Si léger et pourtant si lourd! [Terminé]

En rentrant, elle se mit à fouiller dans son coffre pour trouver une robe propre. Éric n'était pas encore revenu, aussi décida-t-elle de passer sa robe rapidement. Plus tôt cela serait fait, plus tôt ils pourraient parler. Les dernières paroles qu'il lui avait adressées semblaient montrer qu'il avait compris ce qu'elle lui demandait, et son agacement était redescendu aussi vite qu'il était monté. Elle retira sa robe rapidement, ne laissant qu'une légère tunique de lin et s'apprêtait à enfiler la robe propre lorsqu'Éric arriva. Il se contenta d'une caresse dans le dos et d'un baiser avant de repartir se vêtir lui-même, ce qui la fit sourire. Elle se dépêcha de passer la robe propre avant de se retourner vers lui, qui s'était également vêtu, même si... Cela restait une simple chemise.

- Je n'avais pas pensé à ta chemise de rechange... J'ai vraiment la tête ailleurs aujourd'hui. D'ailleurs tu n'as pas froid ? J'ai une couverture ici.

Il se rapprocha d'elle, lui prit la main et y posa ses lèvres. Elle sourit, refermant la main sur la sienne, et de l'autre commença à caresser du bout des doigts le crâne rasé du déserteur.

Elle se demandait pourquoi elle avait cru voir son ancien mari en lui. Est-ce qu'elle s'était cherché des excuses ? Cela avait été une impression fugace dans la mine, mais ici, elle n'arrivait plus à le voir ainsi. Il s'était passé trop de choses pour qu'elle puisse encore dissocier son corps de son esprit et malgré son apparence étrange elle le trouvait beau. Elle avait aimé Einar et elle l'aurait aimé encore si elle avait pu. Mais les choses avaient changé, et elle-même avait changé aussi. Oui, de corps et d'esprit, ces deux hommes n'avaient rien à voir, cela ne se limitait pas à leur chevelure. Ou leur absence de chevelure. Elle passa ses doigts sur le visage de cet homme si étrange, suivant les contours du menton, des sourcils. Cette absence de pilosité était étrange, mais amenait une douceur troublante également. Après un moment de silence où elle ne prononça pas un mot, elle finit par reprendre la parole.

- As-tu... de la famille ? Quelqu'un que tu voudrais inviter à notre mariage ?

Notre mariage. C'était étrange, de faire de nouveau des projets avec quelqu'un. D'envisager un avenir ici, dans ce duché étranger.

- Je n'ai personne à inviter pour ma part. Il y aurait bien quelques amis que j'ai à Marbrume mais... Je n'aimerais pas qu'ils risquent leur vie pour venir ici, simplement pour cela. Je ne pensais pas que cela arriverait un jour, tout est allé si vite.

C'était si rapide et si lent en même temps. Ces deux semaines avaient été longues, mais faciles à supporter dans la mesure où elle ne se tracassait jamais des choses qui pouvaient arriver ou ne pas arriver. Mais maintenant que les choses étaient claires entre eux...

Je n’avais pus m’empêcher de lui caresser le dos en la voyant dans cette tenue légère qui laissait voir bien plus de peau que la robe. Évidemment, j’aurais adoré pouvoir compter sans tout ce lin qui m’obstruait la vue. C’est ainsi que je me contentais de voler un baiser sur l’épaule nue avant de m’habiller.
Elle faisait de même, passant une nouvelle robe avant de s’apercevoir de ma nouvelle tenue, si tant est que l’on puisse appeler une simple chemise, une tenue. Elle s'inquiétait de me voir souffrir du froid et me proposait une couverture.

Non, je n’ai pas froid, je te remercie. Avec une couverture, je vais mourir de chaud. J’attendrais que mes habits soient enfilables, j’ai l’habitude.

Je souriais toujours en lui prenant la main et sentais avec bonheur la sienne se refermer sur mes doigts. Je fermais les yeux de plaisir lorsqu’elle me caressait le crâne, inclinant ce dernier vers elle pour le lui présenter au mieux. Mon visage eut droit également à ses caresses tandis que mon pouce s’activait sur sa main. Je passais mon bras dans son dos, venant me caler dans sa cambrure et la collait doucement à moi pour partager au mieux ce moment de douceur entre amoureux silencieux.
Elle rompit ce silence par une question qui m'émoustille irrémédiablement. L’entendre prononcer “notre mariage” me chatouillait agréablement le ventre et je répondis d’une voix douce.

