Opération humanitaire (Cywel, Finn, Le Capitaine)

Des enfants, quelque part c'était là l'horrible réalité qui collait si bien à la peau des recrues les plus récentes de la Compagnie des Lames. Plus que le corps de leur camarade, ce fut l'expression du regard du Capitaine qui ramena Finn à la réalité, le faisant réintégrer son corps aussi sûrement que si on l'avait frappé en plein visage. L'un des leurs n'était plus et c'était là leur lot jusqu'à la fin de leur existence de Mercenaire. Le jeune homme se sentit coupable d'être en vie, sans qu'il ne sache vraiment pourquoi, sans qu'il ne comprenne d'où venait cette sensation d'après atterrissage, en quelque sorte. Dans son esprit se bousculaient à présent plusieurs questions qui s'entrechoquaient sans qu'il ne parvienne à les arrêter. Est-ce que Thomas avait été tué par un coup en traitre ? Est-ce que le coupable avait souffert avant de mourir comme un lâche ? Est-ce que c'était parce qu'il n'avait pas su être assez vigilant ? Est-ce parce que son ennemi avait été meilleur que lui ? Ou bien est-ce que c'était parce que son heure était arrivée ? Finn fixa le Capitaine sans se détourner, un peu hébété malgré lui, puis entreprit de le suivre d'un pas moitié pressé, moitié cotonneux. Il avisa Cywel à son côté qui n'avait l'air guère mieux, puis ses yeux clairs accrochèrent Strakhov, son point de repère le plus sûr après leur maitre à tous. Se rapprochant de son ainé, quémandant ainsi en silence le droit de se tenir à ses côtés, il passa ses mains sur son armure de cuir pour tenter d'en ôter le sang qui le maculait, en vain. Le liquide était trop poisseux, trop collant et en trop grande quantité.

- ... Est-ce que c'est normal que j'aime et que je déteste ça ?

Demanda-t-il à voix basse au plus âgé et au plus sage d'entre eux tous, le ton aussi indéchiffrable que le sujet de sa question. Il ne précisa pas s'il parlait du sang, des cadavres, de l'adrénaline ou même du fait d'être encore en vie tandis qu'un des leurs n'était plus, mais l'on voyait à son expression qu'à présent que la tension du combat retombait, il avait l'air plus jeune et plus perdu que jamais. Un enfant avec une épée, voilà ce qu'il était encore aux yeux des Mercenaires aguerris, mais pour autant quoi que lui réponde Strakhov ou qui que ce soit d'autre, Finn se contentera d'acquiescer avant de s'emmurer dans le silence jusqu'à la fin de leur trajet de retour. L'on ne pouvait se réjouir de la perte d'un des leurs, qui sait ce que l'avenir leur réservait encore ?

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