[Quête] L’âme de l’agonie

La femme décida tout de même d’aller jeter un œil à l’extérieur, alors que pour Ulric cela ne servait visiblement à rien, il n’y avait qu’une seule entrée et qu’une seule sortie ici. Il en était persuadé, on ne se serait pas donné tout ce mal, si on pouvait y accéder gentiment par l’extérieur. Mais soit, il la laissa faire, ce n’était finalement pas son affaire ! D’ailleurs, elle ne faisait rien de plus pour aider ce cher aventurier dans sa découverte, comme la majorité d’ailleurs. Seul un des prêtres se risquait à essayer des combinaisons, et c’était tout à son honneur.

Le prêtre roux, qui ne sembla en premier lieu pas vouloir suivre la milicienne, fit alors marche arrière et sortit à son tour de la grotte.
Alors qu’Ulric s’attendait à les voir revenir tous les deux, seule la femme revint. Il haussa alors les épaules, sans doute en avait-il profité pour s’éclipser, non désireux de poursuivre, par crainte ou apr manque de détermination, peut être qu’il ne le saura jamais !
Qu’importait, ils étaient à présent rendus à quatre courageux explorateurs et le mystère de la fameuse porte n’était toujours pas résolu.

La femme restait toujours en retrait, sans rien essayer, ni actes ni même paroles. Il se demandait même pourquoi avait-elle accepter de les accompagner, ne la trouvant pas aventurière pour un sous. Qu’elle ne croit pas pouvoir mettre la main sur un quelconque trésor, si elle ne se bouge pas un peu, pensa Ulric.
Le milicien c’était un peu identique, sauf qu’il proposait quelques idées.
Et enfin le prêtre qui restait dans l’aventure, fit bouger les anneaux, dans un sens qu’il jugea bon. Tout le monde attendait impatiemment le verdict, mais rien ne se passa. Fort malheureusement !

Ulric s’approcha alors des anneaux, rassuré de ne voir qu’il n’y avait visiblement pas de pièges, rien ne se produit alors il se voyait en sécurité. Certes, la porte ne s’était pas ouverte, mais rien d’autre de mauvais ne s’était produit. Il se pencha alors, de manière à toucher aux anneaux de lui-même. Lorsqu’il fit ce geste, en se tenant un peu avant, un objet glissa de sa veste et roula sur le sol.
Il n’y fit pas attention sur le coup, occupé à tourner les anneaux, dans un sens, puis dans l’autre, cherchant la combinaison qui pourrait être la bonne. Fatigué de ses essais qui ne donnait rien du tout, l’homme s’éloigna alors de la porte, las.

- « Je ne comprends pas… Nous avons certainement dû louper quelque chose, mes braves ! »

Sa logique n’était pas la bonne. Déçu, il ne quittait pas des yeux les anneaux. La bonne nouvelle, c’est que la mauvaise combinaison n’avait pas déclenché de pièges.

- Hé ! Mais arrêtez !

Alaric s’écria et tira le balafré en arrière, afin qu’il arrête de jouer avec les anneaux.

- Vous avez retenu vos combinaisons, au moins ?

Le soldat enrageait de voir cet idiot s’amuser avec une énigme qui pouvait toujours se révéler dangereuse. Il le poussa sur le côté sans ménagement et vit la milicienne ramasser quelque chose. Dans sa précipitation, il n’avait pas vu l’objet tomber de la poche d’Ulric, mais il n’appréciait pas que la jeune femme s’isole avec ce mystère supplémentaire. Déjà qu’elle n’essayait pas de les aider…

- Qu’est-ce que t’as trouvé ? demanda-t-il sur un ton plus sec qu’il ne l’aurait voulu.

Il se souvenait maintenant pourquoi il préférait travailler seul et explorer les lieux sans personne à ses côtés. Les hommes étaient si égoïstes… Ceux-là semblaient en faire partie.

- T’es venue avec nous, tu ne cherches rien, et dès que tu trouves un truc, tu le gardes pour toi.

