[Event] Les Joutes Royales - Introduction

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◈ Les Joutes Royales ◈

Avec Roland de Rivefière, Cesare, Aymeric de Beauharnais, Merrick Lorren, Hector de Sombrebois, Bérard d'Ergueil, Mathilde, Serena de Rivefière, Alexandre de Terresang, Ulysse de Sombreval, Logan de Sylvecastel, Ombeline, Nathandall, Alix l'Espiègle, Victor de Rougelac, Adelaïde de Rougesoleil, Scarocci Corbera, Madelyne LaFemelle, Enguerrand de Charmoret et Cécilia Valclair.

1er Mai 1166 – Début d’après-midi

Jamais de mémoire d’homme Marbrume n’avait connu telle liesse.

Il faut dire que l’événement n’était pas des moindres, après la débâcle et la chute du Roi, du Royaume même, l’humanité dans toute sa splendeur avait sombré dans un abîme de ténèbres comme elle n’en n’avait jamais connu. Les villes étaient tombées, les châteaux et les bourgades perdus, abandonnés à ce fléau galopant que nul n’avait vu venir.

Mais pas Marbrume.

Tant de sang versé, tant de larmes aussi. Tant d’hommes, de fils et de mères tombés et pour quoi? Les Dieux s’étaient bien gardés de fournir une quelconque explication, leur sentence était assez évocatrice. L’humanité devait se relever ou périr et sombrer dans l’oubli. Et depuis quand avait-on vu l’homme, cette créature aussi retorse que magnifique baisser les bras?

À genoux devant l’autel du grand Temple Sigfroi priait en silence, le front posé sur la superbe couronne qu’il tenait entre ses deux mains. Si l’homme nourrissait des craintes il n’en montrait rien, l’heure était trop solennelle, trop belle pour qu’elle fût gâchée en de vains doutes. Se relevant il leva la main droite et se prépara à répéter le serment au Royaume qu’avaient écrit les trois Hauts Dignitaires de la Trinité. Ce serment qui le lierait au peuple et aux Dieux pour que triomphent les hommes et trépasse la fange.

Tous les dignitaires étaient présents, toute la noblesse ainsi que tous les représentants du Clergé. Le peuple et la milice se massait à l’extérieur tandis que des hérauts répétaient les paroles rituelles afin que personne n’en manque le moindre le mot. Pour l’occasion la ville entière avait été décorée. L’on disait même que le Goulot ne puait plus, à tel point que les rats eux-mêmes choqués par tant de propreté avaient déserté les lieux. Tout était beau propre et chatoyant, à chaque fenêtre sa banderole, à chaque échoppe sa bannière, et pas une seule ne manquait à l’appel. En ce jour l’humanité entrait de plein pied dans une guerre totale contre son propre anéantissement. En ce jour un Royaume se relevait de ses cendres et se parait de son plus beau fer de lance.

Son Roi.

“Moi. Sigfroi de Sylvrur, fils de Hugues de Sylvrur et d’Iris de Sylvrur, Duc du Morguestanc. Jure devant les Trois de servir et d’honorer le peuple de Marbrume, de combattre la fange où qu’elle soit et de veiller à ce que jamais ne s’éteigne la lumière des hommes.”

L’on posa la couronne sur son auguste chef et tandis que le Roi se relevait la foule éclata d’une joie que les murs de Marbrume en étaient presque venus à oublier. La rumeur dit qu’en les faubourgs et les marais la fange elle-même était restée coite, muette de stupeur devant le bruit que tant d’âmes, tant de proies, pouvaient produire. La rumeur cependant ne disait pas qu’à l’instant même, alors que les remparts immémoriaux vibraient d’une liesse à peine contenue, des villages étaient comme toujours pris d’assaut, comme toujours ravagés par la frénésie qu’avait provoqué l’insolence de l’homme chez son plus grand prédateur.

Tout ceci ne serait découvert que plus tard et quand bien-même, que pouvait-on y faire? Il y avait bien trop à célébrer pour se perdre en larmoiements devant un spectacle finalement bien trop commun. Le Royaume et son nouveau monarque se préparaient à livrer une bataille que nul ne pouvait se permettre de perdre. Mais il y avait un temps pour tout.

Et si la guerre était proche l’heure était à la joie. Et à la fête!

◈ ◈ ◈

“Oyez Oyez, gentes dames, gueux et damoiseaux, nobles et minots! Venez célébrer comme il se doit le Sacre du Roi Sigfroi! Sa Seigneurie vous offre de grandes joutes et moult célébrations ce jour à midi Place des Pendus! Chevaliers en armure spectacle de faucons et saltimbanques ! Oyez Oyez!”

Voilà des semaines que retentissait encore et encore la même litanie, de Bourg-Levant jusqu’aux tréfonds du Goulot les Hérauts du Roi s’époumonaient sans relâche. Et le jeu en valait la chandelle! Un tournoi offert et présidé par sa Majesté en personne! Voilà qui suffisait à bon nombre d’habitants, et pour ceux que ne voyaient là qu’un étalage de richesses dont le peuple manquait cruellement, il restait l’effet d'événement, ce fameux “j’y étais” qui faisait que même le plus acariâtre des ermites ne pouvait se permettre de rester cloîtré en ce jour de fête.

Et cela faisait des émules. Dans toute la ville l’on pouvait observer les enfants jouter eux aussi, vêtus d’armures en tissu et d’armes en bois. Cela n’allait pas sans poser quelques problèmes, mais l’engouement était réel et chacun voulait être le preux qui triompherait devant sa Majesté et deviendrait seigneur parmi les seigneurs et serait couvert d’or et de gloire. L’on parlait même d’un domaine offert au plus valeureux, mais qu’en serait-il vraiment? Chacun y allait de sa petite supposition, L’on disait que le grand vainqueur devrait triompher d’un fangeux à mains nues pour prouver sa valeur, d’autres prétendaient que le valeureux devrait se baigner dans les flammes et en ressortir indemne. L’on disait beaucoup de choses. Et à mesure que les crieurs ensemencaient les esprits de leur ritournelle saccadée, l’engouement grandissait. Et avec lui l’impatience.

◈ ◈ ◈

La fameuse place des Pendus, haut lieu à la fois de vie et de mort était méconnaissable. Jamais l’austère quartier de la Milice n’avait revêtu si belle parure. Des fenêtres aux colombages tout n’était que bannières et tentures chatoyantes et chamarrées, fleurs aux couleurs vives et lanternes flamboyantes. Le tristement célèbre échafaud avait lui disparu, démonté pour l’occasion et déplacé jusque dans les cachots. L’on n’arrêtait pas la machine de mort qu’était la justice pour autant, tout juste était-elle camouflée, dissimulée derrière la joie et la liesse qui régnait dans les rues de Marbrume.

Au centre de la grand place désormais dépossédée de sa potence trônait désormais une immense arène circulaire, bordée d’estrades et surmontée au nord de la tribune Royale, celle d’où sa Majesté elle-même présiderait aux joutes. Un peu plus à l’écart des mannequins d’entraînement étaient là pour les moins braves qui n’osaient pas s’inscrire aux combats mais souhaitaient tout de même faire sonner l’acier, des cibles étaient également disposées à bonne distance et des arcs aux flèches émoussées attendaient là que viennent s’y essayer les petites gens.

Et bien-sûr que seraient des Jeux sans une cohorte de ménestrels, bouffons et fous en tous genres? Ça et là retentissaient les cris de surprise de la foule tandis que de mystérieux chapeaux surgissaient de non-moins mystérieux lapins, que de gosiers immaculés jaillissaient d’immenses gerbes de flammes et que des mains des jongleurs s’envolaient toute sorte d’objets, du plus simple au plus improbable.

Tout ceci et bien plus encore car où que pouvait se porter le regard, une choses incroyable s’y trouvait, tout en sachant que le meilleur restait à venir.

Soudainement résonnèrent les trompettes royales et le silence se fit, presque palpable, tellement intense que l’on aurait pu se croire que le pied de guerre. Mais ce n’était que le Roi. Qu’un simple Roi? Non! L’ultime souverain du monde et bras armé de l’homme face au fléau qui y grouillait. Ce n’était plus un homme, ni même un monarque, c’était une légende qui semblait ne trahir aucune émotion, aucun doute sur la mission qu’il embrassait désormais pleinement.

“Gentes dames, nobles seigneurs damoiselles et damoiseaux.” L’homme vêtu de son tabard si spécifique tendit théâtralement le bras vers la tribune Royale tandis que sonnaient les clairons. “Le Roi!”

Sa majesté se leva sous les vivats de la foule rassemblée et il ne fallut que quelques instants pour que le silence ne revienne de lui-même. En homme de peu de mots Sigfroi avait préféré miser sur le fond que sur la forme, aussi son discours était-il succinct. Mais n’attendait-on pas de lui qu’il relève son peuple plutôt que de l’abreuver de verbe? Ses actions parlaient bien plus que lui-même, et cela lui convenait parfaitement.

“Puissent ces jeux vous donner la force d’affronter les épreuves qui nous attendent, et la joie d’en ressortir victorieux! Je déclare ouvert le Tournoi du Roi, place aux combats!”

Et voici que s’avancaient les premiers chevaliers sous les cris de joie d’un peuple entier, cette fois-ci le tumulte ne s’estompa pas aussi rapidement. Deux fiers chevaliers en armure venaient de pénétrer dans la lice et se tenaient tête découverte face au Roi, à la fois fiers et et honorés d’entamer ainsi les festivités d’un tournoi qui assurément marquerait à jamais l’histoire. Des murmures parcoururent la foule, si les blasons qu’ils arboraient étaient clairs pour certains, le peuple n’avait pas le loisir de fréquenter la haute noblesse et ils restaient pour la plèbe d’illustres inconnus transpirant d’aise et de puissance dans leurs armures rutilantes.

