[TERMINÉ] La surveillance de la muraille [Rosen x Desmond]

La surveillance de la muraille

Rosen feat Desmond

30 septembre 1166,
Sombrebois

A quoi bon quitter le lit, je me demande… maintenant, c’est de pire en pire, je n’ai même plus envie de sortir de la chambre. M’isoler sur les remparts étaient déjà invivable, mais là, j’atteins les sommets… Il faut que je me reprenne en main.

Je me lève donc après ma sieste, prends une robe de velours noire et descends me laver. Je ne supporte plus ces stupides robes de satin, de soies, de dentelles et compagnie, je ne supporte plus ce stupide titre qui me sied si mal, je ne supporte plus ce foutu château et encore moins les gens qui y vivent.

A m’arrêter quelques minutes sur ce que je ressens en mon for intérieur, je crois que je suis au bord de la crise de nerfs. Je ressens une telle tension, un tel nœud, une telle barre dans l’estomac qui me remonte dans le gosier. J’ai l’impression plus que jamais de n’être qu’une intruse dans cet univers qui n’est pas le mien.

L’éloignement se creuse de plus en plus avec Hector, les circonstances qui en sont responsables s’enchaînent encore et toujours. J’ai eu des mots blessants et cruels ? Bien ! C’est lui qui a commencé à me blesser. Je l’ai trompé ?

D’accord, admettons, même si je me suis évertuée à lui faire entendre que je n’ai pas voulu ça – Que n’ai-je donc pas fermé ma gueule au lieu de lui en parler ! Et après ? Il dit m’avoir tout pardonné, mais en finalité, il ne m’a rien pardonnée du tout et il se met même à me salir devant ses gens !

Jusqu’à quand allons nous nous déchirer de la sorte ? Qu’il me rejette, je peux encore le comprendre. Mais notre enfant… son héritier ? Il ne semble même plus lui porter le moindre intérêt. Je vais finir par croire qu’il n’aura pas de père, ce pauvre bébé… J’ignore bien quel sera notre avenir, à supposer que nous en ayons un.

Je file comme une ombre pour sortir rapidement. J’avais promis de faire des efforts… je les ai fait. C’est sans un mot à quiconque que je me dirige vers l’extérieur prendre l’air, j’en ai besoin. Officiellement, je vais chasser. J’ai donc pris mon arc, mais en réalité, j’ai juste envie de me défouler dans une longue marche et de solitude. Quand plus rien ne va, que peut-on bien vouloir d’autre après tout ?

Je soupire en retrouvant l’éblouissante lumière du jour, je suis d'une humeur massacrante. Puis je cligne des yeux à plusieurs reprises devant une forme floue et de haute stature, quelque chose dont la taille me paraît difficilement humaine. Merde, un ours ? Un fangeux ?! Non, ce ne peut pas être ça ! Je recule rapidement de plusieurs pas pour essayer de mieux distinguer ce qui me fait face.

Dernière édition par Rosen de Sombrebois le Dim 15 Nov 2020 - 2:14, édité 3 fois

Pourquoi moi ? Qu’est-ce que j’ai fait de mal ? Ce sont les questions que je me pose alors que j’attends comme un idiot devant la porte extérieur des appartements de dame Rosen de Sombrebois. Lorsque le comte de Rougelac m’a demandé de surveiller la jeune femme, j’ai d’abord cru à une blague, mais il n’est pas vraiment homme à plaisanter, du moins pas avec moi et j’ai dû me rendre à l’évidence, il était sérieux.

J’ai reçu de nombreuses missions au cours de ma carrière de Chevalier, comme prendre un château, donner l’assaut contre un campement de brigand et même retarder un fangeux mais là c’est une des plus bizarres que je n’ai jamais entendu. Je suis donc là, alors que le soleil se lève, bien planquer, mais je commence sérieusement à en avoir marre, en plus j’ai la vessie qui commence à poser des problèmes, je n'aurai pas du boire autant de bière hier soir.

Au bout d’un moment, n’y tenant plus, je décide de profiter d’un petit coin pour aller me vider, surveillant du coin de l’œil la porte d’où doit sortir ma cible. Je me soulage avec volupté, m’amusant même à faire un petit jeu en essayant d’aller le plus haut possible et c’est jusque quand j’ai terminé que d’un coup une porte situé non loin de moi s’ouvre.

Comme je sais très bien que ça ne peut pas être la jeune noble, car il s’agit de la maison de l’apothicaire que je n'apprécie guère, je commence à gueuler en lui disant :

Mais tu ne peux pas faire attention, espèce de…

Je m’arrête juste à temps, car je me rends compte que c’est bien l’épouse d’Hector, qui se tient face à moi. Je me rhabille précipitamment, rangeant ma trompe dans mes sous-vêtements, et je m’incline :

Bien le bonjour noble dame. Je suis Desmond de Ronchemont.

Je jette ensuite un coup d’œil à l’intérieur et je comprends mon erreur, j’ai inversé les deux bâtiments comme un véritable idiot, l'apothicaire c'est de l'autre côté ! Bon sang de bonsoir, j'ai uriné sur les murs du chateau ! Il y avait une bourde à ne pas faire et je suis rentré dedans de plein fouet. Je me recule donc pour la laisser passer, et j’observe alors un curieux accoutrement pour une noble, ce n'est pas sa robe de velours noire qui attire mon regard, mais ce qu'elle porte, un véritable arc !

Souriant devant cette apparence guerrière, je lui indique :

Vous ne devriez pas porter de telles armes, vous risquez de vous blesser.

