Prémonition ou angoisse dissimulé [Theo]

Une fois qu'ils sont éloignés du premier patient et avant de voir le second, Theodren pose une simple question à Abigaelle

- Es-tu réellement convaincue qu'il retrouvera l'intégralité de ses moyens malgré sa blessure ? Il n'est pas bon de donner de faux espoirs à un patient. S'il pense que tu lui as menti, il perdra sa confiance en toi et cela rendra les soins suivants plus complexes. Je sais que ça part d'un bon sentiment, mais ça nous soulage nous plus que ça ne le soulage, lui. Et c'est lui, notre priorité.

Il a tenu le propos sans agressivité, plutôt formateur, jouant le jeu. Abigaelle a été totalement correcte jusqu'ici et il ne voit pas pourquoi il la priverait de son enseignement, s'il l'estime justifié. Après, chacun trouve sa méthode, mais il y a quelques vérités qu'il a acquises au fil des années et qu'il est prêt à partager. Quand la mère buggue, il s'attend à une blessure pire que la première, puis découvre un patient en "bon état", ce qui a de quoi surprendre. Plus surprenant encore, c'est sa ressemblance avec Constance. Theodren n'en laisse rien paraître, mais son cerveau fume. Doit-il prévenir Constance ? Lui ignore qui est sa mère, elle ignore tout de ses origines. Et cette ressemblance ne peut pas être fortuite. Lui aimerait savoir, alors il doit lui en parler. Et maintenant, car l'individu est là anonymement et risque de disparaître pour de bon dès que le bon de sortie sera fait.

- Bien, comme vous le voyez, je suis guérisseur, en fait chirurgien barbier, et non prêtre. Je n'ai pas le pouvoir de vous faire sortir, mais l'expertise pour juger votre blessure. Je suis supervisé par Mère Constance. Mère Abigaelle, ici présente, m'aide en tant que scribe et assistante. C'est Mère Coinstance qui pourra signer votre bon de sortie, et on va faire en sorte que ça ne prenne pas trop de temps.

il se tourne vers Abigaelle et lui sourit, espérant que par là elle comprenne à quel point sa demande s'avère importante

- Pourriez-vous faire venir Mère Constance aussi vite que possible ici ? Je vais vérifier la plaie, faire le cataplasme, le bandage puis je pense que notre homme pourra sortir. Tâchez de faire vite, Mère, je compte sur vous. C'est toujours agréable de voir sortir un patient.

Il revient vers son patient anonyme et reste assez détendu.

- Bien, monsieur X. Visiblement vous avez quelques notions de soins. C'est une bonne chose, mais pas pour nous, soigneur, car si tout le monde sait se soigner, moi j'ai plus de boulot. Vous avez eu le bon réflexe et visiblement beaucoup de sang-froid. Et il en faut quand on croise ces "choses". N'en veuillez pas à vos hommes, ils veulent vous protéger et vous garder entier, c'est plutôt bon signe.

Un nouveau sourire

- Voilà, je fais le cataplasme. Mère Abigaelle devrait ramener Mère Constance incessamment sous peu. Je présume qu'après avoir attendu deux jours, attendre quelques minutes de plus ne sera pas une torture

Et pour le faire patienter, il lui fait la conversation.

- Je travaille d'ordinaire dans le Goulot et on ne peut pas dire que le travail manque. Si je suis venu faire des heures en plus par ici, ça n'est pas par la grâce d'une foi extrême, mais pour les beaux yeux d'une prêtresse. L'amour rend idiot il paraît, mais j'aime me sentir idiot. Mais nulle inquiétude, ça motive, aussi, à bien faire son boulot, pour ne pas la décevoir. C'est une guérisseuse, comme moi. Nous nous marions bientôt. Dans trois semaines. Les noces seront ouvertes au public. Si vous n'avez rien à faire ce jour-là, n'hésitez pas !

- « Je ne sais pas » souffla la jeune femme un peu amère.

Non, la jeune femme n’était pas devin, elle ne savait pas lire les cartes, ou percevoir l’avenir comme certaines prêtresses était capable de faire. Ni même d’entrevoir des possibles événements, conséquences que réservaient les trois. Comme Constance, grommela intérieurement la clerc, qui commençait à ressentir une profonde jalousie vis-à-vis de cette femme flirtant avec la perfection. Calmement, la brune haussa les épaules, laissant retomber celle-ci plutôt mollement. Son interlocuteur n’avait pas été particulièrement agressif, n’avait pas non plus fait preuve d’une intonation qui aurait pu sonner à ses oreilles comme un reproche. Abigaëlle se contenta d’opiner, sans pour autant trouver son comportement déplacé. Prôner l’espoir ne serait à ses yeux, jamais quelques choses de négatif, bien au contraire.

- « Je suis certaine que l’esprit peut avoir un impact important sur la guérison d’une personne » ajoute-t-elle simplement, pour se confondre dans son idée.

