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 [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts.

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Margaux de Piana
Margaux de Piana



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MessageSujet: Re: [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts.   [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts. - Page 2 EmptyMar 9 Aoû 2022 - 10:21


La jeune Margaux aurait voulu plaider sa cause à nouveau, s’agenouiller, mieux s’expliquer devant l’adulte ; mais ses paupières devinrent lourdes, si lourdes qu’elle ne put résister au besoin impérieux du sommeil. Ses petits yeux se fermèrent ; et elle s’abîma dans un sommeil sans rêve, d’où elle n’émergea qu’un temps indéfini plus tard.

Elle eut du mal à reprendre ses esprits, mais la faim la poussa finalement à se redresser, tandis qu’une odeur délicieuse parvenait doucement à ses narines. Son estomac se contracta alors qu’elle reconnaissait du lait au miel, mélangé à un espèce de gruau consistant, avec des céréales, que l’enfant commença à manger de très bon appétit. Elle s’émerveille de la petite sculpture de son interlocuteur, qui semblait ressembler à une fée avec ses manières amicales et drôles, si droles qu’elle ne pensa pas tout de suite à son frère. L’histoire de l’oiseau creusant la pierre pour en récolter des pierres précieuses la laissa sceptique, mais néanmoins enjouée et curieuse ; ce qui fit passer le temps du déjeuner comme un éclair. Pour une fois, son ventre était plein, elle avait chaud dans sa jolie chemise propre - mais malgré tout, la réalité reprenait corps. Louis reprenait sa place dans ses pensées troublées ; et toutes ses inquiétudes concernant sa situation précaire et son statut incertain envahissait, parasitaient sa bonne humeur. Margaux comprenait confusément que les nouvelles ne devaient pas être bonnes si elles n’étaient pas abordées - sans pour autant oser les matérialiser en posant une question directe.

Mais déjà, Kathy lui demandait de se lever, lui tendait un objet qu’elle n’avait jamais vu auparavant, et dont l’enfant comprit rapidement l’utilité. Le feu aux joues et les yeux emplis d’une naïve adoration pour sa nouvelle amie si généreuse, elle relégua ses songes moroses à l’arrière-plan, pour apprendre à se servir de sa canne convenablement, simplement heureuse du bien-être procuré. Elle fit ainsi de nombreux allers et retours dans le couloir, le cœur lourd mais l’âme chantante - bien que la souffrance ne s’arrêtât pas, elle n’était pas amplifiée par la marche, ce qui ravissait secrètement la petite fille. Mais la fatigue commençait à la gagner, aussi se laissa t-elle entraîner docilement aux bains.

La jeune noble suivit les explications de la sorcière, ou plutôt de la douce fée avec autant d’intérêt que de fascination. La disposition de l’étuve la laissait pantoise de tant d’ingéniosité, et elle allait poser une question sur la régulation de la température qu’elle s’interrompît aussitôt, tandis que son interlocutrice se déshabillait sans pudeur.

Écarlate et gênée, Margaux déposa sagement sa nouvelle canne de bois poli contre un mur, lissa sa chemise sur sa peau nue, avec embarras. Elle n’osa jeter un coup d’œil qu’au corbeau toujours juché sur la tête de Kathy, émit un petit rire à sa voix ridicule.

- « Je suis pas une souillon… »

Sa voix était gaie, enjouée. Elle aimait beaucoup Kathy, bien qu'elle ne la connaissait pas vraiment, mais sa gentillesse et sa douceur - qu'elle n'était pas obligée de feindre - lui allait droit au cœur. Et malgré la plaisanterie, l'enfant était suffisamment mature pour en reconnaitre le fond de vérité, aussi baissa t-elle la tête en saisissant la brosse, un peu empruntée. Elle s’assit humblement dans un coin, commença à frotter consciencieusement ses pieds. Elle avait conscience qu’il allait falloir affronter la réalité ; et finalement, alors qu’elle tentait de nettoyer sous sa nouvelle robe de nuit sans l’enlever, la gamine reprit la parole.

