A l'aube d'une nouvelle ère (Alana Vieilgarde)

Mais qu'est ce qui lui prenait à la fin? Retenue par le bras au dernier moment, je me retournais vers le noble d'un air mauvais. Non, le travail n'attendait pas. Mais voilà, il semblait que le comte avait effectivement d'autres choses en tête, mais je n'étais pas du tout d'accord pour ce rapprochement physique, bien au contraire. J'allais protester quand il m'embrassa de force. Je lui mordis violemment la lèvre, à le faire saigner. Le goût du sang dans ma bouche ne me dérangeait pas tant que ça. Il avait beau dire qu'il pouvait être discret, il faisait quoi du consentement? J'avais déjà assez de problème comme cela dans mon boulot, si en plus j'avais un employeur qui me sautait dessus…

Il était proche, trop proche de moi. Je paniquais. Je n'étais pas encore au point de vouloir le poignarder comme il le suggérait, mais je lui écrasais le pied pour pouvoir reculer un peu, puis lui envoyais un bon coup de genoux dans les bijoux de famille. Cette fois ci, c'était sûr qu'il allait me laisser tranquille au moins quelques minutes. La méthode était éprouvée. Je reculais cependant vers la sortie tout en le surveillant du regard pour ne plus me laisser surprendre. Je l'avais laissé aller beaucoup trop loin, mais j'étais prête à en assumer les conséquences. Pas vraiment agréables pour moi, mais tant pis.

«Vous savez quoi, oubliez la promotion et vos cadeaux. Je vous les laisse. Je démissionne. Vous n'aurez qu'à sauter sur le prochain mec que vous embaucherez.»

Et je sortis. J'étais furieuse. Il allait falloir que je fasse l'aller et retour à Sombrebois pour aller chercher les affaires qui m'appartenaient mais qui était restées là bas. Retours chez mes parents. Au moins, je pourrais les aider un peu mieux, mais je pouvais aussi oublier la maison neuve dans ce bourg en plein développement. C'était un véritable gâchis! Tout ça parce que j'étais une femme et qu'il n'avait pas pu retenir ses mains baladeuses! Mais hors de question que j'aille dans son lit.

Tout ce passait si bien! Pourquoi avait il fallu qu'il essaye de … Je commençais à pleurer sans m'en apercevoir. Quand je sentis enfin les larmes sur mes joues, je me mis à courir. Je ne voulais pas que quelqu'un me voit dans cet état. Je connaissais un endroit où personne ne me trouverait. Je n'allais pas voir mes parents, je fonçais directement droit sur ma cachette et pus enfin y pleurer tout mon saoul. Qu'allais je faire, maintenant? Je n'en savais rien du tout.

A jouer à quitte ou double, lorsque l'on perdait, la défaite pouvait être des plus douloureuse. Et c'est ce qui arriva à l'opportuniste Comte de Rougelac, malmené à la lèvre avant de voir les étoiles tourner au dessus de sa tête lorsque le genou de la mercenaire s'abattit contre ses bijoux de famille. La douleur fut telle que Victor s'écroula comme un pantin, se tenant l'entre cuisse sans pouvoir évidemment entendre les mots que venaient de lui adresser Alana. A peine eu-t-il perçu le terme "démissionne", rien de plus, mais suffisamment pour qu'un bon quart d'heure après le violant coup porté à son intimité, le Gouverneur du Sud ne se redresse pour aller alerter son homme de main avant de se dire à lui même.

- Quel sacré bout de femme. Elle me plait plus encore.

Dans la demi-heure qui suivi, les hommes et "petits oiseaux" du mondain se déployèrent dans la capitale afin de retrouver la jeune femme. Le temps pour Victor de regagner son Manoir et d'y faire transférer la malle de sa femme d'arme. Si l'on surveilla les parents de la mercenaire, c'est ailleurs qu'on la débusqua et d'une manière bien atypique !

Au cœur des quartiers populaires, il était complexe de retrouver une fugitive, surtout pour un homme et armé de surcroit ! Disons qu'on se faisait aisément repérer. Mais un pauvre enfant des rues n'était-il pas au delà de tout soupçon ? A moins que... je ne vous berne et que ce qui va se passer par la suite n'est pas ce que vous pensiez ?

