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| [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] | |
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Mathilde VortigernFermière
| Sujet: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Mar 11 Juin 2019 - 20:39 | | | 2 avril 1166 Plateau du Labret, aux environs d'Usson Entouré par de solides mais rudimentaires palissades et d'imposantes tourelles de guet, le plateau du Labret, garant de la survie de Marbrume et des environs, connait une journée paisible. Revenu à temps pour les semailles, le soleil offre aux quelques trois milles âmes qui le peuplent une journée chaude, parfaite pour contempler les premières pousses émerger paresseusement de la terre et partir à l'assaut du ciel, là où les oiseaux chassent le moindre insecte qui viendra remplir les petits estomacs des nouveaux nés. La journée est idéale pour Mathilde, qui, tôt le matin, a quitté sa ferme pour se rendre à Usson à pieds. Depuis quelques semaines, déjà, elle partage son quotidien et son terrain de jeu avec quelques travailleurs envoyés par l'Ordre de l'Astre d'Azur, travailleurs qu'elle forme avec toute la passion qui l'anime lorsqu'il s'agit pour elle de partager les secrets de son métier. Avec eux, elle abattra un travail considérable et, elle le sait déjà, pourra au moins doubler son rendement d'ici à la fin de la saison. Sur le chemin d'Usson, Mathilde rêvasse à tout ce que cela signifie. Plus de nourriture pour le Duc, et pour la ville. Plus de nourriture aussi pour les nécessiteux. Un peu plus d'argent pour elle, argent qu'elle investira dans sa ferme pour en maximiser l'efficacité et tirer le meilleur de sa terre. ...
Le sourire rêveur de Mathilde s'étire, tandis que la brise caresse son visage, dont le teint a pris les couleurs caractéristiques des gens de la terre. Les temps sombres semblent parfois si lointains. Pourtant, la menace de la Fange est quotidienne. Une relève de garde mal gérée, un trou dans la défense, un fangeux plus aventureux, et c'est la catastrophe. Récemment, on a rapporté la rumeur d'une attaque dans le coin de Najac, attaque heureusement évitée de justesse grâce aux chiens qui y sont utilisés pour prévenir du danger. Tandis que ses pains cuisent dans le four commun d'Usson, Mathilde en profite pour prendre des nouvelles. C'est ici, sur cette petite place où l'on se retrouve le temps d'une cuisson de pain, que les ragots sont partagés. Une nouvelle relève chez les miliciens d'Usson, la petite Dufour qui a mis au monde son premier enfant, la disparition momentanée du fils Lepage, les joutes qui se préparent en ville... Les joies sont partagées, tout comme les peines qui pèsent tout à coup moins lourd sur les épaules de celle qui pleure un proche. On se console, et on rêve de jours meilleurs tout en accueillant avec joie chaque petit bonheur que les Trois placent sur le chemin. La fermière est connue à Usson. Elle a fait partie de ceux qui n'ont pas quitté le Labret, lors de la Fange. On la sait profondément attachée à la terre qui l'a vue grandir. On l'a vue évoluer, depuis l'automne dernier, passant d'une veuve éplorée à une femme d'affaires. D'une humeur égale et pleine de projets, le printemps semble lui apporter une énergie qu'on ne lui connaissait pas jusqu'ici. Il faut dire que reprendre la ferme familial, quand on est une femme seule, n'est pas chose aisée. Pourtant, elle a su s'entourer sans perdre de vue son unique objectif : cultiver ses terres pour en tirer le meilleur. A-t-elle seulement remarqué les deux paires d'yeux posées sur elle tandis qu'elle parle avec une vieille dame de semences qu'elle pourrait lui donner? Absolument pas. A Usson, Mathilde se sent en sécurité. Si elle pense y connaitre la plupart des résidents, elle sait aussi que de nouveaux venus ont rempli les maisons et les fermes aux alentours. Deux visages inconnus, ça n'a rien de surprenant. ... Deux visages inconnus qui la suivent sur le chemin du retour, ça n'a rien de surprenant. Après tout, plusieurs fermes se trouvent au sud-est d'Usson. Tandis que les pains, encore chaud, dégagent une odeur alléchante depuis la sacoche dans laquelle elle les a rangés, Mathilde presse un peu le pas et fait mine de contempler le paysage, jetant, de temps à autre, un regard par dessus son épaule. Impossible de se convaincre que ces hommes sont inoffensifs. Quelque chose dans leur allure indique qu'ils sont en chasse, et que la proie se trouve devant eux. Les deux hommes se rapprochent peu à peu, allongeant le pas. De toute évidence, plus grands et plus costauds qu'elle. Tandis qu'une petite boule d'angoisse se fraie un chemin quelque part dans ses entrailles, Mathilde fait le compte. Le temps de lâcher sa sacoche, de prendre l'arc qu'elle a dans le dos, d'y encocher une flèche, ils seront sur elle. Son coeur accélère dans sa poitrine. La peur s'infiltre en elle, s'emparant, tel le venin du serpent, du moins recoin de son être. Elle court, maintenant. Sa robe vole dans l'air, ses pieds lui paraissent légers. Son chignon se défait un peu plus à chaque foulée. La ferme est si proche, et si loin à la fois. Impossible de faire demi-tour pour retourner à Usson, où elle trouverait de l'aide. Elle court, droit devant elle, sans plus regarder en arrière. Plus vite Mathilde, plus vite.Une main attrape son épaule droite. Coupée dans son élan, elle lâche sa sacoche et dégaine la dague qu'elle porte toujours à la ceinture, mais une autre main, ferme, agrippe son poignet pour le tordre. La douleur l'oblige à lâcher sa précieuse lame, qui tombe sur le sol poussiéreux. La fermière se débat, cherchant désespérément à se libérer des prises de l'inconnus qui lui fait maintenant face et la pousse assez fort pour la faire tomber de tout son poids sur le sol. Elle n'a pas le temps d'amortir la chute. Assise par terre, à moitié assommée, une douleur sourde remonte le long de son dos et lui coupe le souffle. Ses yeux écarquillés à cause du choc se posent sur la dague trop loin d'elle, et son arc qui l'a rejoint, dans un mouvement dont elle n'a pas eu conscience. Tout s'est passé si vite. Elle grimace, son souffle revient, rapide, saccadé. Deux inconnus, menaçants, la regardent maintenant de haut en ricanant. L'un des deux s'avance vers elle, un coutelas à la main. Il s'accroupit tandis qu'elle ramène les pans de sa robe brune sur ses jambes. - Salut p'tite dame. On va t'accompagner à ta ferme et tu vas bien nous accueillir. Si tu cries, si tu cherches à t'enfuir, si t'essayes de nous entourlouper, je t'égorge. La voix est calme, très contrôlée, le chasseur est en pleine possession de ses moyens, contrairement à la fermière, aussi vulnérable qu'une enfant. - Je vous en prie... j'ai rien... pas d'argent... pas de nourriture... La ferme est vide, pour la journée. Les ouvriers ont leur congé, et les mercenaires de l'Ordre accompagnent le convoi vers Marbrume. Ils seront de retour dans un jour ou deux. Si elle s'exécute, personne ne pourra venir à son secours. Son seul salut est de réussir à regagner Usson. Ou de marcher suffisamment lentement que pour espérer être vue. Le second homme s'approche, l'air mauvais, et l'attrape par le bras pour l'obliger à se relever. La fermière étouffe un gémissement, tant le fait de déplier son corps est douloureux. - J'espère qu'on t'a pas trop abîmée p'tite dame, j'compte bien profiter de ta chaleur. Grouille. Son sourire est emprunt de lubricité. - D'accord. Ok. Mes pains. Où sont...? Elle est interrompue, recevant une sacoche dans l'estomac, sacoche qu'elle agrippe de ses deux mains, comme s'il s'agissait d'un bouclier qui la protégerait. Au fond, tout au fond, se trouve un couteau qu'elle a troqué contre quelques légumes au forgeron. Sa chance. Dans un geste lent et douloureux, elle met sa sacoche en bandoulière et fait un pas, puis un autre. Prendre le temps d'apprivoiser la douleur, détendre ses muscles qui se sont contractés sous le choc. Ensuite seulement, elle pourra tenter quelque chose. Silencieusement, Mathilde implore les dieux de lui envoyer de l'aide. Derrière elle, l'un des deux inconnus a ramassé sa dague et son arc, tandis que l'autre la soutien toujours par le bras, lui indiquant d'avancer. Terrorisée par ce qui l'attend, Mathilde tente, tant bien que mal, de garder son sang-froid. Juste un peu d'aide...
Dernière édition par Mathilde le Mer 10 Juil 2019 - 18:47, édité 2 fois |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Jeu 13 Juin 2019 - 18:29 | | | Un vieil homme était installé confortablement au pas de sa porte, dans son fauteuil à bascule, une petite couverture posée sur les genoux, profitant du bon temps et respirant le plein air en pétunant tranquillement sa pipe. C'était Adelbert Mornever, bavard de haute volée, ce vieux paysan remplissant l'une de ces maisons autrefois vides du Labret. Originaire de l'Obliance, c'était l'un de ces éclopés trop vieux pour s'étriller les vertèbres en cultivant la terre, laissant la besogne à présent trop lourde pour son beau-fils.
Sa maisonnette se trouvait à une petite vingtaine de minutes à pieds de la ferme Dumas. Entourée de quelques arbres, et toute proche de la route, elle était flanquée d'un poulailler ; un coq et des poules grattaient la terre, non loin d'oies au mauvais caractère comme toutes prêtes à becqueter les intrus. Dans l'allée, non loin devant Adelbert, se tenait la grande silhouette du jeune Lupin, le front en sueur sous des mèches noires, chemise crasseuse faite de lin sur les épaules, les manches retroussées. Le Coutilier auquel il était rattaché s'était montré grandement inquiet pour la frilosité du vieux Mornever, si bien qu'il affecta l'un de ses patrouilleurs, le bien nommé Alcide, à la récolte et à la coupe du bois. Ce dernier soulevait une hache de bûcheron par dessus sa tête pour l'abattre aussitôt sur le billot en un tchack sonore. Son écho résonnant à répétition pour l'horizon, il fendait le rondin en deux, puis en quatre, pour grossir le monticule de tronce et de petit bois posé à ses côtés. On bûchait, par ici, Alcide se penchant sur une énième buche pour la saisir, pendant que la voix du vieil homme comblait la rudesse du labeur en lui contant moult désastres et mésaventures. De ces histoires qui lui valurent une patte brisée, le genre de confidence qu'il ne lui serait jamais venu à l'esprit de raconter à un étranger venu de la Cité. Mais voila, Alcide rabaissant continuellement Marbrume, les deux compères s'entendant bien, c'est avec un certain plaisir, l'air d'apprécier sincèrement la compagnie, que Aderbert, finissant de cracher quelques stratus de fumée, conclu son monologue :
- Retenez bien ça, m'garçon. Aux infirmes c'est l'occupation qui manque, c'est pas la santé… Ils la garderont leur chaude-pisse, leur vérole, tout leurs tubercules. Ils en ont besoin ! Non, c'qui leur faut c'est d'la distraction.
Le rôle du paillasson admiratif, celui qu'affichait Alcide, était à peu près le seul dans lequel on se tolérait d'humain à humain. La vérité, c'était qu'il était épuisé d'être affecté de jour comme de nuit sur les chemins de ronde. Ca ne l'ennuyait pas vraiment de rendre service à Adelbert, mais il ne se souvenait simplement plus de la dernière fois où il profitait d'un bon sommeil, ne rêvant plus qu'à rejoindre la fourrure consolante de sa paillasse.
- M'étonne pas que vous soyez seul, Mornever. - HAHA ! Plus on est haï, je trouve, plus on est tranquille... - Vrai que ça simplifie les choses, opina Alcide, abattant lourdement sa hache sur l'énième bûchette.
Un sourire s'étirait sur un visage ridé, témoignant d'une quiétude qui, aussitôt, vint à se volatiliser. Adelbert leva les yeux vers la route, plissant des paupières... Se penchant, il fit grincer son siège à bascule, son regard furetant le paysage entre le feuillage et le tronc des arbres, plus loin, là-bas, sur la route.
- Dites donc, Lupin. V'nez voir un peu par ici...
Alcide épongea la sueur perlant sur son front d'un revers du bras, puis reposa méthodiquement la hache contre le billot. L'air intrigué, il rejoignit donc le vieil homme, celui-ci lui désignant une direction d'un geste du menton. Et lorsqu'il détourna le visage à son tour pour lancer un rapide regard sur le chemin, Alcide fronça sitôt les sourcils...! C'était la veuve Dumas, par là-bas, qu'il voyait bousculée, violentée par deux roublards. S'en prendre à celle qu'on disait paisible, généreuse et sans histoire au sein de la garde, était sorte d'injustice insupportable aux yeux d'Alcide. Ils ne se connaissaient certes pas, mais patrouillant depuis des semaines dans le Labret, il avait déjà pu croiser son regard. Les miliciens, se taisaient toujours quand le Coutilier lançait une œillade vers la ferme Dumas, comme s'ils étaient soudain hors d'haleine, le souffle coupé, parce qu'elle était femme jeune et désirable, autant qu'elle semblait forte et digne. L'envoyer au massacre ou l'abandonner à la pulsion malsaine des faibles, c'était du pareil au même. C'était pour ça qu'il était là, Alcide. Lui, disait qu'on ne touchait pas aux femmes ; qu'elles étaient choses du sacré, ce n'était pas plus compliqué.
