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 Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers]

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Mathilde VortigernFermière
Mathilde Vortigern



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MessageSujet: Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers]   Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers] EmptyVen 29 Jan 2021 - 2:35
Najac, octobre 1166
Milieu de la matinée


Najac. Une petite ville joyeusement bordélique, bruyante, fourmillante de vie, où les odeurs de fumier dominent nettement celles de la nourriture. Pourtant, à l'heure où Mathilde fait son entrée dans la ville voisine d'Usson, la plupart des femmes s'emploient à faire preuve de créativité pour nourrir ceux qui travaillent dans les champs... alors de temps en temps, entre deux parfums de merde, une odeur de nourriture perce l'air avant de s'évaporer rapidement. Les charrettes encombrent certaines rues, des commerçants se rassemblent le temps d'un marché, quelques enfants portent des gerbes de blé vers on ne sait où. Dans les prochaines heures, on se rassemblera pour reposer les corps qui ont travaillé aux récoltes, avant de mieux reprendre le travail.

Najac. C'est ici que Mathilde a rendez-vous pour embarquer de la farine et les premiers légumes de conservation qu'elle emmènera directement chez le Comte. C'est que le mariage approche et que le cuisinier veut s'assurer de la qualité des produits. Or, des bons produits, il y en a ici, à commencer par le blé qui est moulu sur place. La petite tournée n'est qu'une formalité, et même si elle ne s'est pas annoncée à l'avance, compte tenu de la météo si variable à cette époque de l'année, elle sait que plusieurs produits l'attendent déjà dans les granges des environs.

Ma, tu pourras déposer ça à ma femme, s't'plait? Jehan, aide-maraîcher sur la ferme Dumas, ne voit sa nouvelle épouse que rarement depuis que la saison des récoltes bat son plein, mais il sait qu'à partir de novembre, il pourra profiter pleinement de la petite vie de famille. La ferme entrera en dormance, ou presque, pendant la saison froide, pour se réveiller tranquillement à partir de février. Mathilde en profitera pour retrouver sa solitude tant appréciée lorsque son pirate de mari prendra la mer. Mais d'ici là, la fermière rend un menu service en déposant quelques denrées chez l'épouse de son employer, et en profite pour lui donner quelques nouvelles ô combien rassurantes avant de reprendre son chemin. Bien sûr, Isabeau est déçue : elle aurait préféré que son bel amour se charge des petites commissions de la Dumas, mais la brune a bien indiqué qu'aujourd'hui, elle travaillait pour le Comte et non pour sa ferme, et qu'il n'était pas question de mêler les affaires de l'Ordre à celles du Comte, surtout depuis que ce dernier n'appartient plus à l'organisation qui permet à la fermière d'employer des gars sur son exploitation. Des histoires de nobles qu'il ne faut surtout pas mêler avait-elle conclu, avec l'air de ces gens qui trouvent que ce genre de considérations est une pure perte de temps.

C'est à la boulangerie qu'elle trouva la farine. Sur le chemin, le meunier lui avait indiqué que le grain du père Georges avait été moulu, qu'il en attendait dans les prochains jours et que d'ici là, il lui faudrait prier pour que le boulanger n'ait pas ouvert la poche de farine remplie grâce au bon travail de l'un des plus vieux paysans encore en vie dans la région. Du haut de ses soixante-huit ans, il était résolu, comme tout bon agriculteur qui était né et qui avait grandi au Labret, à mourir dans ses champs. La Fange ne lui faisait pas peur. Le père Georges savait que tôt ou tard, il aurait à honorer un rendez-vous avec Anür... et avec sa douce Cunégonde, morte vingt ans plus tôt. Le père Georges était un phénomène, et il était impossible de quitter la boulangerie avec un sac de farine sans en entendre l'histoire racontée par le boulanger. Mathilde s'était pliée à la tradition, pour la troisième fois, avant de quitter l'établissement, une lourde poche de farine dans les bras.

- Non, je vous jure que ça va, merci! Traverser la place pour aller aux écuries, où Marguerite patientait sagement sous bonne garde, était une épreuve que la fermière acceptait de passer, si cela la gardait d'une quatrième narration de l'histoire du père Georges. Au moins se dit-elle en marchant d'un pas lourd, ça fera quelque chose à raconter pendant le banquet. "Cette pâte a été réalisée grâce à la farine produite à partir du grain du plus vieil agriculteur de Najac, monseigneur. Oui monseigneur, soixante-huit ans, prêt à retrouver sa Cunégonde d'amour!" Mathilde rit toute seule en imaginant le tableau d'une fermière contant des banalités à un noble qui bâille.