Toujours est-il qu'une gamine des rues, crasseuse, tenant un chiffon en guise de doudou s'approche timidement d'Alana qui venait de quitter son repère. Lui adressant un regard si innocent, qui d'un temps soit peu sensible ne se serait arrêter devant cette enfant dont le destin semblait être de mendier pour son propre compte ou celui de parents dans une situation tout aussi précaire.

- Dit m'selle j'ai perdu mon p'tit frère... tu voudrais pas m'aider à l'retrouver s'teuplait ? Avec ce monde... j'ai peur...

Elle vint d'instinct s'agripper à l'une des jambes d'Alana Vieilgarde.

- C'est qu'on était en train d'jouer à cache-cache... pis... l à ça fait trop longtemps. Dit moi oui, allez ! Y a personne ici qui veut m'aider.

Elle versa une larme et l'on pouvait dire qu'elle jouait fort bien la comédie !

Quand je me fus calmée, mon instinct me dit que j'avais suffisamment perdu de temps comme ça, que j'aurais dû partir tout de suite, juste le temps de rassembler mes quelques affaires. Trop tard, sans doute. Mais si je partais maintenant, j'avais encore une chance. Peut être bien que le comte faisait surveiller les entrées, à moins qu'il en ai assez de mon mauvais caractère et qu'il ait déjà embauché un homme à ma place. Je ne savais pas trop, mais dans le doute, je préférais prétendre que c'était l'option la pire qui était valable. Je sortie enfin de ma cachette et décidait donc de me diriger vers une des entrées de la cité.

Je verrais bien si les gardes dévisageaient ceux qui sortaient, ils ne le faisaient que vaguement, habituellement. Mais c'était sans compter sur mon bon cœur. Je parcourais de nouveau les rues que depuis quelques minutes, que je fus abordée par une fillette qui semblait bien en peine. Je me demandais même si ce n'était pas une enfin laissé à elle même comme il y en avait après la famine subie il y a quelques temps. Une fillette, encore jeune, semblait chercher son petit frère.

Je soupirais. Je n'avais pas le temps, je le savais parfaitement. Mais je n'avais pas le cœur de la laisser comme ça toute seule. C'est vrai qu'il y avait un peu de monde dans cette rue, peut être son cadet avait eu peur lui aussi et s'était enfui plus loin. Je ne l'espérais pas. S'il n'était pas dans le coin, ça allait être compliqué de le retrouver. Je ne savais pas si je pouvais compter sur les gardes pour le chercher si je ne le trouvais pas rapidement. Je pouvais toujours essayer car je m'accordais seulement dix minutes pour cette recherche.

«D'accord, je vais t'aider à le chercher. Comment s'appelle t'il?»

Je commençais à appeler le gamin, entrant dans une petite rue perpendiculaire. Soudain, je tombais sur un homme d'arme qui me barrait la route. Je me retournais et en trouvais deux dans mon dos. Le temps que je les regarde, je me rendis compte que la gamine avait disparu. Un traquenard? Cela y ressemblait fort et à une contre trois, mes chances étaient faibles. Je cherchais du regard un moyen de m'échapper si cela tournait mal. Peut être par les toits, si je trouvais un moyen de monter. Je sortis mon arme, en attendant. Je n'avais pas du tout l'intention de me laisser faire.

La gamine des rues avait bel et bien envoyé Alana Vieilgarde dans un traquenard et cette dernière se retrouvait prise au piège dans une ruelle sombre loin des rues passantes. A trois contre un, les chances de mettre en déroute ces hommes armés semblaient mince. Armés d'épées courtes, l'un portait des liens en corde à sa ceinture. Cela confirmait les dires qui allaient suivre.

La mercenaire qui venait de se rendre compte que la petite fille avait disparut la voit soudainement ressurgir derrière l'un des hommes avant qu'elle désigne d'un index Alana.

- C'est elle m'sieur. Comme vous m'l'avez d'mandé. J'l'ai suivi d'puis le Temple et j'vous jure, les hommes du Comte l'on pas suivi...

L'un des hommes esquissa un sourire satisfait et lança une petite bourse en direction de la gamine.

-T'as fait du bon boulot, maintenant dégage.

Il reporta son attention sur la femme d'arme avant de l'interpeller de sa voix.

