Remonter du gouffre ? [Victor]

Mi-février, Hiver 1166,


Le froid mordait les joues de la jeune femme dont les effets de l’âge étaient visibles sur son visage. Quelques rides d’expression entourées ses yeux d’un bleu sombre. Avait-elle trop ri dans le passé ou était-ce les tourments du présent ?

Les années s’étaient écoulées pour Iris. Longues et constantes, elle avait perdu cette gaité qui l’animait tant. La joie avait quitté son être peu de temps après la fête chez Rougelac. Qu’est-ce qui avait bien pu l’atteindre à ce point ? Etait-ce sa capacité en la manipulation ? Sa découverte d’une autre facette plus sombre de sa personnalité ? Elle ne savait, ou ne souhaitait pas se l’avouer. Cependant, depuis cette soirée, elle n’avait plus eu affaire à Victor, ou même à ses hommes de main. Que s’était-il donc passé pour qu’il soit si froissé ? De plus, elle avait appris de la part de Fenrir, après plusieurs mois, qu’il s’était désolidarisé du bordel. Son cœur s’était à ce moment-là serré, sans en chercher la raison.


« Iris ? » retentit une voix douce et ferme à la fois derrière sa personne. « Comptes-tu admirer les pavés de ce vieux bourg toute la journée ou te préparer pour l’une des soirées les plus festives de l’année ? ». Elle s’approcha davantage de la catin pour poser une main réconfortante sur son épaule dénudée, couvert de frissons causés par le froid environnant. Fenrir, pour des raisons économiques avait jugé bon de ne faire fonctionner que les âtres des chambres la nuit et celui de la cuisine uniquement en jour. Assise sur un sofa, dans le salon principale, la blondinette n’avait pas bougé, ni même sursauté au son d’une voix étrangère aux bruits de la pièce.

« A quoi peux-tu bien songer en cette si belle après-midi ? » Reprit-elle de plus belle en prenant place à côté de sa consœur. Elle déposa le châle de la jeune femme sur ses épaules, remarquant au passage les égratignures sur l’un des poignets d’Ethaïs. Son visage se plissa sous l’inquiétude. « Que s’est-il passé avec ton dernier client ? Tu dois nous prévenir quand certains deviennent trop sauvages, tu es au courant pourtant, depuis le temps… »

Iris se leva d’un trait et la fit taire d’un doigt sur la bouche avant de plonger son regard dans celui de Pauline. « Ce métier, je le connais dans les moindre recoins. Ne t’inquiète pas pour moi, je gère à ma façon, mes clients. Point.» Elle prit une gaulée d’air fraiche avant de reprendre. « Je ne suis pas en danger par eux, mais bien par… ». Elle se tut aussitôt, avant de révéler davantage son mal-être actuel. Resserrant son étreinte sur le châle beige, elle prit la direction du grand escalier pour bénéficier de la paix qu’offrait sa chambre. Avec le temps, elle n’avait guère changé. Un grand lit à baldaquin trônait au milieu de la pièce, maitresse des meubles, une petite commode se situait à l’entrée, où divers accessoires étaient entreposés. Une coiffeuse se cachait discrètement près du paravent. Le maquillage et parfum étaient peu nombreux, mais les rubans et bijoux jonchaient la tablette. Elle avait accumulé tant de babioles et de cadeaux.

Elle prit place sur le matelas, et se laissa tomber de son être dessus, comme si tout le poids du monde était porté par ses épaules. La catin lâcha un lourd soupire avant de se tourner vers la fenêtre, pour admirer les quelques flocons qui tombaient. Le froid l’envahissait et la fit grelotter. Elle avait maigri dernièrement et ses joues s’étaient légèrement creusées. La vie lui réservait bien des mystères mais avait-elle encore envie de les découvrir ?

Ses paupières s’alourdirent, et tombèrent sur ses pupilles, la plongeant dans le noir, les ténèbres. Son esprit tout entier commençait à se renfermer telle une huitre protégeant sa perle si précieuse. A qui manquerait-elle après tout ? Sans famille, sans mari, sans enfant. Que de piètres amants qui la comblent de temps à autre contre quelques pièces ou bijoux. Etait-ce réellement une vie ? Plus aux yeux de la catin. Elle était vidée de ces émotions et tellement triste…

Un sursaut et la peur l’envahirent quand des doigts glacés effleurèrent sa peau. Elle n’eut le temps d’émettre un son. Une main vint se plaquer contre ses lèvres gercées par le froid. Qui était-ce ? Personne ne devrait être ici vu l’heure, aucun client… Elle se ressaisit et rassembla le brin de lucidité qui lui restait. Quand l’un deux se dévoila, elle fronça les sourcils, ayant une impression de déjà vue. Pourtant elle n’arrivait à remettre de nom sur ses visages.

