Apolline De PessanComtesse
| Sujet: La fièvre dans les yeux || Irène de Valis (Aparté du mariage Aymeric/idalie) Dim 15 Nov 2020 - 1:12 | | |
L’air extérieur, enfin. Apolline sentit un frisson remonter le long de son dos, alors que la fraicheur du labret n’était plus à prouver. La journée n’était guère encore terminée, pourtant, le village lui-même semblait parfaitement silencieux. Tout du moins à condition de regarder du bon côté, puisque derrière elle, à l’intérieur du bâtiment qu’elle quittait, elle pouvait encore ressentir l’engouement de l’événement. Engouement qui ne l’avait nullement effleurée un seul instant. Les lèvres pincées, la dame avait relevé quelques jupons pour éviter toute chute malencontreuse, à l’extérieur, elle avait incliné de la tête en direction des gardes présents, satisfaits de voir que la sécurité était maintenue. Elle ne put que faire un bref rappel à l’ordre vis-à-vis de l’ensemble : ici c’était chez elle et il était hors de question de menacer un quelconque invité. Aussi fou puisse être l’ordre du comte ou menaçant soit-il. La milice était présente et nul doute qu’elle ne se générait pas pour embarquer le futur époux en cas de divergence, ceci étant dit, elle avait fini par s’éloigner, un sourire satisfait sur les lèvres. Un homme d’armes l’avait retenu afin de converser, de la mettre en garde de la dangerosité du village, précisant bien évidemment que la plupart de ses hommes se trouvaient ici… Comme le reste des habitants. Apolline n’avait pu qu’opiner, parfaitement consciente de ce fait, puisqu’après tout, c’était bien là ce qu’elle recherchait, l’isolement, le calme. La dame ignorait entièrement les agissements à venir de son ancienne interlocutrice. Allait-elle la suivre, allait-elle rester à l’intérieur, elle restait encore dubitative vis-à-vis de sa proposition, sans trouver le comportement adapter et digne à adopter.
S’éloignant avec lenteur, les bras croisés sous sa poitrine pour chercher un peu de réconfort et de chaleur, la dame s’éloigna de son domaine, se faufilant dans certaines ruelles jusqu’à monter sur les hauteurs pour aviser le village au loin. Proche du lieu se trouvait également le domaine concéder par Apolline à son chevalier, celui qui l’avait accompagnée en ce lieu et qui de ce fait constituait son cavalier invisible de la journée. En hauteur, la dame ne pouvait que bien se sentir, alors qu’elle avait l’illusion d’avoir à portée de main toute une ville. La solitude était quelque chose d’agréable pour celle qui ne l’était plus si souvent que ça dernièrement. Prenant une inspiration, la dame de Pessan n’accorda aucun regard en arrière, malgré les premiers bruissements qu’elle percevait. Apolline n’avait finalement accordé son attention à Irène qu’une fois le premier contact établit, une main venant se déposer sur son propre bras.
- « Le royaume entier est oppressant dernièrement » corrigea simplement Apolline sans grande surprise « Mon temps est le vôtre dans une certaine mesure » ajouta-t-elle en conservant néanmoins sa surprise pour elle-même. Irène était définitivement soit complètement inconsciente, soit à la recherche d’un danger, d’une sensation de survie « J’aime cette vue » admit la dame dans un léger soupir « Elle me rappelle mon enfance et mon appréciation de rouler jusqu’en bas de la pente… Un temps qui me semble parfois bien lointain » resserrant son emprise autour de son propre corps à cause de la fraicheur elle pinça ses lèvres « Le domaine est éloigné volontairement du village, ce qui était sa force à l’époque est aujourd’hui une faiblesse » précisa-t-elle en pivotant la tête vers Irène pour la détailler.
Il aurait été mentir de prétendre qu’Apolline était parfaitement à l’aise, elle était même plutôt tiraillée intérieurement, entre cette envie de cibler cette femme qui était sans le moindre doute redoutable et ce besoin de ne pas rester isolée trop longtemps en sa compagnie. Irène dégageait cette assurance, cette certitude, cette séduction assumée et assurée qui était à la fois attirante et déroutante. Jamais la comtesse n’avait fait un pas vers cette appréciation des femmes, jamais n’avait-elle envisagé un instant de trahir Serus, qui en y réfléchissant bien, encourageait la sexualité en général et non spécifiquement vers l’homme et la femme, cette association était plus accrochée à Anür.
- « Vous n’avez pas peur que mon 'offuscation' provoque votre chute ? Est-ce dangereux de proposer à la dame de maison de la rejoindre dans sa chambre… Quoique, une discussion nocturne est toujours intéressante, je suppose » joua-t-elle du bout des lèvres en insistant sur le mot ‘discussion’ « Navrée, je ne suis pas certaine d’être encore en mesure d’exprimer autre chose que ma neutralité habituelle et puis, pourquoi souhaiter cela de ma part ? Je ne suis pas certaine d’être une bonne source de votre intérêt soudain. » elle afficha finalement un sourire malicieux « Rien ne peut vous certifier d’ailleurs qu’aucun garde ne se camoufle quelque part pour observer notre rencontre, prêt à rameuter le clergé en cas de dérive quelconque… Ou prêt à vous faire chanter ou susurrer des mots doux pour vous espérer vous avoir dans sa couche… Qui ne rêverait pas de se glisser entre les cuisses d’une comtesse. »
Le chantage était presque une habitude, du moins, aux yeux d’Apolline, était-elle convaincue que le moindre faux pas pouvait lui couter beaucoup. Un homme ayant une information pourrait l’obliger au mariage, le contrainte ou lui soustraire des informations en retour, qui n’avait pas essayé d’ailleurs ? Il devait en être de même pour la dame de Valis. Ainsi, jouer ainsi en pleine réunion de la noblesse à un jeu aussi dangereux qu’une proposition à une femme, en tant que veuve célibataire… C’était quelque peu… surprenant et un peu… déroutant.
