[Terminé] - J'aime l'odeur du milicien au p'tit matin [PV Log]

Une telle confiance que celle que Log affichait envers lui était pour le moins déroutante. Ou une preuve supplémentaire de la folie du Suicidaire. Il n’en restait pas moins qu’il avait raison. Grâce à leur intervention combinée, l’attaque avait été contenue relativement rapidement.

Les deux miliciens se dirigèrent à nouveau vers la salle où un baquet fumant les attendait. Le borgne posa son armement avec précaution, puis fit glisser sa cape et son linge humide. Il s’était imprégné de la fraîcheur extérieure et Théo sentait que ses testicules n’avaient pas apprécié la chose. Aussi, il se glissa avec délice dans l’eau chaude, et l’appréciât encore plus que son premier bain de la soirée.

« Et toi tu n’a même remis de fourreau à ton autre épée »

Le regard entendu de Théophile était au diapason de l’humeur de Loghart. Légère et badine.

« J’imagine les pauvres gars qui t’ont remonté et qui ont pu détailler l’ensemble de tes bijoux de famille. »

L’archer ne pouvait contenir le rire que l’image lui provoquait. Il voyait tout à fait Loghart, allongé nu sur le rempart en faisant l’étoile de mer, en train de se remettre de ses émotions, et les pauvres miliciens qui l’observait avec de grands yeux. Il noya son hilarité dans une gorgée de bière.

Encore une fois, l’eau chaude fit son effet et détendit les muscles tendus des hommes d’arme. Leurs vêtements leur furent rapportés et cette fois, ils purent se rendre à la salle commune habillés. Le patron était toujours invisible, et c’était une seconde femme qui s’occupait de faire le service pour ceux qui n’avait pas pu se restaurer avant l’attaque. La coutilerie de Théo était déjà attablée et il fut heureux de voir qu’aucun d’entre eux n’était blessé. Puant peut-être, mais intacts. Il fit signe à Loghart de se joindre à eux.

« Viens, j’ai partagé le voyage avec ta coutilerie, viens prendre le repas avec nous. »

Chef n’était plus en colère après lui. Lui aussi avait l’air soulagé de voir son casse-pieds préféré en un seul morceau. Le borgne enjamba le banc et se retrouva face à lui.

« Vous puez autant qu’un chien errant les gars. J’espère que vous ne comptez pas esquiver le bain. »

« Au pire ils le prendrons demain à Usson. »

L’archer fronça les sourcils. Vu l’état de la muraille, il faudrait sans doute plusieurs hommes pour effectuer les réparations. Il pensait que le convoi resterait peut-être bloqué un jour supplémentaire pour leur donner un coup de main.

« Nous partons toujours demain ? Ils n’ont pas besoin d’aide ici ? »

Chef soupira, ses épaules s’affaissèrent légèrement, comme si cette histoire lui pesait physiquement. Après tout, c’était sa première sortie hors des murs en tant que Coutilier. La vie de ses hommes lui tenait à coeur, il s’en sentait largement responsable. Et il avait femme et enfants qui l’attendait à Marbrume, et sans doute avait-il peur de ne pas revenir et de les laisser les trois femmes de sa vie seules. Tout le monde savait comment pouvait tourner la vie pour trois femmes seules…Le Coutilier finit tout de même par se redresser, conscient qu’il devait montrer l’exemple à ses hommes.

« Le convoi ne peut pas être arrêté. Le responsable est venu me dire qu’il y avait des denrées qui devraient être vite consommées. Ils devront se débrouiller sans nous, peut-être qu’ils vont faire envoyer un message à Marbrume avec ceux qui y repartent pour avoir des renforts, je ne sais pas. »

Il jeta un œil à Loghart. Lui en effet ne devait pas aller jusqu’au plateau. De ce qu’il savait, sa Coutilerie devait rentrer avec deux chariots pour Marbrume.

Je ne déposais strictement rien.
N’ayant revêtu aucun vêtement et ayant abandonné mon épée hors de la ville, je n’avais qu’à me déposer moi-même dans l’eau. Je pris tout de même soin de me débarbouiller et de retirer un maximum de boue avant de plonger dans l’eau fumante.
Je ris de bon cœur à la remarque de mon compagnon.

Je n’ai pas vraiment eu froid, avec des torches fangeuses au cul tu sais !

Je lui envoyais une gerbe d’eau à la figure en récompense à sa seconde phrase.

Ne t'en fais pas pour eux, ils ont l’habitude ! Sinon, ils la prendront vite !