Avez-vous déjà remarqué qu'il suffit de se moquer de quelqu'un, même d'une personne sans visage et sans réelle consistance, pour que les Trois vous rappellent à l'ordre? C'est précisément ce qui se passa : à force de rire, Mathilde ne vit pas le joli crottin frais joyeusement laissé là par une vieille carne de passage, et la fermière mis le pied dedans, dérapant sur une courte distance, suffisamment que pour perdre l'équilibre. Entraînée par le poids de la poche de farine, c'est vers l'avant qu'elle bascula, se vautrant lamentablement sur ladite poche, son menton rencontrant la terre battue de la rue. La douleur de l'impact se répandit dans toute la mâchoire de la fermière, qui se demandait encore ce qui avait bien pu se passer lorsque, devant son nez encore au ras du sol, apparut un bâton. Un bâton et une paire de pieds. Levant la tête sur l'apparition, la fermière réalisa qu'il s'en était fallu de peu pour qu'elle heurte une vieille femme qui devait probablement être sourde, aveugle et centenaire.

- Désolée. Vraiment désolée. J'ai glissé. C'était d'une évidence folle. Se frottant le menton d'une main, Mathilde se redressa pour se retourner et comprendre l'origine de sa chute, à mi-chemin entre les écuries et le temple de Najac. Les Trois étaient donc d'humeur taquine. Bah voyons.


Dernière édition par Mathilde le Mer 3 Fév 2021 - 4:31, édité 1 fois
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Winifred Des Rosiers
Winifred Des Rosiers



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MessageSujet: Re: Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers]   Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers] EmptyDim 31 Jan 2021 - 22:07
Ouh nom d'un p'tit haricot déplumé, c'est qu'elle commençait mal cette journée. Winifred s'était réveillée aux aurores, comme à son habitude, avec pour projet d'aller faire un petit pain à la carotte pour le vieux Louis. Mais, bon sang, impossible de sortir de son petit lit. Ce dernier était coincé dans l'angle d'une grande pièce vide, ou presque. Seule une étagère dans laquelle la prêtresse empilait ses vêtements peu colorés brisait l'écho de la pièce. Elle n'avait pas besoin de grand chose, ce n'était pas une femme matérialiste, mais les Trois, eux, avaient besoin d'elle et avaient besoin de sa foi. Bon, où en étais-je ? Ah oui, OUILLE !
C'est pas facile d'être une vieille toute rabougrie, les os ça casse, les muscles ça se fatigue, la tête se perd et les dents, pas moins ! Le dos, ah lala, ce vieux dos. Ce matin, il ne s'était pas réveillé, lui.

Une, deux... trois !

Winifred leva ses petites jambes et tenta de se faire basculer pour se redresser tout en agitant frénétiquement les bras mais rien n'y fait. A part amplifier la douleur elle n'avait pas bougé d'un poil.

Saaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaande, s'égosilla Winifred de sa petite voix qui ne réveillerait même pas une mouche.

Sande, c'était un p'tit gars du village, il avait entre... 17 et 26 ans, elle saurait pas bien dire. Des fois il l'aidait à faire mettre ses souliers, des fois il lui préparait de quoi manger. Il était au temple, mais surtout pour Wini, les autres ils se débrouillaient bien. Au début elle voulait pas de lui parce qu'il ne parlait pas et elle aime bien parler. Mais au final, il était plutôt agréable à regarder et il était gentil, il en fallait pas beaucoup plus. Et le mieux dans tout ça, il priait très souvent. C'était un bon p'tit gars ça. Mais bon, elle avait beau crier, pas grand monde arriva. Pour ne pas dire personne.

Bon, c'est entre toi et toi, ma p'tite vieille. Dis-toi que des nouvelles dents t'attendent si tu te lèves. Les Trois vont t'en offrir à la pelle, un jour !

Elle aimait bien se raconter des petites histoires à elle même pour se motiver et, faut pas croire, mais des fois ça marchait ! Ils avaient peut-être un peu de peine pour elle.