En rentrant dans la nouvelle zone de soin, la jeune femme clerc n’avait pas pu cacher sa surprise, une légère grimace s’étant même dessinée sur son visage. N’avait-elle pas suffisamment luter pour se débarrasser de Constance…Pour se retrouver une copie presque conforme et masculine de la jeune femme en soin. Un bref soupir, presque imperceptible avait franchis la barrière de ses lèvres. Professionnellement elle avait récupéré la feuille de soin de l’individu, indiquant simplement ce qui lui semblait important à voix haute. Ses sourcils se froncèrent légèrement à la demande du guérisseur, barbier. Si Abigaëlle n’était pas forcément une femme respectant à la lettre les recommandations et le règlement, elle était en revanche, une prêtresse très maligne. Aussi voyait-elle en cette occasion, une façon simple et efficace de faire du tort à sa concurrente. Délicatement, elle déposa les documents qu’elle tenait entre ses mains sur un petit meuble, afin de s’approcher de l’inconnu, pas si inconnu et de celui qu’elle avait accompagné jusqu’ici.

- « Je suis navrée, mère Constance est en entretien avec une haute prêtresse, même avec toute la bonne volonté du monde, je ne pourrais interrompre cette conversation. » Elle fit silence, comme pour laisser le temps à Theodren d’intégrer vers quoi elle se dirigeait. « Cependant, je vais aller voir si votre future épouse est disponible, sinon je signerai le bon de sortie moi-même. » Elle afficha un sourire rayonnant vers le patient « Je fais vite, promis. »

Elle hocha la tête en direction de son collègue avant de disparaître, laissant ses pas engloutirent rapidement le petit couleur. Évidemment, la clerc n’avait nullement l’intention de prévenir Constance, elle allait simplement laisser le temps s’écouler, sagement, patiemment, le temps d’être certaine que Theodren termine ses soins et reviendrait avec le précieux papier signer. Les minutes s’écoulaient lentement, même pour une jeune clerc pleine d’entrain et dont la patience semblait inépuisable. La brune s’était baladée sagement entre les murs du temple, papillonnant à droite à gauche, s’entraînant à faire sa mine la plus sérieuse. Comédienne c’est ça qu’elle aurait du faire, tant elle était douée. Après un certain temps, Abigaëlle revint jusque dans le lieu de soin, le document signé entre les mains.

- « Je suis désolée de vous interrompre » dit-elle alors que l’homme terminait sa réponse
- « J’n’aime pas trop les mariages-moi vous savez, le temple non plus, c’est la première fois que je m’y mets les pieds depuis pas mal d’années… » il sourit à la jeune femme arrivant « Ya pas de mal, je n’aime pas trop blablater de toute façon, j’vois que vous avez mon papier. »

Abigaëlle offrit de nouveau un large sourire en lui tendant le document :

- « Je suis navrée ma collègue ne peut pas venir. » elle se tourna vers Theodren « Elle m’a dit de te dire qu’elle te faisait entièrement confiance et qu’elle était certaine que ton jugement serait le bon. Elle a juste signé en murmurant que c’était toujours agréable de voir des victimes de la fange sortir aussi vite. »

L’homme n’avait pas franchement attendu son reste, déjà debout, il avait enfilé sa chemise, refermé les boutons de son pantalon et entamé déjà de remettre ses bottes. Il ne tendit ni sa main au guérisseur, ni même à la jeune femme qui ne semblait pourtant pas le laisser indifférent, il avait hâte de partir.

- « Merci pour les soins… Merci ma jolie… Monsieur, vous passerez vos salutations à votre future épouse, en vous souhaitant tout le bonheur qu’on puisse avoir malgré notre situation. »

Un sourire en coin avait pris naissance sur les lèvres de la clerc, qui regardait avec une pointe de fierté le départ de l’homme. Il n’y avait pas à douter que Constance serait certainement très attristé par cet événement, et les moments de faiblesse de la jeune femme était rares, nul doute qu’Abigaëlle serait de nouveau tirer son épine du jeu. Si Theodren avait eu dans l’idée de le rattraper, la clerc lui aurait évidemment attrapé l’avant-bras pour l’en empêcher avant de rajouter le plus sérieusement du monde :

- « Je ne suis pas très bonne soigneuse, c’est vrai. Mais tu as failli manquer à ton devoir le plus important, le secret. Peu importe le patient, peu importe qui il peut être, jamais tu ne dois trahir ton devoir, et conservez pour toi tes doutes. Il me semblait pourtant que c’est ce qui faisait ton honneur dans le goulot, me trompais-je ? Si Constance venait à perdre un enfant, ce que je ne vous souhaite pas, ou à être blessé grièvement… Qu’elle se faisait soigner ici et refuserait de t’avertir, les soigneurs ne t’avertiraient pas. C’est là tout notre devoir dans sa globalité. »