- Adelbert... J'ai besoin de votre fourche. - Faites, faites... Mais c'est vot' destin, pas le mien ! Fit le vieux en attrapant sa canne pour se hisser sur ses pieds.
Mornever s'éclipsa à son rythme, la pipe au bec, boitant et courbant l'échine sous le poids des âges avant de refermer sa porte derrière lui dans le fracas métallique des verrous. Quant à Alcide, il reprenait possession de sa cape poussiéreuse, la soulevant sur ses épaules, arborant maintenant des couleurs forestières dont les rebords usés partaient en lambeaux. Sa main agrippa le manche d'une fourche aux pointes rubigineuses reposées sur le mur de la maisonnette, puis il fit volte face en direction de la route. De cette façon, lorsque la fermière et ses tortionnaires arrivèrent à hauteur du sentier menant à la petite battisse, Alcide leur fit barrage, le drapé de sa cape se balançant encore quand il s'immobilisa devant eux. Combattre était déjà une victoire en soi, mais c'était Vaincre que le jeune Lupin voulait, posant lourdement la hampe de sa fourche à même la terre battue, les pointes vers le ciel, tandis que, de sa main libre, il dégainait lentement le fil de sa lame courte. Alcide s'amarrait, s'ancrait sur leur passage.
- T'es seul ! Retourne sur tes pas, l'milicien, t'as aucune chance ! Beugla l'un des bandits en renforçant son étreinte sur la fermière. Les yeux vert-mousse d'Alcide détaillèrent alors le ciel, l'espace d'un instant, comme s'il déplorait la bêtise ambiante, avant de les reporter sur eux aussi fulgurants que le trait d'une arbalète.
- J'ai toujours su que la merdaille dans votre genre était majoritaire ; que c'est bien forcé qu'ils gagnent. Alors venez donc. Venez me foutre une branlée ! - Qu'est-ce que t'attends, tue-le ! Ordonna le premier. - J'vais t'saigner comme un goret, sombre imbécile ! Grogna le second, laissant son comparse et la jeune Dumas en arrière, pour s'élancer en direction d'Alcide, le coutelas à la main.
Fort de ses nombreux mois passés dans la milice, le Lupin baissa sa fourche, tombant aussitôt un genou à terre pour s'y appuyer, le manche fermement maintenu à l'intérieur de son bras vint soudain se tendre pour porter l'estocade droit dans le ventre du bandit ! Scrotch ! Celui-ci arrêté net, comme un sanglier qui dans sa course s'empalerait sur un pieu. Trois fines et longues pointes surgirent alors de ses reins, le transperçant de part et d'autre pour éclabousser le tablier de la fermière de quelques perles de sang.
Ce n'est que quelques jurons - foutrecouille et palsembleu - plus tard que le corps du bandit s'écroula genoux au sol, l'air agonisant, ses prunelles rivées sur les piques dont il était traversé ne parvenaient à y croire. Sans perdre de temps, Alcide le laissa à son sort, portant les ombres d'un regard en direction de l'adversaire suivant, poursuivant sa marche implacable qui l’entraînait auprès du malsené qui séquestrait encore la jeune femme... Étrange, c'était facile... Trop facile.
- T'approche pas, ou j'tranche la gouge ! Fit l'homme en pressant sa lame sous le cou de la paysanne, nerveux, lui entaillant superficiellement la peau depuis la pointe de son couteau. Il s'agrippait à son corps comme un serpent constricteur. Il ne la quittait pas de l’œil, à dire vrai, son haleine fétide soufflant sur sa joue, l’étouffant de son bras qui la pressait contre lui comme pour tuer la moindre de ses tentatives. C'est alors qu'il écrasa son nez tout contre la pommette de la veuve, laissant échapper un murmure : C'est pas maintenant qu'il faut gueuler, p'tite dame, non-non-non, tu l'feras seulement dans le fossé d'ton champ, quand je vais t'y bourrer l'arrière train.
Sous les invectives de l'homme, Alcide s'était immobilisé, baissant sa lame tout en levant sa main libre devant lui. Un geste qu'il voulait rassurant pour lui signifier qu'il ne tenterait rien de stupide. Maintenant qu'il était à proximité, juste à quelques pas devant eux, le regard sombre du jeune Lupin se fit plus tendre pour l'otage. Ces yeux-là, s'ils savaient parler, lui disant qu'il était son allié, que tout cela ne durerait pas une éternité.
- La vie toute crue n’est pas encore assez pourrie ? Vous compliquez les choses... Fit Alcide pour le bandit. Il aurait voulu poursuivre, peut-être commencer à négocier, persuader, trouver une alternative, mais...
Mais qui pensait qu'un simple coup de fourche, aussi dévastateur soit-il, pouvait terrasser l'homme si robuste qui gisait encore derrière lui ? ... L'homme enfourché se redressait peu à peu, extirpant lentement les pointes qui l'empalait de part et d'autres, grimaçant de douleur chaque fois que sa carcasse laissait s'échapper de son précieux fluide. Alors, doucement, ainsi agenouillé derrière Alcide, le bandit se releva aussi maladroitement qu'un pantin désarticulé, titubant dans sa direction, la main pressée sur son ventre pour en contenir le flux qu'il vomissait.
- On en a pas fini toi et moi... Urgl...
C'était la guigne qui frappait. La poisse ! Le bandit développa ses ballants comme s'il s'agissait d'une paire d'ailes, surprenant le milicien en l'attrapant par le tronc, lui emprisonnant les bras sous les siens ! Alcide rugissait, désormais entravé, montrant les dents tandis qu'il cherchait à s'en défaire. Quant alors, le pervers qui s'en prenait à la fermière se mit à rire, s'écartant de celle-ci pour lui écraser son pommeau sur la tempe de son visage, sans doute dans l'espoir de la sonner... Tout allait si vite, un semblant de chaos naissait dans le Labret... L'homme relâcha subitement sa prisonnière pour se ruer frénétiquement sur le jeune Lupin, prêt à lui faire payer son insolence. Quand la crapule l'approcha, Alcide étant toujours restreint à l'intérieur des énormes bras de l'enfourché, il fendit l'air de son poing qu'il catapulta sitôt dans le visage du milicien... Suivi d'un autre... Et d'encore un... Chacune des frappes lui arrachait un gémissement, accusant coup après coup, la tête vrillant d'abord sur la droite, un filet de sang lui giclant des narines ; Courrez m'dame Dumas, fit-il d'une voix faible. Son visage ensuite balancé sur la gauche, une gerbe ensanglantée lui surgissant des lèvres ; Courrez, mpf... Un cri d'affliction plus tard, Alcide encaissait rudement le calvaire lorsque le malsené continuait de marteler ses chairs avec les lourdeurs d'une massue. Courrez, m'dame Dumas... Courrez, c'est bon je les retiens...
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| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Sam 15 Juin 2019 - 1:47 | | | Avancer, lentement, pour avoir une chance, une toute petite chance d'être vue. Avancer, donner à son corps la chance d'apprivoiser la douleur sourde qui lui parcourait l'échine. Avancer, en silence, sans donner la moindre occasion aux inconnus de précipiter leurs plans là, dans le fossé. Avancer. Mathilde regarde l'horizon, se demandant si c'est sa dernière marche dans la campagne du Labret. Si c'est le cas, elle n'aura pas eu le temps de voir la beauté de ses maraîchers en pleine production. Elle manquera les récoltes et les festivités qui les accompagnent. La délicieuse odeur des légumes cuits pour être conservés.
Elle n'a pas dit son dernier mot. Ce n'est pas la marche du condamné que l'on emmène, sous les cris vengeurs de la foule, jusqu'à la place des Pendus. Non. Chaque pas est un peu moins douloureux que le précédent. Les Trois veillent sur elle. Ce n'est pas la fin. Ce n'est pas son heure. Elle n'en a pas fini avec la vie. Ce soir, lorsqu'elle se bercera devant le feu crépitant dans la cheminée, tout cela ne sera qu'un mauvais souvenir.
Une silhouette. Les Trois soient loués! Avec un peu de chance, ce n'est pas le vieux Mornever, dont la ferme est proche, mais bien... elle plissa les yeux pour mieux voir. Un milicien! Quelle chance! Elle jubilait intérieurement, mais ne dit pas un mot pour ne pas s'attirer les foudres des deux hommes. Ils ne ralentissaient pas. Ils ne la relâchaient pas pour s'enfuir. La main agrippée à son bras, le premier des deux l'obligeait à avancer. Que faisait l'homme à la cape? Il s'arrêta et s'installa pour les cueillir.
- T'es seul ! Retourne sur tes pas, l'milicien, t'as aucune chance ! Du regard, Mathilde implora le milicien de l'aider. Il était évident qu'elle était en fâcheuse posture, tout comme il était évident qu'il comptait lui porter secours.
Mathilde étouffa un cri lorsque le premier se fit embrocher, et elle ferma les yeux un instant pour ne pas voir la scène sanglante. Mais la poigne qui se raffermit sur son bras, et le contact glacial du métal sur sa gorge l'obligèrent à rouvrir les yeux. Instinctivement, elle se colla à son agresseur, étirant la tête contre son épaule pour éloigner son cou de la menace, en dépit du dégoût qu'il lui inspirait. Elle détourna la tête lorsqu'il lui murmura ses projets à l'oreille, réveillant en elle une colère qui exploserait bientôt. Pas un mot, Mathilde, pas un geste. Pas encore. Elle croisa le regard clair du milicien. Il avait quelque chose de réconfortant. Elle aurait aimé lui dire qu'elle avait confiance, mais les larmes de rage et de détresse embrumaient les yeux noisettes de la fermière. Ses yeux s'écarquillèrent. Sans lever le bras, elle pointa le milicien... ou du moins, l'homme qui s'était relevé derrière lui.
- Non! Derriè... Trop tard. Le bandit avait saisi le milicien. L'autre relâcha son étreinte et lui donna un coup sur la tempe qui l'envoya à terre. Un pain roula jusque dans le fossé. C'est la douleur de sa hanche, qui avait réceptionné la chute, qui la tint éveillée, bien que sonnée. Elle distingua les trois hommes, entendit les coups, les gémissements, et cette voix étouffée qui lui disait de partir.
Rush d'adrénaline. Mathilde se redressa. Courir? Elle ne le pourrait pas. Elle ne le voulait pas. Les deux brutes ne méritaient pas qu'elle s'enfuient. Ils devaient payer, ils devaient être arrêtés sinon ils recommenceraient. Ils devaient être pendus haut et court. D'une main tremblante, Mathilde fouilla dans la sacoche. Le couteau. Elle l'attrapa, sans sentir l'entaille qu'il venait de lui faire dans la pulpe de son pouce. Elle sentirait une gêne, plus tard. Son poing se ferma sur le manche en bois neuf. Elle prit une grande inspiration et marcha en titubant plus que prévu vers l'être répugnant qui frappait.
Elle sortit le couteau à la dernière minute, à la dernière seconde, et sans autre avertissement qu'un cri de rage, elle le planta entre les omoplates. Il pénétra dans la chair avec une aisance déconcertante. Peut-être parce que la lame était neuve et bien affûtée. Peut-être parce qu'elle y avait mis la force de son désespoir. Peut-être parce que les Trois accompagnaient son geste. Elle recula, récupérant le couteau. L'homme se retourna sur elle, abandonnant un instant le milicien. Un pas, deux pas en arrière. Mathilde déglutit. Gonflée d'audace par l'adrénaline, elle n'avait pas prévu qu'il soit encore debout.
- Salope! Il porta une main à son dos et la découvrit, couverte de sang. Voilà qui expliquait la douleur qu'il ressentait. Il chargea Mathilde en hurlant de rage. La fermière resta figée sur place, tétanisée, jusqu'au dernier moment où, alors qu'il tendait le bras pour la prendre à la gorge, elle fit de même, pointant le couteau au niveau de son ventre. Une fois encore, la lame s'enfonça comme s'il s'était agi d'un simple gâteau fraîchement sorti du four. La main agrippa le frêle cou de la fermière et serra, la faisant grimacer. Elle fit pivoter la lame dans son fourreau de chair, ce qui arracha un cri de douleur à l'homme. Les yeux dans les yeux, chacun observait le souffle de la vie quitter le regard de l'autre.