Non, je n’ai strictement personne à inviter.

Elle affirmait la même chose, invoquant seulement quelques amis qu’elle se refusait à inviter pour ne pas qu’ils risquent un trajet dangereux pour cette “simple cérémonie”. Je reculais la tête et plongeais dans son regard lorsqu’elle parlait de la vitesse à laquelle tout cela arrivait. Je lui lançais un petit sourire plein de malice et de désir.

Je ne pense pas qu’il soit prudent en effet de leur faire prendre la route.
Ces deux semaines ont étés longues sans toi. L’attente de l’officialisation va l’être encore plus. D’une certaine façon, cela ne va pas assez vite.

J’approche lentement de ses lèvres, désireux de m’en saisir.
Je sentais son ventre, chaud, contre le mien et je dû chasser à regret les images de Gudrun nue descendant dans l'eau chaude de la mine.

Il la serra tout contre lui, elle le laissa faire. Ce contact était plaisant, si elle arrivait à faire abstraction de leurs bassins l'un contre l'autre. Il n'y avait personne à inviter, ce qui était tout à la fois triste et... ouvrait une perspective réjouissante. Il n'y avait rien à préparer, rien à organiser. Il recula la tête, et elle put le voir de nouveau sourire d'une façon qu'elle commençait à connaître. Ses yeux sombres qui lui paraissaient si inexpressifs il y avait encore deux semaines semblaient désormais chaleureux. Il allait donc lui falloir de la patience pour deux, mais au fond... cela la flattait de le voir si impatient.

Sans plus réfléchir elle alla à la rencontre de ses lèvres si attirantes. A peine avaient-ils commencé à s'embrasser que quelqu'un frappa à la porte. Elle se recula soudainement, toute excitation envolée, et lissa sa robe de la main pour se redonner une contenance avant d'aller ouvrir la porte.

- Bertille ! Tu as fait vite ! Je ne... m'y attendais pas...

Elle se retourna pour essayer de voir où s'était mis Éric, car la jeune fille ne comprendrait sûrement pas qu'elle ne la laisse pas rentrer, mais encore moins qu'un homme à demi-nu soit dans le logement.

- Oui ! J'ai fait aussi vite que possible quand j'ai su que vous m'cherchiez ma Soeur ! J'ai même couru ! Qu'est-ce qu'il vous fallait ?

Décidant finalement de ne pas la faire entrer, elle répondit :

- J'ai là... Un invité et... J'aurais besoin de Marie-Ange pour certaines choses. Voudrais-tu aller la chercher au château ? Je sais que tu fais habituellement d'autres choses l'après-midi, mais c'est un cas un peu... exceptionnel, alors si tu peux le faire, tu auras ta matinée libre demain. Mais ne cours pas, et encore moins au château ! Ce n'est pas convenable !

Bertille aquiesça avant de repartir d'un pas rapide qui suggérait qu'elle se remettrait à courir dès qu'elle serait sortie du temple. Soupirant, Gudrun referma la porte et se retourna vers Éric.

- Les dieux la bénissent, cette petite ne manque pas d'énergie... Enfin, je ne sais pas si Marie-Ange aura le temps de passer aujourd'hui... Mais tu ne peux pas sortir dans cette tenue.

Elle fronça les sourcils.

- Mais où ai-je la tête aujourd'hui ! Tu ne peux pas la recevoir dans cette tenue non plus, ça ne serait pas très convenable. Tant pis, ce qui est fait est fait. Alors viens, je vais te montrer la chambre où tu pourras dormir cette nuit. J'ai des choses à faire par ailleurs, tu pourras te reposer, et au moins elle ne te trouvera pas ici.

