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 Survivre pour vivre [PV Mathilde]

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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMar 10 Mar 2020 - 12:02
1166
Proximité d'Usson
4 Septembre

Survivre !
La base même de la condition humaine.
Nous sommes nés survivants, sans doute est-ce la volonté des Trois, raison pour laquelle nous souffrons tellement en ces temps troublés.
Dans leurs divines expériences, les Dieux cherchent à créer une espèce adaptative à l’extrême, pouvant affronter tous les dangers, tous les éléments et survivre. Pas individuellement, non. Nous avons été pensés comme une masse en mouvement. Comme une colonie de fourmis, certains disparaissent pour que survivent les autres.
Pour que survive la race.

De fait, les Trois se contre-fichent de ce qu’il advient de vous, de moi, du soldat égaré, de l’enfant terrifié, du vieillard à bout de souffle ou de la femme souffrante.
Tout cela ne les intéresse pas tant que le genre humain survit. A vrai dire, je pense même que lorsqu’il se penche sur un cas particulier, alors l’individu choisi ne souffre qu’encore plus.
Oui, je les soupçonne de, parfois, choisir un « exemplaire » de leur création pour lui infliger de terribles souffrances, tant physiques que mentales. Je ne me considère pas comme un cas unique. Je suis conscient que d’autres souffrent autant, si ce n’est plus, que moi. Je ne suis pas le martyre, témoin des exactions des Puissants. Je n’en suis qu’un déchet, un reliquat encombrant.

C’est pour cela que je me suis détaché de l’existence dans laquelle se complaisent les hommes. Structures hiérarchiques sociales, ordre religieux définis, commerce de masse et marchés financiers, tout cela n’est qu’un simulacre de contrôle, mis en place par les hautes sphères dans le but de contrôler la base. Sur fond de lutte contre la tyrannie et, plus récemment la Fange, ce ne sont que des tentatives maladroites et désespérées pour certains de s’assurer une sécurité imaginaire.

Mais tout ceci n’est qu’un masque vitreux sur un monde laboratoire. Moi, un simple élément isolé.

Survivre !
L’essence même de ce qui me fait homme. Car oui, j’appartiens malgré tout à cette espèce et, à l’image des autres représentants, je ne désire pas m’éteindre. Alors même que je n’ai rien, si ce n’est ma vie. Ce que l’on m’en à laisser.

Survivre !
C’est ce que je fais, ce que je suis.
C’est la raison de ma désertion de la milice.
C’est l’excuse que je me donne pour me trouver là où je suis.

Il fait nuit, il fait froid. Un morceau de tissus est noué autour de ma bouche et de mon nez. Non pour masquer mon identité, je ne compte pas m’attarder. Lorsque j’expire, l’eau de mes poumons se prend dans le tissu, supprimant les volutes de vapeur que je pourrais produire. Vêtu de noir, une cape cassant mes formes, sans vapeur, je suis tel un vieux buisson rachitique au pied d’un arbre, attendant depuis un temps certain mais immesurable. Une brève éternité, dirons-nous.
Le temps n’apporte rien, le temps n’est rien ni ne signifie rien. Il ne fait que passer, égrenant le décompte de la fatalité.

La dernière lueur c’est éteinte depuis huit puissantes rafales de vent et quatorze hululements de chouette. Il est donc pour moi arrivé l’instant de me couler dans la grange, à quelques enjambées de là. A l’ombre pareil, je glisse sur le sol boueux, marquant la terre de mon rapide séjour, courbé, mon couteau couvert de boue pour éviter tout reflet de l’Astre d’argent.
Un bruit sourd que fait le verrou sous ma petite lame, un grincement tranchant la nuit et me voici dans ce que j’avais bien identifié comme une réserve. Nulles étoiles à laisser passer pour rien, je me mets en quête de quelque nourriture. Quelques navets, une botte de carotte un choux rejoignent rapidement la sacoche qui me bat le flanc. Ce dont j’ai besoin, leurs récolte a été bonne, cela ne leur manquera pas. Plus ce serait trop, moins ne serait pas assez.
Mes yeux tombent sur des pommes. Je ne résiste pas et en renifle une, fermant les yeux. Ferme, odorante, lisse. J’en place deux dans mon sac.
Un bruit ! Bref, soudain ! Lumière !
Fuir ? Affronter ? Résister ?

Pas de sang, il y en eu assez.
La petite lame se retourne, longe mon avant-bras, tandis que je me redresse, capuche en tête et masque sur le bas du visage. J’offre mon dos tandis que mes bras se redressent lentement, doigts écartés. Grande silhouette noire dans l’obscurité de cette grange.
Fuite peut-être ? Combien derrière ? Gère plus que des paysans, mais c’est leur pain que je vol !
Danger ?

Ma voix, étouffée mais rauque, s’élève.

Je ne veux pas de mal !

Doucement je me retourne, focalisant ma vue sur la flamme d’une torche. Je ne distingue pas bien l’âme qui la tient. A la question s’il y en a d’autre, je ne saurais pas répondre.

Sous ma cape, dissimulés, un vieil arc usé, un carquois de quelques flèches et à mon flanc gauche, une courte épée. Ma besace battant flanc droit. Un plastron de cuir sur mon torse, par-dessus quelques couches de vêtements noirs. Des bottes sous des guêtres de fourrure.

Simplement manger et partir !

Je suis obligé de me cacher les yeux d’une main, éblouis par la lueur de la torche.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMar 10 Mar 2020 - 21:08
La nuit est tombée. Plus aucune lumière dorée ne filtre entre les planches de la grange dans laquelle elle s’est installée. Seule la lueur froide et argentée de la lune se fraie un chemin entre les interstices, éclairant à peine le grenier où elle a trouvé refuge. Emmitouflée dans sa couverture pour se prémunir du froid nocturne, les mains enserrant une tasse de soupe chaude, Mathilde Dumas soupire de bien-être. La journée a été rude et ce moment de détente, le premier depuis son lever, est accueilli comme un instant de grâce. La paillasse est presque confortable et il ferait bon y fermer les yeux. Pourtant, c’est assise, le dos bien droit contre la parois de bois que la fermière s’est installée. Elle monte la garde.

Depuis le lever du soleil, elle et les gars se sont activés dans les champs pour en extirper les légumes qui, demain, quitteront les granges pour être acheminés vers Marbrume. Le montant de la taxe royale est considérable, le tribut est lourd, mais qu’importe puisqu’il ira nourrir les dernières traces de l’humanité. Les carottes colorées, aussi irrégulières que délicieuses, ont été les premières à sortir de terre afin de passer la journée à sécher au soleil. Il en reste encore beaucoup aux champs. Semées plus tardivement, elles attendront novembre et les gelées profondes pour être cueillies. La plupart des choux ont été acheminés à l’abri des premières gelées de ce début septembre. Seuls quelques uns ont reçu une couverture de paille qui leur permettra de se gorger de sucre dès que la morsure du froid se faufilera entre les brins pour frôler les feuilles externes. Alors seulement, Mathilde les récoltera pour elle et ses gars. Une petite gourmandise que seule la patience offre à ceux qui savent attendre. Marbrume n’attend pas. Marbrume a faim. Marbrume est insatiable, alors quelques navets et oignons ont rejoint les victuailles qui seront expédiées. La vraie récolte, elle, ne surviendra que plus tard. Les légumes racines ont cette formidable capacité d’attendre presque indéfiniment que celui qui les cultive soit prêt à les consommer. Le potager de Mathilde, derrière la chaumière, en regorge.

Ne mets jamais tous tes œufs dans le même panier, Mathilde lui avait appris son père. Elle avait appliqué son conseil, en variant les cultures pour résister aux gels hâtifs et aux tempêtes imprévues, à la morsure des insectes et à la gourmandise des larves et des limaces, tout comme elle avait multiplié les arrangements pour tisser un réseau où les services restent la monnaie privilégiée. Aussi, lorsque des rumeurs de vols dans les environs s’étaient faites entendre, la fermière ne s’était pas inquiétée outre mesure. Qui pourrait bien vouloir dérober les légumes de la veuve Dumas? En apparence seulement, elle s’était montrée à l’écoute de Philippe, le plus alarmé de tous, qui avait suggéré que l’on partage en deux la récolte pour la stocker dans les deux granges, et que l’on monte la garde en attendant que le convoi parte vers Usson où il serait pris en charge par la milice. Philippe n’avait, naturellement, aucune idée des petits arrangements qui la liaient aux bannis et aux pirates, arrangements qui avaient le mérite de les garder à l’abri, elle et sa production, sans pour autant éliminer totalement la menace. Des voleurs, il y en avait pour toutes sortes de raisons, et dernièrement, le mauvais accueil réservé par la plupart des Labrétans aux mordus de la Fange avait contribué à la hausse des vagabonds, obligés de voler pour survivre. Sagement, et pour ne pas susciter de questions inutiles, Mathilde avait obtempéré. On avait divisé les récoltes en deux et une personne montait la garde dans chacune des granges. A la moindre alerte, on crierait pour que l’autre arrive en renfort.