Mathilde n'avait plus aucune conscience de ce qui l'entourait. Les bruits avaient disparu, la lumière semblait avoir baissé. Son univers entier se réduisant à cet homme, son haleine putride, son regard lubrique, son souffle chaud, ses grognements. Elle suffoquait. Avait-elle permis au milicien de reprendre le dessus sur l'autre? Allait-il arriver pour la sauver? Elle perçut un mouvement du bras libre. Il allait essayer de prendre son couteau. D'un mouvement rapide, elle le sortit de sa chair pour le poignarder dans le flanc. Alors seulement, la prise sur son cou sembla faiblir, à temps pour laisser l'air pénétrer à nouveau dans ses poumons. Mais elle n'était pas encore tirée d'affaires. Le milicien non plus.
Dernière édition par Mathilde le Mar 18 Juin 2019 - 4:46, édité 2 fois |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Dim 16 Juin 2019 - 12:05 | | | A la façon dont étaient proférés les coups, il ne restait guère à son visage qu'un masque baveux... Cette corolle de chair, sa bouche, qui se convulsait et soufflait, poussait toutes les espèces de sons poisseux à travers le fracas des phalanges, ne laissant derrière elles qu'une traînée de bouse, de sueur et de sang. Quelle punition... L’ordure elle, ne cherchait pas à durer. Pas de la même façon. Le corps d'Alcide, traversé de molécules agitées, tout le temps se révoltait contre cette farce atroce de durer. Elles voulaient aller se perdre ses molécules, au plus vite, parmi l’univers. Elles souffraient d’être seulement « nous », ce cocus de l’infini. Le Lupin éclaterait s'il en avait la force, mais ses tortionnaires l'enfermaient là, entravé, atomique en sa peau même, avec sa dignité.
Un cri de rage surgit du fond des tripes fit échos sur la route, celui que poussa soudain la fermière. Un temps suspendu où Alcide releva fébrilement la tête, la face noircie par des entrelacs d'hémoglobine. Une étincelle de vie dans le regard, levant les yeux, et ce fut comme s'il connaissait un bout de son âme ; la veuve Dumas n'avait pas prit les jambes à son cou. Elle était encore là, poignardant de la pointe d'un couteau le dos de son bourreau. Merci.
Si le calvaire avait perduré, peut-être aurait-il fini par en lâcher son épée, sombrant dans l'inconscience, mais le temps n'était pas venu de se perdre en pronostique. Cette prise de risque venait de la mettre en danger ; il fallait saisir l'opportunité d'agir. Du nerf, Alcide, du nerf. Un bruissement de cuir plus tard, sa mitaine se crispa sur le manche de son arme. Le regard féroce, le milicien se fit basculer en avant, prenant l'élan nécessaire pour catapulter sitôt sa tête en arrière. Et bam, le nez du bandit épousait la forme de son crâne, écrasant ses cartilages en un clappement dégueulasse. Ces bras qui l'entravaient furent comme le nœud d'une corde qui doucement se défait. Mais le combattant était comme le chasseur, quoiqu'il fasse jamais il ne devait quitter la proie des yeux. La cible était cet homme qui s'en prenait à la jeune Dumas, et pourtant... Fin bretteur, Alcide fit tourner le pommeau de sa courte lame dans le creux palmaire de sa paluche, puis poussa celui-ci, mains jointes, pour perforer l'homme derrière lui. Encastrée dans sa chair, l'épée devint sorte de levier, Alcide lui triturant ligaments et boyaux comme on plongerait une rame dans sa marmite. Et c'est terminé ; en voila un qui ne se relèverait plus. Son regard, lui, n'avait pas bougé, fixant le prochain sur sa liste. Ressortant sa lame de la carcasse, un arc sanguin giclant sur la route, il laissa l'homme s'écrouler en arrière tandis qu'il marcha d'un pas énergique en direction du dernier bandit.
La fille du Labret était fleur piquante ; alors que son opposant étouffait sa gorge dans son poing, elle lui adressait un second coup de poignard dans le flanc. C'est là que l'ombre d'Alcide, sévère, grandit juste derrière l'homme. Elle l'engloutissait, comme pour le dévorer tout cru maintenant qu'il était à sa merci. Le regard flamboyant ; il ne lui laisserait aucune chance, ni la grâce d'une somation. Ce fut immédiat, sans fantaisie aucune. Un ; Il frappa du plat de sa semelle dans l'angle de sa jambe, le bandit pliant aussitôt genoux à terre comme un priant. Deux ; Maintenant qu'il était à terre, le Lupin l'attrapa par les cheveux, lui tirant ensuite la tête en arrière pour lui plonger la pointe de sa lame au plus profond de sa gorge, faisant de son corps son énième fourreau.
- Avale ça. Siffla Alcide entre les dents, chaque syllabe crachaillant du sang. Toute sa lame s'enfournait alors dans ce buste si tendre, et la sentence fut immédiate, le milicien tiquant d'une paupière quand il sentit son tranchant lui découper l'intérieur des entrailles. Le Lupin s’immunisait à l'envie de vomir, comme une carapace s'étant formée en lui-même, seulement abîmée par le passage des combats, du deuil, et du temps.
C'est fait.
Alcide avait le souffle lent et profond. Une arcade sourcilière ouverte, le coin d'une lèvre entaillée. Les pupilles dilatées, le corps gorgé d'adrénaline, toisant impassibles le cadavre qui s'écoulait mollement à ses pieds...
Et le silence fut -cet apaisement,- le calme revenant peu à peu dans le Labret. Une nuée de volatiles survolait la maison du Mornever et ses arbres, croassant pendant que la brise tiède soulevaient les mèches sales du milicien. Ses yeux vert-mousse roulèrent alors en direction de la fermière, la détaillant un instant, avant de reposer la chaleur d'une main consolante sur son épaule. Comme pour la soutenir, l'accompagnant tandis qu'elle tâchait de reprendre sa respiration. Au fond, que n'avait-elle pas déjà vu, elle qui sans hésitation avait prit part au combat ? On lui avait raconté des choses sur la veuve, chaque fois que la patrouille passait devant son terrain. On disait qu'elle maniait l'arc aussi bien qu'elle travaillait son champ, mais d'aucun de ces conteurs ne lui avait dit qu'elle pouvait être un adversaire farouche.
- On en crève tous d'être sans légende... Sans mystère, sans grandeur... Dit-il doucement avant de soupirer de soulagement : Merci d'être intervenue.
La beauté, on savait que ça mourrait ; c'est comme cela qu'on sait qu'elle existe. La veuve Dumas faisait partie intégrante du paysage bucolique auquel le milicien s'était attaché. De la même façon qu'Adelbert Mornever, dans un tout autre genre, elle figurait sur une fresque faite des feuillages fanés des frênes et des aunes, des champs de blé, de maïs, travaillant la terre et s'occupant à bouder l'horizon des bourgs. Lui qui souhaitait que rien ne soit défiguré, maintenant, savait qu'il reverrait sa silhouette, la bêche ou le panier à la main, déambuler dans les prairies et sur les chemins du Labret. En vie.
- Vous n'êtes pas blessée ? ... Une femme ne devrait pas à voir ça. J'avertirai le Coutilier pour que nos hommes débarrassent leurs corps du plancher... Le front grigné de plis soucieux lorsqu'il se tourna pour toisé les corps ensanglantés. Jadis, cette époque où il était plus bavard, c'était une phrase qui lui aurait valu l’assentiment de nombreuses femmes du Goulot. Alcide ne cherchait pourtant pas à infantiliser, simplement prévenant, il était de ceux qui savaient que la vision du sang répandu n'était pas sans conséquence sur la psyché.
- Mieux vaut être prévoyant, ils n'étaient peut-être pas que deux à sévir dans le secteur. Je sais que Mornever, le vieil homme qui vit dans la ferme d'à côté, - fit-il d'un geste du menton lui indiquant l'endroit, - méfiant comme il est, est suffisamment barricadé, ses fenêtres sont condamnées, sa porte consolidée, mais vous... ...Mais de vous savoir seule sur la route, je...
Que lui dire si ce n'est qu'il était inquiet ; que de voir son corps étripé malgré tout participerait à son déchirement ?
- Est-ce que mon héroïne permettrait que je la raccompagne ? Une petite ridule lui marqua la joue, étirant un sourire discret au coin de ses lèvres tendrement goguenardes. Il cherchait à la rassurer pour qu'elle puisse retrouver ses esprits, lui épargner la sordidité du massacre. Rengainant sitôt son épée, Alcide lui proposa poliment son bras. |
| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Lun 17 Juin 2019 - 4:13 | | | - ...
Dans un mouvement régulier, la lame brillante s'enfonça dans la gorge, pour plonger dans le buste de l'étranger, jusqu'à en lacérer les entrailles. La poigne s'était relâchée autour de son cou, et Mathilde avait instinctivement reculé, tandis que le condamné, les yeux grands écarquillés, ne comprenant pas pourquoi son corps ne répondait plus à sa volonté, entrouvrit la bouche pour ne laisser passer qu'un souffle rauque qui se finit sur un gargouillis. Elle ne put le quitter des yeux que lorsqu'il s'effondra sur le sol, laissant apparaître, à sa place, la silhouette menaçante du milicien. Gonflé par l'adrénaline du combat, enivré par l'odeur du sang, il regardait, de ses yeux maintenant noirs, le résultat de son oeuvre avec une froideur affolante.
Son couteau à la main, Mathilde se pencha en avant pour reprendre son souffle, irrégulier, superficiel. Son corps réclamait de l'air, ses membres engourdis demandaient leur dose d'oxygène pour continuer de répondre aux ordres du cerveau. Son visage carmin trahissait la tentative désespérée de son corps, qui y avait fait affluer le sang dans un ultime effort pour préserver sa vie, quelques instants encore. Si la lame de son couteau n'avait pas conduit au relâchement de la poigne qui enserrait son cou, si l'épée n'avait pas achevé le travail, elle se serait évanouie, et serait morte quelques secondes plus tard. La peur au ventre, Mathilde se maudit d'avoir autant hésité à tuer son agresseur.
Elle entendit un pas traîner dans la poussière du chemin, puis un autre, et resserra sa poigne sur le manche de son arme. Son coeur battait si fort qu'il menaçait de faire exploser sa poitrine. Ils étaient désormais seuls sur la route, et si lui aussi décidait de tirer profit de la veuve,... La main qui se posa sur son épaule la fit tressaillir. Elle lutterait pour sa vie.
- Merci d'être intervenue.
... ou pas. Pas cette fois. La voix venait de balayer son appréhension. A son plus grand soulagement, le milicien s'inquiétait réellement de son état. Elle se redressa au gré de sa respiration pour regarder l'homme qui lui avait porté secours. Il était de toute évidence plus amoché qu'elle, mais s'en sortirait, à première vue. Avec quelques hématomes qui terroriseraient ses gamins, lorsqu'ils le verraient. Contrairement à lui, elle n'était pas blessée. Elle boiterait sans doute un jour ou deux, peinerait à porter des charges pendant quelques jours, puis son corps oublierait.
- Il faut les décapiter dit-elle d'une voix éteinte. Il faut leur couper la tête sinon... Sinon ils risquaient de se relever en fangeux, et de faire de gros dégâts. À commencer par ce vieux couard de Mornever, qui ferait une cible facile à atteindre, puis Usson, où résidaient des familles déjà éprouvées par bien des drames. Il fallait décapiter les corps et les brûler dès que possible. Le milicien allait sans doute s'en occuper discrètement, et ne s'attendait probablement pas à ce qu'elle le formule.
Mathilde jeta un oeil aux agresseurs, et se surprit à regretter qu'ils soient morts. Elle adressa une prière silencieuse à Anür pour qu'elle les pardonne et qu'elle les accueille dans le Domaine avec toute la bonté du monde. En ces temps où l'humanité courait à sa perte, la moindre vie prenait une importance folle. La moindre mort aussi.
Le silence qui suivait les combat avait quelque chose d'apaisant. Sa respiration finit par reprendre sa régularité et sa profondeur habituelles. La brise légère fit place au vent, dont le souffle fit bruisser les feuilles dans les arbres. Elle récupéra machinalement ses pains, son arc et sa dague, sur le sol, essuya la lame de son couteau sur le tissu sale de l'un des corps et constata avec un certain soulagement que les têtes avaient été séparées des bustes par l'inconnu à qui elle devait la vie. Ce vieux grigou d'Adelbert n'aurait plus qu'à leur offrir un joli petit bûcher. Il le ferait, ne serait-ce que pour éviter d'attirer du fangeux dans les parages. Mais il n'accueillerait pas Mathilde chez lui. Les brouilles familiales avaient commencé bien avant sa naissance, et n'avaient jamais eu de fin. Il ne lui parlait pas, tout simplement.
- Est-ce que mon héroïne permettrait que je la raccompagne ?
