[interlude] Rosen et Desmond au 24

Rosen et Desmond au 24

Rosen feat Desmond

Je soupire en faisant tout ce qu’il y a à faire sur moment. Quelle journée de merde… Je regarde Athanase pleurer contre moi, serré tout contre ma poitrine par mes soins avec peut-être un peu trop de zèle ce matin. Non, on ne me l’arrachera pas. Pas lui. Pas la chair de mon sang. Si je dois mourir, je mourrai seule.

« Shhht… dis-je doucement pour l’apaiser. Tout va bien aller. Sois sage… »

J’aurais dû envisager ça… qu’il soit en danger, lui aussi. Mais je crois que comme trop souvent, j’ai refusé de voir l’évidence avant qu’on ne me la glisse sous nez pour me forcer à la regarder. On m’annonce alors que Desmond vient me demander.

Tiens, ça faisait longtemps… je sourirais presque. Dire que j’ai failli mourir à l’accouchement et qu’il ne m’aurait plus jamais revue… Je me demande bien ce que ça lui aurait fait. Une rapide révérence vu qu’il y a du monde autour, et je prends la parole d’une voix discrète pour ne pas trop attirer l’attention.

« Salut… le salué-je toujours préoccupée et mal à l’aise. Alors, tu racontes quoi ? Ça doit bien faire un mois depuis la dernière fois. Comment va Bonchat ? Est-ce qu’il grandit bien ? Chester chasse beaucoup de rats et de souris ici, il sait se rendre utile ce petit. »

J’ai décidé d’aller voir la maîtresse des Lieux, car c’est quand même son bourg et il est naturel que je me présente à elle. On me fait entrer dans une grande pièce où beaucoup de larbins sont présents. Rosen est présente avec son bébé, semblant un peu préoccupé, mais c’est son air habituel. Il n’y a eu que quand elle est avec moi, qu’elle arrive à se détendre.

Je la salut donc, comme il convient, vu mon rang de chevalier, même si je n’ai pas encore retrouvé complètement mon titre de noblesse. Je lui souris et je lui réponds, à voix basse pour l’imiter :

Bonchat va très bien, c’est devenu un puissant chasseur. Il peut tuer une dizaine de rats en une seule journée et il est bien utile à mon quartier général. Il n’y a que les chattes aux alentours qui arrivent à le distraire de sa mission.

Je regarde ensuite le bébé et je lui dis en souriant :

Alors comment va le petit monstre ?

Puis je me rends compte que j’ai peut-être fait une erreur, car il est vraiment très moche cet enfant. La baronne est pourtant très jolie et Hector avait un certain style, mais là, on frôle le mutant. C’est bien simple, on dirait qu’il a été enfanté par deux lépreux au stade terminal. J’arrête de le fixer, car d’une part sa mère risque de mal le prendre et d’autre part, car je risque de faire des cauchemars cette nuit.

Je change donc de sujet et lui demande :

Et toi, comment vas-tu ? L’accouchement n’a pas été trop difficile ?

Je me souviens qu’elle craignait de mourir lors de la naissance, comme une revanche des Dieux. J’espère qu’elle a arrêté avec les idées noires et sa paranoïa, comme quoi tout le monde lui en veut.

Rosen et Desmond au 24

Rosen feat Desmond

Desmond ne tarie pas d’éloges sur son petit chat. C’est ce côté mignon qu’il a, à toujours en faire trop. Je souris un peu, puis il me demande comment va le petit monstre. C’est en souriant que je baisse le regard sur Athanase, qui bien que toujours quelque peu agité, ne pleure plus avec autant de frénésie que quelques minutes auparavant.

Petit monstre…

'Je crois que mon petit monstre est réveillé…
- Je crois que le mien aussi.'

Non, c’est pas le moment de me laisser troubler par les conneries de Roxanne. Vraiment pas.

« Il va bien... il est aussi vigoureux que son père pouvait l’être. »

Je relève les yeux vers Desmond lorsqu’il me parle de mon accouchement. Un accouchement catastrophique, bien évidemment, comme tout ce qui a trait dans ma vie me concernant. Un accouchement qui m’a laissé pas mal de point de suture sur le ventre.