“Ne serait-ce pas là Messire de Hautevoie?” Murmura une courtisane qui n’avait pas manqué une miette de la scène depuis sa tribune proche de celle du Roi, malgré le cordon de miliciens qui entouraient la lice. “Absolument! Et le second n’est autre que Messire Pardieu! J’ai Ouï dire qu’il allait bientôt prendre épouse et comptait remporter les joutes pour s’installer dans le domaine promis par sa Majesté!” La première courtisane ne put que siffler d’admiration devant ces deux parangons de droiture, scintillant dans leurs lourdes armures mais ne faisant pas mine d’en éprouver la moindre gêne.

Le héraut s’avança de nouveau et s’exclama d’une voix forte et solennelle tandis que ses paroles étaient répétées et colportées à travers la foule.

“Chevaliers! Combattez pour la gloire, combattez pour l’honneur! Et combattez pour vôtre Roi! L’histoire sera témoin de votre bravoure!”

Citation :: Bonjour à tous et bienvenue dans cet évent! Pour ce premier tour on vous laisse tous arriver tranquillement, notez que le combat des deux chevaliers n'a pas encore commencé et qu'il débutera au début du second tour!

Pour le reste de l’évent vous serez répartis dans plusieurs groupes d'ici quelques tours, on commence juste en douceur avec l'ouverture des festivités.

On compte sur vous pour donner le maximum de jeu à la fois à vos partenaires et à vos Mjs, soyez inventifs et surtout amusez vous! Notez qu'en évent comme en rp Mjité si vous manquez plus d'un tour votre personnage sera remplacé pour permettre aux groupes de fonctionner convenablement. N'hésitez pas à nous contacter si vous avez la moindre question!

Quelques règles cependant :
- Un poste par tour (Une réponse/semaine) pas plus, pas moins, sauf avec l'autorisation de votre MJ.
- Tâchez de faire ressortir les noms des personnes à qui vous vous adressez pour plus de facilité de compréhension.
- Le tour 1 est un tour calme, le tour 2 amènera un peu plus de peps le tour 3 vous amènera à être réparti en groupe

Et pour terminer on est très heureux de vous accueillir dans cet évent dont on est assez fiers, on espère qu'il vous plaira autant qu'on a eu de plaisir à le préparer!

Date limite de post : le 13/04/19. Prochain tour le : 14/04/2019

Il avait fallu des semaines de préparations au monarque pour ce tournoi gigantesque, mais il en avait fallu tout autant pour tout les participants. Cet événement était le plus prestigieux que l'Humanité avait connu depuis sa Chute.
C'était une véritable débauche de moyens qui s'étalaient devant les yeux de tous. Ne valait-il mieux pas utiliser ces ressources pour se redresser et combattre la Fange? Probablement. Mais Logan était, comme tous ici, porté par la liesse générale.

Il y avait un véritable effet de foule qui faisait que même les plus intransigeants finissaient par se décrisper et même en profiter. Lui qui avait d'abord commencé avec de grosses réserves s'était finalement jeté dans le même jeu que les autres.
Il s'était entraîné de longues journées durant pour offrir un combat des plus glorieux. Il avait encore de nombreux hématomes qui couvraient sa peau, mais la douleur était devenue une compagne plus qu'une ennemie, lui rappelant les sacrifices qu'il avait concédé jusqu'à maintenant.

Mais avoir un beau combat ne suffirait pas. Ce jour là, c'était LE jour pour pénétrer dans l'arène...mais politique.
Le châtelain n'était pas connu,c'était un euphémisme que de le dire, et il allait clairement en profiter, comme beaucoup d'autres pour se présenter à tous.
Mais la concurrence serait rude pour voler la vedette, pour sûr. Tous seraient sur le trente-et-un (voire même plus ! Qui sait?) et chercheraient à se faire remarquer.
Logan avait cet "avantage" de participer en tant que combattant. Plus de risque certes, mais le rayonnement, surtout en cas de victoire, était bien plus spectaculaire.

Pour l'occasion, en plus de ses entraînements, le châtelain avait engagé une domestique qui était une couturière particulièrement douée et avait fait fabriquer une tenue d'apparat en matériaux précieux aux couleurs de sa maisonnée.

En même temps, il avait commandé à sa propre scierie la fabrication d'un coffre. Le meuble était une merveille d'un mètre de large par soixante-dix centimètres de profondeur et cinquante de hauteur.
En essence de noyer, les teintes sombres étaient rehaussées par des gravures sur des plaques d'olivier. Le tout était solidarisé par des rivets quasiment invisibles et se fermait par un serrure finement ciselée.
À l'intérieur, un coussin de soie attendait qu'on y dépose un objet précieux.

Logan et sa petite suite s'était présenté devant le nouvellement couronné Roi pour lui présenter sa modeste offrande avec toute la déférence requise.

Une fois ceci fait, il alla avec les autres concurrents dans l'estrade prévue à cet effet et reconnu immédiatement Roland. Il inclina la tête lorsque ce dernier l'aperçu, ne sachant pas si il allait pouvoir l'aborder ou non.

En ce jour où le duc devint Roi et où les chevaliers s'affronteraient dans la lice, la cité était en liesse. De fait, depuis déjà une semaine un vent d'allégresse soufflait sur Marbrume, et ce, de l'esplanade jusqu'au taudis infâme et miteux du goulot. Tandis que les réjouissances promises enflammaient les esprits et les ardeurs d'une population avachies depuis bien trop longtemps par le poids de leur cruel destiné, l'apparat au faste exubérant du moment, couplé à l'attrait des festivités, éclipsa les lourds nuages des douleurs de jadis. Du moins pour un temps, au moins pour une journée dédiée à l'allégresse et à l'euphorie.

Toujours est-il que cette gaieté n'avait pas pris racine chez l'ensemble de la populace. En effet, Merrick Lorren promenait un regard aussi désintéressé qu'épuisé sur la foule qui se massait sur la place des pendus. L'ivrogne qui n'était que jovialité en temps normal, encore plus lorsqu’une quelconque célébration battait son plein, n'en menait guère large, avachit par une fatigue plus que conséquente. Les dernières semaines n'avaient pas été de tout repos pour la milice, ou à tout le moins pour sa coutelerie. Après tout, face à un regroupement aussi massif de populace, et un événement d'une importance capitale, le bras armé du duc devenu roi avait mis les bouchées doubles pour s'assurer de la sécurité et du bon déroulement des réjouissances.

Ainsi, c'est en faction que Lorren assistait aux festivités. Son uniforme rapiécé était le plus propre possible, comme l'avait ordonné son coutilier Arthur. Sa rondache sanglée dans son dos, le milicien gardait une main appuyée sur la garde de sa lame, non pas à cause d'un quelconque risque, mais simplement par le confort que lui apportait l'appui. Retenant un bâillement de s'échapper de sa bouche, masquant la marque de fatigue de poindre à l'horizon grâce à ses doigts, le jeune homme se secoua sur place pour rester non pas concentré, mais tout simplement pour éviter de piquer du nez.

-'' Gardez les yeux ouverts, Lorren.'' Proféra son supérieur en faisant les cent pas.

Soupirant sous le couvert de ses doigts qui n'avaient pas encore déserté sa bouche, Lorren ne proféra tout de même aucun son. Il pouvait bien être laxiste pour deux, son coutilier était zélé pour dix ! Toujours est-il que quelques instants plus tard, Arthur s'éloigna, probablement pour partir en quête du reste de sa troupe, pour surveiller leurs agissements. Sans se faire prier plus longuement, Merrick se remit à fendre la masse, glissant ici et là un regard, non pas en quête d'un quelconque crime, mais plutôt appâté par les spectacles et les scènes festives qui se jouait ici et là. ''Pardon...pardon. Excusez-moi...'' Se faufilant entre les différents badauds et quidams qui s'attroupaient autour d'un cracheur de feu, le milicien continua sa route, s'approchant encore et toujours plus de l'arène qui avait été érigée pour la journée.

C'est sur ces entrefaites que le roi fut présenté à son peuple par les palabres de son héraut. S'en suivit ce bref discours qui déchaîna les passions d'une foule aussi bigarrées que colorées. N'ayant aucun avis particulier sur le nouveau chef de leur destinée, l'ivrogne ne put s'empêcher de sentir un frisson parcourir son échine, tandis qu'il savait assister à un moment qui marquerait l'histoire, alors que les vivats venaient le secouer aussi sûrement que la houle pouvait ballotter de son ressac un frêle esquif de pêcheur.

-''Pardon... pardon, excusez-moi.'' Continuant à s'approcher encore et toujours plus du centre névralgique des événements, le milicien trouva un coin parfait pour ''surveiller'' la lice, en prenant position dans les estrades. Pour faire bonne mesure, Merrick resta tout de même debout à l'arrière, comme s'il était en faction, bien que son regard intéressé soit fixé sur les deux guerriers qui était positionné dans la lice. Probablement que sa hiérarchie ne goûterait guère à sa façon de maintenir l'ordre, mais qu'importe. Tout le monde avait le droit à un bref moment de répit...non ?

-'' Vous pouvez aussi combattre pour le simple spectacle et mon plaisir...'' Murmura tout bas Merrick Lorren, sans s'épancher à l'adresse de personne en particulier, laissant un sourire taquin orner ses lèvres et une main se perdre dans sa chevelure.

C'est sur ces entrefaites que du coin de l'œil, le milicien aperçut son coutilier fendre la populace en contrebas de sa position. Retenant une profusion de mots qui n'étaient guère flatteurs à l'encontre de son supérieur, Merrick se laissa rapidement choir sur l'assise la plus proche, tentant de se camoufler au regard d'Arthur au milieu de ceux qui étaient assis. Se penchant un peu plus bas, l'ivrogne poussa un soupir de satisfaction lorsqu'il crut avoir échappé à la vigilance du gradé. Se passant une main dans les cheveux -encore-, se redressant, Merrick croisa le regard de son voisin -ou voisine-, qui semblait n'avoir rien manqué de la scène.

-''ahem... La place est-elle prise ?'' Tenta-t-il en dressant un sourire en coin. Généralement, on posait ce genre de question avant de prendre place....

S'il était invisible, le regard de Scarocci pouvait être ressenti. Aiguisé et direct, il était imposible d'ignorer lorsque le chevalier pose ses yeux sur vous. Aussi, lorsque le milicien -qui semblait à tout prix vouloir échapper à son supérieur- lui demanda si la place était prise, Scarocci décida de l'aider à sa manière.