Son sang se glaça lorsqu’un doux murmure raisonna dans la pièce. Elle ne comprenait guère le sens premier de la phrase, fouillant dans sa mémoire par la même occasion. Un bon ami à elle ? En a-t-elle déjà eu ? Elle en doute, personne ne s’était souciée de son état de santé depuis plus d’un an, pas même Victor de Rougelac ! Rien que son nom lui donna la nausée. Quelle piètre homme renvoyait-il, toujours besoin d’une bonne pour les sales besognes avant de la jeter comme un chiffon troué. Elle était révoltée au fond d’elle de s’être faite avoir aussi facilement.

Elle ne sut que faire et se détendit au contact de l’un de ses geôliers, absorbant au passage sa chaleur corporelle, lui redonnant quelques couleurs. Elle ne résista point quant à son intrusion, essayant de se demander si le Comte était bien le personnage central de cette entrevue.

« Par… » Elle grelottait encore et claqua des dents. Machinalement, elle se colla davantage contre son assaillant, ses mains agrippant la main qui était passée sous ses jupons. « Que veut le Comte ? » Un coup de poker en réalité, car Ethais n’avait pas spécialement une idée particulière sur les allusions, elle ne voyait que Victor, ou Théodore, ou le capitaine travesti. Serait-elle chanceuse ? Mais surtout que lui voulait-il après tout ce temps ?

« Une putain à d’autres talents que celui de vous satisfaire, surtout hors des horaires d’ouverture de l’établissement. » Finit-elle par articuler avant de se détacher doucement des deux hommes. Elle rabaissa ses jupons, et les toisa, attrapant un deuxième châle et un lien pour attacher ses cheveux en un chignon informe.

« Si vous souhaitez mes services personnellement, je suis disponible ce soir, surtout que nous sommes en plein dans les festivités au bordel avec l’anniversaire du gérant et de deux de nos filles. Si ma soirée est prise par la personne qui n’est capable d’assumer ses actes et envoie ses sbires à la place, alors soit, nous nous reverrons plus tard pour cette besogne de catin. » Lâcha en cachant ses seins et épaules via les deux morceaux de tissus. Le silence régna en maitre, pesant.

Iris, restant une fine observatrice, sourit discrètement à son assaillant. Aurait-il seulement pu utiliser les liens à des fins funestes ? Malgré le charme de la catin ? Elle en doutait fort, mais ne perdait point de vue que Victor pouvait être animé de pulsions meurtrières quand les choses n’allaient pas en son sens. Peut-être pour cela qu’elle était tant attirée par le personnage.

« Quelques pars. C’est si peu dire. » Releva-t-elle en s’approchant du paravent pour s’habiller en conséquence. Elle sortit sa longue robe de bal verte pomme dont elle était vêtue pour sa dernière mission. Un clin d’œil pour le Comte et une façon à elle d’achever leur relation si particulière. « Le Comte ne fera rien sans mon approbation. » Dit-elle d’un ton détaché. « Catin, mais maitre de mon corps Messieurs, ne l’oubliez pas. » Reprit-elle en faisant signe à l’un d’eux pour l’aider à lasser le corsage. « Rendez-vous au moins utile, et ne serrez pas trop la taille, je tiens encore à respirer et ne pas passer au bleu dans quelques minutes » Conseilla-t-elle avant de fermer ses pupilles. Elle se remémorait les derniers moments avec Victor. Elle se demandait bien quelle vie menait ses compagnes. Pour le coup, elles ne les enviaient guère.


La route jusqu’au Manoir fut douloureuse pour la rouquine. Elle avait si froid malgré son châle et la cape qui couvrait ses épaules et sa tête. Elle avait opté pour une coiffure peu structurée, avec un bijou d’ornement et un maquillage très succin, contrastant avec la tenue portée. Elle espérait que cet effet plairait au Comte.

Les portes du Comte s’ouvrirent, laissant la chaleur fouettait Iris. Elle se pinça les lèvres, les souvenirs remontant et la submergeant. Elle tenta de se calmer, prenant de profondes inspirations. La crise d’angoisse atteignit quand même son paroxysme et elle posa une main sur l’un des sbires de Victor, manquant de s’écrouler.