- On est là pour ramener ta tête à un ami, qu'elle se trouve ou pas sur tes épaules. Alors t'as le choix. Soit tu jette ton arme et tu lève bien haut tes mains, soit tu l'as joué tête brûlée et alors on te passe au file de l'épée. A toi de voir si tu tiens à ta vie.

Tout portait donc à croire que ces hommes n'étaient pas ceux du Comte de Rougelac, mais certainement à l'un de ces détracteur qui souhaitait mettre la main sur l'un de ces allié.

◇◇◇

Si la gamine disparut, elle rejoignit rapidement une ruelle avoisinante où quelques minutes plus tard, une silhouette dissimulée sous une capuche de riche facture se présenta à elle.

- M'sir, j'ai r'trouvé la femme... seulement... va falloir payer plus que...

Elle sortie de sous ses haillons la bourse que venait de lui donner l'homme armée, provoquant un léger rire chez l'individu faisant face à la gamine.

Hum. La situation était mauvaise mais elle aurait pu être pire. Les hommes de main semblaient un peu trop sûrs d'eux. Bien entendu. J'avais l'habitude et j'avais souvent tiré profit de cette situation. Ils pensaient que c'était du tout cuit et que j'allais me rendre sans faire d'histoire. C'était bien mal me connaître. J'étais certes une femme, mais j'avais plus d'un tour dans mon sac. Je sortis de ma tête la gamine traîtresse pour me concentrer sur comment me sortir de là. Un plan commençait à naître dans mon esprit. Je cachais alors mes attentions jusqu'au dernier moment.

Deux étaient devant moi mais un seul derrière. J'avais ma chance. Je ne connaissais ni son niveau ni vraiment s'il était prêt à se battre ou pas. Son arme n'était pas sortie, vraiment trop de confiance. C'est fou ce que je tremblais de peur. Si vraiment j'arrivais à le passer, il me suffirait de courir jusqu'à une rue plus fréquentée. Et ensuite? Je n'en savais rien. En tout cas, ces sbires ne semblaient pas œuvrer pour Victor, ils s'en seraient sans doute vantés. Alors qui? Je supposais que le comte avait plus d'un ennemi, mais je n'avais pas tellement envie de servir de monnaie d'échange ou de chantage en me faisant prendre. J'avais un certain honneur et même si je venais de démissionner de mes fonctions,

Battre le seul qui est derrière moi et s'enfuir jusqu'à trouver une rue passante. Non mieux, il fallait que je trouve des miliciens de ma connaissance, ils seraient sans doute prêts à m'aider. Je marchais donc tranquillement vers l'homme en arme qui était seul. Un coup d’œil rapide dans mon dos m'appris que les deux autres avaient commencé lentement à suivre le mouvement. J'accélérais brusquement, me jetant sur l'homme et donnant un coup furieux de lame avant de m'écarter et me mettre à courir, le dépassant avant qu'il n'est eu le temps de réagir, son réflexe ayant été de compresser sa blessure. J'entendis les types jurer derrière moi et se lancer à ma poursuite.

Si je me sortais de là, je me promis de prévenir le sang bleu. Peut être pas en personne, mais je lui écrirais une lettre pour l'informer de la situation. En attendant, je devrais retrouver des rues plus passantes. Problème, c'est qu'avec l'effet du stress, j'avais un peu perdu mes repères et je ne savais plus trop dans quelle direction était le centre ville. Mais pas question d'arrêter de courir.

La femme d'arme avait crânement joué sa chance, se dérobant au guet-apens dans lequel elle s'était naïvement fourré en tentant d'aider la fillette. Malheureusement, l'altruisme de la jeune femme avait ses faiblesses, celle de perdre complètement le sens de l'orientation. Ainsi, elle ne regagna pas de rues passantes pour espérer y trouver une protection.

Talonnée par les trois mystérieux individus, Alana était en train de s'enfoncer dans un quartier presque désert et elle ne croisa à aucun moment quelques miliciens en patrouille. Les ruelles devenaient de plus en plus sombre et étroites et elle semblaient tous plus où moins se ressembler au point que la dame de Vieilgarde en perdit tout repère. Jusqu'à... jusqu'à ce que la petite fillette réapparut à sous un porche en pierre, devant Alana avant de lui lancer.

- Si tu veux t'en sortir, suit-moi.

