La coutilière est remontée presque aussitôt avec le petit milicien. Cette fois-ci plus que jamais, j'ai l'impression de voir une tueuse dans ces yeux-là. D'ailleurs, elle envoie balader le mioche d'un mouvement de jambe qui m'a l'air totalement volontaire. Je ne sais plus très bien de qui j'devrais avoir peur... Le petit milicien, qui s'appelle Hardy je crois, il se met à foncer sur l'homme à la dague, mais çui-là est sacrément doué puisqu'il lui lance sa dague en plein dans le coeur ! C'est le bazar, encore plus de sang partout, je vois la coutilière courir vers nous et me pousser un peu violemment. Je tombe à la renverse tout en entendant un grand CRAC. J'espère que c'est pas mon os, mais apparemment tout va bien, j'peux encore bouger tous mes bras, et mes jambes, et mes doigts, et mes orteils, et mon cou. Alors je me rassieds et je regarde autour de moi. Les deux miliciens sont par terre, inconscients ou morts, chacun dans une mare de sang, et Léonie a dû passer la porte avec l'homme à la dague. Je m'relève aussi vite que je peux, et sans un regard en arrière, je m'élance moi aussi vers la porte. Il est temps que j'mette les voiles, j'aurais jamais dû m'attarder ici, je l'savais bien que ma curiosité me perdrait un jour, et ça j'vous promets qu'on m'y reprendra pas à deux fois.
J'ai un p'tit moment d'hésitation une fois à la porte. Léonie est aux prises avec l'homme en question et plusieurs miliciens sont pas loin, en train de courir vers eux. Non, décidément, si en plus il y a davantage de miliciens qui rappliquent, il fait pas bon s'attarder dans le coin. Je m'ratatine sur moi-même et je sors de la maison en me dirigeant vers ma charrette à pas de loup. Le temps que les miliciens se débrouillent avec ce type-là, j'atteins ma charrette et je repars avec elle dans une ruelle. Mais cette fois-ci, c'est d'un pas vif, et sans chanter aucune ritournelle... Je remercie Anür de m'avoir sortie en vie de cette mauvaise passe. En même temps je l'mérite bien, j'suis sûre que c'était des sales sectaires dans cette baraque. Et puis... Ca m'fera une sacrée histoire à raconter aux clients demain !