- « Qui serais-je pour ralentir votre goût du risque de la journée ? » affirma la brune sans réellement savoir dans quoi elle venait de s’engager « Je n’ai guère de verre de vin à vous jeter, n’y a-t-il de ce fait pas grand risque n’est-ce pas ? »
Terrible erreur que voilà, elle qui n’imaginait nullement que ce rapprochement physique d’une femme avec une autre pourrait entrainer ce type d’écart. Irène avait glissé une main dans son dos, avisant dans les yeux celle qui n’en restait pas moins dubitative. Le froid l’avait, semble-t-il quitté alors qu’elle sentait cette multitude de picotements l’animer. Son regard ne pouvait que se soustraire un instant des prunelles de sa vis-à-vis, le temps de s’assurer qu’aucun témoin gênant ne pourrait attester de cette proximité dérangeante. Celle qui avait l’habitude de mener la danse ne savait ni où poser ses mains, ni même où fixer son regard, abordant un point imaginaire digne d’un troisième œil qui pouvait donner l’illusion à son interlocutrice qu’elle l’a regardait pleinement. Dans cet échange de proximité, ou les tailles se mélangeaient dans cette presque insolence des sens, elle ne put que sentir son corps avoir ce mouvement de recul imperceptible, ce frémissement, ce mouvement de fuite qui ne trouva qu’un écho sur la main qui longeait le bas de son dos, avant que des lèvres non conviées ne viennent se déposer sur les siennes. Douceur excessive, proposition indécente d’un instant qui n’aurait jamais dû exister et qui pourtant sonnait comme horriblement réelle. La comtesse ne l’avait pas repoussé, ne l’avait pas prolongé véritablement non plus. Un effleurement des bouches, un regard perdu qui se plonge dans celui curieux de son interlocutrice avant qu’elle ne s’éloigne, ne s’écarte, ne lui demande son avis.
Il ne reste que la sensation sur sa bouche, un goût fruité sur ses lèvres et son silence qui n’est cette fois pas volontaire, pas programmé, pas intelligemment défini. Un froncement de sourcil, puis un second. Elle est immobile et dévisage un instant celle qui est responsable de cet état presque second, penchant la tête sur le côté, après un temps qui ne perdura sans doute pas aussi longtemps que ce que percevait l’esprit de la brune. Sa tête avait fini par se remettre en route, dans cette maîtrise qui pourtant s’était bien plus qu’effritée.
- « Eh bien, je ne suis pas certaine que je proposerais à ce marchand d’en acheter davantage… Ou peut-être le contraire » tenta-t-elle sans parvenir à formuler parfaitement sa pensée en souhaitant rebondir en écho sur le compliment qu’Irène avait proposé de faire au commerçant du Labret « Je n’ai jamais été armée, comtesse » rajouta-t-elle « En tout cas, il me semble que nous ne jouons pas dans le même système d’armement » argumenta-t-elle en penchant légèrement la tête « Je ne suis pas certaine de jouer non plus la même partie… » c’était presque une certitude, alors que le jeu d’Apolline la faisait jamais s’aventurer dans le jeu de la sexualité, du désir, des frontières des relations, ou presque.
Ce fut ce silence cette fois parfaitement volontaire et maîtrisé, alors que ses propres doigts viennent effleurer ses lèvres -à elle-, que ses sourcils se froncent -encore-. Un bref sourire, un mouvement de tête ni négatif ni positif et elle se concentre une nouvelle fois sur l’échange et le dialogue.
- « Vous vous lancez dans un jeu dangereux n’est-ce pas ? En pleine conscience en plus, je le crains… Le chemin que vous empruntez est délicat Irène. » elle fit un bref mouvement du menton en direction de la pente « Et en toute transparence » ajouta finalement Apolline « Était-ce à votre goût ? » l’interrogea-t-elle finalement « Vous vous concentrez sur mes ressentis, mais j’ai la sensation que c’est plutôt quelque chose en vous que vous cherchez à obtenir, me trompais-je ? »
Ses doigts se déposèrent sur l’avant-bras de la comtesse, émettant cette légère pression compréhensible. Pas de colère, pas d’écœurement, simplement cette interrogation repoussait pour mieux conserver la maîtrise de l’instant.
- « Si je puis me permettre » un silence, le relâchement de l’avant-bras d’Irène « De comtesse à comtesse » un autre silence, un regard qui se porte sur l’horizon « Il ne tient qu’à nous de décider de nous engager ou pas » elle parlait véritablement de cette pression du mariage, à cet instant précis « On aura toujours besoin de notre argent, de notre puissance, il suffit de la garder précieusement, de la chéri et hormis les rumeurs de vieilles filles refusant d’offrir la vie, on ne risque pas grand-chose, non ? »
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