« Ne vous en faites pas, un corset comprime toujours la poitrine des femmes. Une douce torture. » Dit-elle rapidement pour ne point inquiéter qui que ce soit. « Emmenez-moi au chaud avant que tout ceci ne termine plus mal ». Termina-t-elle le souffle court.

Ethais porta sa main au cœur et fut escortée jusqu’au petit salon. Pourquoi diable avait-il choisi cette pièce ? Se demanda-t-elle furieuse. Il ne pouvait donc pas… Ses pensées furent coupées nettes au son de sa voix. Elle était apaisante et emplissait les lieux d’une façon majestueuse. Il n’avait pas changé d’un iota avec l’année qui venait de s’écouler. Peut-être légèrement plus ridé au niveau du visage.

S’exécutant, la jeune femme prit place sur le fauteuil, sans le quitter des yeux. Ce magnétisme ne l’avait point quitté. Cela la fit sourire doucement, animant son visage blafard. Elle ne savait comment entamer la conversation et prit le pichet entre ses mains pour se servir. L’arôme qui se dégageait était enivrant. Elle le huma doucement avant de porter la coupe à ses lèvres. Elle but quelques gorgées avant de se racler la gorge, contenant une colère profonde face à cet « oubli ».

« Comment je me porte ? Cela t’intéresses-t-il réellement ? » Demanda-t-elle d’un ton sec. « Après tout, tu as su passer au bordel pour mettre fin à ton contrat avec Fenrir, cela t’aurait-il meurtri de passer me voir ? Je ne crois pas. Mais qu’attendre de plus d’un être aussi manipulateur est cynique que toi. » Continua-t-elle, le visage s’empourprant.

Elle se leva alors, les tissus crissant au passage. Elle se rapprocha de l’âtre pour y capter la chaleur et tourner le dos à son interlocuteur.

« Le bordel coule, mais ça tu devais déjà t’en douter. Fenrir est incapable de le gérer de façon correct et seul. Mais soit, ce n’est pas ce qui me chagrine le plus en ce moment. Au pire d’autres pourront me recueillir. » Reprit-elle d’un ton plus calme et posé. Elle but une autre gorgée, se pinçant les lèvres. « Je suppose que ma présence ici relève encore d’une tes machinations. Qui comptes-tu abattre à présent ? Et pourquoi moi plus qu’une autre ? » Lança-t-elle, la curiosité l’emportant. « Mais après tout, j’en oublie les bonnes manières. Comment te portes-tu cher Comte. »

A aucun moment, Ethais n’avait eu envie de le vouvoyer, brisant le respect qu’elle lui devait vis-à-vis de son rang. La crise d’angoisse toujours présente, la jeune femme s’était trop emportée et posa une main sur le rebord en bois où séjournait des babioles. Elle prit une grande inspiration avant de faire quelques pas et de toucher du bout des doigts les ouvrages posés sur une étagère.

Ethaïs avait repris place près de l’âtre. Cette guerre intestine ne faisait que commencer. Pour son plus grand plaisir. Elle le savait manipulateur, vile et impitoyable. Cependant, il avait une faiblesse : la gente féminine. Peut-être arriverait-elle à jouer sur cette corde si fragile et difficile. La soirée s’annonçait longue et remplie d’émotions. Pour son plus grand bonheur. Pourquoi n’avait-elle pas contacté le Comte plus tot ? Etait-ce par peur d’un refus ? De son ignorance pour sa personne ? Elle se passa une main dans la nuque, le scrutant sans vergogne.

Iris goba le moindre de ses mots, son visage exprimant sa pensée. Ainsi allaient-ils jouer sur le sarcasme ? Soit, cela n’était pas son domaine de prédilection. Cependant, le reste du discours provoqua une moue sur son visage tiraillé par la fatigue et la faim. « Qu’est-ce que ma condition peut bien lui faire. » Pensa-t-elle en arquant un sourcil tout en tournant son minois vers le Comte, un sourire narquois aux lèvres. Elle détestait par-dessus tout les ordres de ce type. Il n’avait aucun droit sur sa personne, encore moins en essayant de l’intimider avec ses sbires et son argent.

La rouquine ramassa la petite bourse, sans dire mot. Elle n’allait point cracher sur cet argent si facile, cependant, elle appréciait peu la démarche du Comte. Comment pouvait-il croire qu’elle était une marchandise à acheter.