Un plan un peu ridicule, et probablement inutile compte tenu des chances infimes qu’un voleur ne se présente, de nuit, à la ferme. Gauthier était parti à la ferme de Beauharnais et reviendrait au petit matin avec Landroval, le cheval du Comte, qui pourrait mener les victuailles à Usson. Marcus, lui, était parti à l’opposé, chez de Terresang, pour les mêmes raisons. L’Ordre avait conduit la fermière à tripler son rendement, ce qui impliquait une logistique de transport toute autre. Arthur, lui, était retourné à Usson pour s’assurer qu’on y recevrait effectivement les vivres. Dans le cas contraire, il serait le premier de retour, au petit matin, pour annuler le transport. Une fois le produit des récoltes concentré à Usson, le convoi se mettrait en branle, sous bonne garde, vers Marbrume. Cet effort de coordination serait répété à chaque envoi, pour limiter les pertes. Certains pensaient que d’autres convois partiraient à vide pour servir de leurre, permettant au vrai chargement d’éviter les embuscades tendues par les bannis et les hérétiques. Un effort bien inutile au goût de Mathilde. Si les bannis mettent la main sur des provisions qui leur permettront de tenir une partie de l’hiver, c’est tant mieux. L’humanité, dont ils font partie, résistera un peu plus longtemps au chaos de la Fange.

Le bruit sourd du verrou qui pivote la tire de ses pensées. Un instant seulement, Mathilde se fige, aux aguets. Par les Trois, Phil’ avait raison. Mathilde se libère de sa couverture et s’approche de la trappe du grenier, restée ouverte. La porte pivote sur ses gonds, produisant un grincement sonore qui déchire le silence de la nuit. Pas la peine de la huiler, Ma’. Si ça crie, ça nous avertit et on peut descendre avec les gars. Une ombre passe sans même remarquer qu’au-dessus d’elle, deux yeux l’observe. Voleur, ou âme égarée à la recherche d’un abri? Car il est de notoriété publique que le grenier est un refuge pour quiconque en a besoin. Mais l’ombre n’a pas refermé la porte, pas plus qu’elle ne monte à l’échelle. Un voleur, donc. La fermière ramasse la torche éteinte. L’intrus semble s’être dirigé vers les légumes, il lui tourne donc le dos alors qu’elle descend sans un bruit les barreaux de l’échelle, nus pieds.

A-t-elle peur? Oui. Mais pas assez que pour rester en haut et crier à l’aide. Mathilde fait partie de ces femmes inconscientes qui se pensent souvent plus fortes qu’elles ne le sont, et si ses épaules de terrienne lui donnent une allure solide, elle n’est en réalité qu’un poids plume dont on se débarrasse aisément. Prudente, elle reste à côté de l’échelle et dépose la torche sur le sol. Un bruit sec, celui d’un briquet produisant une étincelle qui enflamme la torche aussitôt. Mathilde la ramasse, alors que l’ombre s’immobilise. Elle entend son cœur battre dans ses oreilles. Sa gorge se noue, son souffle se fait plus rapide. Du calme, Mathie, Phil n’est pas loin et tu en as vu d’autres. L’ombre met ses mains en évidences, des mains qui ne sont pas armées, mais dont elle se méfie. Un couteau, ça se cache si bien dans une manche. Une épée, ça se dégaine si rapidement. L’ombre appartient à quelqu’un de plus grand qu’elle, un homme sans doute. Elle n’aura pas le dessus s’il l’attaque, elle le sait.

A l’image de la tension qui habite maintenant les corps des deux êtres, la flamme de la torche tremble. L’un des deux doit rompre le silence pesant. Je ne veux pas de mal!. Une voix rauque, dont le ton est mesuré, s’élève dans la grange. Lentement, l’ombre se retourne sans aucun geste brusque, pour finalement faire face à la fermière qui, instinctivement, tend la torche au-devant d’elle pour mieux le voir. Simplement manger et partir. Mathilde regarde silencieusement l’homme dont le visage est dissimulé par un masque, une capuche et une main protectrice. Il est armé, armé et protégé. Ses bottes ont parcouru des lieues et des lieues. Ses vêtements ne sont pas neufs, loin de là. Son idée est faite : un mordu dont la survie ne tient qu’aux victuailles qu’il peut dérober ici et là.

- C’est la première fois que je vous vois ici dit-elle en reculant vers la porte, éloignant avec elle la lumière chaude de la torche. C’est pas comme ça que ça fonctionne, dans cette ferme. Sans quitter l’intrus du regard, la fermière tend la main pour trouver la porte et la refermer. Un obstacle entre eux et un éventuel fangeux qui rôderait, attiré par l’odeur de cet homme bien imprudent. Vous devez être désespéré pour oser circuler la nuit par ici. On a signalé des fangeux, avec l’automne et les averses plus fréquentes, ils sortent plus souvent. Mathilde revient à hauteur de l’échelle. Elle n’a pour seule arme qu’une dague accrochée à la ceinture. Bien que tendue et méfiante, elle fait de son mieux pour ne rien laisser paraître. Ce n’est pas le premier intrus qui s’aventure chez elle, et jusqu’ici, rester calme a été sa meilleure stratégie.

- D’habitude, celui qui a besoin d’un abri trouve une façon de me payer en retour, en me rendant un service par exemple. De cette façon, on ne parle pas de vol mais d’échange de bons procédés. En haut, il y a une paillasse et de la soupe chaude avec un morceau de pain. Vous pouvez monter cette échelle, vous mettre en sécurité et m’aider à ne pas m’endormir en me racontant n’importe quoi. Au petit matin, je m’éclipserai et vous laisserai dormir en paix. Ou bien vous pouvez me laisser monter toute seule et vous enfuir pour courir dans les bras des fangeux, passer pour un voleur et risquer, la prochaine fois, de rencontrer l’une de mes flèches. Bien que le ton soit calme et presque courtois, la menace est claire. Mathilde laisse le choix à l’intrus : se plier à la règle simple de l’échange de services ou voler délibérément et ne pas bénéficier de la clémence de la fermière, la prochaine fois. A condition qu’il ait l’audace de revenir… et qu’il survive à la nuit. Au Labret, dès que le soleil disparait, les fangeux sortent à la recherche d’une proie.

Sans attendre la moindre réponse, Mathilde plonge la torche dans un tas de sable pour l'éteindre et monte l'échelle. La menace des fangeux est plus inquiétante qu'un voleur, et mieux vaut ne pas traîner en bas. Une fois revenue dans le grenier, sommairement aménagé pour des voyageurs de passage, elle allumera une bougie histoire de donner un peu de lumière à l'intrus.
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMer 11 Mar 2020 - 12:19
Une femme !
La voix qui s’élève ne ment pas, il s’agit d’une femme. Même si je ne la distingue pas. Seule !
Danger ? Moyen !

Elle ferme la porte, elle est seule.
Danger faible !

Elle n’a pas une attitude hostile, pas plus pas moins que n’importe qui se faisant dérober ses vivres.
Je n’avais pas vu l’échelle, je ne m’étais pas méfié de l’étage.
Erreur !
Elle explique. De nuit, se déplacer est dangereux, à cause des fangeux. Que dans cette ferme, le vol n’est pas un bon fonctionnement. Que c’est le désespoir qui doit me guider pour oser affronter fange et éléments.
Elle retourne au pied de l’échelle, dague au flanc et torche à la main. Je peux baisser la mienne, je ne suis plus aveuglé.

Vous n’auriez jamais du me voir mais, à la réflexion, si vous étiez au dessus, c’est que je ne suis pas le premier.

Elle reste calme, bien que je note une sévère crispation. Aucune chances contre moi si j’attaque, cela m’étonnerais qu’elle ai vu mon couteau, dans ma main. Je risque un coup de torche, désagréable. Mais le danger réel, ce serait qu’elle aurait le temps de crier, de lancer une alerte.
Mais elle ne se montre pas agressive. Je n’ai pas pour projet de faire du mal.

Le désespoir n’est pas une fatalité, l’évoquer pour justifier d’un crime est bien souvent falsifier la réalité. Non, je vous vol car j’ai faim.

Elle me donne alors le choix. Elle ne s’opposera pas à moi. Je puis prendre ce que j’ai volé et fuir dans l’ombre de l’astre d’argent, m’exposant à des représailles sévères la prochaine fois.
Ou bien, l’accompagner à l’étage, en sécurité, dans une chaleur relative, l’aider à veiller contre des éventuels autres tels que moi, en racontant des choses. Raconter ?
Compliqué !
Mais cela me permet un temps de repos par la suite, un accueil meilleur, à manger.
Un échange, comme elle l’a dit.