Gudrun termina le trajet jusqu’à mes lèvres dont-elle prit possession. Je commençais à envisager de passer ses lèvres lorsque quelqu’un frappa à la porte.
Ma belle se détacha prestement de moi, arrangeant sa robe avant d’entre ouvrir la porte. Comprenant par là qu’elle ne tenait pas à ce que je sois vu, sans doute à cause de ma tenue, je fis un écart pour me placer dans l’angle mort.
L’échange entre la dénommée Bertille et Gudrun fut rapide et la porte vite refermée. Ma fiancée, ça fait bizarre de se dire cela, demandant juste à la jeune femme d’aller chercher Bertille au château. Elle m’avait présenté, sans me dévoiler, comme un invité et quérir l’autre prêtresse. Je restais interdit, ne comprenant pas trop où elle voulait en venir. Perplexe, je me grattais la nuque.

Elle évoquait alors la vivacité de la jeune-femme qui venait de repartir avant de signaler que je ne pouvais pas la recevoir en cette tenue. A ces mots, je cessais de me gratter et baissais les yeux. En effet, recevoir une prêtresse avec l’entre-jambe à moitié à l’air n’était pas souhaitable. Le fait de me gratter la nuque avait suffit à légèrement soulever le bas de ma chemise, dévoilant un peu de ce qu’elle cachait. Je ramenais donc sagement le bras le long du corps.
Je ramassais mes affaires et suivais Gudrun dans le couloir. Je ne pus résister à l’envie de venir la taquiner en chuchotant à son oreille.

Je pensais porter cela pour la cérémonie, cela ne te convient donc pas?

Je ris doucement et lui pris la main instinctivement jusqu’à la chambre qu’elle me prêtait. L’endroit était très similaire à celle que j’avais occupé plusieurs mois auparavant alors que Marie-Ange m’avait soigné. Une fois entré, je poussais la porte du pied et posais mon bazar au sol avant de me tourner vers la prêtresse. Lui prenant la main, j’ajoutais.

Obligée de me cacher faute de pantalon!

Alors, je la serrais de nouveau contre moi avec tendresse et viens frôler ses lèvres.

On a été interrompus…

Je l’embrasse avec passion, venant doucement caresser ses lèvres de ma langue.

Regardant Éric avant de l'entraîner ailleurs, elle remarqua qu'il semblait mal à l'aise dans sa tenue, comme s'il se rappelait soudainement des convenances et de la pudeur. C'était assez étrange, mais un peu rassurant : il n'était pas totalement ignorant de ce genre de choses !
Il l'attrapa par la main dans le couloir avant de lui chuchoter des paroles incongrues.

- Si tu comptes porter cette chemise, je ne peux pas changer ton choix Éric, mais elle n'est plus toute blanche.

Un petit rire d'Éric lui fit réaliser qu'il avait sans doute voulu plaisanter. Ce n'était pourtant pas très drôle, il lui faudrait bien une chemise propre pour la cérémonie. Et s'il comptait vivre avec elle, elle espérait bien qu'il aurait une tenue de rechange plus appropriée qu'une simple chemise à l'avenir.

- Enfin, voilà la chambre en question... Évite simplement de crier sur les toits que tu dors ici, d'accord ?

En prononçant cette phrase elle se rendit compte qu'il ne risquait pas de sortir ainsi. Il enfonça le clou en se disant obligé de se cacher. Elle eut juste le temps de se rendre compte qu'il avait refermé la porte et posé ses affaires avant qu'il ne l'attrape de nouveau pour l'embrasser. Ses lèvres se firent tentatrices pendant qu'il lui rappelait le baiser interrompu... Puis il l'embrassa résolument. Un baiser délicieux qui ôta à la prêtresse toute envie de réfléchir plus loin, pendant qu'une vague de chaleur la submergeait. Elle passa les bras autour du cou de son désormais fiancé pour se serrer davantage contre lui, continuant à goûter sa bouche avec la sienne. Cette fois-ci, elle profitait pleinement de ce câlin : contrairement à toutes les autres fois, ils étaient fiancés, tout avait été dit, elle n'avait pas peur d'être surprise et il sentait bon.

Il faudrait bien qu'elle retourne voir ses patients à un moment, mais cette pensée restait dans un coin de sa tête. Cela pouvait bien attendre quelques instants... Ou plus. Elle était bien, elle n'avait pas envie que ce moment de tendresse se termine.