Il s’avança brusquement vers elle et tendit son bras, main ouverte.

- Montre.

Il avait besoin de calme pour réfléchir, il voulait aider le prêtre du mieux qu’il le pouvait, mais cette ambiance pesait trop sur ses nerfs. Déjà deux de leurs compagnons étaient partis sans un mot et celle-là espérait sans doute s’échapper avec une partie du butin pour elle seule. Alaric ne pouvait le tolérer.

La situation était loin de s’arranger, prenant même une tournure inattendue qui allait, une fois de plus, faire douter le prêtre quant à l’efficacité de son équipe ou l’efficacité de ses prières au début de l’aventure.

Le chevalier à la chevelure d’or s’était absenté pour quelques mystérieuses raisons, puis vint le tour de son frère du Temple qui devait être bien moins patient que son collègue, s’éclipsant sans prévenir vers le chemin de retour, un comportement qui laissa un goût amer à Cesare, toujours en proie à une frustration grimpante à mesure que les anneaux défiaient leur ingéniosité combinée … enfin, la sienne et celle du milicien qui le gardait.

En parlant du seul duo qui restait, ces derniers semblaient tout aussi exaspérés que lui concernant l’attitude tête en l’air et simplette d’Ulric qui enchainait les démonstrations d’un cerveau probablement rongé par l’alcool comme un ver affamé, réduisant ses capacités intellectuelles à celle d’un enfant curieux et imprudent, si bien que Cesare avait envie de le sermonner furieusement pour les avoir entrainé dans ce bien triste jeu au milieu de nulle-part.

« Ne touchez à rien, Ulric. La dernière chose qu’on souhaite avoir … »

Il fut coupé brusquement par l’attitude agressive du manieur de dagues qui afficha soudainement une animosité menaçante à l’égard de la blonde dont l’utilité fut pour le moins hypothétique. Doutant néanmoins que sortir crocs et griffes allait encourager son équipe à se serrer les coudes de façon plus efficiente, il s’apprêtait à faire appel à la raison plutôt que le conflit, mais leur litige prit un sens nouveau quand il mentionna un objet que la demoiselle aurait trouvé avant de se mettre à l’écart de leur communauté si peu soudée.

Craignant par contre que les deux seuls combattants du groupe n’en viennent aux armes, il tenta de s’interposer entre eux, mains levées et paumes dévoilées en signe de paix et d’apaisement.

« Calme ! Calme ! Nous étriper par frustration ne nous avancera guère ! Essayons plutôt de garder notre calme et de travailler réellement en équipe. »

Se retournant vers Madelyne, il secoua légèrement le menton en sa direction, le regard porté vers ses mains qui tenaient la source de cette dispute.

« Mon enfant, qu’avez-vous trouvé ? N’importe quel indice nous serait précieux vu l’état d’avancement de notre enquête. Ne nous enfermons pas dans le doute et la méfiance et partageons le peu qu’on puisse trouver. »

Ulric avait alors fait tomber quelque chose de sa poche, en se penchant pour regarder les anneaux, un objet circulaire. Il ne s’en était pas aperçu, la milicienne avait profité du fait qu’il soit occupé, pour venir subtiliser l’objet et s’éloigner avec lui. Néanmoins, l’explorateur la vit s’éloigner du reste du groupe, soucieux de ce qu’elle allait bien faire, il s’exclama dans sa direction.

- « Eh demoiselle, vous allez où, vous allez filer vous aussi ? Revenez donc nous donner un petit coup de main ! »

Il tenta de s’approcher alors vers la milicienne, mais il fut pris de court par le deuxième membre de la milice, l’homme brun venait carrément le bousculer et le rejeter en arrière. Visiblement, la pression commençait d’ores et déjà à gagner le groupe.

- « Doucement l’ami ! »

Dit-il en riant. Alaric se dirigeait alors vers la blonde, la questionnant d’un ton sec. Il tenta de faire preuve d’intimidation, de manière à récupérer ce qu’elle cachait.


