et dans le fait que l'ennemi avait volontairement épargné sa vie. Mais comme dit, en sa qualité de Gouverneur, il se devait de jouer son rôle auprès du peuple et de sa représentante.

La Baronne de Sombrebois avait été retrouvée saine et sauve, du moins sa santé, plus qu'inquiétante les premières heures de sa découverte, s'était amélioré et elle était à présent hors de tout danger de mort. Par contre, son fils avait disparut, tout comme son ex-nourrice de surcroit qui avait nourrit des relations tendues avec le Comte. Des coïncidences qui pour Victor n'en étaient pas. En sa fonction et en appui avec la milice, il avait naturellement ouvert une enquête et devait donc rester quelques jours à Sombrebois avant de regagner la capitale pour obtenir des réponses auprès de la Favorite de la Reine et évidemment, en faire son rapport, comme il avait été convenu avant son départ pour ces sinistres réjouissances.

Le quadragénaire s'était donc porter naturellement au chevet de Rosen, dans le style qu'on lui connaissait c'est à dire, toujours en décalage avec certaines us et coutumes. Ainsi, le sang-bleu n'avait pas attendu le réveil de la blonde et l'observait déjà depuis un moment, assis sur une chaise dans un coin de la pièce, les jambes croisées, les bras poser avec soin sur les accoudoirs, prenant la pose comme s'il scrutait la femme alité sous toute les coutures. Sans l'ombre d'un doute, Rosen s'attendait à tout sauf à la présence du mondain et cela lui provoqua un sourire espiègle à la commissure de ses lèvres quand elle croisa son regard.

- Vous avez le sommeil mouvementé et je ne peux que le comprendre ma chère.

Il laissa la baronne émerger et vérifier qu'il était bien seule dans la chambre avant de se relever non sans prendre soin d'ajuster les pli de sa tunique, comme pour toujours, soigner son apparence, avant toute autre chose.

- Vous ne rêvez point, ni même ne faites un cauchemar. Nul Edwige, nul Pénélope ne se tient à votre réveil dans cette pièce, mais bien moi, l'homme qui a pu tourmenter votre vie passée de roturière. Ne me remerciez pas et gardez vos bribes de force, je ne souhaite point guerroyer par la verbe avec vous.

Il s'avança avant de poser son séant sur le bord du lit non loin de la convalescente pour continuer à l'examiner, cette fois-ci sans que ces lèvres ne s'entrecouvre pour émettre la moindre parole, attendant tout simplement la réaction de la baronne.

L'éternel refrain

Rosen feat Victor

Est-ce que ma vue me joue des tours, ou est-il sérieusement en train de se foutre de ma gueule ? Un peu vaseuse avec du mal à ouvrir correctement les yeux, je fronce légèrement les sourcils, la vision instable et gênée par la luminosité de la bougie.

Non, pas besoin d’une vue perçante ou d’un esprit très clair pour savoir que c’est bien le cas. Un sommeil agité ? Sans rire… encore que je ne dois pas gigoter beaucoup au vu de l’état de faiblesse dans lequel je me trouve.

Je le regarde se lever pour se rapprocher. Je ne le lâche pas des yeux, suivant sa progression jusqu’à moi. Je me demande bien pourquoi il ne reste pas sur sa chaise… et je me figure que, s’il voulait me tuer, il pourrait le faire aisément. Je n’aurais pas grande force pour me débattre s’il s’amusait à m’étouffer avec un oreiller. Mais il n’en fait rien.

Je pourrais lui demander ce qu’il trouve si amusant. Lui signaler que sa seule vision est un cauchemar à elle toute seule et que s’il croit vraiment avoir réussi à me tourmenter de quelque façon que ce soit, il se fout le doigt dans l’œil et que c’est ce qu’il est justement en train de faire, de guerroyer contre moi.

Mais je n’en fais rien. Ça m’est égal parce que la seule chose qui a réellement de l’importance accapare toutes mes pensées. Le reste n’en a absolument aucune. Je n’ai donc pas envie de répondre à ses provocations qu’il n’assume même pas, et je suis trop épuisée pour chercher le conflit.