Alors, la fillette se mit à courir avant d'emprunter une bouche d'égout. Comment la mercenaire allait réagir ? Elle n'avait que quelques secondes pour prendre une décision car déjà le bruit des trois paires de bottes raisonnaient derrière elle, accompagné d'un.

- Si on la retrouve, vous savez quoi faire. On a ordre de la tuer maintenant qu'elle n'a pas obtempéré.

Il n'y avait donc plus à réfléchir pour Alana, son kidnapping initialement prévu venait de se transformer en futur assassinat. Restait à savoir si elle allait fuir par les égouts ou affronter ses assassins présumés.

Bon sang! J'avais peut être plus perdu le sens de l'orientation que je ne le pensais. Je jurais entre mes dents tout en continuant de courir, espérant reconnaître une ruelle, quelque chose qui me permettrait de me remettre sur la bonne voie. Mais rien n'y faisait. Deux me talonnaient d'assez près et le troisième, celui que j'avais blessé, d'un peu plus loin. Celui là finirait peut être par abandonné, mais je ne pouvais pas me reposer sur cette éventualité. Déjà que deux contre un c'était un pari un peu risqué. Ces hommes là étaient entraînés. J'avais eu la chance de les prendre par surprise, mais voilà. Cela ne jouait plus et il fallait vraiment que je les sème.

Si au moins j'avais le temps de m'arrêter et de regarder plus en détail autour de moi. J'étais sûre que j'arriverais à me repérer. Mais pas le choix, il fallait continuer de courir. Brusquement, la même fillette que tout à l'heure surgie non loin devant moi et me dit de la suivre si je veux vivre. Je ne suis pas très chaude, ni vraiment en confiance. Cependant, mes options sont vraiment limitées. Surtout que j'entends un commentaire sur ma futur mort de la part de mes poursuivants. Lâchant un soupir de résignation et retenant un juron entre mes dents, je plongeais à mon tour dans la bouche d'égout. Evidemment, c'était tout noir là dedans.

Evidemment, je n'avais pas de quoi faire une torche ou quoi que ce soit pour éclairer ma route. Evidemment, c'était très bas de plafond et je devais quasiment me courber en deux pour pouvoir tenir dans le boyau. Je retenais à nouveau un juron bien senti. Je ne voulais pas que mes poursuivants entendant que j'avais filé par là. Ils devaient être en train de chercher par quelle ruelle j'avais bien pu filer. J'espérais que d'ici à ce qu'ils comprennent que j'avais pu m'échapper par le bas, je serais loin d'ici.

«Gamine, tu es là? Pourquoi m'aider après m'avoir trompé?»

Je l'appelais à mi voix alors que je n'entendais plus les hommes dehors. J'avais encore le temps de changer d'avis, de remonter et de filer pendant que ces types exploraient les alentours. La fillette avait plutôt intérêt à se montrer convaincante, même si jamais je ne ferais grand mal à une enfant.

La mercenaire venait sans doute de sauver sa peau en préférant les égouts que le labyrinthe de ruelles dans lequel elle semblait totalement désorientée. Après avoir pu entendre quelque jurons au dessus de sa tête venant de la bouche de ses assassins présumés, elle pu recroiser la silhouette svelte de la fillette qui réapparut dans un boyaux. Le visage de la gamine était malicieux mais avec un grain de sincérité dans sa voix.

- J'suis désolé m'selle mais... faut bien qu'je mange. Les temps sont dure alors... j'cracherais pas sur deux bourses plutot qu'deux. T'me comprend m'selle.

Elle lui fit un geste pour qu'elle la suivre dans cet endroit exigu. Le parcours ne fut pas de tout repos entre les odeurs et les matières fécales qu'elles devaient contourner par moment. Et après un bon quart d'heure à avancer à genou, le duo déboucha sur un boyau plus large qui terminait par un petit escalier métallique.

- V'la m'dame, j'm'arrête ici. Tu dois monter, on t'attend. J'te conseille de monter parce que les gars qui te cherchent, ils sont pas commode. J'dis ça j'dis rien.

Allait-elle faire confiance à la fillette ? Ce qui était certain c'est que si Alana acceptait de monter, elle déboucherait dans une salle d'eau au gout certain, la pièce nimbé dans une atmosphère florale et en son centre, une large cuve de cuivre dont l'eau chaud laisser quelques douce vapeur s'y échapper.

