L'oreille du milicien [PV Gaël de Conques] - TERMINE

Je gloussais en entendant la raison qu’il évoquait de ne pas me donner à manger. S’il y a bien une chose qui avait grandement participé à me faire le désirer la première fois, c’était bien sa maladresse. Bon, je m’étais empressée de lui donner le change hein ! Mais tout de même.
Aussi, je ne pouvais que le croire. Il fallait bien être honnête, je n’avais que peu d’attirance pour me faire repeindre par de la soupe.

Tu as raison, le risque de devoir commander un nouveau bain est trop grand ! Hihi !

J’avais donc sorti mes bras de la couverture pour attraper mon bol de soupe, sans chercher à masquer quoi que ce fût de mon buste. J’avais eu tellement froid dehors, que je me sentais bien maintenant. De fait, je ne pris pas particulièrement garde lorsque la couverture glissa doucement sur mon épaule.

Elle est bonne cette soupe, je t’assure ! J’ai déjà mangé plus raffiné, oui, mais…

Je déposais un baiser sur sa joue.

C’est toi qui me l’a offert… Enfin, je te rembourserai hein ! Mais… Enfin, elle est bonne et… La compagnie est excellente !

Je sentais que je repartais à rougir, ce qui, visiblement, devenait habituel avec Gaël. C’est alors que ce dernier voulait mon avis de femme.

Oui, bien sûr, avec plaisir !

Hélas, je n’étais pas naïve. Pendant que je l’avais cherché, j’avais compris qu’il avait fait une course pour une autre femme. S’il se montrait aussi charmant avec moi, c’était sans doute par égard et par ce qu’il m’appréciait peut-être réellement. Cependant, il avait dû trouver quelqu’un pour partager sa vie.
J’attendais donc qu’il me pose sa question, buvant ma soupe pour ne rien ajouter de plus.

Les réponses de Gaël étaient devenues plus sobres, signe qu’il devenait plus naturel, plus détendu, plus en confiance. Enfin quand Olga accepta de lui donner son aide, il se leva sans attendre, reposant le bol sur la table, il avait de toute façon fini sa soupe assez rapidement.
Il était évident de voir que le jeune milicien était excité à l’idée d’avoir son avis, il fouilla sa besace pour essayer d’y trouver son petit cadeau.

Quand il l'eut trouvé, il le prit précieusement entre ses mains, un peu comme s' il s’agissait de quelque chose d’aussi fragile qu’un oisillon tombé du nid. A nouveau, il reprit place sur le bord du lit, ouvrant ses mains pour montrer le bijoux à sa confidente.
Il avait le visage d’un petit garçon heureux d’enfin pouvoir partager son secret.
Dans ses mains, était lové un collier simple, peu riche, un petit poisson travaillé dans le bois à la main pendu par la chaîne qui avait au moins l’air fine et solide.
Pour un oeil observateur, le manque de détails prouvait que ce n’était pas là l'œuvre d’un artisan confirmé, cependant la sculpture avait demandé une certaine rigueur et donc du dévouement à la tâche.

«-Alors ? Qu’en pensez-vous ? Est ce qu’il fait trop ? Il pourrait plaire à une jeune fille vous pensez ?»

Gaël était adorablement plein d’attentes envers les réponses d’Olga, le regard pétillant, mais aussi terrifié de s’entendre dire que le cadeau n'était en vérité pas à la hauteur.

C’est… Il est très joli !

Je sentais ma voix comme étranglée. Le bijou était vraiment de très bon goût et, même si j’avais déjà vu beaucoup plus précieux, la réalisation était très propre et d’une finesse assez précise. Enfin, considérant le statut de Gaël, c’était là un très beau bijou pour un simple soldat.
La jeune-femme que le milicien avait choisie avait une chance extraordinaire !

La finesse de la chaine donne au pendentif un côté presque aérien…

Il avait un regard que je pouvais qualifier d’enfantin, attendant mon verdict comme un gamin qui fait un cadeau à sa maman, espérant de doux mots de félicitation. Je ne pouvais retenir une petite larme, car, d’un côté, j’étais heureuse qu’un homme aussi bien que Gaël ai trouvé une femme, de l’autre, je savais ce que cela signifiait.
Jamais une femme n’accepterait que son époux aille voir une autre femme, prostituée qui plus est, et ce, même s’il ne s’agissait que d’une visite amicale.
Après tout, qu’avais-je espéré ?
J’étais en train de me noyer dans des émotions complètement contradictoires, ne sachant pas vraiment ce que j’avais imaginé, rêvé ou pensé. Nous avions laissé libre cours à nos désirs la dernière fois, peut-être m’étais-je laissé envouter par un moment qui avait été magique et valorisant, aujourd’hui tout me renvoyait à ma place.