Nous pouvions alors nous payer le luxe de nous détendre, l’eau chaude nous délassant la couenne et affutant mes sens. Je lançais quelques sourires à la serveuse lorsqu’elle nous apporta nos habits propres, me demandant si j’aurais le temps de repasser la voir. Enfin propres, Théo m’invita à se joindre à sa coutillerie pour le repas, invitation que j’acceptais en m’habillant.
À notre arrivée, les gars semblaient un peu abattus et, surtout, ils étaient sales et sentaient la vase. L’archer, taquin, aborda le sujet, mais fit la moue à la réponse de son chef. Je restais silencieux durant leur échange jusqu’à ce que le coutillier suggère que nous demandions des renforts à Marbrume. En effet, la muraille à bien souffert et plus il y aura de monde pour travailler à sa réparation, plus vite la ville sera de nouveau sûre.

Croisant le regard du borgne, je haussais les épaules.

On doit rentrer avec deux chariots pour Marbrume oui pour repartir dans trois jours avec un convoi pour Sombrebois. J’imagine que mon coutillier à prévu de donner l’alerte dès notre arrivée. Après, connaissant les gars, ils sont actuellement à pied d’œuvre pour aider les locaux à barricader au mieux la zone.

Nous prenions place autour de la table et je me saisie d’un tranchoir et d’un morceau de fromage après avoir servi un verre de vin à l’archer ainsi qu’un pour moi.

Cependant, si cela peut vous rassurer, avec deux chariots seulement nous irons beaucoup plus vite qu’à l’aller. S’il le faut, l’un de nous ira en avant du convoi avec un canasson, ce ne serait pas la première fois. Chaque demi-journée compte.

Je mis un coup de coude à Théo, accompagné d’un sourire.

Pas d’inquiétude les gars, la partie la plus dangereuse du parcours est derrière vous!

Loghart ne parut pas déstabilisé par les paroles de Chef. On sentait que tout ceci lui était familier. Et si ce n’était pas le cas, il faisait avec. Du peu que l’archer connaissait son nouveau camarade, ça aurait tout à fait pu être ça. Improviser ne semblait pas être un problème pour l’ex-mercenaire. Au contraire, cela était vraisemblablement sa façon de vivre.

Le borgne sourit à la dernière réflexion de son nouvel ami.

« Qui t’as dit que j’étais inquiet ? Au contraire, il me tarde de rencontrer les veuves du plateau. »

Théophile trinqua avec son camarade avant de s’attaquer au repas avec enthousiasme. Le peu qu’ils avaient grignoté sur la route était bien léger pour leurs corps. Pourtant, les hommes s’étaient habitués à parfois manger peu. La première année à Marbrume avait été faite de privations pour beaucoup. Même si les choses allaient mieux, il suffisait d’une mauvaise récolte pour qu’ils doivent à nouveau se serrer la ceinture. Alors autant apprécier la bonne chère tant qu’il y en avait devant leurs yeux, et leurs bouches !

Ce ne fut qu’une fois leur festin engloutis que les hommes étaient à nouveaux prêts à discuter. En réalité, il ne restait plus que Loghart, Théo et Le Rouquin à table, les autres ayant déclaré forfait pour la journée.

« Je dois dire qu’il était agréable de trouver un camarade aussi sympathique dans le convoi. Et un guerrier aguerri. Comme tu le disais hier, la plupart des miliciens ne connaissaient rien au combat avant de s’enrôler depuis la fange. Certains ne saurons jamais ce qui peut se passer quand tu tue ton premier homme, que tu dois sauver le cul d’un camarade sans avoir de consignes parce qu’il serait trop tard si tu les attendais ou bien d’annoncer à une femme que l’homme qu’elle aime ne rentrera plus jamais, la laissant veuve avec une tripoté de mômes à gérer. »

Ce n’était qu’une petite partie des tâches ingrates que les soldats et mercenaires devaient accepter pour respecter leur serment. Ils avaient dû en prononcer un nouveau en rentrant dans la milice mais cela n’effaçait en rien ce qu’ils avaient vécu auparavant. Le Rouquin tapota l’épaule de Théophile et fit un signe de tête à Loghart. Si lui aussi décampait, c’était signe que la soirée commençait à s’allonger et que la nuit serait courte.

« Je pense que je vais les rejoindre sinon Chef risque encore de me tirer les oreilles demain, et je crois que j’ai assez titillé sa patience pour le reste du voyage. »

Le borgne leva son verre en direction de Loghart.

« Que les Dieux veillent sur toi l’ami et t’aident dans tes recherches. Passes me voir quand tu restes quelques jours sur Marbrume, je te payerais une chopine pour que tu me racontes dans quelles aventures tu t’es encore fourré ! »

Il rit et se releva, prêt à aller lui aussi reposer ses muscles avant d’entamer la dernière demi-journée de l’aller de ce voyage. Restait à espérer que le retour serait moins chargé en émotions !