[Libre]Sauver Willy... s'il vous plait?

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Février 1165 – Une nuit au Goulot

Je marchais d'un bon pas pour oublier le gel et la douleur qui pulsait dans mes côtes, mon poignet et ma hanche.. et pour oublier la peur également. Si je m'arrêtais un instant j'étais sûre de rester paralysée par ce qui venait de se produire...

Malgré Rikni devait considérer que j'avais passé suffisamment d'épreuve pour toucher au but puisque sous le court des ombre, je fini tout de même par trouver ce que je cherchais : le trou dans la cloison obstrué par une planche. Peinte comme prévue. Prenant mon courage à deux main, je me glissais dans le vieux cellier par cette entrée dérobée. L'odeur de renfermé et de rance était à peine supportable... et une respiration sifflante fut le seul accueil que j'obtins en m'approchant. Je me couvrais le nez de ma manche pour que les larmes ne me viennent pas aux yeux sous l'assaut de la puanteur.

La pièce était fondue dans l'obscurité, seul les rais de lumières qui filtraient par un pan du toit effondré offrait un chiche éclairage.

« Gareth ? »

Pas de réponse.

Je m'enfonçais à tâtons... Pour découvrir le garçonnet suant à grosse gouttes... La main qui trônait sur son torse déformée et amputée de plusieurs doigts plus arrachés ou écrasés que proprement tranchés, comme il était parfois le cas pour les voleurs... Je posais rapidement mon front contre le sien.

Brûlant aurait été un euphémisme... Sa respiration était faible...

« Tient bon, je vais m'occuper de toi maintenant... Courage... Rikni puisse-tu lui prêter ton endurance. »

Si je ne le sortait pas rapidement de là et qu'il ne recevait pas des soins au plus vite, il n'avait que peu de chances de survie, il ne fallait pas être guérisseur pour le deviner. Pour la deuxième fois en mois d'une heure, je fourrageait dans ma sacoche à la recherche de ma flasque d'eau sacrée. Mais cette fois, ce n'était pas pour recommander une âme à Anur et facilité son passage. J'espérais de tout cœur que Rikni laisse planer de bon augure et que les mésaventures que j'avais déjà traversées ce soir lui agréeraient assez pour qu'elle retienne la main de sa consœur.

Prononçant quelques versets des écrits divins, j'humectais mon mouchoir de cette eau faiblement salée et la plaquait sur la main détruite de l'enfant, lui arrachant un faible gémissement et un sursaut à peine perceptible.

Je n'aimais vraiment pas la tournure des événements...

Frêle et dégingandé, j'aurais put plus mal tomber, mais bien qu'anormalement grande, je n'étais pas plus musclée qu'un chaton à peine né... et je commençais à entrevoir que l'endurance qu'il allait me falloir était peut-être hors de ma portée...

Mais pour l'heure, ce n'était que le commencement. Décalant au préalable la planche qui obstruait l'entrée, Ravalant l'urgence de la situation, je refermais la flasque avant de passer un bras sous la tête du garçon et l'autre sous ses genoux. Le hisser contre moi en faisant en sorte que ses bras et sa tête ne baguenaudent pas fut moins aisé que prévu, mais une fois fait, ma cape à moitié rabattu sur lui ce qui faisait autant un appel d'air froid contre ma peau qu'un peu de chaleur sur la sienne, je me glissais de nouveau au dehors.

J'aurais voulu pouvoir avance comme une ombre parmi les ombres... Mais difficile en portant quelqu'un qui en plus gémissait aléatoirement...

Saluant silencieusement une mystérieuse ombre encapuchonné s’évanouissant dans la pénombre ambiante, un homme aux boucles grisonnantes porta à l’épaule un grossier sac de toile, visiblement bien rempli.

S’arrêtant un instant dans cet infâme cloaque, il laissa une douce brise froide caressait ces durs traits impénétrables et des vagues se heurtant à des roches impassibles une nuit d’hiver.
Impassible, imperturbable, immuable et éternel.

Fermant les yeux un petit instant, comme pour s’accorder un bref répit dans cette vie infernale, ce fut un craquement mécanique de ces longs doits fins qu’il le transporta dans son funeste passée. Une année, au mois près. Il se remémora le triste état de ces mains d’alors. Tordues, ensanglantés, tuméfiés en partie, ils avaient depuis récupérés leurs états d’origine.
Mais cette violence physique, cette douleur sourde n’était rien face à la rage, à la haine qu’il avait éprouvé ce jour-là, son intense désespoir résonnait à travers les désastreuses percussions qui s’échappait du choc de ses poings contre le crâne, réduit en charpies de l’honteuse créature qui lui avait arraché sa famille.