C’est donc la voix chevrotante d’émotion que je concluais.

Elle a… Beaucoup de chance… J’espère que… Qu’elle te rendra heur… Heureuse Gaël, tu… Tu le mérite… C’est un très beau bijou…

Alors, je posais la tête sur son épaule, mes larmes se faisant un peu plus nombreuses sans que je ne sache vraiment pourquoi.

Plus Olga approuvait, plus on pouvait le voir fier de son travail, il suspendit le collier à ses doigts le laissant se balancer avec précaution.
L’émotion dans la voix de la jeune femme fini par l’alerter, les derniers mots ne faisaient pas beaucoup de sens pour lui, il se demandait sincèrement de quoi elle pouvait parler.

«-De la chance ? Je ne sais pas, j’imagine, c’est ce qu’elle dirait en tout cas…» La tendresse se décupla dans son expression, ce que lui pouvait être chanceux d’avoir Sixtine.

«-C’est certain que ce n’est pas un objet des plus luxueux, mais depuis que ma sœur s’est dédiée aux Trois elle préfère arborer une apparence des plus simples.» Il rit nerveusement devant la tristesse apparente de sa comparse.«Est ce que tout va bien Olga?»

Il posa une main sur son épaule dénudée, espérant l’atteindre un peu dans ses pensées, le collier reposé sur sa jambe et tenu par les doigts libres.
«-J’espère que je n’ai rien fait de mal.»

Il aurait été malheureux de finir sur cette note, de plus il lui restait peu de temps maintenant avant de retourner à la caserne.

J’ouvrais brusquement des yeux ronds, sentant mes joues chauffer soudainement plus fort que jamais. J’étais étranglée par un sentiment de honte, de soulagement, d’angoisse et de bonheur… Oui, tout cela à la fois.
Sa main qui se posait sur mon épaule avec douceur me fit frémir alors que, sans même y réfléchir, je l’enlaçais de mes bras, finissant de faire choir la couverture.

Non ! Tu… Tout va bien !

Je le serrais contre moi, le nez dans son cou, profitant de son odeur. Finalement, c’est le soulagement qui s’emparait de moi. Ce cadeau était pour sa soeur et non pour une prétendante. Cela voulait dire que je pouvais continuer de le voir et j’en ressentais un extraordinaire bonheur.

C’est moi, j’ai cru que… Que tu avais trouvé une épouse et… J’ai eu peur !

Immédiatement après avoir prononcé cette phrase, une pointe d’angoisse refit surface. Peur ? De quoi avais-je peur ? Réellement ? Je n’en savais trop rien à vrai dire, tout était un peu confus dès qu’il s’agissait de lui.
Peur de le perdre, de ne plus le voir, de ne plus pouvoir lui parler ou le toucher. La crainte de ne plus pouvoir sourir de sa maladresse, de ne plus pouvoir le taquiner ou le sentir, ne plus pouvoir le serrer contre moi.

Une bête crainte de…de fille… !

Mes joues étaient en feu, mon ventre brûlait et ma peau appelait la sienne. Je déposais un doux baiser dans son cou avant de susurrer à son oreille.

Embrasse-moi Gaël… !

Je venais de glisser une main sous sa chemise pour délicatement caresser le bas de son dos, profitant de chaque seconde avec lui.

C’est vrai ce qu’on disait, les femmes sont difficiles à comprendre, Gaël n’avait pas compris quelle mouche l’avait piqué, il sursauta presque en la voyant se jeter dans ses bras.
De toute évidence il n’avait au moins rien fait de mal, il lui tapota gentiment le dos dans une tentative de réconfort, un peu mal à l'aise face à la situation inconnue, pourquoi donc parlait-elle d’épouse ?

Il n’entendit même pas sa demande, son esprit trop occupé à surchauffer, est ce que c’était là une façon de lui faire comprendre ses envies ? Est ce qu’elle s’imaginait une vie commune avec lui?
Son cœur se mit à tout rompre, mais cette fois c’était un sentiment bien connu qui produisait cette réaction, la peur, il se releva, plus brusquement qu’il ne le voulait.