- MUHAHAHA ! IL Y A TOUJOURS DE LA PLACE POUR QUELQU'UN DE LA MILICE !

Par pur miracle de la destinée, sa voix tonitruante, qui aurait attiré les regards sur Merrick, fut couvert par un énorme vivat dans leur tribune. Se levant avec fracas, le chevalier posa une lourde main gantelée sur l'épaule du milicien, l'enfoncant d'un bon demi-centimètre dans le bois, qui craquela sous leurs pieds.

- Asseyez-vous, asseyez-vous ! On a une bonne vue ici, n'est-ce pas ?

Afin de faire de la place à son nouvel ami, Scarocci se saisit du fourreau contenant une de ses deux épées, qui reposait sur le siège, et le ramena entre ses jambes. L'armure du chevalier, d'un style passé de mode depuis des décennies, était resplendissante, lustrée et nettoyée avec amour. Mais sa propreté ne cachait pas un nombre considérable de cabosseries et de traces de coups. De toute évidence, le chevalier casqué en avait vu des vertes et des pas mûres.

Un grand manteau de couleur beige, vieux, abîmé et recousu en de multiples endroits, attaché comme une cape et recouvrant la moitié haute de son torse, parachevait l'apparence antique du chevalier. Deux longues épées se trouvait donc entre ses jambes.

Il présenta sa main.

- Scarocci Corbera ! Enchhanté de faire votre connaissance ! Vous en pensez quoi de ces deux preux en contrebas ? Je me méfie de messire de Hautevoie, c'est une sacrée lame ! Qui sait, il sera peut-être un de mes adversaires, si mon premier combat se déroule bien !

Puis, il se mit à suivre joyeusement les acclamations, applaudissements et vivats de la foule, faisant autant de bruit qu'une dizaine de personnes.

Florian fut choisi pour accompagner Hector à la grande fête du Duc. Dans un rôle d'écuyer qui lui allait plutôt bien en raison de son lien de parenté avec Hector et de sa proximité avec les chevaux, il avait accepté avec joie cette demande, pensant aussi aux activités qu'il allait pouvoir mener une fois dans la capitale, libéré de ses obligations. Sans doute irait-il à la Balsamine, à l'Effeuill'âge, ou dans une autre maison de plaisir.

Hector l'avait également choisi car il n'était pas le meilleur soldat de Sombrebois... Légèrement paranoïaque depuis l'incident qui l'avait opposé aux représentants de Terresang, le baron avait décidé de laisser ses meilleurs hommes au château pour le défendre, au cas où le vil vicomte décidait d'une attaque surprise pendant son absence.

Pour les deux ou trois jours qu'il allait passer à Marbrume, le baron prit quelques habits plus ou moins chaud - le temps était très instable en cette saison - et l'armure de plate de son père - armure qu'il n'avait jamais eu l'occasion de porter mais qu'il avait tout de même essayé avant de partir et qui, ma foi, lui allait à ravir ce qui le surpris beaucoup, tant son père avait en son souvenir une silhouette massive ! Hector était devenu bien plus grand et fort qu'il ne l'aurait jamais crut ! Et ses adversaires auraient bientôt l'honneur - ou le malheur ! - de s'en apercevoir...

Il avait décidé de prendre ses quartiers au Gobelet Salé, un petit établissement bien sympathique et discret, dans lequel il espérait ne pas avoir affaire à des sbires de Terresang (paranoïa quand tu nous tiens...). Il y arriva la veille du grand jour, espérant y passer une bonne et longue nuit régénératrice ; et elle le fut. Elle aurait juste pu être un tout petit peu plus longue car Hector fut retardé en y arrivant, par une petite conversation avec une connaissance, presque une amie, Madelyne, qu'il croisa devant l'entrée de l'auberge. Cette jeune femme, il l'avait rencontrée un jour de février de cette année et il avait vécu avec elle - notamment - une magnifique course poursuite en charrette dans les rues de la ville !

- Madelyne ! C'est vous, Madelyne ?! Que... Cela me fait grand plaisir de vous revoir ! Elle avait un air surpris et fatigué... Vous vous souvenez de moi ? Hector de Sombrebois... La roue perdue, le vol de ma bourse, la course poursuite en charrette, la... chute de cheval, la... mauvaise blague du mariage ! Hum... Je tenais à m'excuser d'ailleurs... à la fois pour la chute de cheval - je n'ai pas été très prudent - et pour la mauvaise plaisanterie... J'ai dû vous mettre dans l'embarras et c'est vraiment la dernière chose que je voulais.
- Ah la chute à cheval oui... je me souviens à présent. Vous aviez fait ce vœux il me semble...
Le vœu qu'il avait fait ce soir là lui était totalement sorti de la tête ! Il réfléchit un instant, s'en souvint et sourit.
- Et oui ma chère Madelyne, j'avais fait un vœu... mais vous le savez, pour qu'ils se réalisent, les vœux ne doivent pas être révélés... aussi me garderais-je bien de vous en dire la nature !

Il fit un clin d’œil à la jeune femme. Il n'avait pas encore bu ce soir - d'ailleurs il n'en avait guère l'intention, il devait être en forme le lendemain - aussi fut-il moins entreprenant qu'à l'accoutumée, ne proposant ni promenade digestive, ni dernier verre, ni "voulez-vous coucher avec moi, ce soir ?" à la jeune femme. Il ajouta sobrement :
- J'espère que votre bras est remis et que vous ne gardez pas une trop mauvaise opinion de moi ?
Ce à quoi elle lui répondit que son bras était bien remis et tout et tout... Le baron lui dit alors qu'il venait participer aux joutes du grand tournoi et qu'il serait heureux de l'y croiser si elle avait l'occasion d'y assister. La jeune femme lui expliqua qu'elle s'occupait justement de la sécurité de l’événement et... justement, cela lui permettrait de venir le soir pour qu'il lui donne les réponses aux questions qu'elle avait à propos de son amoureux d'ami : Bérard...

Le lendemain matin, le jour J donc, Hector ouvrit la fenêtre de sa chambre d'auberge et vit que le ciel était clair et que la température était légèrement frisquette mais, au diable la prudence, il choisit de revêtir la belle tunique bleu ciel qu'il avait acheté chez sa chère Aelys. Elle le mettait en valeur - selon les dires de la couturière - et il avait envie de se montrer sous son meilleur jour ! Il adjoint tout de même à sa tenue une fine écharpe blanche et s'en alla, fier comme un coq, sur Moto (sa jument), en direction du Temple de la Trinité. Sur le chemin, il repensa à la lettre qu'il avait écrite pour le futur Roi. Elle était concise mais montrait le respect qu'il avait pour Sigfroi, sa volonté de l'aider à combattre la fange et, aussi, une certaine forme d'indépendance qu'on pouvait déceler entre les lignes...

Lettre d'Hector pour le Roi:

Dans le temple, le baron fut impressionné par l’apparat et la grandiloquence de la cérémonie. Il en fut conforté dans le choix de ses mots pour son suzerain. Il approuvait effectivement le combat... mais pas toujours les moyens.

Hector se plaça sur un siège discret, à côté de nobles qu'il ne connaissait guère. Il ne se fit point remarquer, laissant le Roi et la noblesse de Marbrume communier dans ce moment unique. Il déposa sa lettre, cachetée des belles armoiries de son peuple, dans la main d'un des dignitaires de l'administration désormais royale et quitta le Temple lorsque la cérémonie fut terminée pour retourner rapidement à l'auberge voir si les préparatifs, pour Florian, se passaient bien.

Son cousin était dans l'écurie de l'auberge et finissait de charger l'armure, les armes et tout le bazar nécessaire pour le tournoi à venir. Hector le remerciât pour son travail, prit un rapide et léger repas avec lui et lui dit "à tout à l'heure, noble écuyer ! Je pars devant." Puis il laissa Florian prendre les commandes de la charrette tandis que lui, enfourchait Moto pour rejoindre la place des Pendus.

Sur le chemin, les gens semblaient heureux, enthousiastes. Hector offrait quelques dignes saluts aux gens qui l'interpellaient. Il pouvait constater que sa popularité n'avait pas baissé depuis sa dernière visite officielle ici-bas, ses visites (moins officielles mais régulières) dans la capitale étant toujours l'occasion de faire preuve de sa légendaire bienveillance et sympathie à l'égard des habitants, même - voire surtout ! - des moins fortunés d'entre eux.

Puis, un peu plus loin, en approchant de la fameuse place des Pendus, il tomba sur une jeune femme fort jolie, une blonde au minois frais comme la rosée de Sombrebois le matin de son départ. Il mit alors pied à terre - de toute façon la densité de population était alors telle qu'il valait mieux faire de la sorte pour rassurer Moto et ne bousculer personne - et, après avoir caressé le museau de sa jument, s'éclaircit la voix pour s'adresser à celle qui répondait au doux patronyme de Cécilia Valclair (cela il ne le savait pas évidemment, ils ne s'étaient jamais rencontrés)...

- Bonjour mademoiselle, je cherche la lice pour les joutes de cet après-midi ; vous savez, le tournoi du Roi ? Sauriez-vous quel chemin emprunter, je ne suis pas d'ici, je viens de Sombrebois...

Il souriait d'un air un peu filou. En effet le baron savait parfaitement par où passer... et d'ailleurs, il n'y avait qu'à suivre le flux de population pour se retrouver au centre de Marbrume, que dis-je ? au centre du Monde !

“Moi. Sigfroi de Sylvrur, fils de Hugues de Sylvrur et d’Iris de Sylvrur, Duc du Morguestanc. Jure devant les Trois de servir et d’honorer le peuple de Marbrume, de combattre la fange où qu’elle soit et de veiller à ce que jamais ne s’éteigne la lumière des hommes.”