J’ai en effet déjà connu ce genre de femme, incapable de manier correctement ne serait-ce qu’un couteau et qui jouent les durs, un peu comme les miliciennes, que notre bon roi a eu la folie d’autoriser. Mais elles sont les premières victimes de leurs bêtises et si d’habitude je m’en fiche royalement si elles pissent le sang, me moquant même de leur maladresse, je suis chargé de la surveiller et je suis sûr que si elle se blesse, Victor va dire que j’ai faillis à la mission qu’il m’a confié.

Par les trois dieux, que c’est compliqué ! La vie était plus simple avant l’arrivée des Fangeux, tuer, piller et violer, c’est ça une honnête vie ! Mais tout a bien changé et me voilà baby-sitter d’une noble qui veut ce la jouer amazone. J’essaye donc d’être conciliant et je lui demande :

Si vous le désirez, je peux vous accompagner pour porter vos proies.

Mon sourire s’élargit, je suis en effet persuadé qu’elle est incapable de tirer droit et je ne devrais pas être trop fatigué à la fin de sa séance. L’important c’est que je puisse la surveiller et ce sera beaucoup plus simple ainsi, n’ayant aucune envie de me cacher dans les fougères de la forêt.

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Alors que je viens de reculer, je me rends compte qu’il ne s’agit ni d’un ours ni même d’un fangeux puisque la chose qui semble se rembrailler s’écarte du mur et se met à parler – à gueuler plus exactement – en me demandant de faire plus attention, se retenant tout juste de m’insulter. Plaît-il ?! Un crétin s’amuse à élever la voix sur moi ? C’est trop fort ! Quoi, je n’ai plus le droit de sortir de chez moi maintenant ?! De mieux en mieux…

Finalement, le rustre individu se ressaisit et me salue poliment. Je vais lui en donner moi, de la noble dame…

« Espèce de ? De quoi donc ?, je demande sévèrement en fronçant les sourcils et en posant mes poings sur mes hanches. Si ma sortie vous pose un problème, vous n’aviez qu’à aller pisser ailleurs. »

Quel imbécile. Je sais bien qui il est, des colosses aussi grand, on en voit rarement plus d’un dans sa vie. Et je l’ai déjà rapidement aperçu au manoir du gouverneur. Mais ce crétin ne s’arrête pas là, puisqu’à présent, il sous entends que je vais me blesser. Je crois que je vais perdre patience… En ce moment, j’ai perdu toute celle que je pouvais posséder. Et les Trois savent à quel point j’ai pu en avoir !

Et en ce qui concerne la moquerie, je ne peux m’empêcher de rire jaune.

« Me blesser ?! Qu’il est mignon... »

Je crois que je vais lui décocher toutes les flèches de mon carquois dans la tronche, et on verra bien qui de nous deux sera blessé ! Plus sérieusement, en parlant de blessure… je suis déjà blessée – la bonne idée de m’ouvrir le bras avant hier... et à ce propos, je ne risque pas de servir de mon arc si la nécessité ne m’y oblige pas.

A comprendre : si ma vie n’est pas en danger ou si du gibier ne se décide pas de lui même à se présenter sur mon chemin. Je n’arrive plus à manger et la viande n’est pas tellement ce qui me fait le plus envie avec mes nausées récalcitrantes, alors je ne vois pas pourquoi je devrais me forcer à chasser pour les autres. Après tout, personne ne peut plus me voir en peinture, pas même mon époux...

« Mes proies ? Qui vous dit que je vais chasser d’abord ? Non, en fait, je souhaite surtout me promener pour me détendre et je tiens à le faire seule. J’imagine de toute façon que vous avez mieux à faire que de m’accompagner. Salutations à Victor ! »

Et je presse le pas sur ces mots pour me diriger vers l’extérieur du bourg. On va oublier le ‘ Officiellement, je pars chasser ‘ non, en fait, je pars juste me promener. Voilà. Si ça peut empêcher que cet espèce d’ours me colle au train…

C’est une vraie grognasse celle-là ! Ca peut arriver à tout le monde de pisser au mauvais endroit ! En plus j’ai l’impression qu’elle se moque de moi en me disant que je suis mignon, même si ce n’est pas claire dans mon esprit. Je pense que personne ne m’a jamais dit que j’étais mignon et je ne sais vraiment pas comment le prendre.

Mais je suis sur qu’elle me prend pour un imbécile, quand elle m’indique qu’elle ne veut pas aller chasser mais simplement se promener ! Qui va dans des bois où l’on peut trouver des fangeux sous chaque buisson pour bêtement se balader ? En plus je ne vois aucune arme de corps à corps sur elle, c’est de la folie pur et simple.

Je la vois ainsi partir, en direction de la porte d’enceinte, et je décide de rejoindre la donzelle, ce qui n’est guère difficile, je vais deux fois plus vite qu’elle, rien qu’en marchand. Arrivé à sa hauteur j’adapte ma foulée à la sienne et je lui dis tout en continuant à marcher :

Il est hors de question que je vous laisse aller seule, vous n’êtes pas au courant que l’extérieur est dangereux ?

Pour appuyer mes dires, je lui fais la liste de tout ce qui peut se trouver dans les bois :

Il y a des animaux sauvages, des bandits et bien sûr, des fangeux. Ce n’est pas parce qu’il y a du soleil qu’ils sont inoffensifs, ils peuvent très bien se planquer, attendre que nous passions à proximité et vous arracher une jambe comme un rien, puis vous dévorez vivant alors que vous vous videz de votre sang.