Avait-elle bien vu un sourire se dessiner sur ce visage qu'elle avait aperçu à quelques reprises au large de sa ferme, lorsque l'un de ses compagnon d'armes faisait le détour pour récupérer les petits extras de nourriture qu'elle fournissait, en échange d'un regard attentif sur son exploitation? Si c’en était bien un, mêlé au sang, à la salive et à la poussière, il n'avait rien de rassurant. Elle extirpa un carré de tissu de la poche de sa cape pour le presser doucement sur le sourcil, d'où le sang qui coulait abondamment menaçait de l'aveugler partiellement. Alors seulement, elle hocha de la tête, et prit son bras.
- Je ne sais pas lequel des deux va soutenir l'autre durant cette petite promenade de santé. Ses lèvres s'étirèrent en un discret sourire. Décoiffée, secouée, éclaboussée par le sang de ses agresseurs, un bel hématome se formant sur la tempe gauche, Mathilde avait bien meilleure allure que le milicien, couvert du sang qui avait giclé des plaies infligées à ses adversaires, mais aussi de son propre sang. La veuve avait l'impression que c'était l'excitation du combat qui tenait le solide gaillard debout. Une fois qu'elle serait redescendue, il s'effondrerait sans doute.
- Mathilde Dumas. Puis-je savoir à qui je dois d'être encore en vie, ser?
Il lui répondit, et ils se mirent en route, marchant lentement, au rythme des boitillements de la fermière, dont la hanche et le dos lui rappelaient qu'elle était bel et bien vivante. Le vent souffla un peu plus fort, retournant les feuilles dans les arbres qui bordaient la route pour en dévoiler leur revers argenté. Une corneille passa au-dessus de leur tête en croassant. Le Labret semblait retrouver sa tranquillité, celle-là même qui avait poussé la fermière à s'en aller à pieds par les champs plutôt que de rejoindre Usson à dos de cheval.
- Je ne sais pas ce qui vous a mené à être dans les parages aujourd'hui, mais je vous suis infiniment reconnaissante de m'avoir porté secours. C'est la providence qui vous envoie, ser. |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Mar 18 Juin 2019 - 17:18 | | | Cent fois qu'on lui avait dit. Cent fois qu'on le répétait. La décapitation des cadavres était une nécessité, elle permettait d'empêcher que l'invasion ne se répande d'avantage dans le Duché. Heureusement que la fille du Labret le lui rappelait, lui qui lentement sentait ses forces le quitter, comme si dans leur étreinte le tandem des bandits la lui avait vampirisée. Ce n'était pas la plus glorieuse des besognes, ainsi contraint à jouer les bouchers, mais cela valait bien de se faire souffrance, une fois encore, car elle était impérative à la survie des fermiers. Alcide s’attela donc sur les premiers plans d'un tableau sanguinolent où le geste tranchant exigeait qu'on situe l'intérêt de l'œuvre dans le lointain, dans l'insondable, là où se réfugie un cauchemar, pris sur le fait.
Bien qu'il soit oblitéré dans les méandres de sa mémoire, ce temps n'existait déjà plus. Il était derrière eux. La fermière passait à présent un morceau de chiffon sur son arcade sourcilière. Alcide n'était pas genre à se plaindre, ou à pleurnicher sur son sort, mais il devait bien admettre qu'avoir subit les assauts conjoins de la ronde, du labeur et de l'attaque des deux malsenés l'avaient achevé. Les yeux d'abord baissés sur la route, il les souleva pour poser un regard sur elle tandis qu'elle épongeait sa blessure. Faussement imperturbable, il en détaillait silencieusement les expressions, les angles de ses traits, se détrempant silencieusement dans cette douceur qui ne lui était pas méconnue. Il pouvait s'y perdre, mais le sang ruisselant sur son œil lui fit clore les paupières, révélant maintenant la palette colorée de beurre, de cerise et d'aubergine propre à celui d'un coquard...
- Je ne sais pas lequel des deux va soutenir l'autre durant cette petite promenade de santé.
Quand il fut un brin plus présentable, elle prit donc son bras, le milicien posant à nouveau ses prunelles sur cette discrète risette qu'elle avait au coin des lèvres. Attendrit par l'image qu'elle lui renvoyait, il esquissa à son tour un sourire retenu ; décoiffée, éclaboussée, la tempe marquée d'un hématome, et malgré cela toujours debout, prête à avancer. Malgré les coups, la jeune femme avait tout gardé de son panache.
- Nous nous soutiendrons mutuellement, dans ce cas.
Puis, elle se présenta, Alcide découvrant le prénom de celle que, toujours, on avait appelé La Veuve Dumas. Et pourtant, lui qui était en veine d'en savoir plus, fronça malgré tout les sourcils.
- Soldat Lupin. Pour vous servir. Dit-il avant de marquer une pause, continuant de marcher à ses côtés. Mais sa bouche se déforma subitement en une moue, comme insatisfait de sa réponse. Quelque chose clochait à son sens ; il désapprouvait quelque chose...
- C'est ce que le protocole m'exige de vous répondre. Mais de vous à moi... J'ai jamais été aussi fatigué qu'aujourd'hui ; abruti par les circonstances, le métier, la douleur,... les soumissions funestes. Je ne m'en plaint pas, mais pendant ce temps là, tout le monde tombe autour de nous. J'ai plus le temps de jouer au bon soldat... On est temporaire, Mathilde, et moi j'ai déjà temporé suffisamment pour mon grade. En l'absence de la patrouille, surtout du Coutilier, j'aimerai seulement... que vous m'appeliez Alcide.
Il ne pouvait plus faire sans dire les choses qu'il ressentait, à l'instant T où le Morguestanc s'écroulait. Si elle portait plainte en reportant l'outrage, qui sait, ça lui coûterait sans doute, comme de coutume, une journée de corvée à éplucher des patates, mais tant pis, cette créature qui se reposait sur son bras valait cette peine. Il ne voulait pas offrir à la veuve la froideur protocolaire du code obsolète de la bonne conduite. Obsolète, car il n'avait de véritable sens qu'en temps de paix. Alors, l'épuisement ne l'aidant en rien, il s'était mis à l'oeuvre, cet esprit chaotique que l’œil vigilant des gradés avaient braqués, en joue, sur sa personne.
- Pardonnez-moi... Il y a des moments comme celui-ci où... l'esprit ne fait plus vraiment corps avec moi-même. C'est déjà presque une âme qui vous parle... C'est pas responsable, une âme, mh ?
Il sourit, ironique, à travers un souffle nasal propre à l'épuisement. Après tout, éplucher des pommes de terre, c'était mieux que de déambuler dans les effluves putréfiées, à empiler les cadavres pour en faire des feux de joie. Cependant, ce qui n'était perçu comme une banale fatigue, lui qui était si fier, s’avérait être plus lourde lorsque le milicien se mit à défaillir. Perdant de sa droiture, son visage se décomposant peu à peu. Sa tirade, il la payerait cher. Ainsi, à mesure qu'ils marchaient tout deux, pas après pas, le Lupin baissait lentement la tête sous l'effet d'un vertige. Le choc avait été rude, si bien que, l'apaisement l'aidant à se détendre, son corps commençait maintenant à le lui faire sentir.
- Ne me remerciez pas trop vite... Si la providence voulait faire de moi votre fardeau... Je pense qu'elle ne s'y serait pas mieux prise pour... ...
La phrase de trop... Un poids plus important affligeait maintenant l'équilibre de la fermière qui, jusqu'ici, avait pu trouver en lui un soutien si elle manquait à trébucher. Leur route commençait à dévier sur le côté, vers le fossé... Puis soudain, vertement, il ramenait la jeune femme auprès de lui, son bras s'enroulant instinctivement autour de sa taille pour lui éviter la chute, comme si d'un mouvement sec il était ce navigateur réalignant la barre d'un bordage en perdition.
- Cette route n'est pas droite... S'étonnait-il, pendant que tout deux partaient à présent sur le flanc opposé. On aurait dit là deux errants non plus empestant le sang, mais le vin de frambroises, prêts à sillonner les tavernes du Labourg. Accrochez vous ; Rikni nous éprouve. Ne la décevons pas.
Même s'ils devaient ramer pour parvenir à la ferme, il désirait son pas inflexible face à la dictature des larves. Ces larves, du moment où elles gouvernaient, partout dans le Royaume, tout pouvait s'embourber. Alcide, lui, ne se lamentait pas. Jamais.
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| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Mar 18 Juin 2019 - 19:56 | | | - Soldat Lupin. Pour vous servir.
Elle allait lui répondre qu'elle ferait en sorte que son supérieur direct ait écho de son acte de bravoure, mais le soldat Lupin afficha une petite moue trahissant une réflexion silencieuse, avant de reprendre. Alcide. Soldat de toute évidence usé, las, fatigué de la vie, de sa vie, comme elle avait pu l'être, deux mois auparavant, alors qu'elle rendait visite au Temple pour déposer son épuisement et sa détresse aux pieds des Trois. C'est un prêtre qui l'avait relevée, en lui offrant des paroles qui l'avaient obligée à considérer la vie sous un autre angle, ce à quoi elle s'efforçait depuis, lorsqu'un moment de découragement la gagnait.
- Vous parlez à une paysanne, Alcide, le protocole est une chose fort encombrante pour laquelle je n'éprouve aucune affection.
Les brigands avaient cogné fort, déjà le milicien semblait divaguer, ce qui inquiéta la fermière, qui fit donc quelques pas sans réelle aide, ne tenant le bras du Lupin que pour s'assurer d'en saisir le moindre frémissement annonciateur de l'effondrement de l'homme en plein milieu du chemin. Tu aurais dû rebrousser chemin et l'accompagner à Usson pour qu'il s'y fasse soigner, Mathilde. Tu aurais sans doute trouvé quelqu'un de vaillant pour te raccompagner. Mais Usson s'éloignait un peu plus à chaque pas, faisant en sorte que la ferme était maintenant la destination la moins éloignée. Cependant, le milicien continuait, pas après pas, à s'affaisser. Ses pieds étaient lourds et traînaient maintenant dans la poussière du chemin qui se soulevait légèrement derrière eux. Ses épaules perdaient de leur hauteur, tout comme son menton qui, lentement, partait à la rencontre de son torse.
Mathilde vacilla sous le poids qui venait tout à coup de la déséquilibrer, elle qui cherchait péniblement à apprivoiser la douleur qu'elle ressentait. Le fossé se rapprocha un peu trop de leur itinéraire, jusqu'à ce qu'un bras enserre avec force sa taille sans crier gare. Son sang se glaça. Merde. Soit il luttait contre l'inconscience et venait de se ressaisir, soit il jouait une comédie parfaite qui, dans quelques minutes, les plongerait dans le fossé où il essaierait d'abuser de la fermière. Mathilde serra les dents, tandis qu'une nouvelle vague d'adrénaline s'emparait d'elle. Ils rouleraient, elle dégainerait sa dague et le planterait sans sommation. Elle courrait ensuite à la ferme, sauterait sur son cheval et regagnerait Usson où elle rencontrerait le Coutillier pour tout lui expliquer. Ce plan bien à l'esprit, elle tâcha de rester aussi imperturbable que possible.
- Cette route est droite, ce sont nos pas qui ne le sont pas. Appuyez-vous sur moi, laissez-moi vous guider dit-elle en l'attrapant par l'épaule pour redresser le trajet, avant de l'enlacer à son tour par la taille. Dites à votre tête d'arrêter de penser, et contentez-vous de fixer l'horizon, et cette magnifique ferme dont on voit déjà le toit de chaume.
Le faîte du toit seulement, mais c'était un bon début, un encouragement certain, un objectif clair à atteindre. Serus, je t'en supplie, accompagne mes pas, et ne place en cet homme que de bonnes intentions. Habituée aux petits bobos que le travail des champs savait lui infliger, la fermière avait fini par trouver une façon de se mouvoir qui minimisait la douleur, supportant de son mieux le poids du milicien qui, de temps en temps, se faisait plus pesant sur elle.
- Tout le monde ne tombe pas, messire. Cessez de contempler les morts, voyez les vivants. Ceux que vous protégez, ceux que vous sauvez parfois au péril de votre vie. Ne le suis-je point, moi, vivante? Elle parlerait jusqu'à la ferme s'il le fallait, pour se donner du courage, pour le pousser à avancer lui aussi et si, par la grâce des Trois, ses intentions étaient bonnes, elle s'endormirait ce soir l'esprit en paix d'avoir pu aider l'un de ceux qui sacrifient leur vie pour protéger leurs semblables. Notre sacerdoce fait en sorte que nous mettons notre vie au service des autres, chacun à notre manière, mais de façon complémentaire. Sans la sécurité que vous apportez, il n'y a pas de culture, et sans culture, il n'y a pas de vie à défendre. Il trébucha sur une pierre dépassant du sol, les entraînant vers l'avant le temps de trois grandes enjambées désespérées. Il fut le premier à retrouver son équilibre, retenant par l'épaule la fermière qui resta miraculeusement debout. Elle souffla, le temps de comprendre ce qui venait de se passer. Il ne t'a pas poussée dans le fossé. Il ne fait pas semblant.