Qui donc aurait voulu se trouver absent devant tel serment ? Qui de la Noblesse, de la Bourgeoisie ou du Clergé n'aurait souhaité en cet instant ne pas se trouver spectateur de ce couronnement symbolique et admirer le Duc genoux devant l’autel du grand Temple Sigfroi. Aucun intriguant qui se respect n'aurait osé éviter ce cérémonial au risque de s'en retrouver affaibli. Il était évident que le Comte de Rougelac n'allait manquer cette occasion d'affirmer sa sympathie et sa loyauté au Roi nouvellement nommé. Qui puis est, en compagnie de son épouse, qu'il avait conduit par l'avant bras jusqu'à la Maison des Trois non sans que le couple n'ai évidemment prévu d'emporter avec lui une offrande des plus symbolique en ces temps de trouble. Quoi de plus symbolique en effet que d'offrir à sa Majesté Sigfroi de Sylvrur la plus belle et la plus coûteuse arbalète de sa fabrique ? L'arme était splendide, une pièce de collection de tout évidence où la boisure se mêlait aux dorures avec élégance et caractère. Ainsi, la Maison Rougelac affirmait loyauté et soutien à son suzerain.

Cadeau de la Maison Rougelac /Rougesoleil a écrit:

Pour l'occasion, nul déploiement d'une imposante escorte, et ce pour quiconque homme ou femme de bonne ligne. Non, la liesse populaire remettait sans doute à demain d'éventuels traquenards et fallait-il admettre que l'événement était sans aucun doute suffisement encadré par le Bailli du Roi pour ne risquer quelques déconvenues. Ce fut donc seulement surveillé d'une sentinelle que les Rougelac avaient quitté l'Espanade pour le quartier du Pendu où allait se dérouler les réjouissante post-intronisation. Pour l'occasion, le Comte avait choisi une tunique discrète à brocard lie de vin et obsidienne, de quoi affirmer son noble rang tout en évitant soigneusement tout ombrage à l'égard du personnage central de cet événement historique qui reunissait toutes les strates de la population.

S'afficher au côté de la Comtesse Adélaïde de Rougelac était également indispensable pour ainsi confirmer après de moules rebondissements que l'union des deux intriguants de la Haute était acté et consommé. Nul besoin en ce jour de festivité de se rappeler des péripéties qui avaient risqué d'ébranler une vaste alliance ainsi Victor mettait un point d'honneur à mettre en veille, en pause, toutes intrigues et réactions inquisitrices en réactions aux malheurs qu'avait pu subir son épouse bien malgré elle.

Quittant donc le lieux du sacrément, suivant le cortège de nobliaux, le quadragénaire, laissa alors sa somptueuse Dame les guider où bon lui semblerait pour assurément se retrouver comme il était prévu dans les gradins faisant face à la lice qui était aussi démesurée qu'impressionnante, tout comme l'était la décoration soignée de ce quartier dédié à la milice de Marbrume. Désireux de lui offrir une liberté d'action, le mondain lui montrait donc respect et honneur, un piètre dédommagement après ses fâcheux déboirs, mais une marque certaine de confiance.

Les rumeurs se changèrent rapidement en vérité. Le Duc, Sigfroi de Sylvrur allait être couronné roi. La cérémonie se déroulait au temple. Roland et Sydonnie, fraîchement mariés, assistaient au couronnement. Le moment serait mémorable, c’était certain. La ville ne lui avait jamais parue aussi belle et en joie. Le cœur des habitants de Marbrume s’était levé, l’évènement allait donner du baume au cœur et de l’espoir. Les hommes seraient prêts à tout pour défendre leur roi, protégé par les Trois.
Le serment reflétait cet espoir, ce besoin de faire perdurer la lumière des hommes. L’humanité perdurerait, guidée par son souverain, un beau message.

Tous sortirent du temple, une fois la cérémonie achevée. Un héraut avait crié une nouvelle fois l’annonce des festivités. L’héritier s’était inscrit aux joutes royales, il n’avait pas eu le loisir d’y participer récemment. Les dernières joutes auxquelles il avait assisté avec Sydonnie, étaient celles organisées par le comte de Rougelac, en sa demeure. Sa promise y avait participé, mais lui, son rang de noble l’en empêchait. En ce jour, les rôles étaient inversés, il remerciait encore les Dieux pour cela. Il pourrait se battre sous le regard de son roi, c’était un honneur que de pouvoir y prendre part.

- « La cérémonie était merveilleuse, n’est-ce pas. Pour le reste, je suis bien content que tu sois de surveillance, t’affronter devant tout de monde m’aurait dérangé. »

Parce que celle qui était à présent sa femme l’aurait peut être battu aux yeux de tous, ou parce qu’il préférait qu’elle soit à l’abri ? Sans doute un peu des deux.

- « Tu aurais perdu évidemment, ou peut-être t’aurais-je laissé gagner. Je te regarderai, tache de faire mordre la poussière à ton adversaire. »

Il lui offrit un sourire, avant de reporter son attention vers la place des pendus.
Le lieu était méconnaissable, la potence avait été déplacée. L’immense arène y prenait place, là où bientôt l’aîné Rivefière allait disputer son premier combat. Des spectacles de rue, des ménestrels, des cracheurs de feu, des bouffons, des danseurs. Tant d’animations prévues pour le plaisir des yeux. Il ne savait plus où regarder, le monde commençait s’amasser peu à peu. Il reconnut quelques têtes, en salua d’autres. Depuis leur mariage, Roland était resté plutôt discret, il faisait pour ainsi dire son premier bain de foule depuis l’évènement et il n’était pas des moindres.

Margareth, leur domestique, était chargée de déposer leur présent devant la tribune d’honneur. La sergente avait soufflé à son époux qu’il serait judicieux d’offrir un cadeau pour le couronnement de leur souverain. Le blond avait évidement acquiescé bien volontiers. Ils firent préparer des tenues. Une cape aux couleurs de la maison royale, avec le symbole de la trinité brodé dessus, en doré et dentelle. Et une tenue élégante pour sa femme, travaillé avec un tissu de qualité et de la dentelle également, par l’atelier familial, assurément. Le tout rendait bien et était personnalisé. L’offrande fut déposée avec soin.
Le héraut annonça ensuite le roi, qui fit un petit discours annonçant le début officiel des festivités.

Serena vint rejoindre le couple, Roland salua généreusement sa sœur, en espérant ne pas devoir l’affronter. Elle par contre, il n’était pas parvenu à la dissuader de s’inscrire. Espérons juste que tout se passe pour le mieux. Il laissa les deux femmes de sa vie se saluer et peut être s’encourager. Puis il embrassa discrètement Sydonnie, la serrant un peu contre lui, avant que celle-ci ne retourne à ses obligations. Ah oui, depuis qu'ils étaient mariés, il avait peut être un peu plus de mal à la laisser filer.

- « Alors, tu es en forme, ma chère sœur ? »

Le frère et la sœur allait ensuite devoir aller se préparer. Le tournoi allait commencer. L’héritier reconnut Logan de Sylvecastel, celui-ci le saluait d’un signe de tête, auquel il répondit. Puis s’avançant nettement vers lui, lui lança.

- « Bonjour Logan et bonne chance pour le tournoi ! »

Il restait bon joueur, après la mission étrange à laquelle ils avaient participé tous deux, accompagnés du milicien Merrick Lorren, il ne pouvait pas ne pas le saluer. Il ne vit d’ailleurs pas le milicien dans l’estrade des jouteurs, ce qui ne l’étonna évidement pas. Mais il sourit, ayant des bribes de souvenirs de leur dernière entrevue non loin de là, à la choppe sucrée. Quelle soirée!

Alexandre avait rejoint la cérémonie de couronnement en même temps que les autres nobles avec en sa compagnie ses principaux vassaux notamment le Baron Bertrand de Montbard et quelques autres qui n'étaient pas des « seigneurs » de village … car c'était cela qu'était composée sa garde mais qu'importe, il n'avait pas voulu que son nouveau vassal Ulysse de Sombreval le suive, non pas qu'il ne désirait voir ce dernier avec lui mais il devait montrer qu'il était avant tout le vassal de sa nouvelle Majesté et le Vicomte désirait démontrer au Roi qu'il n'avait rien contre lui.

La cérémonie allait bon train et il observait alors ses compères notamment le chien loyal d'Adélaïde de Rougelac … ce nom, cela lui faisait bizarre d'appeler sa belle sœur ainsi mais il avait décider de la marier à cet homme qui était devenu un partenaire d'affaires au Vicomte et peut être même avec le temps, un ami ? Bah ! Il était de sa famille, ça suffisait bien assez ! Il fixait alors Logan de Sylvecastel, il avait un doute quant à sa culpabilité sur l'enlèvement de la Rougesoleil mais il n'avait aucune preuve et puis qui irait s'acoquiner avec un bandit tel que Bodan Mercuro ?

Ce fut à son tour après son beau frère d'amener son cadeau … il avait longuement réfléchi au cadeau qu'il allait donner au nouveau Roi et ce fut un choix rapide, il avait décidé de fouiller les malles qu'il avait réussi à sauver de la Fange et il retrouva l'épée de son grand-père qu'il avait forgé lui même, la garde était décorée par des serpents … le symbole de Rikni, il avait fabriqué cette garde si finement ouvrager pour qu'il ait toujours la Déesse dela Guerre avec lui. Alexandre avait mis de côté son amertume envers son suzerain quant à la mort de sa famille, il avait décidé que la Fange restait la priorité sur la vengeance et avec ses récentes actions dans la cité, il devait montrer sa loyauté à la famille nouvellement royale.

Spoiler:

Puis lorsque la cérémonie prit fin, il ordonna qu'on aille à la place des pendus … là où il avait décidé de participer au tournoi … oui, vous avez bien entendu. Pure connerie, allez vous lui dire mais il le sait déjà ! On lui a déjà dit déjà au Tournoi des Preux de la bouche même de Bertrand de Montbard et il était pourtant encore en vie mais … il y avait plusieurs facteurs … il s'était fait des ennemis notamment ce misérable cloporte d'Hector de Sombrebois ! Il n'avait pas voulu se mesurer à lui laissant faire sa stratégie parodique mais c'était une occasion bien trop grande de mettre fin à cette maudite guerre froide.

Il s'était préparé à ce tournoi, il avait mis sur parchemin ses derniers volontés, car oui, il avait la possibilité de mourir et il s'en fichait ! Il mourra dans la gloire, devant des milliers de spectateurs, l'arme à la main, il n'y avait rien de mieux pour un guerrier pour rejoindre le domaine d'Anür.