Je le sais parce que je l’ai déjà vu, toute ma maisonnée à péri, tué par ces fichus monstres et si je lui fais une description aussi précise, c’est bien pour lui faire peur. Moi-même je suis effrayé à l’idée de combattre seul un fangeux, car je n’ai aucune chance contre lui. Il faut au minimum une dizaine d’hommes pour en venir à bout et encore, nous compterons des pertes dans nos rangs. Toutefois, je suis au service du Comte et je me dois d’être confiant, alors je tâte le fourreau contenant mon épée avant de poursuivre :

Contre un fangeux, le salut réside dans la fuite, pour le reste mon arme vous protégera.

C’est sûr que l’on ne va pas pouvoir compter sur une femelle pour tirer convenablement à l’arc. Je me demande même si je ne devrais pas rameuter plus de soldat, mais ma cible n’a pas l’air commode et si nous sommes plus nombreux elle risque de nous fausser compagnie et je louperai ma mission. Le mieux reste donc de tranquillement rester à ses côtés tout le long de sa soi-disant promenade et être prêt à l’emporter dans mes bras si un fangeux se pointe. J’essaye donc de me rendre agréable :

C’est promis je ne vous dérangerai pas, je resterai silencieux tout le temps.

En plus, je ne vois ce que j’aurais à dire à une représentante du sexe faible, d’habitude mes conversations se limite à un simple « écartes les cuisses ».

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Croyez-vous que ce gros rustre à l’allure d’un ours mal léché dénué de toute faculté intellectuelle prendrait la peine de s’excuser ? Que nenni. Il s’en garderait bien…

Et moi, je me garderais bien volontiers de son ennuyeuse compagnie. Mais le voilà, cet espèce de sanglier grouinant, qui me dit qu’il est hors de question qu’il ne me laisse partir seule à l’extérieur, que c’est trop dangereux. Mais pour qui se prend-t-il au juste ?!

« Sauf votre respect… je m'apprête à le piquer. Il me semble que le seul homme habilité à me dire ce que j’ai à faire ou ne pas faire n’est pas vous mais mon époux. Et s’il me laisse sortir seule, qu’y trouveriez vous à redire ? Peut-être souhaitez-vous donc aller vous entretenir avec lui sur ce point… Lui dire que ce n’est que folie de me laisser sortir seule ! Et il vous répondra certainement ‘mais laissez-là donc faire...’ Essayez, vous verrez ! »

Pour sûr, ma sécurité et celle de notre enfant à venir n’est pas tellement ce qui le préoccupe en ce moment… Il pourrait même préciser que c’est moi, la seule folie de Sombrebois. Et après ? Mordiable ! Je veux juste que l’on me foute la paix ! Mais cet espèce de crétin de colosse n’en a visiblement pas l’intention, je me demande bien pourquoi.

« Et bien, si vous insistez… puisqu’il semblerait que rien ne vous fera changer d’avis… c’est parfait, j’avais justement besoin d’un larbin pour passer devant et se faire attaquer à ma place si danger il y a. Allez-y, je vous en prie, passez devant... »

Et je ne lui prête plus attention pendant un petit moment, avant de lui demander finalement :

« Alors, depuis quand vous venez à Sombrebois seul ? Vous avez quelque chose à y faire ? »

Tant qu’à me le coltiner, autant savoir ce qu’il fout là. J’écoute sa réponse, et puis s’ensuit un moment de silence.

« Restez-là, moi aussi, j’ai envie de pisser. Et que je ne vous vois pas derrière mon dos, où je vous jure que vous pourrez dire adieu à vos génitoires. »

Sait-on jamais, des fois qu’il prend des envies à celui-là aussi de tenter sa chance… Et je n’aimerais pas trop que la liste s’allonge. Je serais bien capable de le faire payer pour deux...

Bref, je m’éloigne assez loin devant, et, lorsque je suis sûre qu’il ne peut plus me voir, je m’élance en courant d’un pas léger pour le semer. Ben tiens. Vous ne croyiez tout de même pas que j’allais le supporter tout le long de ma sortie ?! C’est mal me connaître…

D‘ici qu’il se rende compte de la supercherie, il aura sans doute du mal à me retrouver. Et si je m’amusais à lui laisser une fausse piste…. Voyons… des traces de pas dans la mauvaise direction ! Je suis sûre qu’il tomberait dans le panneau !

Je tente donc le coup, prenant un chemin et pataugeant dans la vase du chemin sur quelques pas avant de me diriger vers la végétation pour ne plus laisser de traces.

Là, je me mets à couvert derrière un buisson. Je ne voudrais pas manquer ça… Je pourrais même m'amuser à le suivre discrètement. Finalement, il m'apportera un peu de distraction ce grand benêt ! Et puis quand j'en aurais marre, je rentrerai tranquillement.

Pour sûr, je fais des progrès avec mon entourage ! Je tiens le bon bout, vous ne trouvez pas ? Voilà une preuve excellente de sociabilisation. Faudra bien que je me décide à faire vraiment des efforts quand même… un jour…

J’ai vraiment une noble devant moi, elle commence à parler de son époux, comme s’il pouvait être d’accord avec elle ! Si c’était ma femme, je la corrigerai bien comme il faut pour que plus jamais elle ne sorte sans ma permission, on ne peut pas laisser une jolie femme s'en aller comme ça ! Surtout qu’elle risque toujours de se blesser en tirant avec son arc.

Comme je reste stoïque et que je ne manifeste aucune intention de partir, elle accepte ma présence, m’indiquant de passer en premier. Bien sûr que je passe devant, je ne vais jamais laisser une représentante du sexe faible ouvrir le chemin alors que je viens de déclarer que c’était dangereux !