«-Dans ce cas là ! Heureusement qu’il n’y a pas eu de malentendu !» Il claqua ses mains, appuyant son propre stress.

«-Vous devriez profiter de la chambre. Tout est réglé de toute façon !» Il se racla la gorge se retournant vers la besace pour rassembler ses affaires, dans sa panique il avait oublié le petit cadeau, caché par la couverture du lit.

Pouvait-il seulement épouser une prostituée ? Mais… Est ce que Olga était-celle faite pour lui? Bon sang, il se maudissait d’être un imbécile pareil, jamais il n’aurait du se laisser aller de cette façon, il a succombé comme un idiot à la facilité du moment et aux plaisirs de la chaire. Rikni devait être déçue, il sentait la noirceur revenir submerger sa poitrine, l’envie de boire pour faire passer le sentiment devenait assez forte, il avait l’impression d'étouffer ici.
Tout cela, ressemblait trop à son père.

«-Je… Je dois partir. Il faut que je rejoigne la caserne.»

Il n’osait pas la regarder, prêt à partir dès qu’il aurait fini de récupérer ses affaires.

J’eu soudainement le sentiment d’avoir raté quelque chose.
D’en avoir trop dit, ou pas assez, ou pas comme il fallait.
Toujours est-il que le jeune-homme se leva brusquement comme si je l’avais piqué et, je manquais de peu de tomber du lit.
Tout s’enchaina très vite et j’eu beaucoup de mal à comprendre ce qu’il faisait jusqu’à ce qu’il me dise de profiter de la chambre. Mon coeur se contracta violemment tandis que la raison de son affolement se faisait clair dans mon esprit.

Je…

Je restais interdite pendant qu’il s’agitait en fuyant mon regard.
L’idiote ! Je lui aurais demandé sa main que cela aurait eu le même résultat ! … A y repenser, en retournant les mots que j’avais employé, il apparaissait que cela pouvait fortement y ressembler. Aussi, pendant que lui blêmissait d’inquiétude, je rougissais d’une honte incommensurable.
Alors, je me levais à mon tour, remplaçant grossièrement la couverture sur mes épaules, envoyant voler le bijou un peu plus loin.
Alors, je le rejoignais aussi vite que possible, paniquée.

Gaël ! Attend !

Je saisissais sa manche pour le retenir et le touner face à moi.

Je ne voulais pas t’affoler ! Je…

Je pris une grande inspiration avant de lever les yeux vers les siens.

Je sais qu’un jour tu ne pourras plus me voir, peu importe la raison. Mais ton amitié m’est précieuse, très précieuse ! Je ne te demandais pas ta main, je… Je ne suis pas le genre de femme que l’on épouse de toute façon… Je ne suis pas… Plus, faite pour ça.

Je baissais la tête, incapable de tenir son beau regard bleu, et perdu, plus longtemps.

J’aime ces moments avec toi, comment je peux te parler, m’ouvrir à toi sans crainte… J’aime aussi ta façon de me toucher et de prendre soin de moi. Cela me va ainsi et je ne ferais jamais obstacle à ta vie. Je…

Je ne savais plus quoi dire et sentais les larmes monter rapidement. Alors, je me retournais.
Du moins, j’essayais.
Je me pris les pieds dans mes vêtements souillés et trébuchais. Mes jambes s’emmêlèrent dans la couverture, cette dernière m’empêchant d’utiliser mes bras pour me rattraper et je terminais ma course dans le bac d’eau maintenant froide.
Une version grande échelle de la dernière fois et qui n’était pas sans rappeler le comte qu’il m’avait lu.
De nouveau trempée et à moitié empètrée dans la couverture, mes nerfs lachèrent et j’éclatais de rire.

Décidément… !

Ses affaires rassemblées, et sur le point de faire un pas en direction de la porte, Gaël sentit la main d’Olga le tourner vers elle, d’un air triste et perdu elle enchaînait de douces paroles.
Il pouvait entendre la peur monter dans sa voix, accompagnée des larmes, il ne savait que faire se sentant pris au piège entre la détresse de la jeune fille et la table, du moins jusqu’à ce que celle-ci réussisse, par il ne sait quel moyen à tomber en arrière.