Mais la milicienne ne céda pas l’objet qu’elle avait en main, bien décidée de garder l’avantage sur les autres.


Simplement, la femme ne comprit pas le sens de l’objet mystérieux. Et pour l’avancée du groupe et de leur quête, leur but commun, elle serait bien contrainte de partager ses informations avec eux. Au risque sinon, de rester bloqués encore un long moment dans cette grotte. Inutile de recourir à la violence, ils œuvraient alors dans un but précis.
Le prêtre essaya à son tour de calmer les deux protagonistes, les raisonnant et tentant de découvrir se que cachait la milicienne.


Madelyne n’en a strictement rien à faire des conseils et avertissements du prêtre, l’intimidation de Cesare est un échec cuisant, pour les deux miliciens, qui semblent être en proie au stress et à l’impatience.

Ulric, quant à lui, avait compris que quelque chose clochait. Il s’avança alors davantage vers le reste du groupe.

- « Si vous commencer à jouer les individualistes, nous n’arriverons à rien ! Allez faites voir. » L’homme tâta l’intérieur de sa veste, n’y trouvant pas le lourd objet, il comprit qu’elle le lui avait subtilisé. L’explorateur brandit son doigt vers la milicienne, en s’écriant. « Petite voleuse ! C’est à moi, je l’ai trouvé ! »


Ulric arrive alors à récupérer l’objet qui était le sien, des mains de la blonde.
Cependant, le brave homme n’était incapable de dire ce que c’était, il aurait très bien pu le revendre en ville. Ou qu’importe. Il avait trouvé l’objet la première fois qu’il était venu en ce lieu, dans cette grotte. Simplement, il n’avait pas cherché plus loin, se disait que ce n’était qu’un bibelot comme un autre et qu’il pourrait peut être en tirer un bon prix, en abusant d’un quelconque benêt. Mais dans l’histoire, il semblait bien que c’était lui qui n’avait pas eu une grande jugeote !
Il montra alors l’objet circulaire aux autres aventuriers, il gratta un peu la surface poussiéreuse et rouillée, il réussit à déchiffrer les mêmes symboles d’animaux. Cependant, ceux-ci ne semblaient pas vouloir tourner, et indiquaient aucun alignement, ne reflétaient aucune combinaison possible.


Alaric et Cesare furent les plus chanceux. L’un tenta d’aller coller l’objet circulaire mystérieux près de la porte sur les parois de la grotte. Et là, les anneaux de l’objet se mirent enfin à tourner, suivant le mécanisme ancien lié à la porte et affichèrent un ordre équivoque. L’autre aventurier, Cesare ou Alaric, peu importait bien, allait pouvoir reproduire ce schéma sur la réelle porte en question. Il aligna alors verticalement, le papillon tout en haut, le loup au milieu, puis l’aigle en bas. Ils se reculèrent aussitôt, prêts à voir quelque chose se dérouler sous yeux, la porte peut être s’ouvrir enfin. Mais non, toujours rien ne se produisit…
Ulric, frappa du poing contre la roche à ses côtés.

- « Je ne comprends plus rien. Si ce maudit objet ne nous avance pas plus ça, que devons-nous faire ? »

Il se recula, réfléchit un instant. Laissant les autres en faire de même également, il repassa en revue tous les éléments.

- « Il doit manquer une étape... »

Cette idiote de milicienne ne voulait rien entendre, même pas les paroles du prêtre qui étaient pourtant très justes. Comment pouvait-on aller à l’encontre d’un messager de la Trinité ? Alaric crut qu’il devrait la menacer plus durement lorsqu’Ulric, comprenant enfin qu’elle lui avait subtilisé quelque chose, haussa le ton et s’avança vers Madelyne. Prise sur le fait, elle n’eut d’autre choix que de lui rendre l’objet volé.