Je prends naturellement la tête, surtout que ce n’est pas la première fois que je viens ici, et que je commence à connaître le terrain, marchant tous les sens aux aguets. Ce n’est qu’au bout d’un certain temps qu’elle me pose une question sur les raisons de ma venue et je lui réponds, lui disant une grande part de la vérité :

Le Gouverneur est parti en expédition et m’a laissé quelques jours de repos, je suis venu travailler un peu sur ma maison, c’est une des choses qu’il m’a promis, pouvoir de nouveau avoir un chez-moi.

C’est en effet un de mes grands rêves, pouvoir avoir mon propre chez moi, un peu comme avant que les fangeux arrivent. Mais ayant appris des leçons du passé, les murs seront très épais, les fenêtres très petites et le toit en tuile et non en chaume, bref, un endroit sécurité, comme son château qui a dû résister à nombreuses attaques au fur et à mesure du temps.

C’est alors qu’arrive une demande peu commune de la place d’une femme de la haute, elle veut carrément allez pisser en pleine nature ! Ça valait le coup de prendre la mouche si c’est pour faire la même chose après, mais cela fait bien longtemps que je ne cherche plus à comprendre ces créatures, même un étourneau à plus de jugeote qu’elles.

Ne voulant pas de problème avec le Baron, je ne bouge pas, me contenant de surveiller les environs, mais au bout d’un moment je commence à trouver le temps long, et s’il lui était arrivée quelque chose ? C’est pourquoi j’indique d’une voix forte :

Attention, je vais me retourner !

Comme je n’entends toujours pas de réponse, je regarde en arrière mais il n’y a plus personne, elle a été kidnappée ! Je dégaine d’un seul mouvement mon épée, tous les sens immédiatement en alerte et me maudissant pour ma bêtise. J’aurais dû être plus vigilant car si je ramène la noble en mauvais état, blessée ou morte, je doute que Victor me pardonne. J’essaye donc de remonter la piste, mon arme toujours à la main, et je vois d’un coup des traces, j’essaye de les suivre, mais la vase m’épuise rapidement.

J’essaye à nouveau de faire le point, ne comprenant pas comment j’ai pu me perdre quand je vois une vipère d’Aspic de bonne taille, se diriger droit vers moi, je la découpe d’un bout coup de mon épée à deux mains, mais je vois d’autre serpents tout autour de moi, je suis tombé sur nid ! J’essaye de sortir de ce piège, la morsure de cet animal pouvant être mortelle.

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Là, seule, je peux enfin me détendre et me plonger dans mes pensées. J’écoute le chant des oiseaux, le souffle du vent dans la végétation, et je regarde ce timide soleil dans le bleu pâle du ciel. Ce que ça fait du bien de sortir de l’obscurité…

Mais ce grand nigaud ne tarde pas à arriver précipitamment son arme dégainée et, bien évidemment, il ne me remarque même pas. Là, il aperçoit mes empreintes et, sans la moindre seconde de réflexion, se dirige tout de go vers la fausse piste. C’est tellement facile que c’en est désespérant…

Une motte de muscles comme garde du corps, c’est bien, mais un esprit vif qui fonctionne un minimum pour s’en servir correctement sans se précipiter n’importe où sans la moindre once de réflexion, c’est mieux.

Je me décide donc à le suivre discrètement – je ne voudrais pas me faire repérer maintenant - et je le regarde avancer stupidement, crapahutant dans la vase épaisse. S’il pouvait y rester emprisonner, ce n’est pas moi qui irait le secourir…

Mais en guise de de coup de pouce du sort pour m’en débarrasser, je peux rapidement apercevoir au bout d’un petit moment de marche qu’il se débat contre des vipères dont il vient d’attirer l’attention. Fabuleux… Dans le genre à attirer les ennuis, il n’est pas mal dans son genre non plus.

Je croise les bras et l’observe sans réagir, non sans m’assurer de ne pas être la cible d’une vipère. Après tout, je ne lui ai rien demandé et je ne compte pas me mettre en danger pour lui. Lorsqu’enfin il s’extirpe de son bourbier reptilien – tout aussi dangereux qu’un bourbier vaseux, je n’en ai aucun doute – je me décide à attirer son attention en tapant quelques coups lent et pas trop bruyants dans mes mains pour applaudir.

« Quelle bataille ! Vous avez été héroïque… seul contre un nid entier de serpent ! Je suis sûre qu’on chantera vos louanges… Ah, pour sûr, sans vous, j'y restais... »

Trêve de sarcasme, je crois que si je ne peux pas prendre l’air en paix, je préfère encore rentrer.

« Cessez donc de massacrer ces pauvres créatures sans défenses, je vais rentrer. »

Et je tourne les talons en direction du bourg en soupirant. Ça sera pour une autre fois… J’irais bien en parler à Hector afin qu’il lui fasse savoir de me laisser tranquille, mais ce n’est pas vraiment le moment de l’ennuyer avec ces futilités, je peux me débrouiller seule…

Et puis ce serait bien un coup à ce qu’il dise que ce crétin n’a pas tort et que je n’ai pas à sortir seule. On ne sait jamais avec lui… je ne sais jamais sur quel pied danser !

Lorsque je réussis enfin à m’extirper de piège mortel, je vois près de moi, la jeune femme que je pensais avoir été kidnappée. Elle semble être bien intact pour une jolie femme enlevée par des bandits et avoir un sens de l’humour très particulier, qualifiant ses serpents d’un mètre de long dont la morsure est mortelle, de créatures sans défense. Je me contente de hausser les épaules, c’est sans doute la première fois que cette femelle met les pieds dans cette forêt, elle ne saura pas reconnaitre la différence entre un sanglier et un loup.