Comme si la malchance d’Olga ne suffisait pas, le bain se trouvait pile sur la trajectoire de sa chute, Gaël essaya d’un geste flou de la rattraper, mais entre le moment où il réussit à libérer ses mains de ses affaires et à saisir le tissu de la couverture s’était déjà trop tard.

L’eau du bain déborda de tous les côtés sous l’amplitude de la vague qu’avait causé l’impact, celle-ci s’étendit en une flaque, emportant avec elle le bijoux amené au sol un peu plus tôt, le cachant sous le lit.

Malgré le rire d’Olga qui s’étendait dans la pièce, Gaël, lui ne trouvait pas la situation aussi drôle, il jeta la couverture à terre pour limiter les dégâts en espérant que l’aubergiste ne remarque rien au moment de rendre la chambre.

«-Cela n’a rien d’amusant Olga… Vous devriez prendre les choses plus au sérieux.» Les femmes, vraiment, c’était à se demander comment elles pouvaient survivre sans un homme pour les surveiller. «Sortez du bain… Vous allez vraiment attraper quelque chose.»

Ce que Gaël pouvait être sérieux, mais il n’avait pas tort, avec le temps qui était passé, l’eau devait maintenant être gelée, en tout cas il le sentait sur ses mains alors qu'il s'éfforçait d'éponger l'eau, genoux au sol. Il avait du mal à cacher sa mine agacée devant les enfantillages d’Olga.

Alors que mes nerfs lâchaient complètement et que je partais dans un rire incontrôlable, Gaël, lui, changeât radicalement.
Le charmant jeune homme timide et réservé d’alors laissa brusquement place à un homme d’un sérieux effrayant. La surprise me coupa le sifflet immédiatement et fit cesser mon rire comme la pire des nouvelles aurait pu le faire.
Alors que j’étais emmêlée dans la couverture, le milicien tira pour me l’enlever et la jeta immédiatement sur l’eau répandue partout. Il me sermonnait comme si je n’étais qu’une gamine et je me sentais alors aussi idiote que bête.

Je…

Sans un mot de plus, je me levais, maintenant nue, et sortais de l’eau pour attraper une serviette et me frotter le visage. Plus que m’essuyer, je pensais dissimuler les larmes qui recommençaient à monter. Il était tellement dur soudainement, tellement directif et sévère.
Pourtant, même si j’étais à deux doigts de pleurer, un frisson me parcourait le dos. Ce côté affirmé et sérieux lui allait bien. Alors que je séchais mes cheveux, la serviette ne couvrant rien de mon corps, je finis par me retourner. Alors, je m’agenouillais pour éponger le sol avec la serviette.

Je ne voulais pas te sembler irrespectueuse Gaël… Excuse-moi, ça a été plus fort que moi, je… J’ai les nerfs qui ont lâchés.

Une première larme s’échappait.

Cette vie, ce travail, ces souvenirs qui semblent si loin et qui pourtant ne le sont pas… Cette solitude aussi. Tu es… mon seul ami et j’ai besoin de toi.

J'avais prononcé le mot "ami" d'une voix peu assurée, comme s'il faisait fausse note sans trop savoir ce que j'aurais pu utiliser à la place.
Ce mot n'était pas le bon, mais je n'avais que lui à l'instant.

Le milicien avait réussi à la faire pleurer, il voyait bien la petite larme faire son chemin le long de sa joue. Il se maudissait de bien des mots dans sa tête, ce n’était pas une façon de se comporter.

«-Je suis désolé madmoi-Olga. Ce n’était pas très digne de ma part de m’emporter ainsi.»

Un ami, cela faisait bien longtemps que Gaël n’avait pas entendu ce mot pour le décrire, c’était apaisant de voir ce genre d’estime dans les yeux de quelqu’un.
Il laissa le silence peser, continuant d’essuyer l’eau, le visage pensif.

«-Je comprends.»

Il laissa la couverture sur le côté, trempée et inutilisable.

«-Se sentir seul. Je comprends.»

Le jeune homme osait à peine la regarder dans les yeux, de peur qu’elle ne voit la tristesse en lui, la solitude c’était quelque chose qui lui parlait.

«-On ne peut pas comparer de la compagnie et le fait d’être bien accompagné… Qu-quelque chose comme ça j’imagine.»