Il se revoyait, pleurant, suintant, bafouillant, ces bras ensanglantés entourant le pathétique corps d’une petite fille aux traits familiers.

Non, cela lui était beaucoup trop douloureux. Il fallait qu’il fasse son deuil, une année déjà s’était écoulée. Il ne les reverra jamais plus.

*****

Serpentant à travers les dédales et les ruelles du Goulot, Lothaire Ferbois vit une bien étrange procession. Une silhouette assez menue hissant, du bout de ses bras, une bien plus menue silhouette. L’étrange binôme semblait difficilement progresser, et encore moins le faire discrètement, à entendre les pathétiques gémissements infantiles qui s’échappait.

Par des temps comme celui-ci, ce n’est qu’une question de minutes avant qu’un autre badaud ne se ramène.

Les gémissements de l’enfant et les claudications hasardeuses de l’encapuchonnée finirent par le convaincre d’agir à l’instant même.

‘’Excusez-moi !’’

‘’Vous avez besoin d’aide ?’’

Une voix clair me fit sursauter. Je faisais brusquement volte face... Enfin aussi brusquement que le poids de Gareth me le permettais. Déstabilisée par le mouvement, je manquais de glisser sur le pavé, me rattrapant in extremis sans que l'enfant que je supportais n'ai a souffrir du moindre choc. Incertaine, le visage glacial et le regard inquisiteur, je scrutais l'inconnu, inconsciente du fait que ma cape ouverte laissait apercevoir ma tenue sacerdotale et le pendentif grand comme ma paume représentant le symbole de la trinité. Mais méfiante ou non... Refuser une aide potentielle dans de telles circonstances était un luxe que je ne pouvais pas me permettre... Je jetais un regard flambant d'inquiétude vers l'enfant avant de reporter mon attention vers l'homme grisonnant qui me faisait face.

« Cet enfant est blessé, je dois le ramener au Temple pour qu'il soit soigné où il risque de ne pas passer la nuit... » glissais-je du bout des lèvres. « Vous pouvez m'aider ? »

Sujet: Re: [Libre]Sauver Willy... s'il vous plait? Mer 1 Mar 2017 - 16:46

C’était une jeune fille, toute juste sortie de l’enfance à en juger de par ses traits juvéniles. Sa cape découvrait la tenue caractéristique des prêtresses et un collier représentant l’insigne du Culte. Elle tentait avec maladresse de tenir un enfant à la main exsangue et au front ruisselant. Sa petite poitrine se soulevait avec douleur et difficulté, l’effort du petiot était palpable.

« Cet enfant est blessé, je dois le ramener au Temple pour qu'il soit soigné où il risque de ne pas passer la nuit... »

« Vous pouvez m'aider ? »

La douce voix de la petite prêtresse essoufflée se teintait d’inquiétude et son regard passa de l’enfant à celui de Lothaire. Cela ne l’arrangeait pas plus que ça, en particulier avec l’objet de sa transaction illégale contenue dans le sac de toile qu’il trimballait. Mais il ne pouvait laisser ce pauvre enfant mourir.

« Ne vous inquiétez pas, brave prêtresse. Il semble que les Dieux vous aient accordés leurs grâces. Je suis médecin. »

D’un geste délicat, il prit en main le bras à la main mutilée du gamin encore accroché à la petite prêtresse, et jeta un bref regard.

Ce bref regard déboucha sur un examen des mutilations subit par le petit garçon. Ces doigts semblaient avoir été arrachés, un par un. Lothaire, bien qu’ayant appris à réprimer ces émotions durant son travail par souci d’efficacité, ne put réprimer une grimace de dégout et de pitié. Il fallait être un monstre pour s’attaquer à un garçonnet.

« Laissez-moi porter l’enfant. Vous n’arriverez pas toute seule. »

La phrase était empreinte d’autorité, Lothaire pensait que face aux jeunes gens si promptes à laisser leurs sentiments les guider, seul la discipline et le sérieux était à même d’y faire face. Combien de jeunots n’avaient-ils pas vu pleurer, crier, s’énerver ou même s’évanouir lorsqu’il aidait dans le Temple à soigner les blessés ?

Cette nubile semblait correctement s’en tirer pour une situation aussi urgente, mais il ne fallait douter de rien.