Il fit un signe à ses hommes de rejoindre les tribunes quand lui, rejoignit la tribune prévu pour les combattants. Il avait revêtu son armure complète … cela le ralentirait certainement mais il ne fallait pas laisser la sécurité au placard quant à son armement … eh bien … il avait son épée longue toujours dans son fourreau ont il « tenait » la garde avec sa prothèse … d'ailleurs il avait décidé de garder la dague à l'intérieur de cette dernière mais ce n'était qu'en dernier recours, il ne voulait tuer personne. Sa Rondache était inutilisable en état mais il avait décidé d'utiliser de la ficelle solide pour attacher son bouclier à son avant bras … oui, c'était du gros rafistolage.

Il s'approcha puis remarqua que les combattants commençaient à discuter et se tourna en entendant une voix familière puis il haussa lui même la sienne.

« Scarocci Corbera ! Comment on se retrouve, chevalier ! » Une telle familiarité de la part du Vicomte était inhabituelle … peut être que son côté soldat commençait à prendre le dessus .

Une capitale ducale devenait première cité d'un royaume renaissant. Un duc avait abandonné sa couronne de plus haut seigneur du Morguestanc pour celle infinimement plus grandiose de souverain incontesté d'une humanité persistant à tenir tète à un fléau inexorable. D'aucun y aurait prétendu plus tot tandis que d'autre ne l'aurait jamais tenté. Mais, si ces deux années de survie à Marbrume m'avaient enseignées quelque chose au sujet de Sygfroi de Sylvur c'était qu'il n'était point homme à ne pas profiter de la moindre opportunité et ce peu importe les circonstances tragiques devenues ordinaires. Toute la cité grondait depuis des semaines d'une liesse impérissable aux relents presque sauvages. La morosité semblait avoir été chassée de manière implaccable du moindre recoin de la grande ville. Ces cris n'étaient pas simplement ceux d'un peuple se réjouissant d'un spectacle offert afin de dissiper ne serait-ce qu'un brin l'horreur d'une vie de souris terrées entre les murs protecteurs d'une enceinte imprenable. Non, c'était bien plus que cela cette joie qui tenait parfois de la folie furieuse représentait un élan d'espoir innatendu pour une population par trop habituée aux drames les plus douloureux. Oh, bien sur le mouvement de foi n'emportait pas tout sur son passage.

Resteraient toujours les cyniques, les désespérés, les rationnalistes, les petites gens persuadées que cela ne changerait rien à leur misère mais cette minorité paraissait invisible face à la vague puissante du choeur des survivants pour lesquels une nouvelle ère s'ouvrait véritablement sous l'égide d'un sauveur quasi mythique. Après tout le duc devenu roi n'en avait-il pas déjà tant fait par le passé ? Reconquète du plateau hautement nécessaire pour le ravitaillement du Labret, dons pour le peuple par le biais de ses nobles, sauvetage de la cité lors d'une trahison détestable de bannis, survie à une tentative d'assassinat. Oui, les Trois baignaient probablement le nouveau roi de leur grandeur. Il était parvenu à mater sa noblesse en la forcant à se montrer utile à la cité et avait aboli le règne des festivités excessives offensantes pour le peuple. Un tel homme pouvait bien recevoir la charge suprème ? De toute manière, y avait-il un seul fol dans cette cité pour s'y opposer.

Chaque habitant d'origine ou exilé ayant assisté à la fin des de Savosse savait pertinnement que l'on ne défiait jamais sa majesté impunément sans en payer le prix fort. Pour ma part, si je n'avais jamais été remarqué par le duc ce qui quelque part n'était néanmoins pas plus mal au vu de mes frasques j'avais toujours été l'un de ses plus fervents partisans aussi ma voix de mème que celles de mes vassaux avaient été parmi les plus tonitruantes lors de la cérémonie de son sacre. Sygfroi était l'homme de la situation dans ce chaos et si la tyrannie était le prix à payer pour abattre la Fange alors qu'il en soit ainsi. Ma propre vassalité vis à vis du vicomte de Terresang passerait toujours à mes yeux après celle que je devais à la maison de Sylvur.

(...)

Le grand jour était fatalement arrivé et ce tournoi verrait les plus preux des sang bleus se mesurer les uns aux autres pour le plus grand plaisir de sa majesté comme de l'innombrable foule de badauds rassemblée dans le quartier de la milice pour l'occasion. Dressé en tenue de combat de pied en cap sous la forme d'une armure de jais liserée d'or frappée au torse du blason familial représentant un Griffon dressé sur ses pattes arrière, je laissais ser Francis attacher une cape dorée à mes épaules. Point de tabard à mes couleurs car l'armure revetait déjà cette fonction. Mes dernières volontés couchées sur testament depuis des jours, je me sentais pourtant étrangement anxieux. Moi qui avais mené mes Griffons Moqueurs contre la Fange des dizaines de fois depuis notre exode me retrouvais à ressentir une bouffée d'inquiétude à l'idée de participer à un tournoi. Le premier depuis des années il fallait en convenir. C'était que l'exercice n'avait rien de contrefait et chaque joute tenait de la bataille lorsqu'elle était menée avec la fureur de vaincre plutot que la parade du théatre. Quoi qu'il en fut, il était temps de me rendre sur la lice et il me faudrait traverser la cité pour cela ou du moins descendre de l'Esplanade.

Ma suite comprendrait tous mes vassaux soit huit hommes ainsi que trois chevaliers dont ser Francis qui me servirait d'écuyer lors des combats à venir. J'aurais pu parlé beaucoup afin d'atténuer l'inquiétude de mes compagnons mais les mots se refusaient de passer mes lippes. Comme si je me sentais écrasé devant la solennité de ce qui allait adevenir. Tandis que se préparait mon équipage ainsi que mon présent à mon roi, je pris le temps d'aller m'agenouiller devant la statue de Catherine au milieu du jardin. Je me receuillis longuement à ses pieds. Soit, je la rendrais fière. Soit, je la rejoindrais. Dans les deux cas, je serais un homme heureux. Déposant un baiser sur la main de marbre comme si je pouvais en sentir la chaleur du modèle, je m'ébrouais finalement et m'en allais enfourcher ma monture. Du haut de la sienne, Francis se guidant à la force de ses jambes me jouait mon air préféré de sa harpe. Un sourire complice passa entre mon second et moi alors que nous arrivions au devant de la tribune royale. Je démontais prestement avant de confier ma monture à Pontfroid. Et en emmenais une autre à la robe immaculée au pied de l'installation de bois depuis laquelle tronait le roi.

-"Votre majesté je vous présente humblement le présent de la maison de Sombreval. Cet étalon fera je l'espère une monture digne de votre splendeur. Son nom est Ataleus. Puisse-t-il plaire à votre majesté."
Puis, à l'issue d'une réverence respectueuse un poing sur le coeur je m'éloignais d'un pas tranquille pour rejoindre mes vassaux dans les espaces prévus pour les participants du tournoi depuis lequel nous aurions une vue de premier choix sur les duels à venir. Je me surpris à adresser une prière à Rikni seule des trois à m'avoir vu me tourner vers elle bien rarement je devais le confesser depuis la Fange. Je me sentis hypocrite mais quelque chose me disait que les dieux se moquaient des raisons nous poussant à les invoquer tant que nous le faisions.

La rumeur du sacre du roi Sigfroi avait dépassé les remparts de Marbrume, profitant des relèves de garde et des convois de nourriture pour arriver au Labret, jusqu'à la ferme Dumas, où, par un beau matin ensoleillé, un milicien avait annoncé avec beaucoup de fierté qu'il quittait pour quelques semaines le plateau afin d'assurer la sécurité de la ville. Mathilde lui avait remis quelques galettes d'avoine pour la route, et prit la décision de quitter la ferme pour assister à l'événement. Il lui avait fallu quelques jours pour finaliser les préparatifs, transmettre les consignes, et désigner Arthur comme responsable de la ferme en son absence. Suite à cela, elle avait profité d'un convoi pour rejoindre la ville en toute sécurité.

Marbrume avait bien changé. Elle était propre, elle sentait presque bon, et semblait vibrer d'une énergie nouvelle. Il lui avait été difficile de trouver une chambre où loger. Les prix, d'ailleurs, avaient été haussés pour l'occasion, la poussant à reconsidérer la durée de son séjour. Finalement, elle avait proposé ses services à l'auberge en échange de deux repas et de deux nuits. En ces jours de fête, le travail ne manquait pas. Elle profita du peu de temps libre qui lui restait pour conclure des contrats avec un petit bourgeois et l'auberge où elle logeait. Son voyage aurait au moins cela de bon!

Le jour du sacre arriva, et Mathilde se faufila vers la tristement nommée Place des Pendus qui, pour l'occasion, était devenu le plus bel endroit de la ville. Bientôt, les estrades seraient bondées de spectateurs hurlant leurs encouragements. La fermière, plus habituée au calme de la campagne, grimaça à cette idée. Elle tâcherait de garder ses distances pour ne pas être comprimée entre deux armoires à glace.

A l'écart de la grande arène, Mathilde avisa les mannequins et les cibles de tir, bien alignées. Sans doute étaient-elles là pour ceux qui désiraient s'entraîner. Elle était là en tant que spectatrice, mais elle ne put résister et se dirigea vers les cibles. Plutôt que d'attendre indéfiniment le début de la joute assise sur une planche de bois, elle patienterait en tirant quelques flèches, à la grande surprise du préposé aux armes.