« Oh, ça... réponds-je mal à l’aise. Eh bien, ça a été. Je m’en suis remise. »

Il n’est sans doute pas au courant que j’ai failli y rester, malgré les nombreuses rumeurs à ce sujet. Tant mieux. Les jours qui ont suivi la chirurgie, j’ai été terrassée par une réelle fièvre de cheval. Je ne sais pas ce qui a été le plus critique entre le fait de me faire éventrer ou la fièvre qui en a suivi, mais les deux semblent avoir voulu ma peau avec beaucoup de motivation.

« Viens, allons faire un tour dehors. Ta maison est finie, le savais-tu ? Tu vas pouvoir l’aménager quand tu en auras l’envie et les moyens. »

Toujours un peu préoccupée et perdue dans mes pensées, je me dirige vers la bâtisse pour qu’il puisse la visiter à nouveau, deux miliciens sur nos talons. J’essaie toujours d’avoir un œil partout afin d’anticiper le moindre danger. Pour l’instant, tout va bien. Jusqu’à quand ?

« Et tes affaires alors, comment ça va ? Tu ne t’es pas trop attiré d’ennuis depuis ton départ ? Tu dois être bien occupé en tout cas. Tu as fait quoi dernièrement ? »

Les ennuis… je crois que nous en attirer, c’est notre grande spécialité à tous les deux. Malgré moi et malgré que j’ai le cœur gros, je souris.

« Ça fait un peu vide ici sans toi. Tu vas rester jusqu’à quand, tu sais ? »

Rosen me rassure sur l’état de son enfant, il a beau être très moche, il n’est pas handicapé, c’est déjà cela. Je remercierai les Trois avec une offrande au Temple local. Même son accouchement semble s’être bien passé. Elle me demande ensuite que nous allions dehors et je la suis, répondant en même temps à ses questions :

Oui, je suis au courant. Je suis arrivé tard hier soir et j’ai pu dormir sur place. Le lit sur mesure était déjà installé et j’ai pu dormir comme un bébé.

Je me rends compte que la comparaison est peut-être maladroite et je me dépêche d’enchaîner :

C’est vrai que le reste est à acheter. J’ai reçu de grosses rentrées d’argent et je devrais pouvoir tout acquérir rapidement.

Elle me parle ensuite d’ennuis et je lui réponds fronçant les sourcils, mais sur le ton de la plaisanterie.

Ce n’est pas très gentil de ta part, sache que je n’ai eu aucun problème. Pas une seule blessure ni aucun bannissement.

Je reprends ensuite plus sérieusement :

Mes effectifs ont considérablement augmenté, je suis maintenant à la tête d’une trentaine d’hommes et de femmes, avec des contrats un peu partout. Je suis d’ailleurs venu avec des prêtres importants qui voulaient te rencontrer. Donc, tout va bien pour moi et la date pour retrouver mon titre approche à grands pas !

Je lui souris franchement quand elle m’indique que c’est un peu vide et je lui réponds :

C’est une des choses les plus gentilles que tu m’as jamais dite. Je ne sais pas encore quand les personnes que j’ai escortées voudront partir, mais suis disponible si tu souhaites une escorte ou une oreille attentive.

Je lui dis cela en toute sincérité. Victor m’a demandé de rester sur mes gardes, mais tant qu’un espion du camp adverse n’a pas été attrapé, je n’ai rien à faire.

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Rosen feat Desmond

Je me retiens de rire comme Desmond fait mine de s’insurger. Je crois que la différence entre lui et moi, c’est que moi, au moins, je m’en rends compte.

« C’est très bien alors, je suis contente pour toi ! »

Il m’informe ensuite qu’il va bientôt retrouvé son titre, chose que je ne savais même pas. Je ne crois pas qu’il m’en ait déjà parlé, où alors je l’ai tout simplement oublié.

« Tout va pour le mieux alors ? », je lui demande, une pointe de tristesse dans la voix, peut-être.

Il dit que je ne lui ai jamais rien dit d’aussi gentil que le fait que son absence laisse un vide. Je me souviens toutes les fois où nous nous amusions comme des enfants… où j’oubliais un peu tous mes ennuis et ma douleur, par moment.