La catin s’appuya sur la poutre en bois, détournant le regard, guère impressionnée par les deux sbires qui l'entouraient. Elle haussa les sourcils, soupirant faiblement pour montrer son agacement. Son monologue était interminablement long. Pour ne point envenimer la situation, elle ne les repoussa pas, mais se dégagea légèrement pour fixer ses prunelles dans celles de Victor.

« Je ne suis point une poupée de porcelaine dont on dispose à sa façon. Si mes courbes ne s’offrent point à toi – elle insista bien sur ce point – comme tu le désires, je ne peux que te dire tant pis. » Commença-t-elle, sur un ton plus ou moins neutre. « Mais merci pour les pierres et de vouloir me tirer de ce miteux endroit. Mais t’étais-tu simplement demandé si mon désir était le tien ? Après tout… Je n’ai pas vraiment eu le choix de venir jusqu’à ton magnifique manoir. » Reprit-elle un sourire espiègle.

Elle se dégagea de l’âtre pour s’approcher du fauteuil de Victor et posa ses mains sur l’accoudoir pour lui faire face.

« Accepter de travailler pour toi ? Encore faudrait-il que ma tête se soit perdue dans un rêve lointain. Je dois donc à présent choisir entre la peste et la Fange ? » L’interrogea-t-elle s’immergeant dans ses prunelles. « Que peux-tu m’offrir de plus qu’un toit et un travail convenable ? M’enseigner l’art de manipuler les gens ? N’est-ce pas contre moral ? » Reprit-elle sans attendre de réponses particulières de sa part.

Ethais recula alors pour lui tourner le dos et fit quelques pas en direction des sbires.

« Faut-il croire que tu n’as guère confiance en moi pour que ces deux personnes soient encore ici ? Ou espèrent-ils me sauter devant tes beaux yeux ? Enfin soit Victor. Je ne connais rien en ton monde et univers, je viens du peuple, je ne sais ni lire, ni même écrire. En dehors de mon corps et charme, je ne suis guère douée. Pourquoi veux-tu perdre autant de temps avec moi ? M’enseigner un art qui demande du temps et de la patience » Questionna-t-elle curieuse. « J’ai besoin de comprendre les desseins qui se cachent derrière une telle entreprise. »

Ethaïs fit une moue, Victor avait l’art et la manière de la pousser à cran et de ne lui dévoiler que des brides de pensées. Etait-ce trop difficile de répondre à ses questions ou cela lui procurait un plaisir inimaginable de torturer la rouquine ? Connaissant le personnage, elle pencha pour la deuxième option, une oreille attentive sur la discussion. Elle n’en perdait pas une miette, tout en observant avec intérieur les flammes dans l’âtre.

Une main vint caresser sa chute de reins. Elle se pinça les lèvres, n’imaginant même pas la suite des évènements. Elle serra doucement les jambes comme pour retenir une furieuse envie qui la dévorait depuis quelques minutes. Victor oserait-il ? Elle espérait bien, après tout ce Comte était joueur, et c’était cela qui l’avait énormément attiré chez lui. En dehors de son charme naturel qui se dégageait de sa personne. Comment se faisait-il qu’il ne soit toujours pas marié ? Cependant, elle n’aurait aimé être à la place de la future promise, connaissant De Rougelac. Un coureur de jupon qui était incapable de s’arrêter, d’autant plus si ce dernier était enchainé tel un lion.

La belle Iris se dégagea des arceaux de sa robe, ainsi que des divers jupons, qui vinrent choir sur le plancher, avec le reste de sa robe. Vêtue uniquement de ses bas en laine, elle était nue, face à trois hommes. Cependant, la rouquine ne désirait capter l’intention que d’une seule et unique personne : Victor. Sa proie, sa cible. Elle le désirait ardemment, tout en souhaitant s’offrir en spectacle. Le mélanges des deux entrainaient chez la catin, un bouillonnement intense, visible sur ses joues qui s’empourpraient. Ce genre de situation était rare, mais si délicieuse. Ethais se passa, une main dans les cheveux, retirant les deux épingles ainsi que la lanière qui retenaient sa crinière. D’un geste lent, sans quitter du regard le Comte, elle les déposa sur le guéridon, reprenant sa place initiale. Le petit jeu avait commencé. Pour son plus grand bonheur.