Elle s'agrippa au bord de son lit de sa main droite et tenta de se faire glisser en dehors du lit. Loupé.
Elle appuya alors ses pieds contre le mur, sans trop savoir pourquoi et se retrouva en un rien de temps au sol, tombée de la maigre hauteur que lui conférait le lit. Elle regarda le sol, se demandant comment son nez pouvait en être aussi proche et réalisa qu'elle n'avait plus mal au dos. Le choc lui avait débloqué quelque chose.

Ah bah mon p'tit père, t'es en forme finalement ! Dit-elle à son corps maigrelet. En route !

Elle vaqua finalement à ses occupations et prit près de 3h à faire son petit gâteau/pain à la carotte. Il avait mauvaise mine le machin mais Winifred sortit dehors pour le faire goûter à un petit môme qui passait là.

Dis petit, goûte moi ça. C'est du carotte au gâteau.
Pourquoi il est gris ton gâteau ?

Winifred l'osculta et fit mine d'y voir parfaitement clair.

Il est orange. C'est à la carotte.

Le môme un peu dépité et dubitatif en goûta une bouchée et esquissa le plus faux des sourires à Winifred. La vieille dame était ravie de pouvoir apporter de temps un temps un peu de plaisir à ces petits, ils connaissaient le prix du plaisir de manger.

Je crois que tu as oublié la carotte dans ton gâteau, mais c'est bon, hein.

On l'entendait dans sa voix que même le petit avait de la peine pour Wini. Il lui tapota l'épaule avant de la remercier, lui laissant tout de même le bout restant entre ses vieilles mains ridées.

Un peu penaude, réalisant qu'elle perdait un peu plus la tête chaque jour, la prêtresse marcha jusqu'à chez Louis en passant devant la boulangerie du père Georges. Un brave type. Un autre vieux croûton, mais un gentil croûton. Et là, une p'tite dame s'étala devant ses trois pieds avec l'élégance d'un fromage, profitant pour éclater son paquet de farine sous sa poitrine. Un nuage de fumée blanche redécora le paysage environnant, les pieds et la canne de la vieille femme n'y échappèrent pas.

Wini dévisagea du regard la magnifique brune qui sentait maintenant à moitié le purin. Elle plissa les yeux pour mieux y voir, ayant alors sûrement l'air particulièrement méchante. Sans broncher, elle contourna la demoiselle et s'afficha dans l'entrebâillement de la porte de Georges.

Hé papy, tu as fait un sacré effet à cette jeune dame, goujat ! Par les Trois, redonne lui donc un peu de farine, et sans ton charabia ! J'le connais par cœur. Et tu viendras me voir cet après-midi, j'ai ta petite commande moi aussi.

Et hop, une poche plus petite que celle étalée au sol fut donnée à Wini qui la tendit à la nana, plus haute qu'elle mais évidemment moins charmante. L'ancien, ça fait tout.

En voilà une idée de goûter la terre, regarde moi comment tu es toute sale ma pauv' fille, viens avec moi, t'en as jusqu'au menton, ponctua t-elle en désignant le front de la belle brune.

Elle ne lui demanda pas vraiment son avis qu'elle la tira par la manche tout en claudiquant. Son mal de dos revint. Elle marcha en direction du temple.

- Il me devait du chat, ma p'tite farine, t'en fais pas pour ça. Mais qu'as-tu fais aux Trois pour en arriver là ?
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Mathilde VortigernFermière
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MessageSujet: Re: Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers]   Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers] EmptyMer 3 Fév 2021 - 3:48
Il y avait encore un petit nuage de farine dans l'air quand Mathilde se releva, le rouge aux joues, consternée d'avoir ainsi bêtement gâché un ingrédient désormais si précieux. Constatant que le lin de la poche avait lâché, sans doute trop usé à force d'être réutilisé, la fermière entreprit de rassembler ce qui n'avait pas été étalé sur le sol pour fermer la poche avec un noeud grossier. Puis, elle se défit de son tablier pour envelopper le paquet et conserver ainsi la farine dans son emballage. La priorité alimentaire étant réglée, Mathilde s'occupa de sa petite personne. La farine recouvrait une partie de sa robe qui était maintenant en deux teintes : ocre clair, et ocre foncé là où la farine ne s'était pas déposée. C'était amusant : on pouvait voir très nettement la trace de son tablier. Elle s'épousseta du revers de la main et secoua ses jupons dans l'air avec de petits gestes énergiques, non sans entendre une voix mature derrière elle parler à un papy avec un entrain certain.