- Est-ce que ça va? lui demanda-t-elle en se retournant vers lui. Elle ne put s'empêcher de sourire devant la situation. Elle n'avait jamais bu assez que pour s'enivrer, mais elle avait déjà vu des soûlards marcher tant bien que mal vers une destination inconnue, en zigzagant sur le chemin passant devant chez elle. C'est cette image qui lui traversa l'esprit, alors qu'elle tendit la main au milicien. - Un homme plutôt sage m'a dit, il y a peu, que la vie n'était qu'une étape durant laquelle nous apprenions tout ce qu'il y avait à savoir avant de rejoindre le Domaine des Dieux. Bonté, générosité, résilience, autant de choses que les épreuves de la vie nous inculquent. Je suis de votre avis, ne décevons pas Celle qui nous envoie cette épreuve. Continuons, nous sommes presque arrivés.
Un dernier encouragement. La ferme était maintenant proche. Il ne restait qu'à quitter le chemin principal pour descendre le sentier de terre battue menant à la barrière ouverte, derrière laquelle se trouvait la petite cour autour de laquelle, depuis cinq générations, s'organisaient la chaumière, le puits, la grange et le poulailler. Remplir un seau d'eau, se traîner dans la chaumière, se laisser tomber dans les chaises berçantes après avoir verrouillé la porte et prendre le temps de panser les plaies. Remercier les Trois de ne pas avoir fait d'autres mauvaises rencontres. Et peut-être finir par réaliser l'ampleur du bourbier dont elle avait été extirpée in extremis par un sauveur qui, finalement, était peut-être plus en détresse qu'elle. |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Jeu 20 Juin 2019 - 2:52 | | | Dans son jeu, l'instinct de mort, l'instinct silencieux, était décidément bien placé à côté de la colère froide. Il tenait la place du fou dans l'échiquier, et la règle des grands nombres travaillait pour lui. C'était une règle sans défaut ; elle faisait loi. Tout ce qu'il entreprenait, d'une manière ou d'une autre, venait buter contre elle et tournait à la sinistre farce. Pour lui, il fallait être Très Grand, ou bien étrange, pour parler d'autre chose que de mort en des temps où sur les terres, sur les eaux, dans les airs, au présent, dans l'avenir, il n'était question que de cela. C'était un peu comme s'en aller danser dans un cimetière ou de parler d'amour dans un cercle d'abattage ; c'était particulier. Mais pas pour lui, ni pour elle qui sait.
La route est droite ; droit devant. A travers les mèches coulantes, humides et sales, qui lui retombaient pratiquement devant les yeux, bien sûr qu'il voyait encore les vivants ; bien sûr qu'il savait Mathilde en vie. Alcide acquiesçait sagement à ses paroles, reconnaissant qu'entre la noblesse -même elle- qui protégeait, le temple qui instruisait et la paysannerie qui nourrissait, il y avait une forme de complémentarité. Un équilibre. Sur ces mêmes paroles, ses paupières s'ouvraient un peu plus grandes, mirant le toit de chaume qui se découpait à l'horizon et qu'elle lui désignait. C'était là. Oui, c'était l'endroit où elle lui proposerait peut-être une chaise où s’asseoir, ne serait-ce qu'un tabouret. Pourvu qu'il n'y ait pas trop d'animation à l'intérieur, Alcide appréhendait d'ici les myriades de questions qu'on leur poserait à leur arrivée.
- Vous n'avez pas tord... Je vois tout en noir... Il n'y a pas si longtemps, je disais qu'au sens où le Duché l'entendait et le désirait, qu'on finirait tous par éclater de noirceur... Je disais qu'on crèverait tous en chœur, avec plaisir, dans un monde ravagé qu'on aurait mis des années à barbeler d'horreurs, d'angoisses... De choses, des gens, de choses encore, des courants innombrables, mêlées au passé, parallèles, croisées... Menaçantes, fondues…
Le Chaos. Il pensait que les Trois ne leur laisseraient plus pour se distraire que l'instinct de destruction. Un instinct qu'avait cultivé Alcide depuis les premières heures de son enfance, la faute à pas de chance, et qu'il entretenait tout au long de ce qu'il intitulait encore La vie. Des lignes et des lignes d'errance ; une seule d'amour... Il soupira discrètement, un instant où le milicien s'égarait sur un souvenir, ses prunelles détaillant ce toit de chaume qui s'approchait encore.
- Est-ce que ça va ?
Délicatement, Alcide fit contre-poids pour la ménager, se dépliant bien plus droit sur ses hauteurs. Un air hagard lui barbouillait encore le visage quand il hocha de la tête pour lui répondre, mais qui, pourtant, ne s’avérait être dû qu'aux vertiges. Un contraste vivant quand il sembla soudain s'éveiller, les paupières plissées, les yeux plus vifs, prenant un peu plus d'ardeur. Une ardeur qui flamboyait dans le fond de son regard, révélant deux braises à l'éclat immuable comme témoins du grondement intérieur. Puis, l'incoercible élan de sa main rencontra naturellement celle qu'elle lui tendait.
- Surement un homme sage, acquiesça Alcide. Je dirais que la vie est comme une barque qui a peur d'être un cercueil. Une coquille à la dérive dans une gueule infernale et qui fuit de là où flotte l'espoir d'une autre rive, d'un antidote. Une barque sans carte, sans compas, où longtemps on se demande « La vie, est-ce bien par là ? » Moi, j'ai la Foi. Je ne sais pas encore où je vais, Mathilde, mais j'y vais ; la flamme au cœur... Il brûle ; il dévore. Sinon jamais vous ne m'auriez vu patrouiller d'ici et là dans le Labret, ou avec vous, ici-même, aujourd'hui à mes côtés... Saine et sauve.
Au mot « sauve » il effleura un baiser, tendre et sans insistance, sur le revers de sa main. Il était sincèrement heureux qu'elle soit vivante ; La Veuve Dumas était à nouveau sur cette fresque bucolique sur laquelle il rêvassait parfois, accoudé sur une clôture, et ça lui suffisait. Peut-être voulait-il exprimer par ses paroles et son geste, qu'en fin de compte, il trouvait que c'était une belle journée ? Une fin heureuse ? Quelques secondes plus tard, il relâcha avec précaution cette main, puisqu'il découvrait sans mot dire que son bras enroulait sa taille, et réciproquement le sien ceignant la sienne... C'était amusant, quelque part, comme la proximité survenait parfois spontanément, sans que ça ne le repousse. Dire que pendant de longues, trop longues minutes, elle avait ainsi soutenu leur marche malgré son état, supportant son poids sans même s'en être plainte. Que du contraire ; patiente, encourageante, elle était un véritable soutien jusqu'ici. Bifurquant sur le petit chemin de terre battue, tout deux descendants la pente, Alcide prit l'initiative de soulever le battant de la barrière à l'aide d'un bras, comme pour se racheter, elle n'aurait plus alors qu'à s'y associer en la poussant d'un geste commun.
- Difficile pour nous de faire autrement, mais... Je vous suis, Mathilde. Dites moi qu'un bon siège nous attends à l'intérieur.
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| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Jeu 20 Juin 2019 - 16:26 | | | - L'ennui, avec la noirceur, c'est qu'il suffit d'une toute petite braise d'espoir pour qu'elle s'écarte. Et si l'on souffle un peu sur cette braise, juste un peu, une petite flamme apparaît. Il ne tient qu'à nous de l'entretenir, pour éloigner les ténèbres.
Elle poussa la barrière de bois, l’entraînant d'un pas claudiquant à travers la petite cours. Seul les bruits de la nature semblaient les accueillir. Les poules caquetaient comme à leur habitude, fouillant dans feuilles mortes qui s'étaient ramassées le long des murets à la recherche de vers dodus. Le vent soufflait, léger, faisant osciller un volet mal attaché. Plus loin dans le pré, la jument soufflait pour saluer le retour de sa maîtresse. Enfin, ils parvenaient dans son havre de paix, sécuritaire, rassurant. Mathilde poussa la porte de la chaumière, qui n'était jamais verrouillée lorsqu'elle s'absentait, ne serait-ce que pour permettre à Arthur, son aide-maraîcher, de s'abriter en cas de besoin.
- Deux sièges, un foyer à ranimer et du repos pour les braves. Un dernier effort!
Elle le guida à travers la pièce principale, contournant la longue table de bois massif, longeant les armoires de bois où elle rangeait tout le nécessaire de cuisine, frôlant un bouquet de thym suspendu, qui libéra un doux parfum. Quelques pas suffirent à rejoindre l'âtre, où les braises se consumaient encore. Sans doute avait-elle alimenté le feu avant de partir, pour ne pas avoir à le rallumer à son retour d'Usson. Elle aida Alcide à s'installer dans l'une des deux chaises berçantes, dont le seul confort était une couverture de laine recouvrant le bois dur.
- Je reviens dit-elle en fronçant les sourcils. Le mouvement final avait été douloureux pour son dos qu'elle avait apprivoisé tout au long du chemin. Un peu de nerfs pensa-t-elle. Elle souffla. Par où commencer? Elle se débarrassa de son arc, de son carquois et de sa sacoche qu'elle déposa sur la table, et sortit par la porte restée ouverte. Elle jeta un seau dans le puits, et le remonta en serrant les dents. Une fois à sa portée, elle attrapa dans ses bras pour le porter contre elle jusqu'à la chaumière.
- Toujours en vie, Alcide? dit-elle en déposant le seau sur la table. Rester active, penser à autre chose qu'à l'agression lui permettait jusqu'ici de ne pas laisser son esprit dériver dans l'océan des possibles, l'emmenant sans doute jusqu'au pire des scénarii. Les Trois avaient eu la générosité de mettre un milicien sur son chemin, et elle les remercierait en prenant soin de lui, qui semblait tant avoir besoin, à son tour, que quelqu'un rallume cette petite étincelle d'espoir. Elle versa une partie de l'eau dans une bassine qu'elle amena à proximité de la chaise dans laquelle Lupin avait fermé les yeux, la tête calée contre le dossier. Elle ouvrit un tiroir pour en sortir deux linges propres, et en trempa un dans l'eau.
- Arrêtez-moi si je vous fais mal, d'accord? Décrasser le milicien, voilà ce qu'elle entreprenait de faire. Elle ne savait pas si c'était une habitude pour lui de sauter les ablutions, au vu de la drôle de couleur qu'avaient pris ses premières rides plus marquées par la crasse que par le temps, ou si c'était seulement le résultat des corvées que l'avait obligé à faire ce vieux grigou d'Adelbert. D'ailleurs que pouvait-il bien faire chez ce vieillard? Était-il de sa famille? Elle ramena ses pensées à l'instant présent, et aux gestes qui se voulaient aussi délicats que possible.
D'abord le front, qu'elle tamponna avec le tissu humide après l'avoir libéré des mèches huileuses, ramassant la crasse pour dévoiler une couleur de peau bien moins étrange. Rincer, une fois, deux fois, puis descendre sur les tempes en guettant le moindre petit froncement de sourcil, la moindre contraction de mâchoire qui trahirait une douleur. Rincer, encore. Contourner les yeux en prenant garde de ne pas appuyer sur l'arcade blessée et enflée. Éliminer le sang séché, tandis que l'homme a toujours les paupières closes.
Le temps semble s'être arrêté dans la chaumière. L'espace réduit amplifie le moindre son qui vient troubler son calme habituel. A moins que ça ne soit cette proximité totalement indécente de la veuve penchée sur le visage tuméfié du milicien, bien loin de la distance qu'elle s'applique toujours à mettre entre elle et les hommes qu'elle rencontre. Cette proximité la trouble, mais elle n'en dit mot, mal à l'aise.
Tout va bien. A part ton dos. Mathilde sourit. Ce n'est pas vraiment une douleur, c'est une tension, une corde sur le point de rompre. Elle s'interrompt un instant pour jeter une bûche dans les braises, qui auront tôt fait de s'y enflammer. Alors, la chaleur des flammes caressera son dos et l'aidera peut-être à se détendre.
Le linge humide reprend son travail, descendant le long de l'arête du nez, s'en allant ensuite sur les joues, s'attardant dans la barbe crasseuse, pour revenir au menton et finir sur les lèvres enflées. Une bonne chose de faite. Le silence est écrasant, mais elle n'ose pas le rompre. Le milicien semble s'abandonner à ses soins, et peut-être à une douceur qu'il ne connait plus depuis longtemps. Des cheveux négligés autant que sa tenue, une âme semble avoir perdu tout espoir... plus personne ne l'attend, chez lui.