La première flèche rebondit sur l'extérieur de la cible. Mathilde fronça les sourcils. La corde de l'arc était trop rigide pour elle. La tendre était difficile, et la flèche avait manqué de puissance. Elle prit le temps de mieux choisir son arc, testant les cordes, la flexibilité du bois, et opta finalement pour celui qui se rapprochait de ce à quoi elle était habituée. La deuxième flèche décochée atteint le cercle extérieur de la cible. Mathilde repoussa gentiment l'aide que lui proposait le responsable. La p'tite dame s'en sort très bien, vous allez voir. La troisième se rapprocha du centre. La quatrième alla directement au coeur de la cible. Les trois qui suivirent aussi. Mathilde sourit, satisfaite, et hocha de la tête pour saluer celui qui avait cru pouvoir venir en aide à une pauvre femme sans doute perdue. Elle lui rendit son arc et chuchota Au Labret, savoir tirer est une question de survie. Elle partit d'un grand éclat de rire devant la mine incongrue du personnage, et s'en alla vers les estrades. La foule commençait à s'animer. Musique, cris, rires, décidément, le calme était totalement étranger à Marbrume.

Elle s'arrêta un instant pour regarder un jongleur de feu. Le spectacle était merveilleux. Sans doute le serait-il encore plus à la faveur de la nuit. Elle fut sortie de sa rêverie par les trompettes royales. Royales. Mathilde réalisa qu'elle vivait un instant historique. Marbrume avait un Roi. Elle se retourna vers la tribune royale et se hissa sur la pointe des pieds tandis que la foule acclama son souverain. Puis le silence se fit. Mathilde n'eût même pas à tendre l'oreille pour entendre la voix grave et puissante s'élever au-dessus de la foule. Le tournoi était ouvert. Il fallait qu'elle se trouve une place, rapidement. Elle finit par opter pour un tonneau jouxtant une estrade, tonneau sur lequel elle s'assit en souriant à son voisin.

- Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait autant de monde!

Puis son regard se perdit, d'abord vers la tribune royale puis vers le parterre de nobles et de courtisans. Elle y reconnut le blond aux yeux bleus rencontré chez de Terresang... son nom lui échappait. De Rivefière... Robert? Roland? Oui, Roland de Rivefière, ainsi qu'Ulysse de Sombreval. Elle vit passer Alexandre de Terresang, qui rejoignait les combattants, et poussa un juron. Il va se faire tuer! Il charge comme un boeuf mais n'a pas la force nécessaire à parer les coups! Terresang, quelle idée!

Ah Marbrume, cette grande ville que je m'étais toujours jurée d'esquiver a tout prix. Ah Marbrume, cette grande cité qui me déplaisait toujours autant. Ah Marbrume, cette grande cité qui me faisait tant peur... Trop de gens, trop de sentiments... trop de tout. Dans la forêt, j'avais l'habitude d'etre seule, toujours seule... Enfin, presque toujours seule. Parfois, j'acceptais de petits boulots dans les villages... Mais voila, cela faisait quelques temps déja que j'avais finalement commencé a rodée dans cette grande prison de pierre. Oui, une grande prison... Pour moi, Marbrume n'est rien d'autre qu'une prison, alors que pour beaucoup c'est leur sauf-conduit pour la survie. Pssshh... Je ne comprenais pas ces gens... Normal, je ne cherchais pas a les comprendre. Je m'en fichais beaucoup. Un soupir filtra entre mes lèvres alors que je contemplais le ciel avec un désintérêt grandissant. Oh combien j'avais hâte de repartir dans les forêts, ah combien je n'attendais que le bon moment pour repartir chez 'moi'. Oui, retourner dans la nature dangereuse et imprévisible... Ça me ferait tant de bien. Le problème restait tout de meme entier. Pourquoi étais-je donc encore ici ? J'aurais due déja etre partie. Apres cette histoire rocambolesque du mois passé... j'aurais simplement due partir loin et fuir, mais non...

La curiosité avant emportée sur mon gros bon sens. La curiosité m'avait poussée a rester. J'avais entendue des rumeurs étranges et bizarres au travers des rues et ruelles de Marbrume.. Une rumeur comme quoi le Duc allait devenir le Roi. Une histoire tellement fantasque qu'il y a quelques temps de ça, je n'aurais point voulue y croire. Le duc ... Nouveau roi ? Ah quel délire d'ivrogne ! Avais-je songé la première fois que j'en avais entendue parler. Jusqu'a ce que tout récemment... Cette histoire délirante devint réellement réelle. Le duc allait avoir le titre de roi... Est ce que ça changeait quelque chose ? De mon avis, rien... C'était un titre pour faire jolie sur un bout de parchemin. De beaux gribouillis en prime ! Du vent pour du vent... Mais ce n'était que mon avis, et je préférais bien entendue le garder pour moi. Mais j'étais quand même curieuse, surtout qu'il allait y avoir des festivités. Pas que l'idée de côtoyer une foule de gens me plaisait franchement... Mais quand même, cela serait peut-etre ma dernière sortie a Marbrume avant longtemps, alors j'allais faire de mon mieux pour ne pas créer de problèmes. J'allais surtout éviter de trop me faire remarquer. De toute manière, qui porterait attention a une 'sauvage' comme moi ? Ah ah ah.

Soupirant légèrement nerveusement, je reportai mon attention sur ma propre, regardant en silence mes bras sans laisser le moindre petit bruit apres le précédent soupir. Mon regard remonta lascivement sur mes mains gantées, les rouvrant et les refermant lentement avec une attention quasi minutieuse avant d'hausser vaguement mes épaules. Allez, il ne restait plus qu'a allez a ce fameux... tournoi... de joute ? Je n'étais plus trop sure de ce qu'était la joute. Aie-je déja sue ? Est ce que mon mentor m'en avait déja parlé ? Bien des questions passèrent brièvement dans mon esprit, secouant finalement légèrement ma tête pour reprendre un semblant d'assurance factice avant de partir dans cette nouvelle aventure qui fut bien vite ralentie par une voix. Une voix d'homme ? Il me parlait ? A moi ? Moi ? Pourquoi ? Qu'avais-je donc fais encore ? Avais-je fait une chose déplacée ? Je n'avais fais que regarder mes bras ! Était ce illégale d'avoir une armure en cuir ? Des vêtements en cuir ? Une cape en cuir ? Délirais-je ? Oui, peut-être, j'espérais bien ! Me retournant pour voir la personne qui m'avait parlé, je sentie mon esprit s'arreter, se bloquer subitement... Il était bien trop bien habillé ! Un noble ? Un noble ? Un noble qui parlait a la vulgaire sauvage que je suis ? Moi et mes habits de cuir un peu usagé, mon armure qui a vue de biens meilleurs jours, pareil pour ma cape... Et je ne parlais meme pas de mon arc désaccorder qui tenait attaché dans mon dos... Je faisais bien pietre figure !

'' Bon... jour ? La joute ? Ah oui, le tournoi. Je crois que c'est par la-bas.. J'ai vue bien des gens allez la-bas. '' Silence, silence... J'ai soudainement tellement mal a la tete. Ça brule, je souffre... Ou pas ? Je sais pas. Mais, j'ai pense... Sombrebois... C'était pas abandonné ? '' Moi aussi, je ne viens pas d'ici. Je ne suis pas de Marbrume. '' Je suis un peu idiote parfois de dire cela aussi simplement comme si de rien n'était. Je lui fais quand meme un signe de la main pour montrer la fameuse direction tout en commençant a marcher vers le lieu demandé. '' Sombrebois n,est pas un coin mort ? Je croyais bien avoir vue seulement qu'une terre déserte la dernière fois que j'y suis été. '' Mon regard se porte sur mes doigts alors que je semble compter en silence depuis combien de temps je n'y étais pas été. Depuis, fort... fort... longtemps en vérité. N'était-ce pas avec mon mentor en plus ? Je crois... Je ne veux pas le savoir en fait. Le surveillant de temps a autre avec de petits regards en coin, je me faufilai du mieux que je pouvais entre quelques badauds, mais ce n'était pas tres aisé. Je ne suis pas bien grande et pas tres bâtie.

Le sourire aux lèvres, Alix finissait d'enfiler sa nouvelle robe préparée spécialement pour l'occasion, toute de tissu rouge vif aux motifs floraux brodés sur le devant. Malgré la tiédeur de l'air, elle appréciait entièrement les jupons qui encombraient un peu ses pas, les manches bouffantes qui rendaient son nouveau vêtement si élégant, les bas blancs qui la faisaient paraitre si soignée.

Aujourd'hui était un jour spécial, un jour de liesse que l'enfant comptait bien savourer pleinement. Aujourd'hui, elle irait dans la tribune des nobles aux côtés de son papa. Elle le regarderait jouter pour la gloire sous les yeux du Roi, elle s'exposerait aux yeux du monde accompagnée même d'une servante, comme ces jeunes filles qu'elle avait toujours enviée. Et si la petite se promit de distribuer l'aumône sur le chemin pour célébrer cet heureux jour de couronnement sans oublier les petites gens, elle ne pouvait s'empêcher d'éprouver un féroce sentiment de bonheur égoïste.

Sagement, elle se laissa aller aux bons soins de Célestine qui finissait de lui coiffer les cheveux en une jolie tresse agrémentée d'un ruban de soie blanche, se laissa mettre une jolie broche précieuse, reliquat de la fortune du comte de Beauharnais, et finit d'enfiler ses bonnes chaussures de cuir rouge assorties à sa tenue.
Et en courant, l'enfant fila rejoindre son père, qui était déjà prêt. Ses joues étaient rouges d'une joie sauvage et naïve lorsqu'elle se saisit de la grosse boite destinée au Roi, qu'elle tint fermement embrassée dans ses bras tout le long du chemin. Les rues de Marbrume étaient si belles et si propres que la petite fille avait du mal à les reconnaitre, mais cela faisait du bien au cœur de voir chacun si heureux. Elle prit soin de distribuer des piécettes et un peu de pain tout le long du chemin, aux mendiants qu'elle reconnaissait et à ceux qui lui étaient inconnus, en éprouvant un grand sentiment de fierté en voyant son père sourire. Une fête en ces temps difficiles avait quelque chose d'irréel, comme un mirage d'espoir que tout allait bientôt finir, que les Hommes allaient bientôt triompher des démons qui les pourchassaient impitoyablement, qui les obligeaient à se terrer comme les proies qu'ils étaient.