Curieux, le soldat s’approcha du balafré et observa la pièce poussiéreuse et rouillée. L’œil vif, il repéra les symboles des animaux gravés et il comprit qu’il s’agissait d’une clé.

- Ulric, tu peux me la passer ?

Le jeune homme attrapa la pièce avec attention et la posa délicatement sur le mur où elle s’emboîtait parfaitement.

- Il faut tourner les anneaux.

Explication inutile, Cesare s’attelait déjà à la tâche. Hélas, rien ne bougea. Alaric grogna, mais continuait de réfléchir. Ils étaient sur la bonne voie, il leur manquait juste quelque chose, un détail… Mais quoi ?

- Peut-être faut-il une autre clé ?

Ils avaient pourtant ratissé toute la grotte et même les alentours, sans rien trouver. Enfin, Madelyne avait fouillé l’extérieur. Il devenait clair à Alaric que si la milicienne avait trouvé quelque chose, elle ne leur donnerait pas. Il inspira longuement afin de garder son calme.

- Dis-moi, n’as-tu vraiment rien trouvé, dehors ? Car c’est le moment, lui dit-il.

Il n’avait jamais eu un charisme exceptionnel, mais on ne sait jamais. Peut-être avait-elle enfin compris qu’ils devaient travailler ensemble pour réussir cette énigme.

Confusion, nerfs, colère, irritation. Tant d’ennemis qui venaient s’immiscer dans la fragile communion de l’équipe hétéroclite, grignotant les faibles liens de cohésion qui les gardaient unis. Pas même Cesare ne parvint à apaiser la soudaine démonstration d’agressivité qui naquit entre les deux miliciens, à croire que le bras-armé de Marbrume était condamné à s’en prendre à soi-même. Les chiens de garde sensés maintenir paix et ordre n’étaient, pour la plupart, que des hommes et femmes comme tous autres, avec leurs instincts, leurs envies, craintes, doutes, fragilités et défauts. Silencieusement le clerc remercia la Trinité qu’aucune goule affamée ne vienne envenimer d’avantage leur situation précaire : au vu du sentiment de méfiance amère qui avait gagné le groupe, ils n’en étaient que plus fragilisés, comme une coquille fissurée, attendant d’être broyée.

Fort heureusement les choses évoluèrent plus ou moins positivement, donnant la sensation que les Dieux répondaient enfin aux prières du représentant du Clergé. Alaric et Cesare examinèrent d’un regard intrigué l’étrange objet qu’avait trouvé Madelyne, avant qu’ils ne se mettent d’accord sur un signe de tête. Le soldat aux yeux azurés prit l’initiative et déposa la « clé » contre le mur, dévoilant un nouvel ordre d’anneaux. Il fut logique alors que l’ascète suive le mouvement et reproduise la combinaison.

Cependant, la porte resta stoïque face à leurs initiatives, se moquant d’eux dans son silence de pierre. Voilà qui était décourageant, d’autant qu’Ulric ne se montrait toujours d’aucune aide. On comprenait pourquoi il avait tant besoin d’aide, simple d’esprit qu’il était. Le seul souhait de Cesare était qu’il soit assez fort pour transporter le potentiel butin, ou pour les défendre contre une quelconque menace. Mais son estime pour l’individu était en chute libre, tout comme pour la milicienne.

S’humectant les lèvres, il croisa des bras, pensif. Tout ceci était trop complexe pour que ce soit fait par main d’homme, il redoutait plus que jamais la sorcellerie qui devait animer ces mécanismes profanes. Puis ses prunelles se portèrent vers le « bouton » qui se situait près du portail. Si la combinaison était la bonne, peut-être ne restait-il plus qu’à appuyer sur cette protubérance rocheuse et activer une fois pour toute le dispositif qui engrenait ces lieux.

« Et si nous pressions sur cette dalle de pierre ? Peut-être est-ce le dernier mécanisme pour déverrouiller la porte. À ce point je ne vois pas d’autre alternative. Nous avons fouillé les lieux de fonds en comble, sans succès. Ulric, mon fils, à moins que vous n’ayez oublié un autre objet dans votre sac, je vous invite à vous concentrer. »

D’un pas décidé, il avança vers la pierre qui ressortait du mur, déposant sa main le long de sa surface froide et lisse.