- « Kathy, est-ce que… tu as pu parler à monsieur Léon ? Tu sais, je sais bien que ce n’est pas gratuit. Que rien ne l’est. J’en paierai le prix, j'en ai bien conscience. »
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Dame CorbeauMaître du jeu
Dame Corbeau



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MessageSujet: Re: [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts.   [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts. - Page 2 EmptyJeu 11 Aoû 2022 - 16:51
15 Mai 1167.
[convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts. - Page 2 Q2fw
La jeune femme observa quelques instants la gamine qui peinait à accorder pudeur et besoin de propreté en laissant trainer sur elle un sourcil aussi amusé que curieux. Finalement, elle choisit de mettre fin d’elle-même à la pittoresque scène. S’approchant d’un pas franc de sa jeune amie, elle lui fit lever les bras et la fit jaillir de son pyjama improvisé avec tant d’efficacité que la jeune fille du cligner des yeux une ou deux fois avant de se rendre compte qu’elle était nue comme un verre.

Toujours pas sensible à la moindre trace de gêne, celle qui la traité comme une petite sœur timide se mit à la briquer. Elle n’hésitait pas à être vigoureuse aux endroits qui avec les semaines et les mois avaient accumulé une crasse persistante, pour redevenir bien plus délicates sur les plaies et hématomes mal guéris. Elle ne fit pas de commentaires à leurs sujets, visiblement parfaitement consciente du genre de vie qu’avait dû mener l’enfant pour être ainsi marquée. Ce qui ne l’empêcha pas d’insister jusqu’à ce que la jeune fille sente le savon jusqu’entre les orteils. Elle lui répondit alors qu’elle s’acharner sur ses petits ongles avec une brosse.

- Je lui ai parlé. Il ne m’a pas donné de réponse, mais je sais qu’il se sera renseigné d’ici à ce que tu le vois tout à l’heure. C’est lui qui te dira si tu as les moyens de ta demande. Je croise les doigts pour que ce soit le cas Margaux, mais je n’ai pas la réponse que tu espères.

Elle ferma les yeux soudainement une longue seconde, ses gestes s’arrêtant tout aussi promptement, comme si une intense réflexion la prenait. Elle s’était si bien immobilisée, le visage parfaitement serein et inerte qu’on aurait pu la croire morte, même son buste semblait ne pas se soulever au rythme d’une respiration. Quand elle les rouvrit, un sourire triste se peignit sur son visage.

- Doug dit que tu reverras ton frère, bien en vie. Mais que ce jour-là tu perdras peut-être le lien qui vous unis tout les deux. Tu dois être patiente et tu dois être forte, car tu dois te sauver toi-même. Une autre volonté étend ses doigts vers vous, en bien ou en mal elle vous transformera profondément et tu devras choisir ta réponse à sa question.

Comme si elle avait dit une chose parfaitement anodine et que rien d’étrange ne venait de survenir, Kathy continua son brossage en règle avant de lui vider de multiple seaux d’eau chaude sur la tête pour s’attaquer au problème autrement plus complexe de sa chevelure laissée sans surveillance ni entretien pendant des mois.

- Et je ne te parle pas de l’ombre que l’autre à jeter sur ton épaule. Ça, je te l’ai dit, elle n’aura que la force que tu lui donnes. Laisse la disparaitre, finit-elle par ajouter plusieurs minutes d’intense et douloureux démêlage plus tard alors qu’elle lui prenait la main pour l’emmener s’asseoir sur les première marche du bain, laissant leur jambes agréablement subir ses effets réparateurs alors que la pythie abordait de nouveaux sujets parfaitement anodins, évoquant des moments drôle de son quotidien pour occuper la jeune fille. Certaines histoires n’étaient pas tout à fait faites pour des oreilles si jeunes, mais Kathy vivait visiblement dans un monde où on ne s’embarrassait pas de détails de ce genre.

Au final, elles durent passer plus d’une heure dans la salle de bain, Kathy la savonnant des cheveux aux orteils deux fois de plus avant d’estimer avoir « entamé » le problème comme elle l’avait dit. Il fallut admettre qu’en sortant, Margaux avait enfin retrouver l’aspect de la petite fille qu’elle aurait dû être, même si son visage émacié et les rictus de douleur qu’elle dissimulait presque par habitude à chacun de ses pas malgré la béquille ne laissait que peu de doutes sur la difficulté de sa vie.