Lorsque j’arrive enfin à son niveau, elle indique qu’elle veut rentrer, ce qui est une sage décision, l’épisode avec les bestioles à du lui faire comprendre que cet environnement était dangereux. Je me mets donc devant elle, toujours pour la protéger d’une éventuelle d’attaque et je lui dis :

Lorsque vous avez disparu, j’ai pensé qu’il était arrivé quelques malheurs, je suis rassuré de vous avoir retrouvé saine et sauve.

Et surtout que Victor n’aura pas à me vilipender pour avoir échoué dans ma mission, mais tout est bien qui finit bien, il faudrait juste interdire à cette noble de sortir de l’enceinte du village et tout ira dans le meilleur des mondes. Je peux même me considérer comme chanceux, elle n’a pas tiré à l’arc, et ne s’est donc pas blesser avec la corde ou les flèches, j’ai eu chaud.

Alors que je pensais que le plus dur était passé, marchant difficilement car mes chausses soient pleines de boue et de vase, je vois une bête sortir des fourrée et s’arrêter en plein passage. Un sanglier de belle taille nous bloque le chemin et pire que tout, il nous a repéré. J’ai toujours mon épée dans mon fourreau, mais le temps que je dégaine, il peut être sur moi et m’embrocher à l’aide de ses défenses. C’est pourquoi j’indique à la voix basse à la personne qui se trouve derrière moi :

Je vais attirer son attention, profitez-en pour fuir sur les côtés, le village n’est pas très loin.

Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre sur l’urgence de la situation, c’est pourquoi j’ajoute :

Courez autant que vous pouvez, et sans vous retournez.

Voilà, je peux maintenant me concentrer sur le combat, la bête me regarde toujours avec ses petits yeux vicieux, comme s’il cherchait mon point faible, et moi je dirige ma main doucement vers la poignée de ma main. Je peux maintenant dégainer rapidement, suffisamment vite pour recevoir sa charge et comme prévu, je fais en sorte qu’il n’a que moi dans son champ de vision, en lui parlant :

Alors mon gros, on s’est perdu ? Malheureusement pour toi, je vais te découper en rondelle et te griller pour ce midi. Voilà, c’est bien, continu à me regarder, c’est moi ton ennemi, c’est moi qui possède l’épée, et je suis sûr que tu sais exactement à quoi ça sert.

Je suis maintenant prêt, et fais glisser mon arme dans son fourreau, centimètre par centimètre, tout en m’approchant, mes instincts de chasseur reprenant le dessus et je suis prêt à apporter la mort, tel le roi de cette forêt.

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Le voilà qui me dit maintenant avoir pensé que je m’étais fait enlever ! Décidément, ce pauvre bougre n’a vraiment pas une once d’intelligence dans le crâne. Sa stupidité me donne envie de vomir. Ou alors, ce sont juste les nausées habituelles…

« Me faire enlever ? Voyons… vous n’y pensez pas ! Personne n’en aurais seulement l’idée… Je suis bien trop insupportable. Remarquez… »

Je tais la suite. Bien sûr, je pourrais rajouter que ça m’est arrivé une fois, un guet apens, que la femme concernée avait bien l’air aussi cinglée que moi et qu’à chaque fois que je l’ouvrais – ou presque – je m’en prenais une. Et putain, ce qu’elle pouvait cogner fort ! Mais non, je ne suis toujours pas décidée à aborder ce sujet avec qui que ce soit.

Finalement, le blanc que j’impose est interrompu par l’arrivée d’un sanglier. Bien, je n’ai rien à ajouter de plus ainsi ! Le garde du corps du gouverneur – qui s’est improvisé garde du corps de la Baronne, mais c’est une autre histoire - m’intime de me sauver en courant pendant qu’il va attirer son attention… Vraiment ? Mais non putain, moi je veux voir ça ! S’il peut se prendre un coup de gré dans le bide et se faire ouvrir la panse, je veux profiter du spectacle !

Je me mets juste à l’écart histoire de ne pas prendre de risque inutile non plus et je regarde la scène. Je réfléchis un instant ; Et si je tirais une flèche sur la bête… ça pourrait l’énerver assez pour qu’elle charge cet abruti et m’en débarrasse… Ça se tente !

Un peu plus loin donc, alors que l’imbécile se met à provoquer le sanglier, je sors mon arc, le bande délicatement en essayant de ne pas forcer sur mon bras senestre, et décode une flèche. Et puis, tant qu’à faire, j’en décoche une seconde. Parce que bon, si je peux le tuer moi même et tourner ce gros nigaud en ridicule, ce serait encore mieux.

Jets de tirs

La première touche une patte arrière, la seconde une patte avant. Hmmm… piètre prestation, mais bon, faut dire aussi que c’est pas la grande forme. Bon, l’animal devrait avoir du mal à charger maintenant. Je m’approche tout sourire de mon acolyte.

« Je vous laisse le coup de grâce, mais éviter de vous faire étriper... Même blessé, un sanglier reste un sanglier. »

Et je range mon attirail, restant aux aguets en regardant faire le colosse. Je me demande s’il arrivera à porter ce gibier.

La tension est à son comble, pendant que je fixe la bête dans les yeux, comme un charmeur de serpent. Dans quelques secondes, ce sera une lutte à mort, entre moi, l’humain, prédateur technologique contre le sangler, prédateur naturel. Ce sera le choc de deux mondes, qui décidera de l’avenir de la civilisation, voire même de l’humanité dans son ensemble. Bon, j’exagère un petit peu, mais comme je risque ma vie, je peux en rajouter un petit peu.