Et ce fut en tremblant légèrement, à la fois d'excitation et de timidité qu'Alix pénétra au Temple, pour y quérir une place aux rangs de la noblesse avec son père et leur domestique. Comment se sentir légitime pour fouler de ses pieds cet espace qu'elle avait tant envié, qu'elle avait tant vu comme un rêve inaccessible, inatteignable ? L'enfant y était pourtant légitime désormais - elle était une Beauharnais de plein droit. Pourtant, le guérisseur et sa femme ainsi que le Capitaine lui manquait, mais elle savait qu'ils ne seraient pas à ses côtés aujourd'hui. Il serait toujours temps de venir les saluer ensuite !
Les yeux brillants, toute sage malgré l'envie de se lever sur son banc pour mieux voir la scène, Alix assista ainsi à la cérémonie du Sacre du Roi. Son serment était émouvant, important - il était du côté des bonnes gens, du côté de ceux qui priaient, qui protégeaient la foule de la mort féroce qui rôdait au-dehors. Elle le trouvait magnifique, la couronne étincelante, dans sa naïveté d'enfant des rues ; et elle serrait la main des adultes qui l'accompagnaient, pour ne pas crier de joie au beau milieu de la cérémonie.

Enfin, ce fut permis. L'enfant s'égosilla à ne plus pouvoir parler, les mains plaquées sur ses oreilles fragiles saturées de bruits. Elle hurla de joie avec les autres, emportée par une fièvre joyeuse et remplie d'espérance ; et ce fut d'un pas dansant, joyeux, que la jeune noble se dirigeait vers la place des pendus, reconvertie pour l'occasion en place de joutes.

Sur le chemin, tout n'était que bannières, banderoles, tapis d'herbes odorantes, pavés immaculés. Les troubadours et les ménestrels faisaient entendre leurs chansons, tandis que la foule, vêtue de ses plus beaux atours, se dirigeait toute dans la même direction. Et si Alix avait l'espoir d'apercevoir vainement sa mère, Louise ou même les enfants, aucune mélancolie ne pouvait aujourd'hui, à cet instant, percer ce merveilleux sentiment de bonheur total que la fillette éprouvait.

Mais arrivée à la place, elle dût s'arrêter. Le spectacle était saisissant à ses yeux encore impressionnables, et elle croisa les yeux d'Aymeric.

- "Papa, papa, Célestine, regardez ! Il y a tant de monde déjà !"

Elle aurait se précipiter, courir, mais une douce pression sur sa main la fit se calmer un peu, à grand-peine. Et ce fut en jouant des coudes pour traverser la population massée autour de la lice que sa servante l'aida à gagner les tribunes nobles, pour s'installer plus à leur aise. Mais l'enfant ne pouvait guère tenir en place, aussi se précipita t-elle en direction de son père à nouveau, alors que le Roi venait d'arriver et que, déjà, les nobles en armures venaient présenter leurs respects à leur nouveau seigneur.
Les étendards lui étaient complètement inconnus, mais la fillette n'en avait cure. Ici, seul papa comptait. Et puis aussi ses amis, bien sûr - elle avait hâte de croiser Louise pour manger des brochettes de poissons avec elle.

- "Papa, on va se présenter au Roi, vraiment ?"

Elle serrait nerveusement la boite préparée à l'intention de leur suzerain. Alix, la va-nu-pieds qui crevait de faim, l'enfant élevée à l'ombre d'un bordel du Goulot, allait être présentée à un grand seigneur, si grand que l'éclat de sa couronne l'éblouissait.
Nerveusement, Alix vérifia que sa robe n'était pas froissée, puis, alors qu'un homme de la maison Sombreval s'éloignait, ayant fait don d'une magnifique monture, ce fut leur tour. La petite fille imita son père en s'agenouillant, le laissa soigneusement parler ; puis, à son tour, elle prit la parole.
Sa voix était un peu chevrotante, mais claire et et un peu aiguë. Ses joues, d'un beau rouge tomate, la brûlaient un peu. Son cœur battait la chamade. Quelle revanche sur la vie elle prenait désormais !

- "En votre honneur, Majesté, j'ai fait préparé cette lance, pour qu'elle vous protège si vous en avez le besoin."

Elle avait appris la phrase par cœur pour ne pas bafouiller - mais même ainsi, la jeune Alix se sentait au bord de l'évanouissement. Le Roi avait écouté sa phrase - déjà en soi, c'était un exploit qu'elle n'aurait jamais cru quelques mois avant.
Avec précaution, Alix déposa la boite contenant la lance en argent, en fer et frappée du blason des Beauharnais dans les mains d'un dignitaire compassé, tout bouffi de son importance, avant de s'incliner avec autant de grâce qu'elle était capable. Elle embrassa alors la joue de son papa, lui glissant entre les doigts le ruban rouge aux armoireries de la maison de sa mère.

- "J'espère que ça te portera chance, mon cher papa."

Un simple murmure, mais tant d'amour qu'elle lui offrait, qu'elle désirait lui faire comprendre ! Puis, à petits pas pressés, la fillette regagna les tribunes et sa servante qui avait acheté une friandise à son intention.

Place aux joutes désormais !

Marbrume était plus flamboyant que jamais : les ruelles étaient propres et animées, le sourire sur toutes les lèvres, mais surtout un nouveau Roi venait d’être nommé. Présente aux côtés des siens, la milicienne observa le couronnement avec réserve. La cérémonie était magnifique, elle ne pouvait le nier. Elle ne pouvait pas ignorer non plus les frissons qui parcouraient son corps à cet instant et l’espoir qui grandissait timidement au fond de son âme. Néanmoins, aucun émerveillement, aucun sourire sincère ne vinrent se profiler sur son visage ou dans ses yeux de jade.

Non, Serena contemplait le spectacle avec perplexité. Après tout, ces festivités demandaient, selon elle, beaucoup trop de ressources. Des ressources qui pourraient être bien plus utiles ailleurs et pourtant, voilà encore que la noblesse se pavanait de richesse insignifiante et se cachait derrière des cages dorées. Si elle comprenait bien l’utilité de jour de gloire, elle avait néanmoins espéré que cela soit plus modéré, que le nouveau roi soit plus raisonnable.

Après tout, le retour à la réalité risquait d’être bien difficile après tant d’excès et tous devraient faire face à de nouvelle vague de famine. Légèrement contrariée donc, Serena resta en retrait jusqu’à ce que tous puissent se disperser pour mieux se préparer aux joutes organisées. Résolue, la jeune femme n’avait point hésité à inscrire sa participation, un moyen comme un autre de faire honneur à sa famille et essayer de décrocher la récompense promise. Ceci étant, voir autant de combattants aux allures expérimentées venir s’exhiber ici alors qu’elle ne les avait jamais aperçus à l’extérieur avait le don de l’irrité plus encore.

Heureusement, la vision de son frère aux côtés de sa plus proche amie vint rapidement chasser ces mauvaises pensées pour mieux la faire sourire. S’approchant d’eux, elle les salua une nouvelle fois avec plus de légèreté. Elle ne saurait dire si pour elle, il était plus difficile d’affronter l’un ou l’autre, mais elle devait bien avouer espérer ne pas en arriver là, c’est que les risques étaient bel et bien présents. Mais dans tous les cas, seul l’un des deux s’était réellement inscrit et il s’agissait de son frère aîné.

« Et toi ? Prêt à montrer de quoi les Rivefières sont capables ? »

Lança-t-elle dans un sourire taquin avant de le voir s’avancer vers une connaissance à lui. Scrutant l’homme avec curiosité, elle laissa finalement son frère faire ses retrouvailles pour mieux rejoindre les tribunes dédiées aux participants. De là, son regard se posa assez naturellement sur Ulysse de Sombreval qui était désormais plus ou moins un membre de la famille éloigné. Si elle ne pouvait décidément pas déclarer le connaître, elle pensait néanmoins en savoir assez pour être à l’aise à ses côtés.

« Ulysse, quel plaisir de vous voir ici… »

Venant prendre place à ses côtés, la milicienne lui adressa un simple sourire avant de poser son attention sur l’arène et de jauger les deux chevaliers présents.

« J’ai hâte de voir vos talents à l’œuvre. »

Brièvement ses yeux croisèrent enfin celui d’un ami qui l’avait déçu lors de leur précédente rencontre. Aymeric faisait évidemment également partie des participants. Légèrement mal à l’aise, elle ne sut réellement comment l’aborder et préféra, pour l’heure, l’ignorer. D’autres visages familiers étant aussi présents que cela soit dans ces tribunes ou les autres. Si certains parvenaient à la faire sourire, d’autres beaucoup moins. Toujours est-il qu’elle préféra finalement se concentrer sur les duels à venir.

♪♫♫♪

« Je peux voir une chose longtemps absente dans le regard des citoyens : une lueur d’espoir. »

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Murmures. Soupirs. Litanies. Prières. Cesare et ses confrères animaient le Temple par le refrain ténu mais envoutant de leurs chants religieux, à peine soufflés à travers la commissure de leurs lèvres, mains jointes en signe de communion avec les Divins tout en appelant ces derniers à bénir celui qui allait devenir le souverain de l’humanité et le flambeau de l’espoir. Ainsi donc la flamme renaissait, plus brûlante que jamais, en ces lieux consacrés. L’humanité renaissait de ses cendres et faisait face à l’adversité, pansant ses blessures et s’armant pour chasser les démons qui menaçaient son existence. Dans cette sainte croisade, il était primordial que l’ascension de celui qui allait guider le peuple soit approuvée par la Trinité, d’où l’importance symbolique de cet événement. Le sacre vibrait d’une énergie spirituelle si puissante que le bon prêtre pouvait sentir des frissons envahir son corps et faire dresser les cheveux de sa peau. Le parfum de l’encens dont les voluptueuses lianes de vapeur flottaient à travers le plafond de la maison des Trois énivrait les narines de Cesare, les chants quant à eux lui donnaient envie de secouer la tête de gauche à droite en rythme avec les réverbérations des voix contre les murs peints. Rares étaient les événements où on pouvait sentir les Dieux si proches, inspirant une telle énergie qu’on croirait que les Trois eux-mêmes se dressaient autour du Duc, approuvant son ascension au trône des survivants.