Je l’observe éteindre la torche, il me faut quelques instants d’accoutumance, que mes yeux se réhabituent aux ombres. Je la distingue monter, me laissant voir son dos, large, de Dame de la terre.

J’ai vu, non pas des fangeux, mais un groupe de bandits, à une demi-journée d’ici. Peut-être six. Venant vers ici. Ils se déplacent lentement mais bien cachés. Ils ne m’ont pas vus, je suis seul. Plus discret.

Je ne sais pas si lui avouer que personne ne m’attend dehors la rassure, il n’y a qu’un seul adversaire, ou l’inquiète, sur les capacités d’un homme à survivre seul.
Mais elle ne me donne pas de raison d’être dangereux. L’agression ne viendra pas de moi. Je monte à la suite de la femme.
A l’étage, de la paille sur le plancher, une bougie qui éclaire l’espace, un bol de soupe et un croûton de pain.
Je suis face à elle, plantant mon regard marron dans le sien, noisette. Son âge est proche du miens semble-t’il.
Je l’observe de pied en cape, rapidement.
Une femme solide, aux épaules volontaires et résistantes, pas seulement sur le plan physique. Son visage, malgré la méfiance, est doux, sans malice.
Je lui montre alors mes mains, aux doigts bien écartés pour prouver l’absence de violence, mais exposer mon couteau à la lame boueuse. Le danger, pour elle, était présent depuis le début.

Vous avez ma parole que je ne ferais rien du moment qu’on ne m’en donne pas de raison.

La petite lame disparaît dans une botte. Je retire ma cape que j’accroche à un clou puis dépose mon arc, mon carquois et mon épée, avec sa ceinture. Je laisse tomber ma sacoche et viens m’accroupir devant la paillasse.
Je la jauge du regard et retire le tissu de mon visage.

Eric !
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyJeu 12 Mar 2020 - 15:55
Vous n'auriez jamais du me voir. Mathilde n'avait pas réagi, en apparence seulement. Il n'avait pas tort, c'était la première fois qu'elle montait la garde dans la grange. C'était la première fois qu'elle était aussi occupée par les victuailles fraîchement récoltées. Avant la Fange, on récoltait le matin-même de l'envoi. Le convoi se mettait en branle et ne s'arrêtait qu'à Marbrume alors que les responsables se relayaient aux quatre ou cinq lieues, et que les chevaux étaient échangés avec d'autres, plus reposés. Un jour et demi au lieu de quatre, maintenant, quand tout va bien. Les légumes perdent en fraîcheur, mais c'est le prix à payer pour éviter les attaques du fléau.

Je vous vole car j'ai faim. Si la phrase est anodine, elle a le mérite de clarifier déjà un certain nombre de choses. A l'inverse du rouquin, cet homme dont elle ne distingue finalement que la silhouette générale et maintenant le regard sombre est seul. Ce soir il ne vole que pour lui, personne n'attend qu'il rentre dans une hypothétique planque pour partager un festin. Pas de protégés, ni de revente sur le marché noir en vue. Et probablement pas d'acolytes non plus. Quelque part, cette simple phrase, malgré l’aveu qu'elle constitue, rassure la fermière qui remonte, tournant ostensiblement le dos à ce potentiel ennemi qui pourrait aisément s'élancer sur elle pour la neutraliser.

Mathilde le sait, la confiance est une chose difficile à gagner, au moins autant qu'elle est difficile à accorder. Tourner le dos à l'intrus est un geste calculé, un premier pas qu'elle fait, une main qu'elle tend. Je ne suis pas une menace pour toi, et j'ose croire que tu n'en es pas une pour moi. Si l'intrus s'enfuit, elle ne le poursuivra pas.

Les mots qui jaillissent dans la nuit la surprennent. Non seulement il ne part pas, mais en plus il l'informe de la présence de voleurs de grand chemin dans les parages. Deux granges, c'est signe d'abondance, ça attire nécessairement la convoitise. Demain, au petit matin, la ferme grouillera de vie, ce qui découragera peut-être une tentative de vol. Six hommes, c'est tout de même beaucoup. Ça vous déleste d'une sacrée partie de la récolte en un rien de temps. C'est embêtant.

La lueur de la petite flamme suffit à réchauffer l'atmosphère pourtant tendue. L'étranger monte, lui aussi. Il ne la perçoit pas comme une menace, et s'il en devient une, elle saura au moins lui planter sa dague dans les entrailles avant qu'il ne profite d'elle. Elle hurlera, Philippe viendra à son secours. Philippe est sa garantie de survie, sa carte secrète au cas où les choses tournent mal. Inspirer la confiance à quelqu'un est une chose, accorder la sienne à cette personne en est une autre. Dans un geste pacifique, l'homme dévoile ses mains et la lame dont il aurait pu se servir pour l'égorger proprement. Vous avez ma parole que je ne ferai rien du moment qu’on ne m’en donne pas de raison Elle hoche de la tête. Pas la peine de lui répondre qu'elle l'aurait brûlé vif à la moindre menace, en bas, quitte à regarder sa grange passer aux flammes.

L'homme s'installe, comme le ferait n'importe quel invité dans ce grenier. Mathilde prend le temps de le détailler, lui et son vieil arc. Un archer, comme elle. Où a-t-il appris à tirer? En chassant, comme braconnier? Dans la milice? Ça expliquerait aussi l'épée. A moins qu'il ne soit un noble qui a tout perdu avec la Fange. Ou un banni. Les possibilités sont multiples. Son regard est fier, déterminé. Il est loin d'être désespéré. Le crâne rasé, dépourvu de cicatrices apparentes, chose assez rare qui mérite d'être soulignée. Pas de traces de coups non plus.

- Mathilde répond-t-elle à l'homme qui semble se présenter. Encore debout, la fermière ouvre une petite marmite installée au creux d'un nid de paille. Elle y plonge un bol pour le remplir de soupe encore chaude, en essuie les parois et le tend à son invité. Bienvenue dans ma ferme. Et bienvenue dans la région, j'imagine. Si j'avais su que j'attendais un invité pour la nuit, j'aurais prévu un peu de lait. Il faudra attendre demain matin.

Mathilde récupère sa couverture pour s'emmitoufler à nouveau. Si la rencontre a eu le mérite de lui donner un coup de chaud, elle sait qu'elle frissonnera bien vite, une fois la tension retombée. Elle s'asseoit sur le sol, dos au mur, et tend la main pour récupérer sa soupe à peine entamée. Il m'arrive de poser des questions embarrassantes. Il suffit de ne pas y répondre. Je préfère le dire avant que vous n'ayez l'impression que je suis une menace pour vos secrets. Elle sourit. Des secrets, elle en a, elle aussi. Des secrets qui la mèneraient à l'échafaud s'ils se savaient. Et si le dénommé Éric n'a pas prononcé les noms des bannis qui la protègent, c'est qu'il ne fait pas partie de leur groupe. Elle évitera soigneusement d'en parler. Le couteau, c'est pas la meilleure idée quand le soleil ne vous protège pas des fangeux. Le sang les attire. Si vous poignardez quelqu'un, non seulement vous risquez de créer un fangeux en ne prenant pas le temps de lui trancher la tête et de brûler le corps, mais en plus vous augmentez vos chances d'être pisté à cause de quelques traces de sang sur vos vêtements. Personne vous a dit que le Labret et les fangeux, c'était une grande histoire d'amour? Les gens de la ville nous prennent parfois pour des condamnés à mort.

Elle rit doucement. Les condamnés sont ceux qui vivent en ville, sans possibilité de cultiver leur nourriture. Elle plonge le nez dans sa soupe. Elle sera froide, au petit matin, même si la paille est sensée préserver un peu de chaleur autour de la marmite. Elle ne redresse la tête que pour désigner le quignon de pain et le couteau. Servez-vous. Y a du fromage dans le paquet à côté du pain. la demi douzaine de bandits, ça vient avec un cheval et une charrette ou ils ont juste leurs bras pour emporter tout ce qu'ils peuvent à votre avis?
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyVen 13 Mar 2020 - 0:44
Elle m'observe.
Comportement normal lorsque l'on rencontre quelqu'un pour la première fois et que ce n'était pas prévu. D'autant plus normal lorsque la personne qui entre dans votre existence le fait en vous volant. J'ai l'habitude que l'on m'observe. Je n'ai jamais été chez moi, je n'ai jamais été réellement admis. Toujours l'étrange, toujours le bizarre. Je ne m'en formalise pas et laisse faire. Elle ne fait qu'analyser l'intrus.
J'apprends alors qu'elle se prénomme Mathilde. Je hoche la tête pour indiquer que j'ai bien entendu.