Une dernière surprise les attendait cependant quand elles revinrent à la chambre attribuée à la jeune fille. Devant la porte un paquet ficelé les attendait. Quand Margaux leva les yeux vers Kathy, celle-ci se contenta de hausser les épaules, visiblement aussi incapable qu’elle de déduire le contenu du paquet. Mais sans hésitation elle s’en empara et entra dans la chambre, sa minuscule amie à sa suite.

Elles entreprirent de le déballer ensemble et découvrirent, non sans stupeur, une robe. Il ne s’agissait pas d’une tenue de bal ou de parade, loin s’en faut. En réalité on aurait dit une version miniature et féminisée de la tenue que pourrait porter un apprenti de l’ordre des compagnons. Une chemise crème maintenue serrée par une sorte de corset à bretelle en une sorte de cuir en daim marron. Une robe longue mais raccourcie au-dessus de la cheville pour restée pratique, surtout pour une estropiée même coloris, et une paire de chaussure. Si l’ensemble paraissait simple et fonctionnel, un seul coup d’œil suffisait à garantir la qualité des matériaux et de l’ouvrage. Peut-être pas tout à fait l’égal de la noblesse, mais qu’une famille bourgeoise aurait été fière de pouvoir s’offrir.

- Bon, au moins on sait ce qu’on va te mettre ! Fût la seule réaction de Kathy après avoir longuement observé le vêtement. Cette dernière insista tout de même pour enduire à nouveau le genou de margaux d’onguent. La cicatrice et la zone environnante, si elles étaient toujours peu ragoutantes, semblait tout de même un peu moins gonflée et rouge. D’ailleurs l’application fut moins douloureuse que la veille avant de laisser place à l’agréable chaleur.

Comme une grande sœur, Kathy l’aida à se préparer en chantonnant tout sorte d’air, finissant par nouer une tresse au centre de sa chevelure fournie pour maintenir l’ensemble sans pour autant dissimuler sa « belle longueur » comme elle lui avait dit. Kathy la fit mettre debout et l’observa d’un œil aussi critique qu’enjoué.

- Pas mal ! Lui dit-elle avec un clin d’œil, avant de poursuivre d’un air plus sérieux. Bon, il va être temps d’y aller. Léon est patient mais je doute qu’on soit en droit de jouer avec cette patience pour le moment.

Naturellement, elle lui offrit sa main, plus en geste d’affection subite que de soutien pour la route. Leurs pas les menèrent jusqu’au début d’une zone nouvelle où l’esquisse d’un renard rouge remplaçait le rossignol bleu. Une porte s’ouvrit sans qu’elles n’aient besoin de frapper laissant apparaître un homme grand et sec au visage fermé. Il observa Margaux une seconde et s’écarta pour la faire entrer, mais tendit son bras quand la Pythie voulut s’engager à sa suite, lui attirant une moue réprobatrice de la jeune femme. Ce qui sembla lui glisser dessus comme un pet sur une plaque de verglas.
Après un instant d’affrontement de regards, Kathy du céder. Elle s’accroupit au niveau de Margaux et pressa ses mains entre les siennes.

- Rien ne t’oblige à tout lui dire quand il demande, mais surtout ne lui ment pas. Ce soir je te ramènerais une tarte qu’on partagera dans ta chambre.

Elle lui fit un dernier clin d’œil avant de la laisser aux mains de son nouveau guide qui lui referma la lourde porte au nez. Après l’avoir verrouillée à double tour et sans un mot, il s’engagea dans le couloir à bon pas. S’il ne sembla tout d’abord pas tenir compte de la difficulté de Margaux à trottiner derrière lui, leur rythme changea subtilement pour finalement parvenir à une vitesse qu’elle pouvait suivre sans trop d’effort ni trop de douleur. Il la guida jusqu’à une porte identique aux autres et lui ouvrit. Un bureau et des étagères, vides, pour la plupart. Des feuillets vierges et de l’encre bouchonnée occupaient l’espace de travail ainsi qu’un épais volume à la doublure de cuir parfaitement anodine. Une large lucarne dans le plafond offrait une lumière plus que correcte.