Il ne sait pas quand il repartira, m’informe qu’il a escorté des personnes ici.

« Eh bien, il faut croire que je deviens gentille... c’est quoi cette escorte que tu as fait, tu peux m’expliquer un peu ? Ici… c’est toujours un peu compliqué, je crois. Mais je fais de mon mieux. »

Comme il est finalement déjà au courant pour sa maison et qu’il y est déjà allé, je m’arrête finalement de m’y diriger.

« Tu aimerais faire quelque chose ? Je dois bien avoir quelques minutes devant moi avant de devoir encore courir après quelqu’un. C’est une très grosse journée qui se profile... »

Quand Rosen me demande si tout va pour le mieux, je lui réponds en lui souriant :

Il me manque juste une femme et la descendance qui va avec. Quand j’aurais récupéré mon titre, je pourrais reprendre mes recherches.

Elle insiste ensuite sur l’escorte que j’ai réalisée et je lui dis en toute franchise :

Il s’agit d’un groupe de trois religieux, deux hommes et une femme, venant directement du Temple. Ils ont insisté pour ne pas voyager avec les autres et à la place, prendre un convoi de marchands. Si tu veux mon avis, ils ont du temps à perdre. En-tout-cas, j’ai passé un accord avec une guilde concurrente pour assurer la protection, en échange d’un autre échange de services.

Je n’ai rien à cacher à la maîtresse des lieux, c’est bien normal qu’elle sache qui met les pieds dans son village. Quand j’étais à la tête d’un fief, je n’agissais pas autrement. Quand elle parle de son changement de caractère, je lui dis en lui souriant :

Ne sautons pas trop vite aux conclusions. Tu as quand même sous-entendu que j’allais avoir des ennuis, alors disons que c’est neutre pour le moment.

Elle me propose ensuite d’aller à un autre endroit et je lui réponds :

Si cela ne te dérange pas, j’aimerais bien aller au Temple local, pour remercier les Trois de m’avoir protégé sur la route. De plus, je connais bien la prêtresse et cela me ferait plaisir de prendre de ses nouvelles.

Je suis quelqu’un de très religieux et je ne manque pas une occasion de faire une offrande. Ainsi, je suis sûr que les Dieux seront toujours de mon côté et frapperont tout ceux qui s’en prendront à moi. En plus, j’ai toujours quelques petits péchés sur la conscience, comme tuer les gens, les torturer ou diverses autres babioles et je suis ainsi pardonné, c’est quand même bien pratique.

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Rosen feat Desmond

Desmond me dit qu’il lui manque une femme, une descendance, et qu’il va reprendre ses recherches une fois qu’il aura son titre. Intérieurement, je tique. Il a déjà abandonné, hein ?

Dire qu’il voulait m’épouser… les choses et les gens changent vites, parfois. J’écoute ses renseignements le plus attentivement possible en mettant ma contrariété de côté. Il y a plus important à faire que de me morfondre sur mes frustrations. Le moindre détail paraissant insignifiant dans une conversation pourrait possiblement me sauver la vie.

« Eh bien, je te souhaite bonne chance dans tes projets. D’ailleurs, moi aussi, il faudra bien que je pense à me remarier. On m’a déjà fait remarquer que je devais y songer… »

Dur dur, la pression sociale, n’est-ce pas ? Mais c’est la vie. Et on on l’a d’autant plus à ce niveau là que l’on est influent avec un bourg à gérer.

« Allons au temple, alors ! accepté-je en m’y dirigeant. Nous pourrons nous recueillir quelques minutes et puis je retournerai à mes affaires. Tu connais bien Sœur Gudrun ? C’est drôle c’est justement elle qui m’a fait la remarque. Encore me faudra-t-il trouver un bon parti pour Sombrebois. C’est clairement pas gagné… »

Peut-être bien que je n’aurais jamais à y penser. Après tout… n’y a-t-il pas des chances que je meurs ce jour ?

Je me rapproche alors pour lui dire discrètement, lui tapotant brièvement l’épaule pour que personne ne le remarque :

« Tu sais… peut-être que l’un de ces jours, on ira se faire une petite virée, rien que toi et moi. Comme au bon vieux temps... On s'amusait bien, hein ?»