Mathilde prend l'autre linge, sec, et le dépose sur le visage maintenant propre d'Alcide pour en éponger les dernières traces d'eau et de sang. Elle emporte ensuite bassine et linges un peu plus loin, ouvre une armoire et en sort deux petits pots de céramique pour revenir auprès de son patient improvisé, dont les yeux clairs la fixent sans ciller.
- S'il y a un concours du plus beau coquard à la caserne, je pense que vous le remporterez haut la main dit-elle en papillonnant des cils, un sourire aux coins des lèvres. -La torture touche à sa fin ajouta-t-elle, en prélevant un peu du baume avant de l'appliquer sur le contour de l'oeil déjà noirci, ainsi que sur le haut de la pommette où se dessine un bel hématome. L'odeur était délicate, mêlant la senteur caractéristique de la camomille au discret parfum d'arnica. Elle fit de même avec l'autre baume, l'appliquant, lui, sur l'arcade sourcilière ouverte. -La consoude va vous refermer ça en un rien de temps. Elle termina par la lèvre, qui avait cessé de saigner, dans un geste qu'elle trouva particulièrement déplacé tant il lui paraissait sensuel.
Elle referma ses pots en détournant la tête pour ne pas montrer le rouge qui teintait ses joues, et s'éloigna pour ranger son matériel de premiers soins. Elle remplit deux gobelets d'eau fraîche et revint près d'Alcide pour lui en tendre un, avant de s'installer avec autant de douceur que possible dans la chaise berçante voisine, chaise qu'elle fit pivoter pour qu'elle fit dos au feu. Le repos de la fermière, enfin. Elle soupira d'aise tandis que les flammes montaient dans l'âtre.
- Vous voyez. Une braise suffit.
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| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Sam 22 Juin 2019 - 22:19 | | | Sans pour autant être un géant, Alcide sembla encorner l'encadrement de la porte d'entrée, baissant légèrement la tête pour ne pas s'y cogner... Mais comment décrire ce visage qui s'illuminait alors ? Une fois entré, il souleva les sourcils, les yeux brillants de flammèches quand il détailla la pièce dans laquelle il pénétrait. Les ombres de la feuillée des arbres projetées depuis les fenêtres vacillaient sur une table centrale, une pièce maîtresse régnant parmi d'autres meubles polis par les ans, encore, qui longeaient les parois de la chaumière. Dans leur démarche maladroite, un bouquet de thym parfumé se mit à frémir, Alcide le rattrapant sitôt d'une main désolée, comme pour lui éviter de tomber. Oups!Son regard parcourait encore la pièce quand il s'enfonça lourdement dans le berçant de son siège. Ressentant un certain dépaysement ; cette chaleur toute personnelle qui imprégnait les lieux ne lui avait pas toujours été donné de voir, car depuis prêt de deux ans maintenant, il ne connaissait pratiquement plus que les chemins de ronde s'il ne partait pas déjà pour une énième expédition. - Je reviens.Alcide inclina son visage sur le côté, sans mot dire, les yeux qui s'interrogent quand il mira les sourcils qu'elle fronçait. La jeune femme éprouvait une douleur, apparente, gênante, mais pas de larmes dans les yeux. Pourvu qu'elle pense à elle plutôt qu'à lui, mais trop tard, elle franchissait déjà la porte pour s'en aller quérir l'eau du puits. Alcide se pencha donc un peu plus avant, grimaçant à son tour quand il se débarrassa de sa cape aux teintes forestières. Cape qu'il laissa choir au sol un peu plus loin où elle ne dérangerait plus personne, car si même d'ordinaire elle était sale, poussiéreuse, en lambeaux, maintenant couverte de sang, il désirait en épargner la couverture où il reposa son dos. Patient, il s'y laissa soupirer longuement. D'abord de bien-être, toisant à nouveau les lieux pendant quelques instants... Puis de plaisance, se décontractant, jouant des épaules pour se fabriquer un nid dans le moelleux de son siège. Il toisa les diverses décorations, jeta un œil au plafond. La tête en arrière posée sur le dossier, il ferma enfin les paupières comme pour savourer le calme qui régnait dans la maison. Pensif, il se disait... que vraiment... les artisans de camelote, de bigoteries citadines, tout l'art mondain en illusions surréalistes, ne seront jamais aussi redoutables que la tranquille simplicité qui régnait dans cette chaumière. ---------------------------- - Toujours en vie, Alcide?Alcide ouvrit un œil. Qu'il riva sur le seau que Mathilde déposait soudain sur la table avant d'en verser le contenu dans un petit bassin. Puis, referma la paupière quand elle s'approcha pour s'emparer des linges propres qu'elle détrempa aussitôt dans l'eau... La douleur s'étalait sur son visage, qu'il désirait lisse, impassible, quand il comprit que la douceur de cette femme provoquerait en lui des hontes qu'il désirait voiler. On le savait qu'il n'était pas facile à aider. Juste aider. Juste lui tendre une main pouvait être pénible. Une main qu'il aurait repoussé brutalement d'un revers du bras... Si seulement il ne s'agissait pas de la sienne ; parce que Mathilde ne lui demandait rien. Le gratuit seul est divin.- Arrêtez-moi si je vous fais mal, d'accord?Le Lupin opina doucement de la tête, doutant qu'elle puisse lui faire le moindre mal lorsqu'il sentit la fraîcheur du linge lui débarbouiller soigneusement le front. Puis elle rinça, une fois, deux fois, le morceau de chiffon avant de l'appliquer sur ses tempes endolories. Elle frôla l'arcade de son visage, puis effleura le contour de ses yeux... C'est là qu'il se disait penser trop vite - une fois n'est pas coutume,- tiquant d'une paupière, crispant une joue, il réprima l'élan du cœur comme pour mieux compter ses battements. La douleur ainsi pesée était plus noble que la douleur qu'on écriait, après tout... Une bûche fut jetée dans l'âtre et Alcide ouvrit les yeux. Des iris clairs, teintés de vert mousse aux nervures d'amande et de tilleul, chacun finement cerclés par la noirceur de leur halo. Le feu à naître s'y reflétait peu à peu quand à l'intérieur dansait les flammèches d'un sombre brasier ; le stigmate d'une fournaise inextinguible d'où se jetaient les âmes, miliciens, innocents, damnés, qui déchurent dans l'abysse de ses pupilles. Peut-être que ces yeux lui demandent si les gens au-dehors, sur le plateau du Labret, se souvenaient d'un seul de leurs noms ? Ou peut-être, qu'ils la remerciaient de lui avoir demandé le sien ? Sous ce regard marqué, son torse se soulevait lentement d'un souffle apaisé. Alcide fondait dans sa chaise à berçant, s'abandonnait à la douceur de ses soins. Ces mêmes prunelles l'observant, comme l'aurait fait un chat à la fois sage et sans scrupule, inflexible et spontané, quand elle fit glisser le linge humide sur l'arête de son nez. - S'il y a un concours du plus beau coquard à la caserne, je pense que vous le remporterez haut la main.Son visage s'illumina d'un sourire espiègle qui fut si franc qu'il le paya d'une onctueuse grimace, tant la ride au coin des lèvres lui tirait l’œil au beurre noir. - La torture touche à sa fin.Il acquiesça sagement, reposant sa tête sur le dossier. Miséricorde. Fallait-il qu'il rougisse en s'avouant que, sans qu'elle le veille, il se sentait attiré par elle ? Fallait-il qu'il se mente ? Qu'il s'occulte d'avantage ? Elle appliqua délicatement le baume odorant sur le pourtour de son œil noircit, ses doigts léchant la surface du pot pour en déposer la crème sur l'arc sanglant de son sourcil... A présent La veuve Dumas n'était plus dans la fresque onirique ; disparue des champs. Pire, elle se tenait juste là, penchée sur son pauvre cas, à prendre soin de lui... Durant sa vie, les plus indifférentes aridités, les plus cyniques goujateries, Alcide arrivait à leur trouver des excuses passionnelles et d'autres signes d’un inexpert romantisme, mais maintenant qu'il y avait trop de noirceur qui le distrayait au dehors, et trop de souvenirs qui remuaient autour, se retrouvant là, au silence entre les mains de Mathilde... La main du milicien se souleva alors lentement de l'accoudoir... La jeune femme passait un doigt sur sa lèvre, innocemment sensuelle, la chevelure décoiffée, son chignon débagoulant sur le côté, quand en retour il entrelaçait ses doigts parmi ses mèches brunes. Déposant tendrement son index sur l'hématome enténébrant sa tempe, il effleurait sa peau sans y exercer la moindre pression. Il toisait la blessure, fronçant légèrement les sourcils, il en soupesait les vices et les travers qui l'avaient conduite à ce résultat. Si l’attraction était comme l'alcool, plus Alcide était impuissant et soûl et plus il se croyait fort et malin : s'il le pouvait... s'il le pouvait, il tuerait plus vertement encore ceux qui s'en étaient prit à elle. Elle détourna la tête, les joues roses quand elle referma ses pots, pour s'éloigner ensuite, puis revenir avec deux gobelets d'eau fraîche. Alcide se saisit du récipient en la remerciant d'une inclinaison du menton, la mirant s'installer sur la chaise voisine. - Vous voyez. Une braise suffit.- Ne vous reste plus qu'à souffler un peu dessus. Dit-il, la bouche pratiquement dans son gobelet, le sourire en coin, buvant une gorgée d'eau avant de le reposer aux pieds de son siège. - Vous savez... Marquant une pause, Alcide se pencha doucement en avant, apportant une main au niveau de sa jambière pour en déboucler la première sangle. - Je m'agace parfois à démêler ce qu'il y a de trop calculé chez les gens. Une répulsion. Instinctive... Poursuivait-il en détachant une seconde attache, puis d'une autre - C'est ce que m'inspirent la plupart des personnes qui m'approchent. Ils m'étouffent. Il répétait des mouvements homologues aux précédents, se débarrassant enfin de ses bottes. - Imaginez... C'est un peu comme si vous étiez perdue au Labourg, dans une masse grouillante de marchands où tous chercheraient à vous vendre quelque chose. Rarement honnêtes, infatigables... Lourds...- Et puis, au milieu de tout cela... Il repoussa du bout de l'orteil ses savates un peu plus loin. - Il y a vous... Mathilde... Qui donnez, soutenez et soignez sans attendre de retour. J'aurai tant à dire sur vous, mais vous voila assise sur votre chaise, remettant votre dos tout entier à la compassion des flammes, dans l'espoir, peut-être, qu'elles soulageront à elles seules votre douleur. Mh ?Il appuya un regard entendu dans sa direction. Alcide n'avait pas rêvé quand il vit dans le visage qu'elle renvoyait tout à l'heure que son échine affligée la mettait à l'épreuve. - Le gratuit seul est divin, et divine vous l'êtes... Mais vous n'y couperez pas. C'est à votre tour de vous laissez aider.D'un naturel absolu, certainement ambiguë, il se mit à débrailler le col de sa chemise, cherchant à s'en défiler sans pudeur aucune. Comme s'il s'agissait d'une routine, trop habitué aux dortoirs, il enlevait son vêtement, sa peau mise en valeur par le modelé pectoral de son torse mis à nu, armant la courbe d'une épaule, le bras catapultant le lin sanglant qu'il mit en boule droit sur le monticule de lambeaux qu'avait formé sa cape. C'était cela l'important ; se débarrasser du sang, préférant l'odeur du bois qui brûle et qui se mêle au parfum de camomille et d'arnica, plutôt qu'à ces effluves rubigineuses. Voila qui était plus confortable. - Ne craignez rien... Rikni m'emporterait dans ses limbes si j'avais l'intention de vous faire du mal.Un doux crépitement de braises plus tard, Alcide se soulevait de sa chaise, tout en se débarrassant délicatement de ses mitaines de cuir. Puis il déroula les bandages ceignant ses poignets et ses paumes, déroulant le ruban qui peu à peu serpentait au sol pour finir inerte à ses pieds. Ensuite, il fit un pas vers la fermière, s'inclinant sans hâte, s'accroupissant juste auprès de ses genoux pour y déposer le revers de ses deux mains. - Vous voyez ces mains, Mathilde ? ... Dorénavant ce sont les vôtres ; je vous les donne. Elles sont à vous.Alcide confirma ses propres dires en opinant de la tête. Il guida alors l'une des mains de la jeune femme dans le creux palmaire des siennes, comme pour lui assurer qu'il les lui confiait, qu'il lui en faisait véritablement cadeau. Des mains de bretteur, cela dit. Des écorchures entaillaient les contours de quelques ongles, mais s’avéraient être une osmose parfaite entre puissance et agilité ; parcourues de quelques veines palpitantes sur leur revers, elles semblaient allongées d'un raffinement sculptural et tendineux. Sa peau était d'une douceur palpable, par ailleurs, que les bandages qu'il venait d'ôter avaient pu préserver des combats qu'il menait. Enfin, prêt à se laisser guider par la jeune femme, il conclu : - Maintenant, levez-vous. Doucement... Venez ; indiquez-moi lequel de vos remèdes votre dos aurait besoin. |
| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Mar 25 Juin 2019 - 16:21 | | | Ne vous reste plus qu'à souffler un peu dessus.