Elle me tend un bol de soupe fumante après avoir pris soin d'en essuyer les contours et me souhaite la bienvenue dans sa ferme. Ce qu'elle ajoute ensuite...
Plaisanterie! Tentative de détendre une éventuelle tension. Malgré mes promesses de ne rien lui faire, elle reste tendue.
Normal!
Je l'observe s'enrouler dans une couverture, bien qu'il ne fasse pas particulièrement froid dans la pièce. Mais elle aura froid, plus tard, elle le sait. Si elle à chaud, c'est de mon fait. J'ouvre ma sacoche et lui tend l'une des deux pommes que j'ai piqué en-dessous de nous.

Merci de ne pas m'en vouloir, Mathilde.


Elle s'installe contre le mur, attrapant son propre bol. Puis, elle explique qu'il lui arrive de poser des questions étranges et que si je le souhaite, il me suffit de ne pas répondre. Je note qu'elle me vouvoies.
Sourire!
Je l'observe, plissant brièvement les yeux. Le mot secret déclenche certaines réflexions en elle. Ce ne sont pas des secrets sur un emplacement de réserve de nourriture. Plus importants.
Elle me parle alors de mon couteau, m'annonçant que c'est un mauvais choix, que plein de sang il attire la fange ainsi que tout le discours habituel sur les risques afférant aux morts non brûlés. J'apprends, en revanche, que les fangeux sont très présents dans le secteur. Je ne suis pourtant pas très loin d'ici en général et n'ai pas remarqué plus d'activité fangeuse que cela.
Je hoche la tête.

La mort viendra par la ville, pas des champs.

Je goute la soupe, elle est bonne, chaude. Je pose le bol et retire mon couteau de ma botte. Je le pose à côté d'elle.

Couvert de boue séchée sauf sur le fil, si j'avais eu à m'en servir, il aurait conservé son tranchant mais n'aurait pas été tâché. Quelques coups sur un tronc et la boue tombe. J'ai l'habitude, je vis seul à l'extérieur et c'est ainsi que je chasse.

Elle boit sa soupe et m'indique de me servir en pain et en fromage, demandant ensuite plus d'informations sur les bandits que j'ai repéré.
Je me saisi du pain et en coupe deux tranches pour lui en donner une puis je réitère avec le fromage.

Six bandits, peut-être un peu plus, je n'ai vu que deux arcs, dont un artisanal, les autres ont des bâtons. Surement quelques couteaux. Ils sont à pieds et pas vraiment dangereux selon moi. Si ce que tu dis sur la présence des fangeux dans les parages est vrai, demain ils ne seront plus que cinq.


Je finis mon bol de soupe, le pose et me redresse. Je me retourne et décroche les attaches de mon plastron de cuir fatigué tout en parlant.

Si besoin de bras ici, à mon avis, tirer une flèche à leur pieds et leur faire déposer les armes. Ce sont des bandits, mais poussés par la faim.


Je m'arrête, l'armure à moitié enlevée. Mes yeux droit sur elle.

C'est le désespoir qui les guide. Se montrer agressif les fera paniquer et ils attaqueront. Montrer de la fermeté et qu'ici il y a une chance, c'est redonner espoir.


Mon plastron fini au sol avec le reste de mon matériel et j'enlève ma tunique, dévoilant mon dos à la faible lueur de la bougie. Elle apercevra peut-être quelques cicatrices mais ce n'est qu'à la lumière du jour qu'elle verrait vraiment l'étendue des dégâts. Là, rien de vraiment particulier pour un vagabond. Je récupère une petite couverture dans ma sacoche et la pose sur mes épaules. J'attrape ma tranche de pain et m'adosse au mur. Je croque le pain, ferme les yeux et pose la tête contre le mur.

Tu te défends bien à l'arc non? Quand les bandits arriverons, tu pourras les accueillir, je resterais sur l'angle est, caché, au cas où cela se passe mal.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyVen 13 Mar 2020 - 14:34
La mort viendra par la ville, pas des champs. Mathilde n'a pas pu s'empêcher de sourire. Au moins ils sont d'accord sur ce point : la menace, c'est la ville.

Elle l'écoute. Le couteau, couvert de boue séchée, peut rapidement être nettoyé. Intéressant. Elle n'a jamais vu ça, mais elle n'a jamais vraiment fréquenté des chasseurs ou des coureurs de bois. Je vis seul à l'extérieur. S'il est marqué, elle finira par le savoir, même si l'information n'est pas primordiale à ses yeux. Elle saisit la tranche de pain puis le morceau de fromage qu'il lui tend. Serviable. Il répond à sa question au sujet des bandits. Deux arcs, des bâtons, potentiellement des couteaux. Un attirail léger qui permet de grimper, au besoin, dans un arbre pour se mettre à l'abri. Des gens qui n'ont pas l'argent nécessaire à l'achat d'une épée, ni le courage d'en dérober une à un mort. Ils ne tuent probablement pas. C'est un bon point. Elle hausse les épaules.

- Ils seront chanceux s'ils ne perdent qu'un compagnon. Les fangeux sont comme des fouines dans un poulailler. Ils tuent dans une frénésie folle. Je les ai vus à l'oeuvre.

Elle se tait et ferme les yeux pour chasser une image, fugace. Un souvenir du Chaudron. Elle ne les rouvre que pour voir Éric se lever et se débarrasser de son plastron. Des bandits poussés par la faim que quelques flèches devraient décourager. Elle n'y croit qu'à moitié. La faim peut faire faire n'importe quoi à un ventre affamé, y compris risquer sa vie au milieu de la nuit pour tenter de trouver une réserve de nourriture. Peut-être que ces hommes, ce soir, sont assez désespérés que pour commettre leur premier crime. Peut-être pas. Éric parle de rendre espoir. N'est-ce pas ce qu'elle vient de faire, pour lui? Le plastron touche le sol, mais l'homme ne semble pas vouloir s'arrêter en si bon chemin. Il ôte sa tunique, et les yeux de Mathilde se posent ailleurs, par pudeur. Oh elle a déjà vu des hommes torse nu, évidemment, mais là, seule avec lui dans en pleine nuit, ça n'a rien d'aussi anodin qu'un paysan se libérant de sa chemise trempée de sueur pour sécher sa peau au soleil de l'été. Sous la couverture, une main quitte le bol pour trouver la poignée de sa dague, un contact rassurant. Du coin de l'oeil, elle saisit le mouvement de la couverture dans laquelle il s'enveloppe.

- Vous êtes un bon observateur. Vous décrivez l'équipement et l'allure des gars. Un vrai chasseur. Elle ne relève les yeux que lorsqu'elle est convaincue qu'il n'est plus à demi-nu devant elle. Ou bien homme d'armes, reconverti en vagabond? Mercenaire? Dans l'obscurité, les joues de la fermière rougissent à peine, alors qu'elle se tait subitement. Questions indiscrètes, il faut arrêter. Elle a souvent joué à observer les gens pour en deviner la vie et les secrets. Les vêtements, la coiffure, la qualité des armes et le port de tête sont autant d'indices qui permettent de distinguer le noble du bourgeois, le paysan du marchand ou le vagabond du voleur. En s'approchant suffisamment, les yeux peuvent repérer l'état des mains, un bijou dissimulé ou encore un parfum subtil qui indique que le fermier n'en est pas réellement un. Alors, l'imagination fait le reste, et en fait un espion à la solde d'un riche noble chargé de comploter contre un bourgeois dont l'ambition est d'épouser une femme convoitée par deux soupirants. Les secrets ne sont jamais dévoilés, mais Mathilde a développé le don de se raconter des histoires extraordinaires.

- Je ne peux pas les accueillir ce soir. Je laisse toujours un peu de nourriture et une couche pour une personne, ici, mais jamais plus. Je n'en ai pas les moyens. Tout le monde ici sait qu'on peut se présenter à la Dumas et monnayer un abri contre un peu de travail sur la ferme. Il y en a toujours, et on est tous bien contents de pouvoir profiter parfois des conseils d'un ancien charpentier, mercenaire ou herboriste dont la fange a bouleversé la vie. Éric est peut-être réellement un chasseur ayant accompagné, autrefois, les chasses des nobles. Peut-être était-il le pisteur chargé de trouver le gibier, pour qu'ensuite les comtes, barons et autres titrés n'aient plus qu'à s'élancer à travers la forêt, à la poursuite de la pauvre bête. D'après vous, ils sont à combien de temps d'ici? Mathilde songe qu'elle devrait aménager une trappe pour avoir un accès direct sur le toit et s'offrir un perchoir extraordinaire depuis lequel elle pourrait cueillir les voleurs d'une flèche bien placée. Elle regarde son arc, posé un peu plus loin et prêt à être utilisé. Il l'a remarqué. Il a vraiment l'oeil, probablement pour anticiper les emmerdes. C'est sans aucun doute ce qui lui permet d'être encore en vie. La fermière songe à Philippe, dans l'autre grange, et espère secrètement que la bande de voleurs choisisse une autre cible que sa ferme. Dans le pire des cas, ils seront trois pour les repousser, sans effusion de sang... Sinon ce sont les fangeux qui vont arriver.
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptySam 14 Mar 2020 - 17:14
Les fangeux tuent en frénésie, en effet, mais ce n’est pas un groupe soudé. C’est un groupe par nécessité de groupe. Au premier tombé, le reste fuira à toutes jambes. Cela ce voit à leur déplacement.