Oui, peut-être que l’un de ces jours, j’aurais bien besoin d’en faire une. Si moi, je survis.

« Si tu en a l’envie, bien sûr ! »

Rosen, me l’avait déjà indiqué avant mon départ et je suis bien d’accord avec ses propos. Elle accepte de me suivre au Temple et quand elle me parle de sœur Gudrun, je lui indique :

Bien sûr, j’y suis allé à chacun de mes voyages ici, et les Trois savent à quel point ils ont été nombreux.

Elle me reparle ensuite du mariage et me fait une proposition qui fait apparaitre un très large sourire sur mon visage et je lui réponds, baissant le ton pour ne pas être entendu :

Bien sûr, cela m’a énormément manqué. C’est vraiment dommage que j’aie un petit statut, sinon je t’aurais volontiers épousé, tu es exactement mon type de femme.

Rosen est une noble, riche, fertile vu la naissance de son enfant et accepte mon énorme branche sans problème, ce qui est une véritable prouesse ! Mais la distance entre un Chevalier et une Baronne est trop grand et je comprends qu’elle veuille un bon partit pouvant la protéger dans ses temps incertains. Cela me rend un peu triste, mais je me dis que la vie est ainsi faite et que l’on n’y peux rien.

Je ne peux même pas me dire que les choses vont évoluer en bien, car j’ai chassé les cultistes pendant des mois, aidant la Milice à de très nombreuses occasions, mais sans aucun remerciement. Sans compter mon bannissement très injuste qui heureusement prendra fin. J’ai bien un projet, reprendre la Châtellenie de Traquemont qui est tombé fin d'année 1165 début 1166. Je pense avoir suffisamment d’homme dans ma guilde pour cela, mais il faudra attendre de retrouver mon statut. En attendant, je continu de constituer des troupes, de gagner de l’argent et de tisser mon réseau.

Lorsque j’aurais accompli cela, je serais digne de Rosen.

Rosen et Desmond au 24

Rosen feat Desmond

Ah, Desmond… il ne lui faut finalement pas si longtemps pour me courtiser à nouveau. Je crois que lui, il ne changera jamais. Mais dit-il, nos petites virées du bon vieux temps lui ont manqué.

« Je crois que mon statut ne vaut pas tant que ça et que tu n’y gagnerais pas grand-chose à m’épouser, sinon de vrais ennuis. »

Je lui mets un coup de coude taquin discrètement, et nous arrivons devant le temple.

« Viens, on va s’asseoir par-là », lui désigné-je une place à l’écart.

Le temple a quelque chose d’apaisant, faut-il le constater.

« Je me demandais... repris-je à voix très basse, comme il convient dans un tel lieu. Si demain, tu as deux amis à qui tu tiens sincèrement, mais que l’un d’eux te demande de nuire à l’autre. Que ferais-tu si de toi même tu n’en as pas envie, mais que tu ne veux pas décevoir le deuxième en refusant ? »

Je me demande bien ce qu’il pourra répondre à ça.

« Choix difficile, non ? », lui dis-je en souriant.

Rosen semble croire que l’épouser va m'attirer des ennuis, sans que je ne sache pas vraiment pourquoi elle pense cela. Visiblement, elle a gardé sa paranoïa avec le monde entier qui lui en veut. Je ne réponds pas pour le moment, prenant un peu de temps pour réfléchir à ma réponse.

D’ailleurs une fois assis, elle me pose une petite question et je lui dit en souriant :

C’est très facile, je demande à l’ami A pourquoi il veut nuire à l’ami B. Si, sa raison est bonne, je ne suis plus ami avec B et je l’aide à faire du mal à B. Et si les raisons ne me convainquent pas, je lui dit que je ne suis pas d’accord et si A persiste en vouloir à B, il cesse d’être mon ami et je prends le partit de B.