Je lâchais un soupir résigné. Oui, je comprenais un peu, en effet. Si ça se trouve, cette enfant avait perdu ses parents. Entre les fangeux et la récente famine, pas mal de familles avaient été touchées. Il restait des enfants orphelins dans la rue et comme personne n'avait été réellement épargné, c'était encore plus dur pour ces jeunes abandonnés par le destin. C'était triste mais tout le monde était encore en train d'essayer de s'en sortir, je ne pouvais pas leur jeter la pierre. Avec un dernier soupir, je me décidais donc à la suivre, croisant les doigt mentalement pour avoir pris la bonne décision.

Le parcours fut difficile et j'en ressortis salie et malodorante. Pestant contre le comte aussi. C'était de sa faute si j'en étais arrivée là. Il n'avait qu'à pas me sauter dessus comme un pervers, voilà tout. Peut être me jugeait il acquise. C'était loin d'être le cas, il s'en était aperçu douloureusement. Enfin, il sembla que nous étions arrivés à destination. Je lâchais un ouf de soulagement. J'en avais plein le dos des égouts, même si sans doute cela m'avait sauvé la vie. Quoi que … peut être que c'était pour mieux m'enfermer dans un piège, je n'en savais rien. Prête à tout, je préférais ne pas dire le fond de ma pensée à l'enfant. Je montais sans un mot. Je me doutais bien que les gars après moi n'étaient pas commodes, je les avais entendu.

Je tirais mon épée et sortis. Pour me retrouver dans une pièce avec une bassine d'eau. Je pinçais les lèvres contrariée, mais prête à affronter encore une fois le noble. Il allait m'entendre. Si ça se trouve, c'était lui qui avait manigancé tout ça pour me ramener ''à la maison''. J'étais furieuse et je comptais bien lui faire savoir. Enfin, si je ne me trompais pas dans mes pronostiques. Je savais que je faisais des suppositions. Je supposais que le maître des lieux ne tarderait pas et qu'à ce moment là, je serais fixée.

Victor aurait très bien pu manigancer toute cette affaire, pourtant il possédait réellement des ennemis bien décidé à l'affaiblir en s'en prenant à ce que le Comte pouvait posséder de valeur dans son entourage, humain ou matériel. Mais pour Alana, complètement décontenancé, le doute pouvait être permit. Si elle resta sur ses gardes dès qu'elle foula cette pièce d'eau, nul doute qu'elle allait rester un moment sans qu'aucune irruption ne se produire. Tant et si bien qu'un bon quart d'heure s'écoula avant que des pas ne se firent entendre derrière la porte pour laisser alors place à une brève discussion, à peine audible pour la mercenaire qui si elle pouvait se montrer curieuse en plaquant une oreille à la porte, entendrait la voix de Rougelac et les propos rassurant de l'homme qui montait la garde.

Victor fini alors par entrer et aviser d'un regard taquin la jeune femme avant de se débarrasser de son veston qu'il posa soigneusement sur une chaise. Il fixa alors Alana qui ne semblait pas avoir prit la peine de faite trempette et grimaça grossièrement devant l'odeur qui émanait d'elle.

- Seriez-vous un chat ? L'on dit qu'ils ont une sainte horreur de l'eau. Vous sentez la merde, permettez que j'emploie ce terme. Diantre, retirer ces affaires et rentrer donc dans cette cuve !

Il attendit qu'elle s'exécute, entreprenant de faire les cents pas dans la pièce en mouvement circulaire autour du bain. Et pour peu qu'elle l'observe, elle pouvait voir qu'il se trouvait bien perplexe et pensif.

- J'ai bien l'impression qu'un de mes détracteur a chercher à neutraliser l'un de mes pions... hmmmm... j'espère que vous me remercierez de vous avoir, pardonnez l'expression, sorti de la merde. Mais cela vous a également permis de constater de mon réseau en faisant la connaissance de l'un de mes petit oiseau. Je paie le double de mes ennemis. C'est une importante dépense mais voyez-vous, cela me permet d'avoir un coup d'avance.

Il fini par s'arrêter et lancer un provoquant clin d'oeil à celle qui quelques heures plus tôt semblait décidé à quitter son service.

- Lorsque vous vous serez lavé, vous pourrez partir ou rester. Mais je ne vous sauverais pas une seconde fois. Sachant que l'ennemi rôde...