Je sais qu’elle observe, même brièvement lorsque je retire ma cuirasse. S’interroger sur ce que fait un inconnu, normal.
Je ne me préoccupe pas de ce qu’elle peut penser lorsque je retire ma tunique. Je ne dissimule pas d’autre armes, c’est tout ce qu’il m’importe à ses yeux.
Elle me dit que j’observe bien, que je suis un chasseur. Elle hésite et suggère un homme d’arme ou un mercenaire.
Curiosité !

Les yeux toujours fermés, appuyé contre le mur, je réponds, naturellement.

J’ai été archer dans la milice quelques temps. J’ai déserté car je ne supportais plus les bannissements. Ces pauvres personnes qui n’ont rien demandé et se font expulser.

Je croque mon fromage avant de poursuivre.

J’ai appris à observer bien avant, lorsque j’étais esclave de brigands. Je n’ai aucuns véritables souvenirs, mais mon sens de l’observation je l’ai développé durant ces années là. Je suppose que c’est grâce à lui que je suis assez habile à l’arc.

Je rouvris les yeux et l’observais. Elle m’expliqua qu’il était impossible de les accueillir tous ici, qu’il fallait aller vers Dumas. Elle demande dans combien de temps ils seront arrivés. Son regard se porte sur son arc que je repère alors à mon tour.

S’ils arrivent ici, ce sera demain. Ils cherchaient à camper lorsque je les ai passé. Ce n’est pas la présence de cet arc qui m’a fait penser que tu savais tirer. Mais en tombant sur moi, tu es restée calme et tu n’as pas tremblé, malgré la peur. C’est le propre d’un archer de rester serein face au danger.

Elle semblait hésiter à me parler, comme si elle n’osait pas poser tout haut les questions qu’elle avait en tête.
Male à l’aise !
Sans doute suis-je responsable de sa perturbation.
Elle est à cran, tendue. Il n’y a pas que moi. Des rumeurs serait-elles parvenues sur des pillages ? J’ai entendu d’autres fermiers en parler.

Tu n’es pas obligée de veiller toute la nuit. La seule surprise de la soirée est devant toi. J’ai fais trois fois le tour des environs avant d’entrer, pour assurer mes arrières. Il n’y a personne.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyDim 15 Mar 2020 - 13:05
Archer dans la milice, c'est une aubaine. Aymeric a peu de temps, en ce moment, pour partager un entrainement qui pourtant lui est plus que nécessaire. Sa blessure à la main est guérie, et si elle a repris ses séances quotidiennes, elle doit admettre qu'elle a pris de mauvais plis et que sa précision en est affectée. Peut-être qu'Éric acceptera de lui donner quelques conseils, demain matin.

Mathilde ne peut s'empêcher de froncer les sourcils lorsqu'il admet avoir déserté à cause du sort réservé aux nouveaux bannis. Elle peut le comprendre, même si déserter est un geste d'une gravité folle. Les mordus sont des victimes de la fange qui n'espéraient pas être exilée de la ville dans laquelle se trouve leur famille, leur métier, leur vie... en plus d'être une menace pour le Labret. Mis au ban de la société, ils sont obligés de voler pour survivre. Quel est le sort réservé aux déserteurs? Elle n'en a aucune idée, mais s'il vit seul comme un vagabond, c'est qu'il n'y a pas de place pour lui dans la société.

Éric poursuit, esclave de brigands. Mathilde met un temps avant de comprendre, et elle ne peut pas masquer son étonnement, mêlé à un sentiment d'empathie profonde. Elle n'a aucune idée de ce à quoi a pu ressembler son passé, mais le mot esclave suffit à trahir une existence difficile. Comment a-t-il été libéré? Mathilde n'ose s'avancer dans les questions qui, pourtant, lui brûlent les lèvres.

C'est le propre d'un archer de rester calme et serein face au danger. Elle sourit légèrement. Ce qui explique ton propre calme quand j'ai allumé ma torche. Ils arriveront demain, avec un peu de chance. Ils se feront cueillir par une solide troupe armée. Elle hausse à peine les épaules. Même si elle le voulait, elle ne pourrait pas les aider. Elle ne peut pas aider tout le monde, elle le sait. Éric lui assure qu'elle est en sécurité.

- C'est culotté de se promener la nuit. L'automne ramène les pluies, les pluies ramènent les fangeux. Vous êtes chanceux jusqu'ici, mais cette chance ne durera pas éternellement. Ce sont nos imprudences qui permettent à la Fange de gagner du terrain sur ce qu'il reste de l'humanité. Mathilde dépose son bol, maintenant froid, et grignote sa tartine improvisée, lentement. Elle veillera, ne serait-ce que parce qu'elle ne peut pas s'empêcher d'être sur ses gardes face à cet inconnu, une attitude bien normale d'une femme isolée face à un homme visiblement plus fort qu'elle et qui pourrait choisir de profiter de la situation. J'espérais que tu ne m'attaques pas, honnêtement. C'est une bonne année, aux champs, je sais que la faim tenaille beaucoup de gens mais en offrant quelques services, n'importe qui ou presque peut espérer être payé avec un bon repas. C'est plus compliqué pour les mordus. Le Roi ne leur a pas facilité la tâche.

Mathilde se tait et grignote en regardant Éric. Comment fera-t-il, cet hiver, pour survivre? Quitter la milice au début de l'été est une chose. Même si les bois sont dangereux, les ressources y sont abondantes surtout pour un bon chasseur. Tu les as tués, les brigands qui te retenaient? La question est sortie de sa bouche avant même qu'elle n'ait pu la retenir. Mathilde rougit légèrement. Merde.
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMar 17 Mar 2020 - 22:48
Elle écoute. Attentivement.
Si parfois, parler revient à jeter des choses dans des oreilles sourdes, ce n'est présentement pas le cas. Mathilde est une femme qui écoute les histoires. Elle s'en nourrit. Elle s'en abreuve. C'est une femme qui cherche à savoir, ses yeux le disent.
Elle est attentive à mes paroles et à mon explication quand au fait que j'ai deviné qu'elle maniait l'arc. En effet, cela explique aussi mon propre calme, en partie tout du moins.

Si je suis resté calme, c'est surtout parce que j'étais presque certain de ne pas avoir à faire à des miliciens. Pas de bruit de pas, pas de bruit d'armure ou d'épée qui tinte. Par la suite j'ai sus que tu étais une femme, puis que tu étais seule et, désolé de te le dire, j'ai perçu la crainte dans ta voix.

J'ai terminé mon pain et mon fromage. En tendant le bras, je sens que ma cape est toujours trempée, cela va être compliqué de dormir dedans. D'autant que sans feu, elle sera encore humide demain. Dormir dedans, c'est chercher la maladie.
De son côté, elle dit qu'il est inconscient de marcher, de nuit par ce temps. Que c'est chercher les problèmes avec la fange. Que ce sont les inconscients qui donnent cette avance à la fange. Que ces comportements mettent à mal le restant de l'humanité.
Je l'observe manger sa tartine, mes yeux se plissent en observant les muscles de sa mâchoire puis ses yeux.
Sa confiance, je ne l'ai pas.
Surprise? Non!

Elle avoue avoir espéré que je n'en vienne pas aux mains, affirmant que la récolte avait été correcte et assurant que, dans la mesure du possible, un repas et un endroit sec attendait ceux qui prêtaient de leur temps et de leur effort. En revanche, ici comme partout, quiconque présente une morsure...

L'humanité?
Peut-être bien que l'humanité n'est as vouée à l'éternité sur cette terre. Après tout, il suffit de voir ce que les humains se font subirent les uns aux autres. Je ne parle pas seulement de mon cas, mais combien n'ais-je pas entendu parler des anciennes guerres entre puissants? De tous les temps, les hommes se sont entre-tués. Qu'il y ai ou non une raison, les hommes se massacrent. Mais comme il suffit d'une raison comme les Trois, l'indépendance d'une région ou même l'honneur d'un père pour mener l'homme sur les sentiers du conflit, je ne suis pas surpris de l'état dans lequel est l'humanité aujourd'hui.

Je défais mes guêtres en douceur avant de les lancer sur une poutre, non loin de l'échelle. Mes chaussures rejoigne le reste de mon maigre équipement.