Mon sourire s’élargit, car je suis très fier de moi, et je lui précise même :

Nous en avons déjà parlé, mais nous sommes des êtres humains, il n’existe pas de chemin blanc ou noir, seulement du gris. Le mieux est de suivre l’enseignement des Trois, mais n’étant pas des prêtres ou des prêtresses, nous pouvons diverger un peu. Il faut alors faire un don au Temple et essayer de s’améliorer.

C’est en cas ma façon de vivre et cela marche ! La preuve, je suis toujours en vie et pas maudit, c’est une conséquence de ma méthode. Maintenant, je peux revenir sur le sujet du mariage et je lui dis en baissant la voix :

Tu sais que je n’ai peur de personne. Si tu es prête à attendre le mois de septembre, je te demande de m’épouser.

Je suis sérieux, il y a de multiples avantages pour moi, mais que des désavantages pour elle, je doute donc qu’elle accepte.

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Rosen feat Desmond

Alors que Desmond m’explique tout fièrement ce qu’il ferait en cas de conflit, je me perds dans son énoncé. Trop de lettres de l’alphabet…

« Euh… d’accord. »

D’ailleurs, je réalise qu’il n’a pas du tout suivi l’énoncé lui non plus !

« On recommence. Si l’ami A veut que tu fasses du mal à l’ami B et que tu ne peux pas refuser sa demande parce que même si tu n’es pas d’accord avec ça tu tiens exactement pareil aux deux et que tu ne veux perdre aucun des deux. Oh, et puis non, laisse tomber, abandonné-je finalement en abaissant ma main dans le vide d’un mouvement vif. C’est sans importance. »

C’est inutile, je sais très bien ce qu’il en serait de toute façon. Je l’ai même vu de mes yeux. Et le voilà maintenant qui reparle de m'épouser... cette obsession !

« Moi non plus, je n'ai peur de personne. Deviens un bon parti en septembre et tu pourras me demander en mariage. Je ne serai plus dans mon veuvage cet automne en plus. »

Il n'abandonnera jamais en fin de compte. Toujours en chuchotant pour rester audible de lui seule, je poursuis :

« Alors, tu m’as dit que que tu as escorté des clients qui n’ont pas voulu voyager seuls ? je lui demande pour changer de sujet et surtout parce que c’est là le sujet le plus important à avoir. Excuse moi, j’ai oublié ce que tu m’as dit, si tu veux bien répéter. T’as dit que des prêtres voulaient me voir, non ? Tu les connais bien ? »

Rosen, bon sang… Fais un effort pour te concentrer cinq minutes… Pour l'amour du ciel !

« C’est à quel sujet qu’ils veulent me voir ? »

Bien sûr, je me doute que c'est par rapport à mon fils, mais quand même. Je réfléchis quelques secondes car quelque chose me perturbe sans que je ne puisse savoir quoi. Puis c’est alors que je réalise :

« C’est étrange ? Personne n’est encore venu me voir... Vous êtes arrivés hier soir tu dis ? »

Meh… il est encore tôt après tout. Quelle heure déjà ? 9 h 30 ? 10 h ? D'ailleurs, je ne dois pas traîner si je veux passer voir Edwige avant la cérémonie. Mais si Eve et Desmond ont eu le temps de venir me voir ce matin… et si j'ai eu le temps de passer un peu de temps avec Mérédith... de parler avec Marie-Ange...

C’est bien que ces prêtres auraient eu le temps aussi, non ? Qu'ont-ils de plus important à faire que de se présenter au château en demandant à me voir à la première heure du jour, passée depuis longtemps maintenant ?

« Ils sont venus juste pour me voir, dis moi ? Ou bien ils voulaient me voir en passant car ils avaient des choses à faire ici ? »

Je ne sais pas pourquoi, je n’aime pas ça…

« Tu peux me réexpliquer cette histoire d’arrangement pour le voyage ? J’ai pas bien compris ? »

Rien compris du tout, même. Et ma concentration est désastreuse… Ya quand même un truc étrange avec cette histoire.

Rosen a du mal à comprendre mon raisonnement qui est quand même simple ! Je pense qu’elle est très fatiguée ou bien qu’elle est limitée intellectuellement. Personnellement, je pense pour un mix des deux, la baronne n’ayant jamais été une flèche, il faut le reconnaître. Mais de toute façon, tout cela est oublié quand elle me dit qu’elle est prête à se marier avec moi ! Je lui tends donc mon petit doigt et lui demande avec un grand sourire :

C’est une promesse ?