« Pas le choix, nous devons avancer. »

Puis il appuya avec toute la force de son bras, le corps tendu comme un arc et le cœur battant.

La milicienne râlait, rien de très original, après tout, ce n’était qu’une femme, pensa Ulric. Il agit simplement la main, pour lui faire comprendre de baisser un peu le ton. Elle se prenait pour qui la blondinette. Non mais franchement, donnez un petit à une femme et elle se croit tout permis. Ulric lui aurait peut être fait comprendre de quel bois il se chauffait, s’il n’avait pas d’autres plans derrière la tête. Comme déchiffrer cette fichue énigme, traverser la porte et voir ce qu’il s’y trouvait derrière !

D’ailleurs, l’autre milicien, le prêtre et notre explorateur se disputaient de savoir qui aurait le privilège de s’accaparer l’objet et d’être celui qui trouvera son utilité. Ulric n’était pas très bon avec tout ce qui touchait l’intellect, non, ce n’était pas son domaine de prédilection, lui, il aimait l’action la lutte et les trésors. Mais parfois, lors de certaines explorations, il fallait faire preuve de tact, d’intelligence et de réflexion. C’était bien pour cela qu’il avait besoin d’une petite troupe avec lui, pour mener à bien ses missions. Ensuite, leur sort, il s’en contrefichait, la plupart du temps. Pas par manque de courage, mais surtout pas indifférence. L’extérieur lui avait appris à être individualiste, à ne faire confiance qu’à lui et à sa logique de survie. Logique parfois bancale, il fallait bien l’avouer. Mais, une chose est sûre, c’est qu’il était resté en vie le bougre. Et il comptait bien continuer dans ce sens.

La femme parlait à présent d’appuyer sur le bouton, ce qui n’était pas forcément une très bonne idée. Ulric savait pourquoi, il avait vu de ses propres yeux la première fois qu’il était venu ici, que ce n’était pas forcément sage d’appuyer sur ce bouton… Enfin, peut être qu’eux auraient plus de chances avec le mécanisme. Il verrait bien, dans le pire des cas, il chercherait d’autres volontaires, ça se trouve assez facilement…

Alaric souhaitait récupérer l’objet, après que l’explorateur l’ait examiné une seconde fois, sans rien y comprendre, le milicien s’y attela à son tour. Et là, miracle ! Le bonhomme avait compris quelque chose. L’honneur de la troupe était sauf ! Il s’agissait alors d’une clé, il la posa sur le mur, le mécanisme s’éveilla alors et fournit la combinaison exacte, de manière à ouvrir la porte. Ulric pensait que c’était tout. Mais non, le prêtre réagit, il fallait bien évidemment reproduire la même combinaison sur les parois de la grotte. Il fit alors tourner les anneaux, vu qu’il avait acquis précédemment que ceux-ci tournaient bel et bien. Il reproduisit à l’identique l’alignement des représentations animales. Et voilà ! Rien ne se passa… Génial, ils n’étaient finalement pas si avancés que cela… Le groupe pensait avoir enfin déchiffré l’énigme, mais non, rien. Toujours rien.

Le milicien interrogeait la blonde, s’interrogeait lui-même, mais rien ne semblait évoluer vers une piste sérieuse.
En revanche, le prêtre, encore lui eut une idée lumineuse. Le cerveau du groupe, heureusement qu’il était là ! Il ne se contenta pas de dire ou de penser à appuyer sur ce bouton, il le fit réellement ! Il appuya dessus, c’était fou, complètement insensé, il avait osé !
Et ! Et…. La porte s’ouvrit ! La médaille-clé roula sur le sol.