Se frottant une fois encore le menton, -elle allait avoir un bel hématome, à moins de trouver un herboriste avec de l'arnica en stock-, elle fut soulagée de ne voir qu'une légère trace de sang, signe que ce n'était qu'une égratignure et non une blessure plus grave. Ce n'était pas le moment d'être blessée, elle n'avait pas le temps de se faire recoudre. Ni de s'offusquer que personne ne vint l'aider, sans doute parce que Najac était maintenant peuplée de gens raflés à Marbrume, et que les quelques badauds présents dans la rue étaient trop occupés à rire de la chute avant de reprendre leurs activités. Pourtant, Mathilde prit le temps de les dévisager avant de continuer à se recomposer une tenue vaguement décente. Ses oreilles ne bourdonnaient plus et son genou gauche semblait bien prendre le choc, lui aussi. Bon, tu pourras finir la saison si tu fais gaffe à où tu mets les pieds.

Mathilde allait reprendre son chemin lorsqu'une poche de farine, plus petite celle-là et tendue sous son nez, interrompit son élan. La fermière leva les yeux vers la petite vieille qui se tenait devant elle, -tiens, la propriétaire de la canne-, et comprit que le regard fâché qu'elle lui avait lancé n'était en fait qu'un froncement sourcils cherchant à mieux comprendre ce qui avait conduit la grande brune à se rapprocher ainsi du sol de Najac, au point de presque l'embrasser.

T'en as jusqu'au menton. Mathilde haussa un sourcil. C'était le front que la petite dame pointait. Dans son esprit, la farine jusque dans les cheveux relevait presque du détail, bien que d'ordinaire la brune soit une coquette discrète. Mathilde comptait simplement charger sa farine sur le dos de sa monture et quitter au plus vite Najac. Sauf que l'ancienne semblait décidée à joueur le rôle du bon samaritain qu'elle espérait. Bon. Que pouvait-elle répondre, si ce n'est qu'elle avait tout à fait raison, bien que ça ne soit pas vraiment gênant. Une fermière avec un parfum de crottin et un jupon sale, rien de plus normal, non? Mais pas aux yeux de la petite dame qui, non contente d'avoir refilé une poche de farine supplémentaire dans les bras de la fermière, la tirait maintenant par la manche pour lui intimer de la suivre.

- Oh je vous assure que c'est pas nécessaire, madame. C'est rien qu'une petite chute, et puis si je suis crottée, j'attirerai moins les fangeux sur le chemin! Est-ce qu'elle l'écoutait? Absolument pas. La grand-mère avait dû avoir des dizaines de petits-enfants dans ses jupons pour ignorer aussi superbement son interlocutrice, tout en déployant son pouvoir de persuasion pour l'obliger à la suivre. Ça devait être la canne. Il me devait du chat, ma petite farine. Mathilde ouvrit la bouche... et la referma, après avoir compris que c'était juste une petite erreur comme on en fait quand on est vieux. Sans s'en rendre compte, la fermière s'était mise en route à sa suite.

- J'ai glissé, chef. Euh... madame. Peut-être parce que j'imaginais une grande et hilarante discussion avec un noble, et que les Trois ont pas trouvé ça vraiment correct de ma part de me moquer de l'air ébahi du noble en question. C'est bizarre parce que c'était même pas un vrai noble, c'était un noble imaginaire, aussi imaginaire que la discussion qu'on avait. Vous croyez que les Trois n'apprécient pas que j'imagine des choses? La petite dame avait touché un point sensible chez Mathilde : elle était superstitieuse. Et si quelqu'un avait le malheur d'évoquer un potentiel coup fourré des Trois, la fermière plongeait dans d'intenses réflexions qui se terminaient toujours de la même façon : dans un temple, avec des dons.

... et comme par hasard, c'est dans la direction du temple que la petite dame l'emmène. Je m'appelle Mathilde Dumas, je suis la fille de Marius Dumas. J'ai une ferme à Usson. Marius aurait sans doute à peu près le même âge que la vieille, s'il était encore en vie. Peut-être se connaissaient-ils. Après tout, les bourgades étaient voisines et avant, on se connaissait tous ou presque. Je ramasse des denrées pour le mariage du Comte de Beauharnais. C'est bientôt et le responsable du banquet veut essayer les produits pour ne pas gaffer le jour-même.