L’attente lui parut une éternité. Il savait comment lui procurer plaisir et délectation. Il savait jouer avec les femmes. Elle craquait davantage pour cet Homme aux multiples facettes, aussi égoiste que dangereux. Néanmoins, ses promesses étaient tentantes. Elle ne devait perdre cela de vue pour son avenir. Cependant, elle y perdrait quelques plumes au passage, cela était certain. Malgré son jeune âge, Ethais n’était point stupide.



Elle se détacha de la scène pour reprendre sa place près de l’âtre. Elle n’était pas gênée par sa nudité, bien au contraire. Cependant, le feu qui s’était embarré d’elle ne descendait pas. Elle fulminait, s’embrasait et manqua de se brûler.

Iris scrutait discrètement les agissements du Comte. Assise face à l’âtre, elle avait plié ses jambes de telle façon que sa tête repose sur ses genoux. Les émotions avaient vidé le peu d’énergie de la catin et elle était bien aise d’avoir quelques minutes de répits. Pour reprendre ses esprits, pour réflechir, pour agir en conséquence. Elle n’aurait jamais pensé Victor capable d’autant d’aplomb et d’un tel geste. A présent, la crainte régnait à son égard. Cependant, n’avait-elle pas atteint certaines limites avec lui ? Elle se mordilla la lèvre inférieure à cette réflexion. « Peut-être bien, je suis tellement idiote parfois. Et je me laisse emporter par mes convictions. » Songea-t-elle en l’écoutant d’une oreille attentive sans en avoir l’air.
Ethaïs pivota sur elle-même pour mieux capter ses gestes. Elle le regarda, le fixant du regard sans gêne. Avait-il conscience de son acte ? En avait-il quelque chose à faire ? Elle espérait que oui, au fond d’elle. Pour donner encore une once d’humanité à l’être qui s’animait devant ses pupilles.

Elle ne dit mot suite à sa provocation. Elle regardait plutôt avec convoitise la corbeille de fruit mais ne se décida point à bouger du plancher, ayant trouvé une position pouvant l’observer, l’écouter et se relaxer. La rouquine poussa un soupire sonore avant de se résoudre de se lever, non sans le quitter du regard. Elle commençait à avoir froid et attrapa son chale posait sur une chaise à l’entrée du salon. Drapée, et se formes couvertes, la jeune femme saisie une poire dans la corbeille et se la croqua à pleine dents. Elle n’avait pas très faim. La contrariété lui coupant quelque peu l’appétit. Cependant, elle souhaitait faire plaisir à son hôte. Elle s’adossa au mur, de manière décontractée, finissant son fruit.

La pièce fut bercée par une douce odeur de tabac. Il était rare qu’elle se trouve en présence de fumeur, au vu du cout de l’herbe. Néanmoins, cela ne la dérangeait guère contrairement au silence pensant qui régnait en maître dans la pièce.

Iris s’avança vers la table basse, prête à faire le premier pas. Elle se saisit de son gobelet qu’elle remplit à nouveau. Elle porta le liquide à ses lèvres et but quelques gorgées avant de le reposer et de s’asseoir sur le divan.

« Qu’as-tu en tête concernant le futur bordel ? » Le questionna-t-elle d’une voix douce et curieuse. « Car je ne souhaite pas vraiment retomber sur la populace de celui de Fenrir. Puis je ne suis pas sûre de vouloir continuer bien longtemps tout ce cirque. Je vieillis et je serai rapidement remplacée par des jeunes filles bien plus belles et moins ridées…. » Continua-t-elle, sa voix se cassant en fin de phrase. « Puis, j’ai eu de la chance jusqu’à maintenant de n’avoir jamais enfanté, je ne voudrais point prendre de risques trop longtemps. Si tu peux bien le comprendre bien entendu. »

Elle se rapprocha du Comte. Posant une main sur son avant bras dont la main n’était pas prise par la pipe. L’un de ses genoux vint effleurer la cuisse de son hôte, non sans un sourire espiègle.
« Qu’as-tu en tête au niveau de mon… » Elle se mit à réfléchir, en trouvant le mot approprié. « Ma couverture ? Je suppose également que nos rencontres seront peu présentes. » Reprit-elle d’une voix légèrement attristée.

Elle prit en bouche une autre gorgée, l’alcool lui montant déjà à la tête. Elle ferma un court instant les paupières. Se laissant bercer par le crépitement dans l’âtre, elle s’allongea sur le divan, posant sa tête sur la cuisse du Comte.