... Avait-elle rêvé? Cette simple phrase, suivie d'un sourire caché par un gobelet bien complaisant, avait été dite sur un ton trahissant une certaine assurance. Mathilde haussa un sourcil, ne sachant quoi trop en penser. N'avait-il pas profité de chaque occasion qui leur avait été donnée jusqu'ici pour tantôt l'agripper par la taille, tantôt effleurer sa peau? Elle ne l'avait pas repoussé, mais il ne fallait pas qu'il s'imagine que c'était là une permission silencieuse de s'aventurer sur la pente glissante des caresses, d'abord chastes puis bien trop intrusives.
Elle porta son gobelet d'eau à ses lèvres, examinant l'intriguant personnage qu'elle avait fait entrer sous son toit. Soudainement très à l'aise, il ôtait ses bottes tout en continuant de parler. Elle l'imita, se débarrassant en deux mouvements d'orteils de ses vieux souliers de cuir, usés par les lieues qu'ils avaient parcouru dans la campagne du Labret. Le confort des pieds nus n'avait nul comparable. Elle les ramena sous ses cuisses, les cachant dans les plis de sa robe, obligeant son dos à être plus droit, répartissant le poids de la douleur sur l'ensemble de sa colonne vertébrale.
J'aurai tant à dire sur vous. Il la connaissait plus qu'elle le connaissait. Il faisait donc partie des habitués qui passaient au large de sa ferme, s'arrêtant quelques instants à peine sur la grand route pour que l'un d'entre eux descende le petit chemin et vienne s'enquérir de la fermière avant d'emporter quelques denrées dans sa besace. Alcide n'avait jamais approché la ferme, elle s'en souviendrait. Il avait dû voir les échecs de certains de ses collègues dans leurs tentatives, souvent maladroites, de courtiser la fermière. Elle savait se montrer très franche, quand l'intérêt n'était pas là... et il fallait l'admettre, l'intérêt qu'on lui portait n'avait jamais été partagé, ne serait-ce que parce que la perspective de se marier impliquait, pour elle, de céder la gestion de la ferme à son époux. Avec ses grands yeux clairs et son attitude négligée, Alcide devait être de ceux qui observent longuement avant d'oser faire un pas, ce qui, en ces temps où la moindre inattention pouvait être fatale, était une réelle qualité.
C'est à votre tour de vous laisser aider. Elle posa le gobelet, maintenant vide, au sol. Qu'avait-il en tête? Elle n'avait pas besoin d'aide, elle s'en sortait très bien. Elle écarquilla les yeux. Comme l'autre milicien, quelques semaines plus tôt, Alcide se déshabillait en faisant fi de la bienséance. Mathilde détourna le regard, horriblement gênée. De toute évidence, le soldat se sentait en bien meilleure forme tout à coup. Sa main effleura sa dague, encore accrochée à sa ceinture. Ne craignez rien... Trop tard, elle craignait. Pour sa vie, sa vertu, sa réputation. Son coeur s'était emballé, sa respiration s'était légèrement accélérée. Un homme à demi nu lui faisait maintenant face et déposait ses mains sur ses jambes, et lui offrait ses mains. Mathilde faisait un effort surhumain pour ne pas dégainer sa dague et lui hurler de prendre ses affaires et de déguerpir.
Perçut-il la résistance mal contrôlée qu'elle lui offrit, lorsqu'il lui pris la main? Avait-il remarqué qu'en dépit de sa voix calme et douce, chacun de ses gestes n'avaient fait qu'amplifier la peur qu'elle ressentait tout à coup? Et il s'imaginait qu'en l'état des choses, elle se déshabillerait à son tour sous prétexte qu'il lui masserait - tout à fait chastement - le dos, lui qui n'avait sans doute pas connu les plaisirs de la chair depuis des lunes, vu la crasse accumulée sur sa peau? Mathilde était bouche bée devant tant d'assurance, et si elle avait été en pleine possession de ses moyens, elle lui aurait sans doute ri au nez, comme elle l'avait fait avec quelques uns de ses collègues.
Que faire? Que dire? Elle ne pouvait pas esquiver. Elle le dévisagea longuement en silence, détaillant la moindre ride, le moindre repli de son visage, uniquement son visage, son torse étant maintenant partiellement caché par les genoux de la fermière.
- Alcide, je... Par les Trois, que sa voix semblait petite, fluette, timide, sans aplomb. Elle toussa pour l'éclaircir, et souffla. Il n'y a aucune chance que je vous laisse approcher mon dos, même si vous êtes le meilleur des soigneurs de la caserne. D'abord parce que vous êtes à demi nu sous le toit d'une femme vivant seule et que cela est particulièrement gênant, et surtout parce que la seule chose dont mon dos ait réellement besoin, c'est du temps. Quatre jours de repos tout au plus et je pourrai à nouveau courir la campagne et sauver un milicien des griffes de dangereux bandits. Un trait d'humour, pour désamorcer la situation, et se détendre.
Elle prit appui sur les accoudoirs de sa chaise pour se relever, obligeant le milicien à se redresser pour reculer. Elle lui sourit et s'éclipsa en clopinant dans la pièce qui se trouvait en arrière de la cheminée centrale, quittant la chaleur réconfortante du feu pour la douce pénombre. Elle y ôta sa cape et son tablier taché, et revint quelques secondes plus tard, une chemise entre les mains.
- Commencez par enfiler ceci lui dit-elle, en la lui tendant. Je n'attends rien, tout comme vous n'attendiez rien lorsque vous vous êtes planté au milieu du chemin avec une fourche en guise de lance. Vous m'avez sauvée, je vous ai sauvé, nous sommes quittes. Mais si vous tenez à me remercier pour les soins prodigués, Alcide, il y aura trois choses que vous pourrez faire pour moi. Elle sourit. Visiblement bien moins nerveuse que l'instant d'avant, Mathilde avait repris le contrôle de sa panique. Il ne l'avait pas retenue, lorsqu'elle s'était levée, par plus qu'il ne l'avait suivie, dans l'obscurité de la pièce voisine. Autant de petits tests réussis, là où d'autres tordus avaient échoué avant de se faire mettre à la porte par une fermière les tenant en joue avec son arc.
- La première, c'est de comprendre que la seule personne qui peut souffler sur votre braise d'espoir, c'est vous, et vous seul. Parce que si vous comptez sur moi pour le faire, et que les Trois me rappellent à eux, vous disparaîtrez vous aussi, mais dans les Ténèbres. La seconde, c'est d'être celui qui laisse les autres sur la grand route pour venir chercher les denrées, lors de vos rondes. La troisième, c'est de prendre un peu de ce baume dit-elle en pointant celui à la camomille pour soigner ce doit être un joli petit hématome sur ma tempe.
Avait-il saisi qu'elle souhaitait le revoir, et qu'elle lui offrait le prétexte idéal pour ce faire? Ou serait-il déçu de la distance qu'elle leur imposait, pour un temps? |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Mer 26 Juin 2019 - 23:13 | | | Son regard se troubla. Alcide sembla rassembler les pièces d'un casse tête, se visualisant la scène pour la reconstituer. En quête de l'erreur qu'il devait racheter, son front se plissa, soucieux en écoutant sans l'interrompre la réponse de la jeune femme. Jusqu'ici il semblait si confiant. Trop, certainement. A présent il était hésitant, baissant la tête tout en passant une main dans ses cheveux, l'air dépité...
- Navré. Je ne...
Pas le temps. Elle prit appui sur ses accoudoirs pour se lever de sa chaise, l'obligeant à se reculer. Ce qu'il fit, se levant debout sur ses pieds pour prendre ses distances d'un pas en arrière. Alcide le vécu comme une terre qu'on labour au passage de la charrue. Remué. Retourné. Balayé. Plus inquiétant encore, elle semblait s'être tendue tout à l'heure, comme si subitement il passait du sauveur à l'agresseur. Son regard se figea aussitôt à cette pensée, l'angle de sa main soulevant ses mèches, ses doigts posés sur le front, le visage en proie à l'incertitude. Est-ce qu'elle s'était sentie brutalisée ? Tu n'es pas ton père. Pas vrai ? ... Tu n'es pas ton père. Tu n'es pas ton putain de pisse-froid d'père. Son cœur se mit alors à courir, enfermé derrière ses côtes. Il courut animé par la frousse, par saccades, et bientôt à force de trébucher, il pouvait l'imaginer chuter par terre, juteux, en rouge et bavant telle une tomate écrasée. Ne restait plus à Mathilde que d'achever son palpitant en l'écrabouillant sous son pieds!
A nouveau Rikni lui montrait tout ce qu'elle pouvait exiger de lui, pour être seulement entretenu tant bien que mal à ses trente-sept degrés. Tendant une oreille aux dires de la fermière, il se rendit peu à peu compte du grotesque de la situation qu'il avait engendré... Alcide était fixé, bien placé peut-être, pour comprendre toutes les saloperies qu'il pouvait contenir. Il lui suffisait de se contempler scrupuleusement lui-même et ce qu'il était devenu d'immondice. Un sauvage ; un de plus, un parmi des milliers d'autres. La gifle... Il se laissa sombrer dans le mutisme, affligé, déambulant de quelques pas dans la pièce, détournant soudain les yeux, qu'il posa dans l'âtre, quand elle disparu dans la pénombre pour se débarrasser de sa cape et de son tablier. Elle devait être une chimère, un leurre. C'était impératif, car dans le cas contraire les jours, les semaines passant, au vu de ce qu'elle lui montrait d'elle aujourd'hui, il ne s'agirait plus d'un simple et pathétique attrait qu'il ressentirait pour elle, mais d'un... Ça suffit! Arrête! Disparaît! Et son regard se durcit contre lui-même ; il lui fallait alors s'anéantir, ne plus y penser, fixant les sabots de la fermière pour ne pas à affronter ce qu'il pensait être de la froideur. Il préféra parcourir la chemise qu'elle lui tendait, la jeune femme lui disant ensuite que, s'il tenait à la remercier pour les soins prodigués, il aurait trois choses à faire pour elle.
- Mmh. J'aurai dû commencer par là, en vous demandant ce que vous auriez voulu que je fasse...
Le ton était étrangement posé ; celui du simple constat... Crétin! Plissant les sourcils, mais c'est bien sûr, ce qu'il comprenait à peine était pourtant évident. Ne sachant plus vraiment où poser son regard, il la remercia d'un geste respectueux du menton lorsqu'il prit le vêtement, l'enfilant sans tarder par dessus son torse. Puis ses yeux roulèrent dans les siens tandis qu'elle formulait ses trois vœux. Il s'attendait à prendre de plein fouet la sévérité de son regard, en vérité, mais à la place de celui-ci, il mira plutôt le fin sourire qu'elle esquissait sur ses lèvres. Le visage du Lupin s'en décrispa peu à peu ; elle était alors moins anxieuse, moins tendue que tout à l'heure. D'abord étonné, puis soulagé, ses épaules se relâchaient pendant que, comme par habitude, il retroussait mécaniquement ses manches.
- Tout ce que vous voudrez. Dit-il en inclinant la tête tandis qu'il s'avançait, toisant l'hématome marquant la tempe de la jeune femme. - Si je vous donne l'impression que je suis en train de couler dans les Ténèbres, que mes pieds cognent le fond du gouffre et que mon aspect tout entier vous l'assure, il y a pourtant une chose qui me différencie des autres noyés, Mathilde... Moi, je ne me suis pas arrêté de marcher sous la surface.
Ce qui semblait être un trop plein d'assurance, au fond de lui, ne l'était pas. Il était honnête quand il lui décrivait ainsi la marche inexorable de l'homme qui se savait déjà mort ; les yeux qui flamboient, il avance droit devant car il sait qu'on ne peut plus rien lui prendre. Alcide posa ensuite son regard sur le pot que la jeune femme lui avait désigné du doigt, poursuivant naturellement ses paroles :
- Je n'espère rien. Je ne demande rien. - Il se saisit alors du récipient, soulevant délicatement le couvercle pour en humer, curieux, le parfum qui s'en échappait. Il en apprenait d'avantage sur l'utilité de la camomille, avant de reporter des yeux reconnaissants sur elle, souriant - Je vous le démontrerai, si vous tenez malgré tout à ce que ce soit moi qui me charge de venir chercher les vivres. Vous avez meilleure réputation que Mornever auprès de mon Coutilier ; il sera facile à convaincre quand je lui dirais que la demande émane de vous.
Quant à la troisième. Reposant le pot, le milicien se saisit d'un linge qui traînait encore, tout juste à proximité de la bassine qu'elle avait auparavant délaissée. D'abord, la débarrasser d'une brindille venue se perdre dans sa chevelure. Ensuite, s'approchant d'elle, vint doucement la caresse de son pouce glissant sur son front, soulevant les mèches brunes qui recouvraient son hématome. - ...Ne bougez plus.