Son guide referma la porte derrière elle dès qu’elle eut-mis un pied dans la pièce et il fallut près d’une demi-heure pour qu’une nouvelle paire de bottes se fassent entendre dans le couloir en faisant crisser les lattes sous leur poids. Le doute sur l’arrivant n’était pas vraiment permis. Léon, dit le couturé, chef de la guilde des voleurs ouvrit la porte et se glissa dans l’ouverture en baissant la tête, rappelant le genre de colosse qu’il était.

Il posa son regard sombre et intelligent sur Margaux, la détaillant. Quand il fut satisfait d’un résultat qu’elle ignorait, il prit finalement la parole. Pour dire une chose à laquelle elle n’était certainement pas prête. Une chose qu’elle devait sans doute redouter.

- Ton frère n’est plus en leur compagnie. En réalité, il n’était déjà plus là depuis quelques jours quand je suis passé hier. Ils l’ont vendu. Un bon prix il parait, a un acheteur anonyme. J’ignore qui, je ne me mêle généralement pas des transactions qui n’empiètent pas sur mes affaires ou mes objectifs.

De sa grosse main, il lui indiqua la chaise derrière le bureau et son regard se durcit jusqu’à ce qu’elle soit assise docilement. Il s’approcha et posa ses doigts sur la couverture de l’ouvrage. Il poursuivit comme s’il ne venait pas d’ébranler tous les espoirs de la gamine.

- Il y a dans ce livre les comptes d’une bergerie au labret. Des stocks de laits jusqu’aux prix du cuir pour les bottes du fermier. Un bourbier économique et légal, expliqua-t-il en tirant de sa poche arrière une feuille pliée qu’il étendit devant elle. Sur cette dernière, il n’y avait qu’une chose, un nombre.

- Je veux que tu fasses rentrer cette somme dans ces comptes de manière à ce qu’une personne qui les étudierait par inadvertance ne se rendent pas compte qu’elle a été ajoutée au total. Fais comme tu veux, gonfle les chiffres, fait mentir les stocks, mais ça ne doit pas ressortir. Tu as une semaine, ensuite si je suis satisfait, je te donnerais d’autres choses du même genre. Si tu as besoin d’information ou de matériel, tu demanderas à Kef, c’est le grand type qui t’a amené ici. Il te trouvera ce qu’il te faut. Tu es maitresse de tes horaires et de ta méthode, tu peux sortir quand tu veux. Je parle de sortir vraiment. Demande à Kef de te ramener en ville et il le fera, à toi de voir si tu reviens ou si tu redeviens une bête errante qui espère qu’on lui sauve la peau.

Il se détourna du bureau pour poser sa main sur une des étagères vide, se frottant le pouce et l’index pour estimer la poussière accumulée. Un geste étonnamment banal dans une telle conversation.

- Tu connais l’expression « grattes mon dos et je gratterais le tiens… » ? Demanda-t-il soudainement.



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Margaux de Piana
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MessageSujet: Re: [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts.   [convocation] Faire quelque chose de ses dix doigts. - Page 2 EmptySam 20 Aoû 2022 - 12:18


Un petit cri de surprise échappa à l'enfant, tandis que Kathy la déshabillait d'autorité. Elle devint toute rouge, jusqu'aux oreilles ; mais elle n'eut guère le temps d'avoir peur ou de s'appesantir sur la question de la pudeur, car déjà, la sorcière l'étrillait avec vivacité, sans toutefois lui faire mal, car Margaux s'aperçut très vite que la jeune femme évitait de lui faire du mal aux endroits les plus sensibles.

Un peu empruntée, elle avait malgré tout serrés ses poings, baissé un peu le regard ; et finalement, elle s'était un peu détendue tandis qu'on passait la brosse sur ses ongles. C'était si agréable de sentir bon, d'avoir de nouveau une peau qui ne la grattait pas - et désormais, elle arborait un sourire amical et confiant envers cette femme qui prenait soin d'elle, comme sa mère autrefois. Bien sûr, elle était déçue de ne pas avoir de réponse concrète, mais elle avait désormais le bon sens d'accepter les bons côtés de la vie, et d'en profiter tant qu'elle pouvait.