J’attends sa réponse, puis je lui répète ce que je viens de dire, essayant d’employer des termes plus simples pour me mettre à niveau de mon interlocutrice :

J’ai accompagné le Haut-Dignitaire Altan, Dame d’Ailfroid et un prêtre un certain Clay. Leur but est de rendre officiellement hommage à la naissance du jeune héritier, comme le Temple l’aurait fait à l’époque.

Il est vrai qu’avant l’arrivé de la Fange, les dignitaires du Temple sortaient souvent de la dernière cité de l’humanité, une manière de faire voir aux croyants que les religieux sont partout. Je ne les connais pas plus que cela à part Dame d’Ailfroide que l’on appelle Sœur Isolde également. C’est une fille de bonne famille que j’ai déjà escortée dans Marbrume.

Je n’en dis pas plus, secret professionnel ! Elle se plaint qu’ils ne sont pas encore venus et je souris devant son ego surdimensionné ! Je lui dis donc, d’un ton amusé :

Tu sais à quel point le trajet peux être épuisant pour des personnes non habituées. La tension est redoutable, et même si la situation, c’est améliorer depuis la reconstruction de Balazuc, cela reste compliqué.

Elle me demande ensuite l’arrangement que j’ai pris avec le chef de guilde concurrente et je lui explique :

Les épées du Morganstanc devaient à la base escorter ce convoi, mais il manquait de chef de convoi expérimenté, connaissant l'itinéraire, alors il m’a confié une partie de ses hommes incognito et c’est donc moi, officiellement qui ai assuré la sécurité. Il me doit donc un service.

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Rosen feat Desmond

« Disons une reconsidération possible de la question… précisé-je en ignorant son geste au cas où des regards attentifs seraient braqués sur nous. Même si tu récupères ton titre, je doute que tu sois le meilleur des partis Desmond. Mais nous verrons bien d’ici la fin de mon veuvage. Si ça peut te rassurer, les prétendants ne se bousculent pas encore à ma porte et il faudra bien que je me remarie un jour. Alors d’ici là… tu as un peu de temps devant toi pour travailler à soigner ta réputation et tes affaires. »

Je ne suis pas non plus le meilleur des partis moi même… mais ça ne m’empêchera pas de chercher le meilleur pour Sombrebois. Et tôt ou tard, je finirai bien par en avoir, si je survis assez longtemps pour ça. Et à ce moment-là… il me faudra bien faire un choix si j’en ai l’opportunité. Mais l’aurais-je seulement...

Je doute fortement que Desmond réussisse à devenir vraiment quelqu’un d’influent et de respectable de toute façon, mais qui sait. Si ça arrive et que je n’ai vraiment aucun prétendant… il aura peut-être sa chance. Mais quelque chose me dit que je risque de ne pas vraiment avoir le luxe du choix…

« Mais certaines choses ne dépendent pas de moi, alors je ne peux rien te promettre. »

Il me reparle ensuite de ces prêtres, m’expliquant-ci, m’expliquant-ça.

« Tu as sans doute raison, dis-je pas convaincue pour un sou. Tu sais où ils sont, là ? Ça serait bien de garder un œil sur eux au cas où ils auraient besoin de quelque chose. Tu pourrais faire ça pour moi ? Et s'ils me demandent, tu leur diras qu'ils peuvent venir me trouver à toute heure évidemment. »

Puis je baisse la tête et essaie de me recueillir quelques minutes. Après ça, je vais encore devoir courir partout.

Ce sont bien les femmes ! Elles promettent une chose et dès que l’on arrive dans le concret, elles changent d’avis aussi rapidement qu’un fangeux te mange un bras ! Finalement, mon interlocutrice met plein de conditions et je comprends très vite que c’est mort pour moi. Elle refuse même de me serrer le petit doigt et conclut que même si je remplis toutes les cases, certaines choses ne dépendent pas d’elle !