Mais alors que nous nous apprêtions à foncer l’un contre l’autre, deux flèches venues de nulle part se fiche chacune dans les jambes de l’animal et celui-ci s’effondre en couinant, avant de basculer sur le côté, incapable de se remettre dans sa position initiale. Je regarde d’un air méfiant tout autour de moi, me demandant qui est cet archer émérite, mais la seule personne que je vois, c’est Rosen !

Depuis quand une jeune femme sait tirer à l’arc ? Elle s’approche de moi, toute souriante après ses deux tirs au but et me demande de tuer ce pauvre représentant de la famille des Suidés. Je la regarde sans bien comprendre, ce mammifère doit bien peser dans les quatre-vingts kilos et je suis bien incapable de le porter, surtout en pleine forêt. En plus, il me regarde toujours d’un air aussi mauvais, il doit me considérer comme responsable de son état, alors que pour une fois, je ne lui ai fait aucun mal.

Je commence tout d’abord par la remercier :

Je vois dois une fière chandelle, si un jour vous avez besoin de mes services et que je suis en mesure de le faire, n’hésitez pas.

En effet, je déteste être redevable et je me demande quand elle a bien pu apprendre à tirer à l’arc, une noble ça ne passe pas la majorité de son temps à s’apprêter pour faire la belle dans son château ? Enfin c’est l’image que j’en ai car ma belle-mère était exactement comme cela. Toutefois, la question n’est pas là et je réponds à la jeune femme :

Je n’ai aucune envie de tuer cette bête, d’ailleurs je ne saurais même pas comment faire. Je vous escorte jusqu’à votre château puis je vais revenir avec quelques chasseurs qui sauront quoi faire ce cet animal.

Je la vois ranger son arc et n’y tenant plus, je lui dis :

Vous auriez pu me dire que vous sachiez tirer ! Et aussi que vous connaissiez la forêt ! Jamais je n’aurais imaginé qu’une noble puisse faire feu aussi vite avec son arme. Bref, ce n’est pas très gentil de m’avoir laissé dans l’ignorance, alors que j’essayai de vous protégez.

Et en plus, je ne comprends pas pourquoi Victor m’a demandé de la surveiller, elle est bien plus à l’aise que moi dans cet environnement et je ne sers strictement à rien ici. Je jette un coup d’œil aux environs mais il n’y a plus aucun mouvement, à part bien sûr le pauvre sanglier qui couché sur le côté, bouge ses petites pattes d’une manière qui me ferait pitié si je me souciais des animaux, mais comme ce n'est pas le cas, je vais très bien.

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Le voilà qui me dit maintenant avoir pensé que je m’étais fait enlever ! Décidément, ce pauvre bougre n’a vraiment pas une once d’intelligence dans le crâne. Sa stupidité me donne envie de vomir. Ou alors, ce sont juste les nausées habituelles…

Le pauvre bougre a cherché quelque chose – ou quelqu’un - tout autour de lui avant de me regarder éberlué. Mais la suite – oh, quelle suite ! Est de loin des plus marrantes.

Le voilà maintenant qui se montre redevable ! Quel comble… Je veux juste qu’il me foute la paix, pas lui donner une raison de me côtoyer ! Même si je pourrais en profiter. Il peut sûrement se montrer utile.

« Je saurai m’en rappeler en temps utile... dis-je blasée. Ceci dit, je vous conseille de vous montrer plus prudent. Pas que je doute de votre carrure, mais si je devais parier entre le sanglier et vous, je miserais sur le sanglier sans hésiter une seule seconde. »

Mais le voilà qui dit à présent n’avoir aucune envie de tuer le gibier, et surtout de ne pas savoir comment faire.
…

Mais sur quoi je suis tombée encore… Voulez vous savoir le pire dans cette histoire ?! C’est qu’il se met ENCORE en tête de m’escorter ! Alors que c’est moi qui vient de lui sauver la vie… mais qui escorte qui dites moi ?! Je commence à avoir un léger doute sur la question.

« Sauf votre respect… c’est moi qui vais vous escorter jusqu’au château… »

Je pourrais presque rire si j’étais d’humeur. Mais je ne suis pas d’humeur.

« Vous ne savez pas tuer vous dites ? Peut-être que le gouverneur devrait envisager de se trouver un autre garde du corps… »

Sérieusement, mais il sort d’où ce crétin ? Qui peut survivre dans un monde pareil sans savoir comment tuer une simple bête ?!

« Je ne suis pas gentille, et je ne vous ai jamais demandé de me protéger. La seule personne que vous devez protéger, c’est Victor. Rentrons. »

Et je reprends la marche pour rentrer en soupirant. Je sortirai me promener une autre fois… En attendant, pour avoir la paix, il me reste la chambre ou les remparts. Je vais devoir m’en accommoder tant que cet olibrius sera dans le coin… et surtout, je vais devoir toucher deux mots au gouverneur afin qu’il demande à son olibrius de me foutre la paix dorénavant.

Parce que je ne vais pas supporter de l’avoir longtemps sur le dos… et j’espère ne pas devoir en arriver à demander à Hector de s’en mêler. C’est déjà assez tendu comme ça entre nous en ce moment… Je ne voudrais pas en rajouter une couche.