Force est de constater en tout cas qu’en dépit de tous mes efforts pour enterrer la hache de guerre, il continue de me chercher. Tant pis, j’aurais essayé. Il me regarde, je le regarde… le moment pourrait se révéler gênant, mais il est juste pénible.

A vrai dire, je n’aime pas trop que l’on empiète sur mon espace vital et je me sentirais plus à l’aise s’il pouvait me laisser de la place et se relever pour s’éloigner. Je ne réponds rien, pas un mot, ne faisant que de le dévisager en clignant des yeux. La fatigue et l’affliction rendent mon regard tristement vide et lointain.

Je ne sais pas trop si j'ai chaud ou froid, mais je sens mes cheveux coller désagréablement sur mon visage moite.

Pour toute réponse, le Comte de Rougelac ne reçu qu'un regard vide, cela en disait long sur l'état de fatigue général de la Baronne de Sombrebois en cet instant. Après avoir lâcher un bref soupir de déception, Victor grimaça en venant examiner d'un peu plus près le visage de la jeune femme alitée.

- Vous auriez bien besoin que l'on vous fasse la toilette, l'on pourrait presque vous confondre avec un fangeux, c'est dire !

Plaisanta-il, sourire aux lèvres avant de finalement prendre une mine bien plus sérieuse.

- Mais passons les banalités d'usage. Je ne peux que me réjouir de savoir la baronne en vie après ces tragiques évènements. Je ne sais pas si on vous à déjà apprit la nouvelle mais... votre fils ainsi la chatelaine du Val d'Asmanthe ont mystérieusement disparut. Je ne veux point m'avancer mais ceux qui ont attaqué le château devait certainement chercher l'un ou l'autre, peut-être même vous, mais ils semblent ne pas avoir prit soin de vérifier si vous respiriez encore. Si j'étais des leurs, je me saisirais certainement d'un de ces oreiller pour finir ce travail "bâclé".

Sa main frôla l'un des oreiller, mais l'homme ne passa pas à l'acte, préférant alors se relever pour s'employer ensuite à faire les cents pas autour du lit.

- Le moment est peut-être mal choisi, mais en ma qualité de gouverneur, je me dois d'enquêter sur ces évènements et il y a fort à parier que vous représentez un élément central à cette affaire. Je ne pourrais hélas pas rester très longtemps à Sombrebois, mais j'espère, suffisamment, pour obtenir quelques pistes à exploiter. Dès que vous vous en sentirez capable, nous devrons parler entre gens courtois. Pour l'heure, voulez-vous que j'appelle Pénélope pour votre toilette ? Avez-vous besoin que je vous ramène quoi que ce soit à votre chevet ?

L'éternel refrain

Rosen feat Victor

Qu’il est terrible d’être clouée au lit sans ne pouvoir rien faire pour retrouver son bébé envolé… qu’il est terrible d’être clouée au lit à se faire charrier en continue par un abject personnage dénué de tout sentiment qui fait même montre d’agacement devant votre état apathique.

Pas que je veuille de sa pitié, ne nous méprenons pas. Mais j’aimerais juste ne pas avoir à essuyer ses humeurs. Sinon, j’ai perdu la notion temporelle, mais je sais encore que je peux compter sur Edwige et Pénélope pour me laisser ce restant de dignité qu’est le soin corporel.

C’est peut-être bien la dernière qu’il me reste d’ailleurs. Pénélope a même voulu tromper les apparences avec un peu de maquillage pour me redonner des couleurs et me donner meilleure mine, mais à quoi bon. J’ai refusé, qu’importe mon teint blafard. Au moins tout le sang que je me suis allègrement étalé sur la tronche a été nettoyé hier.

Et voir Victor s’approcher si près de mon visage me fait lui lancer un regard inquisiteur. Mon espace vital… bordel. Mais je ne réagis pas vraiment à sa nouvelle pique, sinon peut-être l 'ébauche d'un léger sourire. Si j’étais un fangeux, au moins, je pourrais faire un vrai carnage.