Vraiment, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase et je lui dis d’un ton acerbe :

Cela fait beaucoup de si. On est passé de devenir un bon parti à un peut-être. Mais je m’en doutais, comme je te l’ai dit, notre différence de statut est trop grande.

Elle me pose ensuite des questions sur les prêtres et je lui réponds :

Nous nous sommes quittés hier soir et je ne les ai pas vus depuis. Je suis disponible pour te servir d’escorte ou pour t’écouter, mais je n’ai aucune envie d’espionner les représentants des Trois. Sombrebois n’est pas grand alors envoient tes larbins pour les retrouver.

Je ne veux pas de soucis avec le Temple. J’ai une réputation sans tache avec leur groupe, ayant sauvé ou aidé à de multiples reprises leurs représentants, et j’espère bien que les choses vont rester ainsi. Je me recueille ensuite quelques minutes dans le bâtiment, attendant de savoir si la baronne a autre chose à me dire.

Si ce n’est pas le cas, j’irai voir les mercenaires pour m’assurer qu’ils sont facilement mobilisable en cas de problème. Une fois, ceci fait, j’irai acheter une hache, quelques provisions et des outres d’eau, pour stocker au premier étage de ma bâtisse, on n’est jamais trop prudent.

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« C’est parce que tu n’arriveras pas à être un assez bon parti en si peu de temps, marmonné-je dans ma barbe. Mais deviens-le et tu auras de très grandes chances. »

Je suis incapable de me projeter dans le futur, et il voudrait que je lui promette de l’épouser.

« Et puis si ça se trouve, c’est toi qui ne voudra plus m’épouser bientôt. »

Qui sait de quoi demain sera fait. Je pourrais perdre Sombrebois, mon enfant, finir à errer dans les marais en solitaire ou encore tout simplement me faire tuer. S’il pouvait voir un peu plus loin que le bout de son nez… Ne lui ai-je pourtant pas dit que la situation était toujours aussi compliquée ?

« Déjà, je suis insupportable et je me ride à vue d’œil, avec tous ces soucis... », plaisanté-je.

Lorsqu’il me dit refuser d’espionner les prêtres, je lui lance un regard étonné.

Tu deviens moins con toi…

« Je ne parlais pas de les espionner voyons… nie-je les faits. Desmond ! Je te demandais de te tenir disponible au cas où ils auraient besoin de quelque chose ou qu’ils me chercheraient pour me parler parce que je trouve vraiment bizarre qu’ils ne l’aient toujours pas fait. Peut-être ont-ils un souci et ce sont tes clients, tu pourrais t’assurer que tout va bien pour eux. Mais si tu crains que ce soit perçu comme de l’espionnage ou de les agacer, laisse tomber. C’est pas le but de les ennuyer... »

Ah, Desmond. Encore à refuser de m’aider. C’est pas la première fois… refuserait-il quelque chose à Victor ? Bien sûr que non. Pour lui, il l’aurait fait. Et il voudrait m’épouser ? Quelle déveine. Un tel baron n’est pas digne pour le village. Ce n’est pas grave, je me débrouillerai autrement.

Je prends quelques minutes pour me recueillir. Pour penser à Hector, pour penser au futur si incertain et pour que les Dieux aient pitié de moi et qu'ils me tiennent éloigné du point de non retour. Pour qu'ils protègent mon fils... puis je me relève pour partir.

« Desmond ? Être un bon parti, ce n’est pas seulement la notoriété et les finances, expliqué-je en défroissant rapidement les plis de mes jupons. C’est aussi la capacité de gérer un bourg de façon efficace et de le faire passer avant ses affaires personnelles. Si tu as besoin de moi, n’hésite pas à venir me trouver. C'était gentil d'être venu me voir en tout cas, merci. Ça m'a fait plaisir. »

Après voir incliné la tête de la façon convenable, je disparais.

Gérer un bourg de façon efficace... Voilà quelque chose de bien compliqué. J’en sais quelque chose au vu des nombreux écueils que je traverse, d'à quel point il est difficile d'être à la hauteur, même en voulant faire de son mieux. Et maintenant, je file retrouver Edwige pour me faire retirer les points et avoir une rapide conversation avec elle avant la cérémonie qui ne va pas tarder.