« Prenez mon sac mais ne l’ouvrez en aucun cas. Et guider moi vers la direction du Temple, jeune fille.»

Le guérisseur glissa avec douceur ces bras autour du corps fiévreux de l’enfant.

Sujet: Re: [Libre]Sauver Willy... s'il vous plait? Sam 4 Mar 2017 - 3:07

Je ne peux pas nier que l'annonce du vieil homme m'arracha un soupire de soulagement. Étrangement le simple fait qu'il accepte de m'aider était aussi appréciable que le fait qu'il soit médecin… Même si cette seconde partie ne faisait qu'accentuer ma reconnaissance envers les dieux. Si la scène précédente avait été le prix pour que la providence soit de mon côté maintenant qu'il s'agissait de Gareth, j'étais parfaitement heureuse du déroulement de cette soirée !

« Rikni soit louée. Merci. » Murmurais-je en le laissant approcher sans plus de cérémonie et examiner la main de l'enfant. Alors qu'il la tournait avec précaution, je remarquais de la pitié sur le visage buriné par la vie qui était toujours penché sur son travail. Cette once de compassion fini de me rasséréner bien que mon visage froid n'en laisse rien paraître.

A la demande du médecin, je le laissais s'emparer de Gareth et j'acquiesçais simplement avant de charger son sac sur mon épaule.

« Par ici nous couperons au plus court. »

Calant mon pas sur celui de mon compagnon, je scrutais les ombres par prudence mais j'avais la certitude presque fanatique que je nous ne retomberions pas dans le même genre de situation qui m'avait ralenti à l'allée. Maladroite dans la nuit noire, ma jambe endolorie par les coups essuyés à l'allée ne me permis pas de me rétablir après avoir trébuché sur un pavé démis. Retenant un cri de surprise, je tombais, allongeant les bras en avant par réflexe… Et lâchant dans le mouvement le sac que je portais jusque là…

« ça va. » lâchais-je rapidement. « J'ai trébuché. »

Sans attendre, sans prononcer un mot sur ce qui trônait à demi au sol, quelque soit le contenu abjecte, frauduleux ou étrange de ce sac, je le rassemblais soigneusement et rapidement pour me relever dans la foulée. Peu importe l'importance de tout cela, la priorité allait à la vie que portait cet homme entre ses bras. Les genoux rappés et les paumes égratignées, nous étions tout de même arrivé au temple.

Je nous faisais rapidement entrer dans la nef puis dans le hall des clercs et enfin dans l'une des rares salles vide du dispensaire, posant le sac de toile dans un coin et allumant de multiples bougies pendant que l'homme se déchargeait sur ce qui tenait lieux de table d'examen… ou de lit d’appoint en ces périodes de froid.

Sujet: Re: [Libre]Sauver Willy... s'il vous plait? Mer 8 Mar 2017 - 0:51

Déposant l’enfant avec un subtile mélange de précision et de délicatesse sur la brouillonne table d’examen, le docteur Ferbois s’empressa de nouer, à la hâte, une étoffe de tissu autour de la main mutilé, d’une ferme pression, le voici comprimant la blessure avec tout le sang-froid qui caractérisait Lothaire.

Cela faisait bien des années qu’il avait appris à ne pas fléchir devant les pires blessures, et ce n’était pas aujourd’hui qu’il tremblerait.

S’adressant d’une voix forte, clair et distincte, il articula, à l’attention de la juvénile le secondant :

‘’Vous sentez-vous capables de m’assister pour cette opération ? ‘’

Puis pointant de sa main libre en direction de la robe de la prêtresse, il continua :

‘’Vous boitez à la jambe, c’est la raison pour laquelle vous avez trébuchée tout à l’heure, si vous ne vous en sentez pas capables, je n’aurais aucun reproches à vous adresser, mais alors allez me chercher quelqu’un disposé à m’aider. ‘’

Il semblait à Lothaire qu’il n’avait plus rien à attendre de cette jeune fille, elle avait aidé du mieux qu’elle pouvait, protégeant cet enfant autant qu’elle a pu, jusqu’à son arrivée, mais vu l’état de la nubile, il valait mieux qu’elle aille se reposer. Bien qu’il ne préfère pas le lui dire, ne connaissant même pas son nom, il ressentait une certaine admiration devant le courage de cette petite prêtresse.

Mais si elle décidait malgré tout de continuer, pour pouvoir sauver une vie, Lothaire ne saurait l’en empêcher, aussi déclama-t-il :

‘’Que décidez-vous ?’’