Je te l'accorde cependant, toute l'humanité n'est pas tournée vers le conflit. Il y a ce vieil homme, qui m'a raconté ma détention par des brigands. Il pris soin de moi durant tout ce temps et même après notre libération par l'armée. C'est lui qui me raconta alors que des brigands m'utilisaient pour dépouiller des voyageurs, me maintenant ivre de vinasse pour que je sois docile et que cela avait duré sept ans. Sept ans dont je n'ai aucun souvenir.
Comme exemple d'humanité, il y a toi, ici. Qui accueille un vagabond armé pour la nuit, lui offrant repas et abri. Tu conserve ta méfiance envers moi, ce qui est normal.


J'eu un sourire bref.

Peu de personnes m'ont un jour fait confiance, il semblerait que je sois trop étrange.

En revanche, sa dernière question me pris un peu de cours. Nous étions loin des questions posées jusqu'à présent. Elle confirmait cependant mes pensées à son sujet. Son oreille alerte, son oeil vif et son esprit adroit. La curiosité est son met de prédilection. Je marquais une temps silencieux, l'observant droit dans les yeux.

Si je les ai tués?


Puis-je lui faire confiance?
Oui, je suis certain que oui!
Je ne répondis pas, me contentant de me lever et de m'approcher d'elle doucement. Toujours silencieux, je ramassais la bougie puis me redressais. Je lui lançais un dernier regard, et me retournais, laissant tomber ma couverture au sol. J'approchais la bougie du creux d'entre mes reins, illuminant mon dos et ses nombreuses marques. Certaines, mal guéries à l'époque, formaient des cicatrices tordues, un dos lacéré comme une vieille cuirasse de fer usée. La petite flamme tremblante de la bougie n'éclairait sans doute qu'un tiers de mon dos marqué.

Quand bien même je leur dois cela, quand bien même on m'a donné l'occasion de les mettre à mort, non, je ne les ai pas tué.

Je me retournais et lui tendis la bougie, ramassant ma petite couverture.

Trop de sang à coulé, trop de sang coule encore aujourd'hui. Quand bien même ce fut beaucoup le mien, je n'ai pas considéré que leur mort m'aurait offert sérénité ou tranquillité. Je rechigne à verser le sang. D'autres s'en charge assez bien à ma place.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyDim 22 Mar 2020 - 13:40
J'ai perçu la crainte dans ta voix. Mathilde sourit devant ce constat un peu navrant qu'elle se fait : seule, femme sans défenses ou presque, elle s'est aventurée à aller au devant de l'ennemi pour sauver sa récolte. Évidemment, elle avait eu peur, et la méfiance ne l'a d'ailleurs pas quittée alors qu'Éric lui parle, là dans la demi pénombre. Il a beau dégager un certain calme, il ne serait pas le premier à passer de la sérénité à la colère violente en une fraction de seconde.

Peut-être bien que l'humanité n'est pas vouée à l'éternité sur cette terre. Elle écarquille les yeux. Comment les créatures des Trois ne pourraient-elles pas être éternelles? Et comment un être humain pourrait-il aller à l'encontre de son instinct de survie, qui le pousse à faire tout ce qu'il faut pour ne pas mourir, quitte à voler, quitte à tuer? Éric évoque les guerres des nobles, qui ont causé des morts. Il n'a pas tort, mais les nobles sont ce qu'ils sont : d'étranges êtres humains manquant souvent cruellement de bon sens. Heureusement, il y a parmi eux quelques exceptions. Elle pourrait rétorquer qu'effectivement, les hommes ont le don de s'entretuer alors que les femmes, elles, ont la sagesse de résoudre leurs conflits par les mots... pas toujours jolis à entendre, mais ils restent moins mortels. Mathilde préfère garder le silence. Une femme ne dit pas ces choses-là. Si Darius éclaterait de rire en l'entendant, Éric, lui, fait peut-être partie de ceux qui considèrent qu'une femme ne devrait même pas être responsable d'une ferme.

Éric se libère de ses guêtres et de ses chaussures. La fermière songe qu'il n'aurait pas craché sur un bon feu de bois pour se sécher le corps et l'âme. Au lever du jour, elle lui offrira de troquer ses vêtements contre ceux de son père, le temps qu'ils sèchent. L'homme revient sur le sujet des brigands, et sur sa détention forcée durant sept longues années. Elle ne peut s'empêcher de se demander comment il n'a pas eu la présence d'esprit de s'ôter la vie. L'instinct de survie, Mathilde. Éric pointe sa méfiance, elle sourit. Démasquée. Il semblerait que je sois trop étrange. Son sourire s'étire. S'il savait... des gens étranges, elle en connait. Elle a croisé de sacrés énergumènes tout au long de sa vie. Éric garde le silence, elle ne bronche pas, soutenant son regard vif. Si je les ai tués? Il s'approche d'elle. Dans son estomac, une curieuse sensation se fait ressentir... la peur. Encore elle. Sous la couverture, la main de la fermière retrouve la rassurante poignée d'une dague bien aiguisée. Mais Éric se redresse avec la bougie, se retourne, laisse tomber sa couverture...

- ... euh...

Mathilde est horriblement gênée et détourne le regard. Un homme à demi nu. Mais bon sang qu'est-ce qu'ils ont tous? Depuis la Fange, c'est comme s'ils s'étaient tous passé le mot. Le maître-chien, les bannis, le chevalier, le milicien,... qui d'autre? Pourquoi? A-t-elle dit quelque chose comme Mets-toi à l'aise, je m'occupe de tout? Pas du tout. Pourtant, ce vagabond décide de se découvrir sous ses yeux. Elle déglutit, jette un oeil l'espace du seconde, le temps d'apercevoir de sales cicatrices, nombreuses et probablement pas toujours bien soignées. Son regard retrouve le plancher alors que le rouge lui monte aux joues. Non, je ne les ai pas tués. Ce n'est que lorsque la flamme de la bougie se rapproche d'elle qu'elle tend la main pour saisir la chandelle. Je rechigne à verser le sang. Il a ramassé sa couverture, mais lorsqu'elle relève les yeux vers lui, elle réalise qu'il ne l'a pas remise sur ses épaules.

- Pardonnez-moi, pourriez-vous juste euh... enfin... c'est un peu gênant comme situation. Adossée contre la parois, Mathilde se garde bien d'esquisser le moindre mouvement qui pourrait induire une méprise sur ses intentions. Je les aurais tués. Tous. Je le sais parce que j'ai encore envie de tuer celui qui m'a fait ça. Elle lève la main gauche pour éclairer sa paume, barrée d'une large cicatrice causée par le contact de sa chair sur une lame chauffée à vif. Mon humanité a ses limites.

Mathilde garde le silence un instant. Essaie-t-il de la ménager en lui disant qu'il n'a pas tué ceux qui lui ont volé sept années de vie? Peut-être. Elle a versé le sang, pour qu'on ne verse pas le sien. Elle le fera encore, même si le contrecoup est toujours difficile à gérer... c'est la loi de la Fange. Elle soutient le regard perçant de l'homme qui lui fait face. Pourquoi vagabonde-t-il, maintenant? Pourquoi n'a-t-il simplement pas menti sur son identité pour se refaire une vie quelque part, dans un quartier populaire de Marbrume ou au fin fond du Labret?

- Et maintenant, c'est quoi le plan? Profiter de votre liberté et survivre aussi longtemps que possible en volant les honnêtes gens?
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyDim 22 Mar 2020 - 16:14
Elle se tendait alors que j'approchais, bougeant sous sa couverture. Si elle avait une arme de dissimulée, sans doute venait-elle de s'en saisir. Elle se redresse sous le tissu, laissant échapper une hésitation alors que je suis juste à ses côtés. Je ne m'occupais pas de savoir si me voir torse-nu la dérange, là n'est pas le but.
J'entends sa déglutition, je sais qu'elle à vu ce que je voulais lui montrer. Alors, je lui rends la bougie et ramasse ma petite couverture. Sa voix s'élève, hésitante et mal assurée, me signalant le malaise qu'elle éprouve à me voir ainsi dénudé.
De la gêne?
Cela y ressemble, je ne connais pas vraiment!

Pardon!


Je rabat donc ma couverture sur mes épaules tandis qu'elle me montre sa main. Une grosse cicatrice la traverse, à mi-chemin entre la coupure et la brûlure.Je hoche la tête et retourne dans mon coin. J'écoute attentivement sa réponse. Elle les aurait tué et elle insiste sur le fait qu'elle les aurait tous tués. Si elle avait été à ma place, mes tortionnaires seraient sans-doutes morts. Je la crois sans un instant d'hésitation puisqu'elle affirme vouloir encore tuer celui qui lui à infligé cette sale blessure.

L'humanité, c'est ce qui fait la différence entre l'envie de tuer et le passage à l'acte. Tu m'as demandé si je les avais tué, pas si j'en avais eu envie.

Je repose la tête contre le mur, fermant les yeux. Je sens sa méfiance, toujours, impossible à conjurer.
A ses yeux, sans doute suis-je un mort en sursit, un fou, un animal. Peut-être pas vraiment dangereux, mais sommes-toutes, totalement imprévisible.