- « Merci mon Père, merci ! »

Ulric était infiniment content, la caverne enfin s’était ouverte sous leurs yeux ébahis. La roche s’éleva et vint entrer dans les parois en hauteur, s’écarta pour les laisser passer. Ulric fit un geste de la main, afin de les laisser passer, sait-on jamais, il ne s’engouffrait très peu souvent dans un endroit en premier. Il laissa alors passer tous ses petits camarades d’abord. Il veillerait à ce que le passage soit sûr.
Parfait, les voilà passés de l’autre côté. Ils marchèrent un peu plus loin, traversant un couloir très étroit, laissant la place pour passer à un seul individu en même temps. Les parois étaient beaucoup plus lisses que précédemment. l’endroit avait été travaillé, sculpté, il n’était pas brut comme dans la grotte.
Il faisait néanmoins très sombre. De la lumière n’aurait pas été de refus dans ce coin…
Ils arrivèrent dans une autre pièce, beaucoup plus vaste. Il y avait des dalles au sol, certaines étaient très foncées, d’autres plus claires, mais c’était flou, obscur. Les rares petits trous en hauteur de la caverne n’éclairait pas assez l’endroit. La roche était beaucoup plus profonde ici. Les parois lisses. Impossible de grimper par ici pour regagner la surface.
Ulric observait autour de lui, même s’il peinait à voir quelque chose dans l’obscurité.

La milicienne demeure muette et Alaric lève les yeux au ciel. Il se promet de garder un œil sur elle le reste de l’expédition. Si elle essaye de s’enfuir avec une partie du trésor – si trésor il y a – il ne la laissera pas faire sans réagir. Elle n’est clairement pas nette et, quand bien même elle n’aurait rien à se reprocher, elle n’a quand même pas participé à la résolution de l’énigme.

Le soldat raffermit sa prise sur sa vieille dague et dégaine sa dague acérée lorsque le prêtre parvient à ouvrir la « porte ». Mieux vaut être trop prudent que pas assez. Il n’apprécie pas qu’Ulric les laisse passer devant, mais ne réagit pas afin de ne pas provoquer de tensions supplémentaires. Il suit la milicienne et se réjouit de la voir avancer la première. Au moins, il ne la perdra pas de vue.

Le tunnel est étroit et sombre, c’est angoissant, étouffant. Alaric tente de garder une respiration calme et lente et ne laisse rien paraître de l’inquiétude qui le gagne. Enfin, lorsqu’ils émergent dans une salle, il se permet un bref soupir de soulagement. Son apaisement est de courte de durée et, les sens en alerte, il se fige aux indications de la jeune femme. À la lueur de l’allumette, il observe le curieux dallage qui recouvre le sol.

- Ce n’est pas une simple cachette, énonce-t-il. C’est un ancien bâtiment. Qui s’amuserait à placer des dalles ici ?

Manquant le torticolis, il se retourne et questionne Cesare.

- Avez-vous déjà vu ce genre de… pierres dans un lieu sacré ?

Il fronce les sourcils et essaye de discerner quelque chose dans la pénombre. Il pense deviner des contours, sans certitude. Au loin, il perçoit le fracas des vagues sur la grotte et comprend qu’ils se sont avancés vers le large. La caverne ne doit plus pouvoir s’étendre. Ils ne sont pas descendus et, de l’extérieur, elle ne semblait pas très profonde. Il s’accroupit, attrape une pierre et la lance de toutes ses forces dans le fond de la pièce. Elle lui indiquera sa grandeur et déclenchera éventuellement un piège tandis qu’ils demeurent à l’entrée, en sécurité.

Les Dieux répondirent enfin aux supplications et prières du prêtre ! Ha ! Enfin une preuve que les divinités n’avaient guère abandonné leur protégé mais qu’ils cherchaient uniquement à mettre à l’épreuve sa patience. Et sa patience fut récompensée, la porte s’ouvrant finalement dans un grondement sourd. Mais s’ils pensaient tomber directement sur un tas de pistoles d’argent et autres babioles reluisantes et scintillantes comme on ouvre un coffre au trésor, ils seraient déçus, car ce n’était que la première étape de leur quête tortueuse. Un couloir, en effet, se livrait à l’expédition.