Le plus drôle reste encore qu’il me demande si je suis au courant que mon fils a disparu. Comme si je pouvais seulement ne pas l’avoir remarqué… cette blague. Et il s’amuse à dire que s’il était 'des leurs' il m’achèverait. Ben voyons. S’il peut me ramener quelque chose à mon chevet ? Pour sûr !

« C’est bien aimable de votre part de demander. Je voudrais bien... mon bébé. »

Je me mets à rire doucement, mais je grimace bien vite à cause de la douleur. Quelle question stupide… qu’est-ce que je pourrais bien vouloir d’autre ! Un instant, j’ai l’impression que mon faible rire va finir en sanglots. Mais non, je ne fais que rire doucement quelques secondes.

Finissons-en au plus vite, si ça peut le faire dégager promptement.

« Comme j’ai déjà expliqué… quand nous sommes arrivées au deuxième étage avec Roxanne, nous avons été séparées au détour du couloir, prétends-je une fois de plus d’une voix basse par l’épuisement, le regard à présent rivé au toit du baldaquin. Ils étaient nombreux. J’ai reculé jusqu’au temple où j’ai été acculée. J’ai tué l’assaillant qui me faisait face avec la hache. Il y a eu du bruit derrière moi, je me suis retournée… »

Je marque une pause, autant pour reprendre mon souffle que pour essayer de ne plus laisser refluer toutes ces pensées.

« J’ai senti une lame dans mon ventre. Je me suis écroulée. La personne s’est chargé de récupérer mon fils sans s’attarder, elle pensait m’avoir tuée et n’a pas perdu le temps de vérifier. »

Je réprime une grimace.

« Quand la châtelaine est arrivée et qu’elle m’a vue étalée dans mon sang… elle est repartie en courant pour les poursuivre. Elle me pensait sans doute morte elle aussi… et doit être en train d’essayer de pister leur trace à l’heure qu’il est. A moins qu’elle n'ait déjà abandonné… »

Je prends une grande inspiration avant d’expirer d’un air las.

« Vous me direz si vous apprenez quelque chose ? Je donnerai tout ce que je suis capable de donner à celui qui me ramènera mon fils. Pourrez-vous le faire savoir le plus largement possible ? C’est la seule chose que je vous demande. »

Bon, il fallait se rendre à l'évidence, la baronne n'avait pas perdu de son humour piquant. Victor ne pouvait évidemment pas accéder à sa requête et se mit lui aussi à rire face à l'absurdité de la réaction de la jeune mère, une absurdité pourtant légitime et rien ne poussa le Comte à reprendre de sa verbe taquin face à la détresse dans laquelle devait se trouver Rosen, arrachée à son enfant.

Se faisant, la Baronne puisa dans ses quelques forces pour exposer les faits qui s'était produit ce 25 mai 1167. La laissant s'exprimer sans l'interrompre, il nota dans un coin de son esprit la version des faits qui avaient causer la disparition de l'enfant ainsi que de la châtelaine. Acquiesçant de brefs hochement de tête, Rougelac fini par reprendre place sur un coin du lit pour finalement poser la paume de sa main gauche sur le dos d'une des main pâle et moite de la noble alitée.

- Je ne manquerais pas de vous tenir au courant si j'apprenais quelque chose. Mais soyons pour une fois transparent vous et moi. La seule chose que je vous demande dans cette affaire, c'est votre sincérité. Je ne voudrais pas, par des non dit, investiguer dans une mauvaise direction, pour votre bien et celui de votre enfant. Le comprenez-vous ? Vous avez plus à perdre que moi, une fois encore.

Il marqua une pause avant de retirer sa main et poursuivre.

- Je tiendrais discours devant votre peuple et m'entretiendrait sans doute avec la milice. Après quoi, d'ici quelques jours, je devrais regagner la capitale pour rendre des comptes auprès de la couronne.