L'ancienne ne changeait pas de direction. De son pas claudiquant, c'est réellement au temple qu'elle s'en allait, sans doute pour prier un moment avant de l'emmener chez elle. Mathilde avait-elle le temps pour une petite prière vite envoyée? Peut-être. Pas vraiment. Elle ne voulait pas traîner, les récoltes allaient bon train à la ferme et elle allait prendre un retard considérable en faisant ce détour. A moins que... Le doute s'empara d'elle. L'ancienne était-elle une prêtresse? Mathilde la dévisagea, de dos. Voilà qui expliquerait sa longévité et son allure relativement propre et soignée. Elle se mordit la joue pour ne pas rire. Si les Trois avaient eu un message clair à faire passer, ils ne s'y seraient pas pris autrement. Va prier, Mathilde. Ah! La poisse!
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Winifred Des Rosiers
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MessageSujet: Re: Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers]   Une rencontre fortuite [Winifred Des Rosiers] EmptyDim 14 Fév 2021 - 20:35
Les fangeux, les fangeux, ne parle pas d'eux, malheureuse, ils sont bien quand ils sont loin d'ici, que tu cocottes la farine ou le purin. Et tu m'appelles pas chef mon petit, je suis sœur Winifred, madame des Rosiers, mais chef. C'est bien un titre qui ne me plaît pas ça, ou qui va bien à ceux qui tiennent les armes, ceux qui régissent les lois. Mais d'un côté je suis aussi un peu la cheffe, des fois. Quand je dis aux enfants que la cabane il faut pas la faire devant le temple. Bon d'accord petite, tu peux m'appeler chef mai... oh je l'aime bien ce joli petit caillou. Mince, il est un peu bas, faut que je demande à Sande d'aller me le chercher tout à l'heure, je vais l'ajouter à ma petite collection. Et voilà que la petite se met à causer des Trois. Nom d'une carotte, j'ai pas écouté. Je t'avais dit, Wini, d'être plus attentive quand les gens t...

Winifred s'arrêta net, leva la tête pour regarder la jeune femme d'un air interrogateur. Il ne fallait pas trahir le fait qu'elle n'écoutait qu'à moitié. Elle réalisa que tout ce qu'elle venait de dire, elle l'avait juste dit dans sa tête. Aucun mot ne semblait être sorti de sa bouche.

- Dumas, Dumas, marmonna t-elle dans les trois poils de barbe en continuant son chemin d'un pas de vieillard. Oui, j'le connais ton père. J'le connaissais. Mais tu sais mon p'tit, je suis pas à Najac depuis très longtemps. Ceci dit, je me suis renseignée. Et j'ai quand même un peu baroudé, quand ces vilaines bestioles ne rôdaient pas dehors et que mes jambes me supportaient.

Elle ne broncha pas à ses dires sur le mariage du Comte. Elle gardait ses questions pour plus tard.

- Nous y voilà, rentre donc.

Winifred avait poussé la lourde porte en bois avec son séant rikiki. Elle laissa la petite pénétrer la première et ensuite elle donna un coup de canne sur la porte qui se trouvait tout de suite à gauche.

- Ici, ouvre la porte.

Il s'agissait d'une petite pièce avec un seau d'eau posé sur une table, un chiffon propre bien plié.

- Les petits jouent toujours devant le temple, souvent ils tombent dans les escaliers et viennent me demander de les soigner. Je ne leur met qu'un peu d'eau et leur raconte quelques petites histoires sur les Trois, ils aiment ça, les mômes, les histoires. Et toi ma jolie, tu aimes les histoires ?

L'esprit de Winifred était toujours plus clair lorsqu'elle avait de la compagnie. Elle claudiqua jusqu'à l'autre bout de la pièce et attrapa un tabouret. Elle poussa à moitié la jeune femme pour qu'elle y pose ses fesses et sans lui demander son avis elle se mit à lui débarbouiller le visage avec le tissus blanc qu'elle avait préalablement passé dans l'eau.

- T'as quel âge, ma p'tite carotte ?

La dame était loin de s'imaginer que la minette avait passé les 18 années.
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