Cesare, pensif, allait proposer un ordre de passage logique où le plus fort d’entre eux passerait en premier, avec celle qui maniait l’arme à distance en arrière et Cesare au cœur de la file pour des raisons évidentes. Cependant ses compagnons impatients, notamment cette énergumène d’Ulric, pressèrent la marche et le prêtre n’eut d’autre choix que de suivre les deux miliciens, l’ivrogne passif gardant ses arrières pour peu qu’il soit assez attentif pour ne pas lui marcher sur les sandales.

Le couloir était long, ses parois lisses laissaient penser qu’elles furent polies par des mains d’homme. Les doigts du clerc caressèrent en cours de marche les murs froids, intrigué par cette architecture qu’on ne s’attendrait nullement à trouver en ces lieux déserts.

« Sommes-nous dans des ruines antiques ou est-ce le repère d’une quelconque secte ? Plus nous avançons et moins j’apprécie ces lieux … »

Mais qui disait ruines disait reliques antiques et autres symboles dogmatiques de foi perdus, une opportunité rare qui donnait de l’ombre aux inquiétudes de Cesare.

Enfin, le couloir s’ouvrit sur une vaste salle très faiblement éclairée. Le manque total d’expérience de Cesare en termes d’aventures et autres expéditions externes se révéla quand il constata qu’il n’avait apporté aucune torche ni chandelle pour éclairer les ténèbres des lieux, une erreur qu’il promit de ne plus commettre si d’aventure il venait à prendre goût à ces escapades provinciales. Le premier détail qui attira son attention fut les dalles aux couleurs légèrement différentes. Sans-doute avaient-elles un sens autre que par simple désir esthétique, en ces lieux mystérieux.

Ses compagnons flairaient un piège potentiel, sans doute avaient-ils raison, le flair des chiens de la milice étant né d’une longue expérience de mésaventures. Il les laissa inspecter les lieux, méditant pour sa part la question posée par Alaric.

« Peut-être … le manque de lumière m’aide peu, à vrai dire. Je suspecte un sens caché aux couleurs des dalles, peut-être une nouvelle énigme. Il est possible qu’il faille qu’on marche sur un ordre précis, une combinaison de dalles sensées activer un nouveau mécanisme étrange. Ou peut-être que l’une des couleurs est un signe de danger. »

Il se retourna brièvement vers Ulric et ajouta :

« Avez-vous un quelconque objet similaire au précédent ? Sinon, voyons si cette clé ne décèle pas d’autres indices. »

Ainsi donc voilà ce qu’il comptait faire : examiner les objets à leurs dispositions à la recherche d’indices, puis examiner du mieux qu’il peut les lieux, les dalles en particulier pour tenter d’en déceler les secrets.

Les trois compagnons d’aventure d’Ulric étaient alors passés, chacun leur tour. D’abord la femme, puis le milicien, le prêtre ensuite et l’explorateur, en dernier. La milicienne fit stopper la petite troupe après avoir passé le très étroit couloir. Il y avait ces dalles au sol, qu’ils ne distinguaient que très difficilement, à cause de la faible lumière. La milicienne craqua une allumette, ils ont pu voir quelques secondes alors ces dalles, ces murs lisses, ces parois travaillées. Le milicien s’interrogea.

- « Un ancien bâtiment ? Ou des ruines ? Effectivement, mais des hommes sont venus ici, c’est certain. Il y a peu de temps, ou il y a très longtemps, je ne parviens cependant pas à le déterminer. Mais… c’est très intéressant. Creusons plus ! »

Enfin, entendez par là, travaillez pour moi, mes méninges sont limitées les gars !
À la faible lueur de l’allumette, à bien observer, ils pouvaient voir qu’il n’y avait pas seulement des dalles foncées et des dalles claires, il y avait en réalités trois couleurs différentes exactement. Des dalles blanchies, des dalles noircies. Et d’autres étaient rougeâtres. Elles étaient toutes réparties uniformément et de manière homogène. Chaque couleur était donc bien représentée et proche des autres. Il n’y avait pas un ordre précis néanmoins.