Loin d’être un grand orateur, sa voix écorchée laissait entendre sa sensibilité. Il n’avait pas envie de se plaindre, ou du moins d’en avoir l’air. Le souvenir de la main de son père lui agrippant les cheveux, agrandissant les pleurs qu’il voulait arrêter, lui revenait en tête. Un frisson parcouru tout son corps, pleurer c’était pour les faibles et les femmes disait-il.
A force d’enterrer sa sensibilité, c’est difficile de se sentir proche des autres.

«-J’aimerai beaucoup ça. Être ton ami.»

Il lui tendit une main pour prendre la sienne, dans une poignée de main peu professionnelle mais pleine de tendresse.

Rapidement, il s’excusa.
Il me laissait parler, confirmant simplement qu’il comprenait ce que j’évoquais au fur et à mesure que j’évoquais les choses. Finalement, il abandonna l’idée d’essuyer le sol avec la couverture, cette dernière étalant plus l’eau qu’elle ne la retenait.
Quelques coups d’œil à la dérobée m’avaient offert de voir une lueur triste dans ses beaux yeux bleus et déjà, je m’en voulais de le mettre en émois.

Sa comparaison trouvait parfaitement sens à mes oreilles et je lui apportais une précision.

Disons que j’ai, avec ceux qui forment ma compagnie habituellement, le même rapport que toi avec ton épée, à ceci prêt que ton épée ne te juge pas.

Il avait beau sembler un peu détaché, j’avais déjà perçu sa sensibilité la dernière fois. Gaël était un homme modeste et de fait, il ne se permettrait pas de faire comme moi, se plaindre devant un autre. Cependant, sa voix et sa tendresse, lorsqu’il me prit la main en assurant qu’il aimerait être mon ami, trahissait, si cela était nécessaire, toute la largesse de son cœur.
Je refermais doucement les doigts sur sa main en relevant la tête vers son visage. Un sourire discret étirait mes lèvres alors que, de ma main libre, je chassais une larme.

Tu l’es Gaël… !

J’approchais lentement de lui, lui caressant la joue en raffermissant ma prise sur ses doigts.

Pourquoi crois-tu que je t’ai cherché toute la journée, gros bêta !

Sans lui laisser le loisir de répondre, je me glissais contre lui, passant nos mains dans mon dos et noyant l’autre sur sa nuque et dans ses cheveux. La tête sur son torse, je m’imprégnais de lui, de son contact, de son parfum, de sa chaleur.
Les yeux clos, la joue sur sa poitrine, les joues roses, je soufflais une dernière chose.

Tu as payé la chambre, viens m’y retrouver après ton service…

Je me rendais compte, après coup, du sous-entendu qu’il pouvait voir dans cette phrase et, à la réflexion, il m’apparaissait que ce n’étais pas un sous-entendu. J’espérais qu’il revienne du fond de mon cœur et de tout mon corps. Je pressais un peu plus la joue contre lui avant de venir embrasser son menton.

Il était mon repère, mon ancrage dans un monde dévasté.
Oserais-je le lui dire un jour ?

Naturellement, alors qu’elle se blottissait contre lui, Gaël posa sa main à l’arrière de sa tête, lui caressant les cheveux avec tendresse. Il n’y avait pas de sous entendu dans le geste, un simple réconfort sincère qu’il espérait efficace.

Comparer son épée à son métier n’était peut être la chose la plus proche de l'idée, à vrai dire Gaël aimait l’escrime, il considérait son épée comme autre chose qu'un outil, elle faisait partie de lui, de qui il était. C’était une arme mais pas seulement, un totem qui lui avait permis de s’élever de nombreuses fois, une preuve qu’il n’était pas un inutile pleurnichard, un symbole de protection, de justice, tout comme les contes décrivaient la lames des chevaliers mais ce n’était pas une chose à dire.
Pas maintenant, pas après la comparaison qu'elle venait de faire, peut-être lui en parlerait-il une autre fois, peut-être même qu’il lui montrerait quelques coups, en espérant que cela l’amuse autant que lui.

L’insulte le fit soufflé du nez, amusé, Olga avait vraiment tendance à le traiter d’idiot, et lui même ne pouvait pas la contredire, c’est vrai qu’il était rarement très digne face à elle.

La revoir après le service, ce n’était potentiellement pas une très bonne idée, mais c’était son amie, et si elle avait besoin de sa présence, il ferait en sorte de ne pas la décevoir, de ne pas briser ce lien de confiance qu'ils venaient de créer.

«-Très bien Olga. Je repasserai une fois mon travail terminé. En attendant… Pas de folie. Et par les Trois, repose-toi.»