C'était long, très long. Cependant, si je ne tentais pas de sortir de cette pièce, c'est que j'attendais d'en savoir plus. Les pièges, j'en avais eu assez pour la journée, donc je patientais, même si je commençais à avoir les nerfs en pelote. Heureusement, le comte finit par arriver, mais je lui jetais un regard noir qui en disait long sur le fond de ma pensée, surtout qu'il commença par se moquer de moi. Je serrais les dents, ne faisant pas de commentaire, même si ce n'était pas l'envie qui me manquait.

«Et alors quoi? Je devrais me jeter dans vos bras pour vous remercier? Ou mieux, dans votre lit, c'est ça? Et bien, il n'en est pas question, tenez vous le pour dit.»

Je regardais la cuve de mauvaise humeur. Cette manie que Victor avait de vouloir me mettre dans l'eau, et à poil, tant qu'à faire. Si j'obtempérais pour entrer dans l'élément liquide, j'y pénétrais toute habillée. De toute façon, mes habits aussi avaient besoin d'un coup de nettoyage et tant pis si je ressortais trempée. Mes vêtement sécheraient sur moi et ça éviterait que je me fasse trop remarqué par l'odeur en ressortant d'ici. J'étais toujours énervée et ça n'allait pas tarder à s'entendre.

«Oui, oui, vous avez un réseau efficace, mais pas tant que ça, certains travaillent pour plusieurs maîtres à la fois.»

Dis je d'un mouvement d'humeur. En même temps, c'était la vérité. En plus, il ne semblait pas savoir qui avait fait ce coup là, comme quoi il n'était pas infaillible. Juste un peu trop curieux de la vie privée des gens, à mon opinion. Par ailleurs, j'estimais à présent que j'étais suffisamment propre. Je sortis de l'eau, dégoulinante, tentant tant bien que mal d'essorer mes affaires un minimum.

«De toute façon, qu'est ce que ça va changer maintenant qu'ils en ont après moi? Ils veulent me tuer, à présent que je leur ai échappé. Ou pire, ils vont s'en prendre à ma famille! Et tout ça, c'est votre faute! Alors pardons pour l'argent dépensé, je vous rembourserais, quelque soit le temps que ça prendra. Pour le reste, je crois que je vais reprendre le métier de garde, plus sûr, plus anonyme.»

Je ne faisais plus confiance à personne, à ce moment là. Si, peut être à Desmond. Sombrebois me paraissait d'ailleurs plus sûr que la capitale. Moins de monde, moins de danger. C'était décidé, je ferais déménager ma famille là bas et j'irais voir le nouveau chef de guilde. Peut être voudrait il m'engager durablement, mais à moins que le noble ait des arguments solides à me présenter, s'en était fini pour moi de ma collaboration avec lui.

La mercenaire montrait les crocs et mieux valait au Comte de Rougelac d'opter pour une attitude sage et conciliante. Ainsi, il laissa tranquillement passer la colère d'Alana Vieilgarde, n'émettant pas la moindre remarque même si certaines moqueries lui brulaient les lèvres. Ce ne fut que lorsqu'elle quitta le bain qu'il fini par sortir de son silence pour donner la réplique à la rouquine non sans chercher à apaiser les tensions.

- Je suis évidemment bien au fait que certains de mes oiseaux jouent un double jeu, mais comme je vous l'ai indiqué, je paie le double pour ainsi toujours avoir une longueur d'avance. Preuve en est dans votre cas, n'ai-je pas raison ? Vous êtes seine et sauve après tout.

Il se retourna pour alors frapper à la porte de la pièce d'eau avant que deux de ses hommes de main n'apparaissent non sans soulever le coffre que la mercenaire avait découvert plus tôt dans les thermes de la capitale. Ils posèrent dans un coin de la pièce les effets offert par le Comte puis disparurent, laissant le mondain et la femme d'arme seul à seul.

- Ne soyez point entêtée. Vous n'allez tout de même pas rester ainsi des heures durant dans une tenue détrempée. Les présents que je vous ai offert sont vôtres. Je n'en réclame aucune contrepartie. Vous pourrez donc à votre guise quitter mes services sans rien me valoir.