Ainsi, la noble déchue offrit un doux sourire à son interlocutrice, qui se figea complètement alors que cette dernière s'immobilisait complètement. Silencieuse, la petite fille écouta la prophétesse avec attention, en déglutissant péniblement.
Elle devint toute pâle. C'était si précis, presque terrifiant de justesse, et il lui fallut tout son courage, toute sa force et toute sa volonté pour ne pas éclater en sanglots. Elle ne pouvait remettre en question la véracité de la prédiction, aussi baissa t-elle la tête, les épaules basses. Son cœur se serrait à l'idée de ne pas pouvoir véritablement sauver son frère, que leur lien s'en trouverait transformé - qu'il fallait d'abord agir pour elle-même avant d'agir pour lui. Que la volonté démoniaque se trouvait toujours focalisée sur eux deux.

Ils étaient une proie facile pour la Bête, c'était une évident. Une proie qu'Il ne relâcherait pas ainsi, pas si facilement.

Abattue, Margaux se laissa brosser les cheveux, se laissa tremper, avec un sourire fatigué, réagit à peine à l'annonce de cet "autre", qu'elle pouvait laisser disparaitre. La Guilde des Voleurs la laisserait-elle en paix si elle faisait bien son travail ? Pourrait-elle s'extirper de leur influence ? Sans doute était-il plus simple de négocier avec un adulte retors qu'avec un démon... et souvent, la perspective lui parut certaine.
Elle se laissa démêler les cheveux patiemment, en remerciant la Pythie à mi-voix, endura la douleur sans broncher, sans pouvoir s'empêcher de pouffer de rire à son badinage léger et drôle. La gaieté de la jeune femme était communicative, et, bien que son chagrin et ses préoccupations ne fussent jamais bien loin, penser à autre chose, profiter des joies d'une conversation plus légère lui permit de se détendre un peu.

Enfin, elles purent reprendre sa béquille pour retourner dans sa chambre, où un petit paquet les attendait. Même Kathy semblait surprise, et après l'avoir déballé, la petite fille ne put s'empêcher de lui sauter au cou, avant d'enfiler la jolie robe qui semblait lui être destinée. Bien que simple, elle était de bonne qualité, douce au contact et bien chaude. Les chaussures de cuir étaient aussi à sa taille, et en les enfilant, l'enfant sentit tout de suite qu'elle n'aurait plus mal aux pieds quand il faudrait marcher.

- "Merci, merci Kathy ! puisse les Trois te bénir... vous êtes très bons envers moi, je... je vous suis très reconnaissante, tu sais."

Et si la jeune nobliotte savait pertinemment que rien n'était gratuit et qu'il faudrait payer les vêtements, le lit et la nourriture par son travail, elle restait néanmoins consciente qu'ils n'y étaient pas obligés, et qu'ils auraient pu moins investir pour lui demander la même quantité de labeur.
Alors malgré un mouvement de recul instinctif, la gamine se laissa étaler à nouveau la pâte salutaire sur son genou blessé. Le bien-être l'envahit malgré tout, et elle poussa même un petit cri de joie en se regardant dans la glace. Ses cheveux roux étaient de nouveau bien coiffés, son visage propre ; et elle se sentait désormais aussi belle qu'une princesse.

Sans protester, l'enfant se redressa à nouveau, quand sa protectrice lui annonça qu'il était temps d'aller voir le chef de la Guilde, prit sa main pour se laisser guider dans les couloirs. Elle remarqua le changement de signe - d'un rossignol bleu, il s'agissait d'un renard rouge - leva les yeux en se raidissant, tandis qu'une porte s'ouvrait avec autorité.
Un garde, grand et sec, se dessina dans l'embrasure, mais s'il s'écarta pour la laisser passer, il n'en fut pas de même pour la Pythie, qui, après un instant, lui fit ses dernières recommandations.

Margaux sentit son sang se glacer, mais, cependant, obtempéra en hochant sagement la tête.

- "Oui, Kathy. J'ai hâte de te revoir ce soir. Merci pour tout."

L'adulte repartit, la laissant seule avec son nouveau guide. Elle sentit effrayée et vulnérable, prise au piège tandis qu'il fermait la porte à double tour, mais, sans oser regimber, elle suivit de son mieux ; avant de le saluer de la tête, essouflée, lorsqu'il l'amena dans un bureau lumineux et encombrée, où il l'enferma aussitôt qu'elle eut mis les pieds à l'intérieur. Sans oser rien toucher, elle attendit en s'installant dans un coin, en essayant de ne penser qu'à des choses anodines et sans importance, en fuyant consciencieusement l'objet de ses préoccupations urgentes, et finit par sauter sur ses pieds, alors que la porte se rouvrait sur Léon, qu'elle reconnut tout de suite.