J'ai eu l'envie profonde de les tuer, de les faire souffrir. J'en aurais sans doute encore envie aujourd'hui si je tombais sur eux. Mais mon dégoût pour le sang et la raison l'on emporté. J'ai tué lorsque j'étais dans la milice. Beaucoup de fangeux, à l'arc essentiellement. Mais là encore, cela me dégoûte.

Elle me toise, m'analyse, cherche des réponses en moi, les questions se bousculent en elle. En plus de la crainte, je lui inspire de la curiosité. Son pécher personnel, sa soif de savoir l'inaccessible. Mais la question n'en demeure pas moins pertinente. Evidemment qu'elle se la pose. Que fais-je maintenant? Continuer à vagabonder, mais dans quel but? Combien de temps, où et pourquoi? Me comporter comme un voleur jusqu'à la fin de mes jours?
Question piège?
Non!
Question dangereuse?
Je ne pense pas!
Mais alors? Pourquoi cette question dérange?
Pas de réponse!

Je redresse la tête, croise son regard et répond, d'un air sérieux, presque impassible.

Je ne sais pas.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyLun 23 Mar 2020 - 1:43
Je ne sais pas.

Mathilde fait une petite moue. Elle pourrait l'aider, un peu, s'il le voulait... mais le veut-il vraiment? Après tout, il se promène seul, de nuit, au Labret. Il cherche de la nourriture pour survivre, le strict minimum. Il aurait pu remplir sa besace, mais il ne l'a pas fait, il n'a donc aucun lieu où stocker ses biens et ses trouvailles. Aucun abri. Aucune maison.

La question a eu l'air de le troubler. C'est un long silence qui a précédé la réponse, un silence durant lequel son visage est passé par différentes expressions. Ses yeux ont contemplé le vide, comme s'il cherchait une réponse sensée qui puisse le satisfaire. En vain. Il n'a aucune idée de ce qu'il va devenir, il vit au jour le jour. Mathilde l'a compris. Il n'est pas le premier dans cette situation. Il ne sera pas le dernier.

- C'est une drôle de situation dans laquelle vous vous trouvez, Éric. Drôle et inconfortable. Comme si cette liberté était trop grande. Vous vous êtes jeté dans le vide, et rien ne peut arrêter votre chute. En fait, vous le pourriez, mais il vous manque peut-être une raison de le faire. Mathilde sourit. Elle réfléchit à haute voix. Elle n'a aucune idée de sa réalité, elle ne sait pas s'il a encore de la famille ou des amis, ni s'il souhaite réellement vivre. Les Trois ont une étrange façon parfois de bousculer nos vies. Moi, ils m'ont jetée auprès d'un prêtre qui a eu la gentillesse de ne pas me brûler vive au moment où je doutais d'eux. Vous... ils vous ont envoyé dans une ferme sans prétention où une femme se permet de réfléchir sur le sens de votre vie. Elle rit doucement. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour ne pas dormir, hein?

Mathilde ferme les yeux un instant. C'est une situation totalement improbable. Un vagabond et une fermière, enfermés pour la nuit dans une grange depuis laquelle, au petit matin, ils accueilleront peut-être une bande de voleurs.

- Elle avait l'air de quoi votre vie d'avant? Avant les brigands, je veux dire.

Mathilde songe que l'homme doit avoir à peu près son âge. Sept ans de captivité et un passage dans la milice... il n'a probablement pas eu le temps d'être marié. Où vivait-il? Que reste-t-il de sa famille? C'est un bien curieux personnage que les Trois lui envoient. Quels sont leurs plans?

- Croyez-vous au hasard, Éric?

Mathilde est tout à coup songeuse. Serait-il suffisamment digne de confiance que pour lui proposer de travailler de temps à autre à la ferme avec elle et les gars? La fermière se demande s'il en profiterait pour la voler -voler quoi à part quelques légumes?- ou s'il apporterait avec lui son lot de problèmes. Après tout, il a déserté la milice. C'est quoi la punition pour un déserteur? Et pour celle qui l'aide? Elle hésite. Elle a suffisamment d'emmerdes comme ça... mais l'été a été très instructif, elle sait qu'elle doit avoir de la main-d'oeuvre de réserve pour remplacer un gars blessé. Ou mort.
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Eric LaporteVagabond
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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyLun 23 Mar 2020 - 10:19
Les mots choisis par la fermière résonnèrent en moi comme autant de coups de gourdins. Je dois bien avouer que lorsque j'ai déserté, je n'avais que deux idées en tête. Ne plus prendre part à ces tueries que je trouvais inutiles, déraisonnables et survivre à cette désertion. Je n'avais certes pas cherché plus loin un quelconque sens à mon existence.
Ses mots sont précis, ils dérangent!
Essayerait-elle de me déstabiliser?
Non, je ne pense pas!

Je me repositionne contre le mur, soudain mal à l'aise. Ma couverture glisse un peu, dévoilant une épaule, mais je n'y prête guère attention. Elle poursuit ses réflexions. Ainsi à t'elle douté à une époque de la volonté des Trois? Sa curiosité est telle qu'elle se dévoile pour faire parler autrui. En a t'elle conscience? Ou bien souhaite-elle volontairement me partager certains aspects de son existence? Je note le trait d'humour de sa phrase.
Elle réfléchit sur le sens de ma vie?
A n'en pas douter, oui, de toute évidence!
Mais dans quel but?
Pas de réponse!

Je remonte ma couverture, me lève, fais deux pas, me rassois. Je grogne, me relève et finis par venir m'asseoir sur la paillasse, près d'elle. Pas trop près, je perçois encore sa méfiance. Mais seul la longueur d'une épée courte nous sépare désormais. Elle ferme les yeux et je détails son visage. Fin, doux, mais expérimente de la vie.
Tout à l'inverse de moi, qui seul connais la mort et la souffrance.
J'ouvre la bouche pour répondre, mais les deux questions qu'elle me pose coup sur coup me déstabilisent complètement. Je pince les lèvres.
Que cherche-t'elle?
Que je sombre en réalisant le non sens de mon existence?
Je n'en ai pas l'impression! Quel en est son intérêt?
Se débarrasser de moi après m'avoir mit en confiance?
Non, elle n'est pas cruelle! Mais alors quoi?
Que ma vie prenne un sens?
Perdu!

Je ne laisse rien transparaître de ma perplexité, seul mon silence peut en dire long. Tout sonne comme les cloches du temple en moi. Je pousse un soupir.

Je suis un homme creux Mathilde.

Je rouvre les yeux, me lève en laissant là ma couverture. Doucement, je fais deux pas et saut sur une des poutres de la charpente. Prendre de la hauteur à défaut de recul. Je suis là, accroupis, pieds-nus sur une panne, observant les chevrons et les liteaux, faiblement éclairés par la bougie.

Je suis né sans parents, battus pour travailler dès que je pus comprendre les tâches que l'on me donnait. Champs, vendanges, tannerie, construction. On m'envoyais au turbin à coup de latte, on me faisait travailler à coup de sabots, on prenait les pièces que je rapportais à renfort de trique. J'ai réussi à m'échapper avec une petite bourse un jour. J'étais ivre de joie, insouciant quand à l'avenir. L'avenir m'a rattrapé vite fait, par la main des bandits. J'ai été libre le temps qu'il faut pour aller d'ici à Usson. Par la suite, j'aurais pus refuser d'intégrer l'armée puis la milice, mais pour aller où? Faire quoi? Avec quels moyens?

Je poussais un soupir, de nouveau.

Je suis un homme creux Mathilde, un homme qui passe, un homme qui voit, un homme qui entend.
Depuis vingt-six ans, j'existe. Au moins, vagabonder me libère de toute emprise. Je suis libre depuis quelques mois seulement. Je survie, je ne vie pas, certes, mais je suis libre et bien libre. Libre de mourir sans aucun doute. Je ne le souhaite pas, comme tout un chacun, mais je reste rationnel.


Je tourne la tête vers elle, un semblant de sourire las aux lèvres.

Que pourrais-je souhaiter? Je n'ai rien connu d'enviable! Le hasard ne m'a pas apporter grand chose d'autre que de la douleur jusqu'à présent. Je n'ai pas connu l'insouciance de l'enfance, pas plus que les amitiés d'adolescents Je n'ai jamais eu une mère pour me serrer contre elle, ni un père taquin, se moquant de mes maladresses avec une jeune-femme, riant fort et me bousculant d'une bourrade. Nulle femme n'a jamais partagé ma couche et je ne vois guère ce qui pourrait en pousser une à le faire. Je ne crois pas plus au destin qu'au hasard Mathilde. Je crois en ce que m'offre le soleil qui se lève chaque matin.


Je lève le nez vers la panne faîtière. Pensif quelques instants.