Evidemment, il ne détailla pas plus sur le sujet car il avait bien plus que des comptes à rendre, il avait lui aussi à éclaircir certaines zones d'ombres qui était propre à sa situation d'intrigant de Cours plus proche de la Reine qu'il ne pouvait l'être du Roi en personne.

- Si bien entendu vous souhaitiez me voir avant mon départ pour quelque sujet que ce soit, je me rendrais disponible.

Victor marquait donc un virage dans son attitude face à la baronne, bien plus concilient et bien moins taquin, preuve qu'il ne voulait aucun mal à cette dernière.

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Rosen feat Victor

Je ris, il rit… l’instant est étrange. Je ne peux pas encore prétendre tout comprendre aux émotions et aux sentiments – il faut dire que je ne les connais que depuis quelques lunes - mais il me semble que ce sont plutôt les pleurs qui coulent dans ce genre de situation. Et alors que j’ai été soulagé de le voir se lever pour s’éloigner, le voilà qui revient s’asseoir sur le lit.

Et alors que je me figure que le stress de l’attaque doit lui donner la bougeotte, le voilà qui, contre toute attente, pose une main compatissante sur la mienne ! Désarçonnée, je le regarde un instant, saisie par une sorte de hoquet étrange. Et cette fois c’est une étrange vague qui remonte, désagréable, accablante, douloureuse. L’ombre d’un instant, je pourrais vraiment m’effondrer et me laisser aller pour me mettre à pleurer. Mais je tiens bon.

Manipulation ou non, peu importe, et je hoche légèrement la tête sans la moindre hésitation ni doute.

« Bien sûr… »

J’ai atteint un stade ou je ne suis plus capable de faire confiance à personne. Peut-être un jour cela changera. Et peut-être que ce jour-là, je serai capable d’accorder ma confiance à Victor. Pour l’instant c’est loin d’être le cas évidemment – et réciproquement d’ailleurs - même si j’essaie de faire de mon mieux pour tenter d’en faire un tant soit peu un allié en mettant fin aux hostilités. Mais certaines choses prennent du temps, lorsqu’elles sont seulement possibles.

De fait, même si Roxanne a définitivement perdu la maigre et fragile confiance que j’ai voulu placer en elle malgré le fait que tout me criait que ce n’était que folie et que j’en avais conscience, je ne peux pas me permettre de la mettre en difficulté. Je ne sais pas ce qu’elle a fait de mon fils.

Je ne sais pas s’il est toujours vivant ou mort, vu que j’ai fini par réaliser que Roxanne avait le mensonge un peu trop facile et qu’elle pourrait juste voir là une belle occasion de me manipuler pour que je l’arrange dans ses manigances. Elle pourrait tout aussi bien l’avoir éliminé en me disant qu’elle allait le mettre à l’abri. Tout comme elle a dit qu’elle était là pour me protéger avant de me poignarder. Mais il est peut-être toujours vivant…

Et dans cette éventualité, si jamais je disais la vérité à Victor et que ça s’ébruitait… je préfère ne pas y penser. Et ça s’ébruiterait, je le sais. Non, je ne veux pas anéantir toute possibilité de pouvoir retrouver Athanase.

Il retire ensuite sa main en poursuivant la conversation et je lui demande :

« Pourriez-vous faire le tour du bourg pour lister quelles sont les réparations à effectuer ? Et me tenir au courant ? J’ai cru comprendre que les portes ont été détruites... »

Comme si je n’étais pas déjà assez endettée comme ça de tous les côtés… rajoutons encore des frais.