Victor lança la clé du coffre dans la direction de la mercenaire pour ensuite venir s'installer à califourchon sur une chaise, toisant de son regard azur la jeune femme et reprendre son plaidoyer d'une voix calme et maitrisée.

- Ne soyez point si hâtive. En ce moment même je fais surveiller votre famille. Il ne leur arrivera rien, je vous en fait la promesse. Quand au reste, je vous l'accorde, tout ceci est ma faute. Se mettre à mon service présente quelques... risques. Mais que vous souhaitiez ou non continuer notre collaboration, je me chargerais d'éliminer notre ennemi commun. Lorsque l'on ose toucher à l'un de mes hommes, ou femme d'ailleurs, l'on cherche à m'atteindre et ceci n'est pas acceptable.

Il désigna le coffre avant d'ajouter.

- Si vous souhaitez vous faire vengeance, nous œuvrerons prochainement main dans la main. Sinon, je m'occuperais seul d'éliminer cette menace. A vous de voir. Et si je puis me permettre, oublions nos différents et mes manières incorrectes, je souhaite repartir sur une relation plus seine. Accepteriez-vous mes excuses, mademoiselle ?

Il fallait bien avouer que Rougelac faisait bel et bien un meaculpa de toute cette fâcheuse histoire qui avait conduit Alana à se retrouver dans un guet-a-pan. Serait-elle indulgente ? Rien n'était moins sur mais le Comte s'employait à faire les efforts nécessaire.

Je m'attendais à tout avec lui. Il m'en faisait voir de toute les couleurs depuis que je travaillais pour lui. Au début, ça avait été assez calme, puis tout s'était emballé. D'abord, il avait essayé de me mater. Puis, de me mettre dans son lit, avec de plus en plus d'insistance au fur et à mesure que je persistais à refuser. Jusqu'à aujourd'hui. Et puis, ma démission et cette fuite dans les rues de la ville, poursuivie pas des individus peu recommandable. D'ailleurs, en y réfléchissant bien, comment ces personnes avaient été au courant? Il n'y avait que l'employé des bains que j'avais assommé qui avait pu les prévenir. Est ce que le noble s'en était rendu compte?

«C'est aimable à vous, mais laissez moi un peu de fierté, c'est à peu près tout ce qui me reste, pour l'instant.»

Oui, j'étais honnête. Après tout après avoir vidé mon sac, ma colère était un peu retombée. Je me rendais compte aussi que si j'avais filé de la ville directement, tout ça ne serait jamais arrivé, sans doute. Je louche sur la malle qui est amené. Bien sûr que ça me fait envie. Au moins les vêtements pour le combat. C'est de la meilleure qualité. Mais lui devoir quelque chose alors que j'ai démissionné… Bon, j'ai peut être parlé trop vite, après tout. Je savais que parfois, mon mauvais caractère me jouait des tours. Ma mère m'avait mainte fois répété d'être un peu plus conciliante.

«D'accord, d'accord. C'est un peu de ma faute aussi. J'aurais dû quitter la ville de suite. Mais à priori personne n'était sensé être au courant que je venais de démissionner. Il n'y avait que vous, moi et cet employé. Ha oui, j'ai blessé un des hommes lors de cette rencontre.»

Si ça pouvait l'aider à retrouver le commanditaire des faits, autant tout lui dire. Ha parce qu'il me considérait encore comme son employée? Je rougis un peu. J'avais tellement mis d'énergie à me défendre de ses avances que j'avais négligé tout le reste. Bon, s'il promettait de ne plus essayer de me toucher comme ça, je voulais bien oublier que j'avais démissionné. S'il était d'accord pour me reprendre, bien évidemment. J'allais lui demander, c'était un peu normal d'avoir son accord avant de m'emballer de nouveau.

«Je veux bien accepter à la condition que je continue à travailler pour vous. Je lui fis un petit clin d’œil pour lui montrer que ce n'était pas une vrai menace. Mais cesser ce genre d'avance, je vous prie.»

Allez, je trouvais que c'était raisonnable comme demande. Je lui souris. Je n'étais pas spécialement méchante J'avais juste un caractère bien trempé, nécessaire à mon métier, vu mon sexe. «D'accord, d'accord, reprenons sur de bonnes bases. Je crois que l'un et l'autre nous sommes laissés emporté. Oui, je dirais bien deux mots à cette personne. Je n'aime pas qu'on essaye de me tuer.»