Madelyne, en craquant une allumette et en examinant brièvement les parois, a trouvé une torche. Parfait, elle durera plus longtemps que les allumettes et pourra éclairer davantage la pièce. La jeune femme effleure les dalles du bout des doigts, elle constate rien de particulier. Les dalles ne bougent pas, ne s’enfoncent pas.

Alaric, quant à lui, lance une pierre vers le fond de la salle. Il constate alors que le couloir n’est si long que cela, mais la pierre, s’entrechoque vers une paroi au fond. Il plisse les yeux, se concentrent, grâce à la lumière, il entrevoit une porte tout au fond. Ce n’est donc qu’un simple couloir. Il suffit de traverser les dalles, pour accéder à une nouvelle porte.

Les paroles du prêtre, néanmoins très sensées, ne permirent pas de révéler leur exactitude. Il n’observa rien de plus que ses précédents compagnons.

Ulric se retournait vers ses camarades, levant les mains en l’air, paumes contre ciel.

- « Je n’ai pas d’autres objets non, j’avais seulement cette clé. »

Il fouilla dans ses poches, clé qu’il n’avait plus, de toute évidence.

Il avait beau y réfléchir, Cesare ne parvint guère à déterminer ce que ces anciennes ruines pouvaient cacher comme symbolique ou secret. Non, rien ne lui venait à l’esprit. Se mordant la lèvre inférieure du bout d’une canine avec irritation, il se promit de plonger de nouveau son nez dans les parchemins antiques de la bibliothèque du Temple afin de gagner en savoir et en connaissances, sachant pertinemment que le savoir était plus précieux qu’une montagne d’or (surtout qu’une telle montagne aurait peu de valeur dans leur contexte actuel où détenir une vache était une plus grande fortune que posséder un palanquin garni de pierres précieuses). Père Cuthbert ne mentait pas quand il disait qu’une goutte de connaissance valait plus qu’un déluge de violence.

Ses camarades de fortune furent plus efficaces, l’une trouvant une torche qui leur facilitera grandement l’avancée dans les entrailles de la grotte tandis que l’autre vérifia qu’aucune machination perfide ne guettait les aventuriers pour les happer. Claquant de la langue, il voyait comment les deux miliciens se grondaient dessus comme deux chiens rivaux sortant les crocs de chaque côté d’une ruelle. Voilà qui n’était guère encourageant mais le prêtre avait déjà échoué à apaiser leurs esprits. Un second échec serait bien trop cuisant pour sa conscience de berger des âmes perdues.

Cesare fit signe de la tête à Ulric de le suivre tandis que la blonde au tempérament agressif avançait vers ce qui semblait être une porte. Se pinçant les lèvres, l’ecclésiastique se demandait ce qui pouvait se cacher encore comme étranges curiosités à travers ce couloir singulier.

Quand Madelyne déclara vouloir ouvrir la porte, le père spirituel se décala instinctivement contre l’un des murs adjacents, serrant fermement son bâton.

« Je propose qu’on se mette de côté, cela nous éviterait une mauvaise surprise comme un projectile qui fuserait de l’entrée. Jeune fille, écartez-vous dès que vous entrouvrez cette porte et surtout éclairez le passage. »

Quant à lui, il ne pouvait rien faire de particulièrement utile pour l’instant, aussi se contentait-il d’examiner du regard les alentours, cherchant quelque chose, n’importe quoi, qui puisse attirer son attention, même le plus infime détail qui pourrait l’éclairer sur l’origine ou l’utilité de cette alcôve. Ou peut-être un objet intéressant tapi dans l’ombre.

Voyons s’il avait des yeux de lynx et le flair d’un limier !