« Il faudra les faire réparer au plus vite et envoyer une missive pour que l’on nous envoie des ouvriers dès que possible. Si vous pouvez vous occuper de tout ça, je signerai et mettrai le cachet dans la cire… qu’un pigeon puisse partir au plus vite. Vous pourrez dire à la population que les réparations commenceront bientôt, qu’ils soient rassurés. »

Même si je ne vois pas comment on peut être rassuré à l’idée de pouvoir se faire attaquer une nouvelle fois à tout moment…

« Il faudra aussi faire quelque chose pour le sous sol... j’aimerais y jeter un œil dès que possible. Visiblement, il y avait un passage dont personne ici n’avait connaissance... »

S'efforçant de poser des bases plus saines dans leur relation et leur entretien du jour, Rougelac laissait nourrir l'espoir d'une entente nouvelle et profitable pour les deux sang-bleu. Rosen n'avait qu'à se saisir de cette offre que Victor venait d'émettre, une opportunité rare et brève puisqu'il ne resterait que très peu de jour avant de rejoindre la capitale.

La baronne, fort des gestes bien moins piquant de son visiteur a son chevet, se lança alors sur un sujet qui pour une fois, rendait honneur à sa fonction, soucieuse de son peuple et de sa protection. Le Gouverneur du Sud fini par se relever pour venir se porter à la hauteur de la fenêtre donnant sur le bourg en contrebas, qui lui permettait de se rendre compte de l'étendu des dégâts.

- Je m'occuperais de rédiger la lettre et vous la ferais parvenir pour signature. La couronne à dépenser sans compter pour reprendre les travaux du Bourg, nul doute qu'elle se portera garant, une fois de plus, des dépenses pour les réparations. Et... sans doute prendre en considération les failles structurelles qui on permit à cette menace de s'étendre dans votre domaine.

Il se retourna après avoir dresser le constat au dehors puis rajouta.

- Il me paraît inconcevable que les plus hauts dignitaires de Sombrebois ne puissent pas connaître l'architecture complète de la place forte. Chaque mur, chaque sous-sol devra être fouillé, examiné, pour que ces événements ne se reproduisent plus à l'avenir. Dès que vous serez sur pied nous pourrons y jeter un œil, mais sous bonne escorte, cela va s'en dire.

Il acheva sa phrase en prenant la direction de la porte de la chambre.

- Si vous n'avez plus besoin de moi, je prendrais congé pour me mettre à l'oeuvre sans plus tarder.
Posant la main sur la clanche de la porte, il se retourna pour lancer une dernière réplique lourde d'insinuations.

- Vous apprendrez, dans vos fonctions, que les secrets sont lourds de conséquences. Gardezpour vous, ceux dont vous maîtrisez les tenants et aboutissants, quand aux autres, employez-vous à les partager avec des gens de confiance et dans le plus strict de vos intérêts. Croyez-en mon expérience.

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Rosen feat Victor

Ainsi donc Victor a accepté de faire un compte rendu des dégâts et de rédiger la lettre pour une demande de réparation. Il me signale ensuite qu’il faudra que nous nous assurions qu’il n’y aura pas d’autres d’ennuis du genre à l’avenir.

Évidemment que ce serait bien. Il se retire ensuite en lançant un sous entendu sur les secrets. Cela m’étonnerait qu’il s’inclue dans les gens de confiance, mais qui sait. C’est peut-être une façon de me demander de lui dire la vérité quand même.

Mais il n’y a plus personne en qui j’ai envie d’avoir confiance et je crois et en parlant d’expérience, si je me fie à la mienne, raconter un secret équivaut à le dire à une personne, puis devoir le dire à une autre, et puis encore à une autre et ainsi de suite jusqu’à ce que le secret ne soit plus.

Sans doute doit-il se poser des questions sur la tournure des événements et, quand on connaît Roxanne, on sait qu’elle est capable de tout. Mais dans tous les cas il se trouve du mauvais côté de la barrière alors malgré toute ma bonne volonté, je ne me pense pas capable de lui dire la vérité pour courir le risque qu’il aille tout répéter.

Peut-être qu’un jour il me sera possible de tirer partie du fait qu’il soit dans le camp de mes opposants, mais pour l’heure, je ne pense pas que je sois prête à prendre ce risque en vérifiant cette idée. Sur un sujet moins important, sans doute que je pourrais faire des essais, si j’en ai l’occasion. Mais on en est loin à mon avis.