Être un membre du Clergé donnait l’avantage d’être dans les premiers rangs pour témoigner de cet événement historique et Cesare ne pouvait que remercier la Trinité pour lui avoir accordé le privilège de porter son regard sur la nomination du souverain, un événement qu’il n’aurait espéré voir de ses yeux de mortel en des circonstances ordinaires. Hors tout ici tenait de l’extraordinaire, car il fallait bien que l’homme dépasse les limites instaurés par la chair et le sang et s’hisser à la suprématie spirituelle pour atteindre le domaine astral où il pourra puiser la force nécessaire pour évoluer et surmonter les ténèbres qui rongeaient la dernière muraille.

Quand le serment fut prononcé et que la foule acclama Sa majesté dans une liesse sans pareille, l’ascète croisa lentement ses mains sous sa ceinture, un petit sourire éclairant ses traits épuisés. Les préparatifs cérémoniaux furent particulièrement ardus et les responsables du Clergé s’étaient montrés si exigeants et autoritaires qu’ils en feraient pâlir d’envie les sergents les plus autocratiques de la Milice. Cependant Cesare était loin de s’en offusquer et n’était pas du genre à se plaindre pour des corvées à but religieux, loin de là ! Il ressentait une grande fierté et surtout la satisfaction Ô combien gratifiante du travail bien fait. Qu’importe s’il ne recevait ni écus ni remerciements, il savait très bien que les Dieux lui réservaient déjà une récompense à la hauteur de ses efforts dans leur domaine céleste.

Mais son rôle était loin d’être terminé.

Les badauds et autres curieux s’écartaient légèrement en la présence du prêtre, respectant ainsi la figure du Clergé pour lui donner libre passage à travers la foule compacte et bruyante de citadins de toutes classes qui s’étaient agglomérés comme un essaim d’abeilles au cœur de la tristement célèbre place des Pendus, dépossédée de son terrifiant symbole de justice. Cesare veillait à ce que personne ne le bouscule par inadvertance car entre ses mains reposait un précieux objet de nature, vous l’aurez deviné, symbolique. Un petit bol en argent terni gravé d’arabesques complexes représentant un poisson, un serpent et un cerf trônait dans une main tandis que la seconde tenait ce qui semblait être une crosse en bois de chêne dont l’extrémité se terminait en longs filaments qu’on pourrait attribuer à une origine animale. Les connaisseurs sauront qu’il s’agit d’un outil traditionnel consistant à récolter une eau consacrée par maintes prières et décoctions particulières afin d’être aspergées en récitant quelques versets protecteurs, pratique très prisée pour réconcilier les temples profanés par d’odieux païens ou pour envelopper un heureux élu d’une aura protectrice. Le liquide en soit était une eau mélangée à du sel, signe de préservation, de conservation et de protection, d’un soupçon de cendres dont la symbolique était la rédemption et l’humilité, et enfin un peu de vin pour représenter force, vitalité et chance. Quelques gouttes de venin de vipère et de bois de cerf furent ajoutées pour en appeler aux dieux eux-mêmes et quémander leurs louanges et leurs faveurs par simple application de cette eau sacrée.

C’est donc avec ce trésor entre les mains et accompagné de quelques disciples scandant à l’unisson des chants honorifiques de renaissance et de sacralité que Cesare arpenta la tranchée humaine qui s’ouvrait devant lui afin de s’approcher de l’arène où les glorieux combattants allaient tester le métal de leurs armes et de leur volonté. Nul doute que plusieurs regards curieux seraient attirés par cette procession religieuse mais peu seraient dérangés par la présence purificatrice du Clergé, à moins que certains ne voulaient en profiter pour exercer quelques vicieux larcins en douce sous couvert de joie festive.

Atteignant finalement les gradins où les futurs champions se préparaient pour leurs prochaines joutes, le jeune ecclésiastique s’éclairci la main avant de déclarer sur un ton fort et solennel, défiant la sonorité des cris de joie et des rires :

« Mes seigneurs ! Puisse cette journée soit marquée par le sceau de la gloire, de la grâce, de la fortune et du bonheur. Puisse les Trois vous accorder leur Faveur et vous protéger contre le mal et le doute. Ceux qui n’oublient pas leurs Créateurs et plient le genou en leurs Noms savent qu’ils ne craindront ni démons ni sorcellerie ! Les Dieux protègent et les Dieux veillent. »

Levant lentement la main droite, paume dévoilée en signe de paix, il laissa ses mots s’ancrer un instant dans l’esprit des participants, son regard couleur d’ambre s’aventurant dans les yeux qu’il croisait et dont il en reconnaissait quelques-uns sans pour autant se défaire de son impassibilité cérémoniale.

« Enfants de la Trinité ! Je vous rappelle que nous ne connaissons le bonheur que grâce aux Trois tout comme nous ne connaissant la victoire que grâce aux Trois ! Si vous désirez recevoir la bénédiction de nos protecteurs célestes, approchez et agenouillez-vous l’arme au clair. Rappelez-vous que l’humilité n’est point un vice et que celui qui laisse les Dieux guider sa lame ne saurait souffrir de l’adversité la plus retorse. »

Sur ses mots, le père spirituel plongea sa crosse dans l’eau consacrée, humidifiant ainsi le bout sensé recouvrir les volontaires des protections célestes contre le mal, le doute, les péchés et la peur. À présent il comptait uniquement sur les participants pour prouver leur foi et s’approcher pour bénéficier des bonnes grâces du Clergé.

[Event] Les Joutes Royales - Introduction Ewn8ozn-55ea6d8

Tous les esprits étaient à la fête. Tous n’avaient que sourire sur leur visage. Les couleurs ornaient les rues, l’atmosphère était chargée de bonheur. L’on riait. L’on criait. L’on pleurait… de joie. D’allégresse. Et ce sentiment qui ne quittait pas Enguerrand.

Injustice !

Il n’arrivait pas à se retirer cette souillure de la peau. Il n’arrivait pas à interrompre le son incessant de son cœur dans son crâne. Comment cela était-il possible ? Comment cela avait-il pu se produire ? Dans quel monde abject était-il né ? Pourri jusqu’à la moelle. Tombant dans la déchéance la plus répugnante. Tous ces gens qui marchaient dans le noir, croyant voir au loin une lumière salvatrice… Lumière qui ne faisait que les attirer plus proche d’un précipice sans fond. Un gouffre dans lequel ils s’apprêtaient tous à plonger. Et nul ne savait ce que le fond de l’abîme recelait.

Imprudents !

Avait-il était lui-même aveugle de penser que le peuple savait où il marchait ? Non. L’événement qui allait se produire aujourd’hui, celui-là même que tous attendaient dans une euphorie d’ivresse, signait leur fin à tous. Mais tous l’acclamaient et lui ouvraient les bras. Etaient-ils prêts à embrasser la Mort et à l’accueillir dans leur quotidien pour des temps immémoriaux ? Ils ignoraient tout… Tout.

Assis sur son lit poussiéreux, dans sa chambre du Temple, il observait l’unique flamme qui illuminait la pièce. Dans un petit miroir, ses traits ne semblaient qu’être de pierre. Inexpressifs. Il n’y avait pas même une lueur dans son regard qui puisse l’inciter à se lever et à franchir le seuil. Il serait incapable de lutter contre l’adversité, ni d’émettre une quelconque opinion. Quels que soient ses flots de paroles et de conseils, de bravades et d’avertissements, ils se briseraient sur leur conscience vampirisée. Seul, il ne pouvait rien y faire. Et quand bien même, que pourrait-il proposer en échange ? Seuls les Trois pouvaient intervenir, il le savait.

Impuissant…

Que l’âme de cet homme soit maudite.
Qu’elle ne trouve aucun repos.
Qu’elle erre à jamais pour comprendre ses actes.

Sa haine déversée dans une multitude de malédictions à l’encontre du futur Roi, sa respiration se fit plus calme. Celui-ci priait, si proche de l’endroit où il se trouvait… Qui priait-il ? La Trinité l’écouterait ? Bien sûr que non. Mais tout cela se passait ici. Il se leva subitement, jetant sa soutane passablement délavée pour sa toge des grandes occasions, d’un vert sombre au liseré noir dont les boutons s’apparentaient à des yeux reptiliens. La raison l’appelait à réfléchir…
Et s’il s’agissait là d’une opportunité ?

Enguerrand était arrivé au moment où il prononçait son serment. Son premier mensonge en tant que Souverain approuvé des Dieux. Mais le prêtre ne serait pas dupe. Jamais. Le reste de la cérémonie lui laissa un goût amer, tandis que lui-même mentait à ses interlocuteurs, effrontément, avec ce sourire indélébile. Accessoire dont la maîtrise et les effets n’étaient plus un secret. Il lui fallait du temps pour organiser ses pensées…

◈

C’est avec un nouvel élan qu’il s’était rendu sur place. Manquer cet instant historique et culturel était impensable. Non pas pour ce que l’on y célébrait, mais pour sa présence. Il avait d’ailleurs jugé bon de se faire accompagner des enfants du Temple. Pleins d’entrain et d’innocence, ils ignoraient naturellement l’impact que tout cela aurait sur leur avenir. Mais en l’instant, bien que chahuté et maintes fois abordé par des visages reconnaissables ou des inconnus, il se mêlait dans la masse. Ainsi serait préservée sa naturelle réputation au travers des différentes classes qui composaient le peuple et ses « élites ». Il traversa les échoppes marchandes qui s’étaient placées là pour l’occasion, poussé toujours davantage vers le lieu tant convoité par les garnements. Il préféra rester au bas des marches, confiant alors la ribambelle de gamins à un confrère qu’il croisa par hasard ; bien incapable de refuser.

Enfin seul, ses mains trouvèrent refuge dans ses larges manches et son regard balaya l’endroit. Il aperçut les premiers adversaires en train de se préparer, son Frère Cesare en train d’honorer les Dieux et Leurs Créations, puis les miliciens qui devaient assurer la sécurité. Enfin apparut le scélérat, l’infâme et le traître, noyé dans ce miasme de bonheur ineffable.

C’est à pas lents qu’il naviguait entre ces gens d’une ardeur peu commune, incapable de rester en place. Son regard le plus souvent porté sur la tribune d’honneur, mais également sur l’action qui allait se dérouler ici.