Un homme creux. Une enveloppe charnelle pour une âme en peine, un esprit égaré. Je pourrais souhaiter une chose, si. Accepteriez-vous de m’héberger quelques jours en échange d'un coup de main? Vous pourrez garder mon arc, mon épée, ma sacoche et ne me laisser que mon couteau si cela peut vous rassurer quand à mes intentions. Du moins, après que l'on se soit occupé des bandits demain.
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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMar 24 Mar 2020 - 20:37
Mathilde a perçu le malaise d'Éric, alors qu'elle philosophait sur le sens de sa vie... mais elle ne s'est pas interrompue pour autant. Et comme il ne lui a pas sauté dessus pour la faire taire, elle estime que le malaise provoqué aura quelque chose de constructif pour lui, maintenant, alors qu'il se lève pour chercher une place ou une position plus confortable, pour son corps et pour son esprit, ou plus tard, lorsqu'il sera loin d'ici. La fermière songe que le malaise que suscitent ses questions est aussi mental que physique, en témoignent les quelques pas qu'il fait avant de s'installer sur la paillasse.

Le vagabond finit par choisir la proximité mesurée. Mathilde se dit que la place est bien choisie. Ni trop près, ni trop loin. Il est à ses côtés, tout en gardant une distance de sécurité, pour lui comme pour elle. On dirait deux animaux sauvages qui s'apprivoisent doucement. L'image la fait sourire. Éric est aussi sauvage qu'elle, quelque part. Lui, parce qu'il n'a que des mauvaises expériences avec l'humanité ou du moins ce qu'il en reste. Elle parce qu'elle refuse de pleurer encore des morts.

Je suis un homme creux, Mathilde. C'est étrange, cette phrase. Au moins aussi étrange que le fait qu'il se choisisse un perchoir pour parler. La fermière lève les yeux vers cet étrange énergumène. Peut-être est-il tout aussi mal à l'aise qu'elle, finalement, et qu'il préfère prendre un peu de distance avec la présence féminine qu'elle est. La voix masculine s'élève dans la pénombre, racontant l'histoire d'un enfant battu et exploité, comme il en existe tant chez les miséreux. Vingt-six années d'errance et de solitude.

Mathilde le regarde, la gêne a disparu avec la distance qu'il a prise. Recroquevillé sur sa poutre, elle observe ce que la lueur de la bougie lui permet de voir. Des bras musclés, habitués au travail. Des cicatrices dont les reliefs semblent exagérés par la lumière. Des épaules hautes, typiques d'un être tendu et toujours sur ses gardes. Son corps parle autant que les mots qui s'écoulent de ses lèvres.

Que pourrais-je souhaiter? Une vengeance, puis une vie tranquille et utile. Et ce sentiment de plénitude qui vous envahit à la fin d'une bonne journée de travail, lorsque l'on sait que tous les efforts, toutes les douleurs endurées, toute l'attention que l'on a portée au travail bien fait profitera à l'humanité. Il n'est rien de plus gratifiant que ce sentiment, pour elle. Je pourrais souhaiter une chose. Mathilde sourit. Quelques jours de travail, en échange d'un semblant de vie banale.

- Les miliciens d'ici, ils peuvent vous reconnaître? Les portes de la ferme sont ouvertes à n'importe qui. Mordu, banni, voyageur, âme égarée, homme ou femme. Mais elle doit impérativement protéger sa réputation pour pouvoir continuer à le faire, aussi, parfois, elle n'a pas d'autre choix que de refuser le gîte ou de simplement faire taire la personne qui lui demande son aide. Si Éric est reconnu, il aura des problèmes... et elle aussi, nécessairement. Elle doit pouvoir rester pragmatique, même si elle comprend la situation pénible dans laquelle cet homme se trouve.

- Vous pourriez travailler ici, oui, c'est pas l'ouvrage qui manque. Mais je ne vis pas seule, et la milice passe presque quotidiennement à la ferme. Je ne peux pas prendre le risque qu'on vous reconnaisse et que je sois accusée d'aider un déserteur, vous comprenez? Je ne sais pas bien quel sort vous est réservé mais j'imagine que si on nous demande de dénoncer les déserteurs, c'est pas pour rien.

Mathilde le regarde, à travers la pénombre, droit dans les yeux. Elle ne le dénoncera pas, ne serait-ce que parce qu'elle peut comprendre la difficulté pour n'importe quel milicien d'appliquer les décrets royaux, qui impliquent de marquer les victimes de la Fange pour les envoyer ensuite à l'abattoir, hors des murs que ces gens ont toujours connus, face aux marais et à une vie en marge de la société. Pourtant, il a dû faire bien pire... et ne s'en souvient peut-être pas.

- Sans vos armes, ici, vous êtes un homme mort. Je n'ai pas besoin que vous me les cédiez. Mais c'est gentil de proposer.

Adossée contre la parois, Mathilde ferme les yeux pour écouter la réponse d'Éric. Elle n'a plus vraiment peur de lui ou de ses intentions. Quelque chose lui dit qu'elle peut vaguement lui faire confiance. Après tout, s'il avait voulu la violer ou la tuer, il l'aurait déjà fait.
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Eric LaporteVagabond
Eric Laporte



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MessageSujet: Re: Survivre pour vivre [PV Mathilde]   Survivre pour vivre [PV Mathilde] EmptyMer 25 Mar 2020 - 10:06
Elle m'écoute, m'observe. Elle me suis du regard pendant que je bouge, cherchant à fuir ce malaise en changeant de position. Je n'ai pas tout de suite compris d'où venait ledit malaise. Je me pensais simplement mal installé.
Sauf que j'ai l'habitude de dormir dehors, sur une branche haute ou entre deux rochers, le conforts, certes spartiate, de la paillasse devrait être pour moi l'équivalent d'un lit merveilleux. Il n'en est rien.
Je pensais alors que c'était la proximité avec Mathilde elle même? N'ayant jamais connu la douceur d'une femme, être ainsi proche d'elle à échanger était peut-être ce qu'il y en avait de plus proche? Une belle femme à portée de doigts, cela surprend son hommes non?

Pourtant, non, ce n'est toujours pas cela. Mon mal-être est tel que je crois même qu'elle pourrait me prendre dans ses bras sans que je ne réagisse. Non, le malaise ne vient pas de la situation, mais bel et bien de ses paroles.
Elles claquent!

Alors je choisi la fuite sur une poutre. Sensation connue, une prise de hauteur qui permet de se dérober à la vue du monde. Bien évidemment, dans le cas présent je ne suis nullement caché. Je sens son regard se poser sur moi alors que je parle. Elle me jauge, elle m'observe autant qu'elle le peut à la faible lueur de la bougie. Nos regards se croisent un instant malgré la pénombre.
Question?

C'est peu probable que l'on me reconnaisse ici. J'étais affecté à la milice de la cité, pas celle de l'extérieur, en général du moins.

Elle me confirme ensuite que je peux rester, du moins quelques jours. L'ouvrage ne manque pas, c'est une bonne chose. Elle précise qu'elle ne vit pas seule.
Un mari?
Sans doute!

De toute façon, vu la taille de la ferme, vu que j'ai exploré les environs, je sais qu'il y a plusieurs personnes ici. Elle m'explique alors ses craintes quand au fait que la milice me reconnaisse. Certes, il est demandé de dénoncer les déserteurs. Je ne sais pas vraiment ce qu'il advient d'eux moi non plus. Il me semble qu'après quelques temps de cachot on est réintégrés. Enfin, ça c'est si l'on se rend sans opposer de résistance, évidemment. Sinon, la punition est sans doute la corde.
Comme-ci, par les temps qui courent, les humains avaient besoin de s’entre-tuer... Autant tous se jeter dans l'océan!
Elle refuse que je lui laisse mes armes mais apprécie l'offre faite de les lui confier. J'opine du chef.
Soupir!

Je comprends que tu ne souhaite pas de soucis plus que nécessaire et je serais bien en peine de t'en apporter. Je ne peux cependant te garantir que l'on ne me reconnaîtra pas. Si jamais c'est le cas, tu n'auras qu'à dire que tu ne le savais pas, que tu m'as surpris à te voler et que je t'ai menacé de me cacher.

Je quitte mon perchoir et reviens sur la paillasse, reprenant place à un bras d'elle, m'asseyant sur ma couverture. Elle ferme les yeux et bascule la tête, présentant un semblant de confiance. Je fais comme elle, adossé à la parois de bois, je clos les yeux.

Si tu savais le nombre de fois où j'aurais du être un homme mort...

Sur ces paroles, la fatigue me prend. Épuisement et sentiment de sécurité, il n'en faut pas beaucoup plus pour que le sommeil l'emporte. Je me sens glisser et ne lutte pas. Au bout d'un instant, ma tête se pose contre quelque chose. Est-ce l'épaule de la jeune-femme? Est-ce la paillasse? Est-ce le plancher de l'autre côté?
Toujours est-il que je m'endors.
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