L'image des doigts coupés s'imposa à elle. Le corps de la petite fille se raidit, son souffle s'accéléra un peu, et elle se laissa détailler en silence, sans oser bouger d'un pas. Il était si grand, si immense qu'il semblait pouvoir la briser d'un geste, et, lorsqu'il prit la parole, elle leva son regard bleuté sur lui, par pur réflexe.

Son annonce fut comme un coup de tonnerre. Elle eut l'impression qu'on venait de déchirer son cœur en plusieurs morceaux, qu'on le piétinait sauvagement. Il avait été vendu. Le Démon - à n'en pas douter - l'avait pris dans ses filets, et le détenait même depuis plusieurs jours. Sous le choc, les yeux secs et la respiration désordonnée, Margaux ne comprit pas tout de suite pourquoi l'adulte arrêtait de parler, et qu'il durcissait son regard ; puis elle s'assit enfin, soulagée de la douleur insidieuse que lui procurait le fait d'être debout.

Il posa ses gros doigts sur un livre, reprit la parole avec naturel, sans s’embarrasser des sentiments de l'enfant en face de lui. Cette dernière eut un peu de mal à suivre sa réflexion - trop prise dans ses inquiétudes familiales - mais, finalement, hocha la tête en silence.
Bien qu'elle eut toujours été à l'aise avec les chiffres, la tâche lui semblait insurmontable. Comment pouvait-on noyer une somme dans une autre ? Les idées de son interlocuteur lui donnèrent des pistes, qu'elle essaya de graver dans un petit soin de sa mémoire, sans pouvoir se détacher de l'image de son frère. Elle était prisonnière ici ; et lui était ... quelque part à Marbrume.

Découragée, elle garda les yeux baissés sur le livre de compte, les releva avec vivacité.

- "Je p-peux vraiment sortir ? Vraiment ?"

Elle se mordit la lèvre. La petite fille ne pouvait pas laisser son frère. Bien qu'il fallait qu'elle se sorte elle-même de l'emprise de la Bête, la possibilité lui était véritablement donnée de partir, de rejoindre son cher petit frère - ou même de l'abandonner. De grandir dans cette sécurité relative qu'offrait la Guilde, près de Kathy. N'était-elle pas sa seule amie ?

- "Non, monsieur. Je ne connaissais pas cette expression. Mais... ça veut dire... que si je vous rends service, vous me rendrez service aussi ?"

Le ventre crispé, elle essaya d'en mesurer les implications, de réfléchir le plus rapidement qu'elle pouvait. Elle avait peur de repartir au service de la Bête - mais c'était inévitable. Comment des hommes pouvaient-ils se mesurer à un démon ? Le tuer semblait presque impossible - en tout cas à ses yeux d'enfant - mais si Monsieur Léon le retrouvait...

- "Est-ce que ça veut dire que si je travaille très fort pour vous, vous trouverez mon frère ? Je ne peux pas vous cacher que je rejoindrais. Je l'aime. Et l'homme qui le détient... est... Il est effrayant. Si vous me vendez à lui, vous en tirerez des bénéfices et je vous devrais des services. Je reviendrai pour vous aider un jour, je vous en fais la promesse, si je survis. Mais j'ai juré devant les Trois que je veillerais sur mon frère, alors... En attendant, je vous promets que je serai une bonne comptable. Je vous obéirai."

Elle devait être forte pour Louis, pour elle-même. Et elle devait montrer qu'elle était capable d'être forte et de bien travailler.

- "Je ferai tous les services que vous me demanderez, monsieur Léon. Je ne mange pas beaucoup et je sais travailler dur. Vous allez voir. ... Et puis, en plus, je vous suis reconnaissante, pour le lit et tout ça. Merci, monsieur."

La gamine hocha la tête avec détermination. Elle était entièrement sincère, désirait se montrer loyale. Après tout, il n'était pas obligé de se montrer si généreux envers elle ; si bien même qu'elle n'était plus sûre de vouloir partir. Mais elle n'avait pas le choix. Son âme et celle de Louis en dépendait.





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