La jeune femme accepte ma dette, se montrant conciliante pendant une seconde avant d'être désagréable à nouveau, m’indiquant que s’il y avait un combat entre le sanglier et moi, elle misera sur la bête, et cela sans aucune hésitation ! Cette personne est vraiment d’une méchanceté sans borne et je me demande bien ce que son mari lui trouve. Certes elle est jolie, mais les bordels sont remplis de femmes jolies et bien plus aimable, je le sais car je fréquente régulièrement ce genre d’établissement.

Et ça continu, elle se moque maintenant de moi, car je ne sais pas tuer un sanglier, mais ce n’est pas ma faute si je ne suis pas un chasseur, je n’ai jamais apprécié de me cacher des heures dans un fourré pour attendre une proie qui peut-être ne viendra jamais. De plus, je ne sais pas tirer à l’arc, ni à l’arbalète, alors abattre des cibles au loin… La seule que je sais faire, c’est utiliser mon épée et je l’indique d’ailleurs à mon interlocutrice :

Tuer des êtres humains ne me pose aucun problème, j’en ai déjà tué un certain nombre et je recommencerai sans le moindre remords si Victor est en danger, ou bien si j’en éprouve l’envie.

Je souris en prononçant ces derniers mots, me rappelant un voleur qui avait essayé de voler ma bourse et que j’ai rattrapé. Je lui ai d’abord cassé tous les membres du corps avant de le décapiter et cela a été un excellent moment, du moins pour moi. Je continue donc mon monologue :

Mais je ne sais pas quoi faire avec les bêtes, je sais qu’il faut vider le sang contenu dans certaines, dans les autres, il faut enlever les entrailles, mais c’étaient les cuisiniers qui nous accompagnaient lors des campagnes militaires qui faisaient ce travail. Mais ne vous inquiétez pas, ce sanglier vous sera servi pour votre repas, car c’est vous qui l’avez abattu.

Je compte en effet, comme je l’avais prévu, avec des hommes pour m’aider à la transporter. Lorsqu’elle m’indique qu’elle n’est pas gentille, je me contente de hocher la tête, c’est la première fois depuis ce matin, que nous sommes d’accord sur quelque chose. D’ailleurs, après réflexion, je ne me gêne pas pour lui dire ses quatre vérités :

Vous êtes nobles, mariée à un noble et vivant dans un château, loin de la misère de Marbrume, des milliers de jeunes femmes aimeraient être à votre place, et pourtant vous êtes méchantes avec les personnes qui risquent leur vie pour protéger la vôtre. Et je sais très bien que vous ne m’avez rien demandé, je me suis juste inquiétez pour vous, comme tout chevalier l’aurais fait.

Voilà, je suis aussi un noble et je peux également ouvrir ma bouche. Je la dépasse ensuite d’un pas rapide et reprends le chemin vers le château, ouvrant ainsi la marche, prêt à dégainer, mais la seule chose que je vois, pour le moment, sur le chemin c’est un renard peureux qui s’enfuit à notre approche, lui aussi ne veut pas que l’épouse d’Hector lui parle mal.

La surveillance de la muraille

Rosen feat Desmond

Franchement, j’abandonne l’idée de poursuivre mes moqueries. Il est bien trop sot… Ce n’est même plus drôle. Ce n’est même plus drôle, parce que ses réactions ne sont pas bien intéressantes ! C’est à peine s’il remarque que je me paie sa tête. Et le voilà bientôt qui joue un peu trop sur les mots.

Oui, j’entendais bien le fond de sa pensée. Oui, j’entendais bien qu’il voulait parler du d’épouillage du gibier, mais il n’a pas l’air d’avoir bien compris qui il a en face de lui. Il n’a tellement pas l’air d’avoir compris ce pauvre type qu’il prend même la peine d’argumenter pour se défendre…

Cela dit, je n’aime pas vraiment la lueur de son regard lorsqu’il dit qu’il peut tuer s’il en a l’envie. Peut-être un avertissement, un appel à ne pas dépasser la limite, une menace à demi mot… Allez savoir.

« Tout gibier doit être saigné au plus vite sous peine de voir la chair pourrir… l’informé-je d’une voix lasse. Tout gibier quel qu’il soit se tue exactement de la même manière. De celle qui vous plaira, tant qu’elle le vide de son sang. L’égorgement est généralement la méthode la plus pratique. Voilà, maintenant vous savez comment saigner un animal. C’est compliqué n’est-ce pas ? »

Bref, passons, je ne suis pas là pour lui donner des cours de chasse et de préparation des proies. Quant à bouffer ce maudit sanglier, m’a-t-il bien regardée ?! Je n’arrive plus à avaler quoi que ce soit ! Avaler la moindre gorgée de bouillon me tord l’estomac. Mais c’est encore ce qui passe le mieux. Maintenant, j’aimerais rentrer pour avoir la paix, du moins c’est ce que j’espère, mais une contrariété de plus vient s’ajouter au tableau.

« des milliers de jeunes femmes aimeraient être à votre place, me dit-il, et pourtant vous êtes méchantes avec les personnes qui risquent leur vie pour protéger la vôtre. »

Cet imbécile de chevalier a décidé d’ouvrir sa gueule, mais force est de constater que s’il ne l’ouvre pas souvent, il vient de faire mouche. En fait, il m’a carrément mouchée, cet espèce de décérébré et je reste pantoise devant ses derniers mots, en le regardant me dépasser d’un pas décidé.

Quoi, genre, il s’inquiétait pour moi ?! Sans blague… Mais sa réplique m’a désagréablement coupé la chique. Méchante… moi. Peut-être vient-il de sortir la phrase la plus pertinente de la matinée. Oui, bien entendu. J’ai beau vouloir changer, on ne peut pas changer sa façon d’être… Et c’est bien pour ça que plus rien ne va avec Hector, ceci dit en passant. Parce que même si c'est quelqu'un de bon qui s'inquiétait pour moi, il a fallu que je lui brise le cœur.