J’avais, semble-t-il, encore pas mal de progrès à faire au niveau de l’humour. Gudrun n’avait pas compris que je proposais, pour plaisanter, de me rendre à la cérémonie simplement vêtu de cette chemise. Evidemment, je ne le ferai pas, je ne suis pas aussi déconnecté de la vie que cela. J’espérais bien pouvoir, avec l’argent de ma première mission pour Desmond, acheter de nouveaux habits pour cette occasion. Encore fallait-il que j’ai assez, n’ayant, de toute ma vie, presque jamais rien acheté, je n’ai pas la moindre idée de la valeur financière des choses.

Ne t’en fais pas, je compte sur toi pour m’aider à choisir des vêtements dignes de notre mariage. Je plaisantais.

Je n'explique pas ma blague. Je ne voulais pas l’accabler et qu’elle pense que je me moquais d’elle. Lorsqu’elle me montra la chambre, je souriais en réponse à sa mise en garde.

Je fus ravi de constater la spontanéité avec laquelle elle me suivit dans ce nouveau baiser. Elle m’enlaçait pour s’approcher plus encore de moi, nos corps se rencontraient doucement, partageant leur chaleur, leurs formes. Mon bassin contre le sien déclenchait une cascade de fourmillements dans mon ventre tandis que je glissais une main dans le bas de son dos, l’autre venant sur son cou.
J’arpente toujours ses lèvres de ma langue pour finalement la faire reculer, laissant ma propre bouche ouverte à l’exploration.
Je la sers contre moi avec envie, n’ayant aucun désir que cela s’arrête.
Pourtant, il le fallait avant que l’on ne dérape. J’imagine que Gudrun s’en voudrait trop et qu’elle m’en voudrait aussi beaucoup. Par ailleurs, mon entrejambe était devenu trop … présent.

Je rompais le baiser à regret, posant mon front contre le sien.

Je n’ai guère envie de te lâcher ni de te voir partir, mais j’ai terriblement envie de toi comme tu peux le constater. Aussi, ma fiancée devrait peut-être me quitter si elle veut attendre la nuit de noce…

Je glissais mes lèvres à son oreille pour chuchoter.

Si tu savais mon impatience à pouvoir toucher ta peau…

Je l’embrassais à nouveau, ivre de sa bouche et de ses lèvres, tout ce que je pouvais goûter pour l’heure.

Gudrun le sentit bouger ses mains dans son dos, dans une douce caresse qui s'arrêta sur son cou et en bas de son dos. Le tissu laissait passer des sensations et une chaleur très plaisantes. Il lui laissa finalement l'occasion de lui effleurer les lèvres avec sa langue, dans un juste retour des choses, avant de se presser davantage contre elle, lui faisant sentir une pression sur son ventre. Quand il retira ses lèvres, un regret l'envahit immédiatement. Elle aurait voulu reprendre là où ils s'étaient arrêtés, mais il prit la parole pour la prévenir de... De quoi au juste ? Ses mots étaient doux à entendre, mais ils n'avaient pas de sens. Il lui chuchota de nouveau à l'oreille, avant de se remettre à l'embrasser, et un frisson de plaisir et d'envie l'envahit.

Elle se recula subitement, fixant ces lèvres si attirantes.

- Ce n'est pas juste... Tu me menaces de choses dont j'ai tout aussi envie que toi... Tu fais tout pour me retenir alors que tu sais très bien que je devrais partir !

Elle releva les yeux vers les siens, la respiration lourde. Elle n'était ni en colère, ni triste, ni joyeuse. Elle était peut-être un peu des trois. C'était un peu injuste de sa part également puisqu'ils étaient deux dans ce câlin. Ne sachant trop quoi dire, elle lui embrassa le front.

- Mais... j'ai aimé ce moment.

Se dégageant à regret de la chaleur de leurs corps entrelacés, elle se dirigea vers la porte et sortit dans le couloir. Elle prit un instant pour reprendre ses esprits et laisser son cœur et son souffle se calmer, puis, comme à son habitude, elle repartit vers les nombreuses tâches qui l'attendaient au sein du temple...