J’ai dépassé les limites… Et j'en ai rajouté une couche, comme si ça n'avait pas suffit ! Et entendre cet idiot me balancer ça dans les dents me renvoie à cette crise existentielle que je suis en train de vivre. Si je veux réussir à arranger les choses durablement, il me faut changer… durablement. Et, mordiable, arrêter de m’en prendre aux autres quand il ne m’ont rien fait ! Mais… mais j’avais pourtant fait des efforts...

Je le regarde continuer de s’éloigner avant de prendre une grande respiration pour m’exclamer :

« Je ne suis pas méchante ! Je suis… je suis juste en colère !!! EN COLÈRE ! »

J’ai crié si fort ces deux derniers mots que j’ai l’impression de les entendre résonner encore.

« Et je voudrais juste qu’on me fiche la paix ! »

En colère… Je n’ai pas réfléchi en disant ça. C’est sorti tout seul. Mais maintenant je réalise… je réalise comme un voile sombre retiré de mes yeux. Tout paraît si clair… c’était pour ça ? Pourquoi je ne voyais rien ?! Je me sentais si vide, tout ce temps.

Mais je n’ai pas le temps de me plonger plus avant dans mes réflexions intérieures qu’un feulement gutural se fait entendre à proximité. Ah ben bravo, j’assure…

« Courrons ! », je m’exclame alors en détalant en direction du château.

Et lorsque je suis à peu près sûre d’avoir semé la créature et que je peux me permettre de ralentir, j’adresse au chevalier comme le bourg de Sombrebois apparaît devant nous :

« Ne croyez pas que l’on m’envie tant que ça. Personne n’aimerait avoir ma vie… Maintenant vous pouvez disposer, je ne risque plus rien. »

Je soupire. Oui, je suis en colère… mais il serait bon que j’apprenne à diriger à cette colère de sorte à ne plus la faire subir à personne. Ce serait mieux pour tout le monde. Oui, ce serait plus profitable que j’apprenne à me contrôler… Et au moment de quitter le chevalier un tantinet penaude, je l’appelle lorsqu’il va pour s’éloigner :

« Ser Desmond ? Merci de m’avoir accompagnée quand même. »

Après tout, il n’était pas obligé et malgré que je lui en ait fait voir de toutes les couleurs, il est resté jusqu’au bout.

La noble m’explique comment m’occuper d’un animal, mais je n’écoute qu’à moitié, pas vraiment intéressé, je n’aime pas chasser et comme j’ai des gens pour le faire ainsi que des cuisiniers pour préparer la viande, je ne vois pas pourquoi je réaliserai cette tâche, indigne de mon rang. Mais je reste courtois et je ferme ma bouche, surtout que j’ai peut-être un peu dépassé les bornes.

Je le vois très bien quand elle commence à s’énerver et crier qu’elle est en colère. Bon, moi quand je suis en colère, je frappe les gens, alors que pour la baronne, elle crie en pleine forêt au risque d’attirer les fangeux. Elle ajoute ensuite qu’elle souhaite qu’on la laisse tranquille. J’avoue qu’en ce moment précis, je suis prêt à promettre tout ce qu’elle voudra, tant qu’elle ferme sa bouche.

Mais malheureusement, il est déjà trop tard car un cri que je connais bien, car je l’ai entendu de trop nombreuses fois retentit dans les bois. Je reste un instant pétrifié, véritablement terrifié, car comme à chaque fois je pense à la nuit où ils ont attaqué mon château, tuant tout le monde. Il faut que la jeune femme me crie de courir pour que j’arrive enfin à bouger mes jambes et à m’enfuir.

C’est pour moi, une véritable course contre la mort, je me prends des branches, je n’arrête pas de tomber, tellement je suis en panique. Heureusement que la noble que je suis, ne me vois pas et j’arrive enfin à calmer les battements de mon cœur, même s’il me faut de nombreuses minutes pour m’en remettre. C’est donc en bien meilleure posture que je rejoins la jeune femme, une fois qu’il semble que nous ayons semé la créature.

Elle m’indique qu’elle ne risque plus rien, mais je vais quand même la suivre de loin, jusqu’à ce qu’elle ait enfin rejoint son domicile et que je puisse dire à Victor que j’ai réalisé ma mission. C’était loin d’être de tout repos et j’espère que je n’aurais plus jamais à le refaire. D’ailleurs quand elle indique que personne n’aimerait avoir sa vie, je me contente de hocher la tête, de peur qu’elle repique une véritable crise et se mette de nouveau à ameuter tous les monstres des environs et ce ne sera pas pour boire le thé !

Alors que j’allais donc m’éloigner pour ne pas subir de nouveau sa colère, elle me rappelle pour me remercier. Je reste un instant immobile n’en croyant pas mes oreilles, puis, je me reprends et faisant demi-tour, je la salue dans une révérence impeccable et je lui indique, mon poing serré contre mon cœur :

C’est à la fois un honneur et mon devoir.

Une fois que je me suis assuré que l’épouse d’Hector est en sécurité, je rejoins également mes propres appartements. Une fois ceci fait, je m’effondre comme une masse, toute la tension accumulée me prends aux tripes comme un boomerang et je vomis dans un seau. Je mets près d’une heure pour arrêter de trembler, ne sachant vraiment pas comment gérer cette rencontre, si un simple hurlement me fais cet effet, comment je vais réagir si un jour je suis poursuivi par un Fangeux ?