S'il se fiait aux gestes qu'elle avait eu auparavant, il lui fallait à présent nettoyer la surface de l'hématome. Ce qu'il fit, détrempant le chiffon à la surface de l'eau - une fois, deux fois, - avant de l'apposer sur sa tempe, sa main tamponnent délicatement la marque pour capturer le peu de saletés qui y résidaient. A présent, reposant ensuite le linge, Alcide joignit son index à la surface du baume afin d'en enduire l’extrémité de son doigt, pour enfin en étaler le remède.
- Votre souffle... - Il sourit, rompant le silence. - ...Sur votre braise ; la vôtre... - Nuança-t-il en dodelinant de la tête. - Pardonnez-moi d'avoir laisser mon commentaire en suspens, tout à l'heure ; c'était déplacé. Je me disais seulement... que vous en aviez peut-être besoin, vous aussi... Je vois beaucoup de choses en passant par ici, depuis nos rondes sur la route. Des travailleurs, des mercenaires à superviser... des animaux à soigner, des champs à travailler ; tout repose sur vos épaules désormais. Je me rend bien compte que vous n'en manquez pas, de souffle, mais je voulais que vous sachiez que vous pourrez toujours partager mon pain et ma furtive destinée si vous veniez à tout perdre... Je vous trouverai une place.
L'empreinte de son index fila une dernière fois sur l'ondulation que fit sa peau. Le regard bienveillant, il s'en écarta d'un pas, refermant le pot. Inspectant pendant quelques secondes son travail, il sembla satisfait quand il s'essuya ensuite les mains dans le linge.
- Et bien, on dirait que... que... Vos trois requêtes sont honorées, Mathilde. Je n'ai plus rien à faire ici ; nous nous reverrons surement lors de la prochaine ronde.
Avec plaisir... S'éloignant, Alcide rejoignit la chaise à berçant, commençant à rassembler les affaires dont il s'était séparé. Il commençait par enrouler ses bandages autour de ses avant-bras, sans traîner comme pour ne pas s'imposer d'avantage, puis il reposa ses jambières sur son épaule, se disant qu'après tout il pourrait s'équiper convenablement chez Mornever, avant de repartir faire son report à Usson.
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| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Ven 28 Juin 2019 - 0:11 | | | Visiblement, il avait senti le malaise, et s'était réfugié dans un mutisme pesant. Son attitude trahissait un combat intérieur que la fermière ne pouvait comprendre. Mathilde le regarda se décomposer, tenant la chemise en suspend dans l'air. Peut-être y était-elle allée un peu fort. Vous n'avez aucune chance, c'est exactement comme ça qu'elle commençait sa phrase qui annonçait à un jeune homme cherchant ses grâces qu'elle n'était pas intéressée. Elle se mordit la lèvre, comme une fillette prise en défaut. Il lui avait sauvé la vie et elle le remerciait en le repoussant comme un malpropre. Ce n'était pas son intention. Ce n'était pas sa volonté. Il fallait qu'elle trouve une façon de le lui dire. Mais il faut surtout qu'il s'habille!
Comme s'il avait entendu sa supplique pourtant silencieuse, Alcide prit la chemise pour l'enfiler. Son regard glissa sur le torse qui fut bientôt recouvert d'un tissu pâle. La tension qui l'habitait redescendait doucement, tandis qu'elle formulait ses demandes. Il sembla les accueillir avec un certain soulagement. Le malentendu était peut-être dissipé. Ou presque.
Marcher sous l'eau... Mathilde sourit. Elle aussi croyait marcher sous l'eau, mais ce n'est que lorsqu'on l'en avait sortie qu'elle avait compris qu'elle n'avançait pas vraiment. Il en était donc encore là, à ce moment de vie où on lutte contre vents et marée pour continuer d'avancer, comme un somnambule, sans but, sans raison.
Malgré tout. Malgré tout quoi? Elle fronça les sourcils. Il n'avait peut-être pas saisi. Elle n'avait peut-être pas été assez claire. Quand il s'agissait de donner des ordres ou d'éconduire des hommes trop entreprenants, elle était d'une efficacité sans pareille. Mais quand elle espérait revoir quelqu'un, sa franchise s'effondrait, et sa subtilité se faisait de toute évidence bien trop discrète. Pourtant... il était d'une douceur folle lorsqu'il l'approchait, pour ôter une brindille de ses cheveux - encore un geste déplacé, décidément! -. Debout devant lui, elle ferma les yeux. La fraîcheur de l'eau sembla apaiser le battement qu'elle ressentait en continu dans sa tempe. Elle soupira, ça faisait du bien.
Elle saisit le fourreau de sa dague pour le décrocher de sa ceinture et le déposer sur la table. Une façon pour Mathilde de lui dire qu'elle lui faisait confiance et que son arme lui était désormais inutile en sa présence. C'était peut-être prématuré de sa part, après tout il n'était qu'un inconnu, un milicien perdu, sans attache, imprévisible, mais elle en acceptait le risque. Elle sentit son souffle chaud caresser son front, tandis qu'il semblait murmurer, de sa voix grave, les mots qu'il aurait peut-être dû prononcer plus tôt. Il était si proche, bien trop proche, mais cette proximité ne lui déplaisait pas.
Il recula. Déjà! A peine avait-elle eu le temps de s'accoutumer à la douceur de ses soins qu'il avait fini. Pire que ça, il parlait de partir. Mathilde ouvrit les yeux.
- Euh... je... Un peu de nerf jeune fille, voyons! Elle toussa. Alcide, je... je ne manque pas de souffle. Je n'en manque plus, depuis qu'on m'a sortie de l'eau dans laquelle je croyais avancer. Les Trois m'en soient témoins, j'ai tellement d'ambition pour cet endroit que mon espoir est un immense brasier impossible à éteindre! Mais la vérité, c'est que je ne suis bonne qu'à travailler. Parce que tant que je travaille, je ne me lie avec personne. Et tant que je ne me lie pas avec quelqu'un, je n'ai pas à craindre sa perte. Elle s'assit sur la table, le dos droit, un pied ramené sous elle. Elle avait commencé à parler, il fallait aller jusqu'au bout. Elle regarda le fil du bois, dessinant les contours sinueux d'un noeud plus sombre. Je suis la dernière de la famille encore en vie. Quatorze frères et soeurs, deux parents, un mari à pleurer. En plus des vieux amis qui ont disparu avec la fange. Je peux vous dire que ça fait beaucoup de larmes. Vraiment beaucoup. Ma ferme est la braise d'espoir sur laquelle je souffle, parce que je n'ai rien d'autre. Parce que je n'ai personne d'autre. J'en suis devenue la farouche Veuve Dumas, aussi bien en amitié qu'en amour, revêche lorsqu'on essaie de l'approcher, et aussi maladroite qu'un enfant qui apprend à marcher lorsqu'on se montre bienveillant. Mais peut-être qu'avec un peu de patience, quelqu'un finira bien par m'apprivoiser.
Elle haussa les épaules, impuissante face au constat. Elle se tourna vers Alcide, qui semblait prêt à partir puisque sa mission était remplie.
- Alcide? Quand je vous demande de descendre le chemin, je ne vous charge pas de la mission de prendre en charge les denrées à partager avec vos collègues. Je vous invite. Je vous offre un prétexte pour me rendre visite, parce que j'aimerais vous revoir. Le temps d'un bavardage, ou d'un repas. Aujourd'hui, demain, comme il vous siéra. Je ne veux pas vous retenir, j'imagine que vous avez bien des choses à faire mais... si vous en avez le temps et l'envie, sachez que vous êtes le bienvenu ici.
Elle lui sourit, et regarda ailleurs. Il allait sans doute s'excuser, une fois encore, avant de sortir. Et sans doute de s'encourir à la caserne où il raconterait, à ses collègues, les élucubrations de la veuve Dumas. |
| | | AlcideMilicien
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Ven 28 Juin 2019 - 23:04 | | | Un brasier. Alcide eut un sourire tendre, mettant plus de langueur dans ses préparatifs quand il l'écouta parler, touché par ce qu'elle lui disait. Peut-être parce qu'il pouvait s'identifier à elle. Enroulant le bandage autour d'un poignet ; le ruban filant entre le pouce et l'index pour cercler sa paume, son regard passa sur ce à quoi il s'appliquait, puis sur Mathilde, et vise versa. Quelques secondes, seulement, suffirent pour qu'il s'arrête, enfin, le regard plein d'amertume. Il comprenait. La Veuve Dumas, ce pseudonyme froid, rigide, sonnant comme un irréductible titre pour les hommes de sa compagnie, confiait un peu de ce qu'elle avait sur le cœur, pour ses seules oreilles. Le milicien n'avait pas la prétention d'être cette personne qui rivaliserait avec la ferme -un sauvage ne peut le prétendre,- pourtant, contrairement à quelques autres, il l'a voyait telle que ses yeux la dépeignaient. Comme un être humain et toute la fragilité que sa nature impliquait, pourvue d'une chaleur et d'une sensibilité semblable à la sienne.
Au revoir, madame Dumas. Qu'il lui dirait poliment. Peut-être. Il aurait d'autres choses, tellement d'autres choses à dire, ne serait-ce que sur la symbolique de cette ferme, ou la perte des êtres chers, mais la ferveur, l'emportement, prenait une tournure inappropriée qui le desservait jusqu'ici. Il s'attristait de ce qu'il entendait, sans doute éprouvait-il aussi de la fierté, non pour lui mais pour elle-même, fille du Labret, quand il l'entendit parler du souffle que lui procurait sa ferme. Elle méritait bien mieux qu'un pauvre errant, rêveur, troufion sans terres, sans fortune, ne possédant ni grade, ni rang si ce n'était celui de la soldatesque. De la chair à canon toute prête à se faire étriper ; cette dure réalité à laquelle elle ne pouvait aspirer. Pourquoi se sentirait-il visé après ce qui c'était passé tout à l'heure ? Alors autant ne pas se faire d'illusion, et continuer de s'enfoncer dans le bourbier car ce n'était pas de lui qu'elle parlait. Maintenant, Alcide devait envisager le plus dur en étouffant l'attrait, en barbouiller plutôt la fresque à l'aide d'un chiffon, pour que n'en reste plus que le flou gaussien d'un énième songe. Le Lupin se dirigea alors, lentement, se baissant pour attraper sa cape et sa chemise ensanglantée, vers la porte d'entrée... Posant enfin une main sur la poignée, il mit étrangement halte à son geste, laissant filer trois points de suspension quand elle s'exprima à nouveau...
- Alcide? [...]
Bonjour, Mathilde... Il s'immobilisa, le temps d'un soupir, le regard perdu, posé sur un point indistinct. Elle lui assurait, précisant qu'il s'agissait d'un prétexte, d'une invitation ; qu'il serait le bienvenu chez elle. C'était peut-être cela, se disait-il, qu'il y avait de perfide chez lui ; feinter de ne rien comprendre comme s'il était le premier des demeurés. A moins qu'il s'agisse seulement d'une once de délicatesse, vis-à-vis d'elle, lui épargnant l'image du milicien qui bondit partout de joie dans la chaumière, à la simple idée de la revoir ?
- Je sais... - Alcide marqua une pause, avant de reprendre après réflexion - Quoique vous n'auriez pas tord en me rétorquant que je ne peux que l'imaginer ; je n'ai ni frères, ni sœurs, ni amis à pleurer... Toute ma vie j'ai... envié l'amplitude que pouvait prendre une famille ; avec ces pères, ces mères, qui ont le sens de la transmission, du devoir, du don pour le bien et le devenir de leurs enfants. Forts quand ils sont ensembles, unis, solidaires et nombreux ; la condition pour être vraiment libres, connaître la quiétude et savourer la vie... J'ai envié tout cela, cet amour que vous connaissiez, et même cette peine dont vous parlez... Je ne l'ai jamais connu, mais... pourtant je sais... Je sais... ce que ça fait. Je connais ce sentiment cruel quand on perd un être aimé...
Ses yeux étaient secs depuis longtemps, mais il déglutit péniblement, son cœur implosant sur lui-même, la gorge nouée, comme s'il ravalait une larme. Il laissa glisser ses jambières qu'il avait suspendu sur une épaule, laissant choir son matériel au coin de la porte où il s'était arrêté. Alcide marcha ensuite d'un pas lent en direction de la table, rejoignant la jeune femme, poursuivant :
- Vous êtes la dernière... La plus précieuse... La survivante à qui il incombe de transmettre tout ce que vos aînés vous ont enseignés ; ça ne doit pas être vain. L'homme qui saura vous apprivoiser doit savoir tout du fardeau que vous portez... J'espère qu'il en aura conscience, et que vous le choisirez consciencieusement... Vous parlez de craindre de perdre à nouveau, à raison, là où je vous réponds que vous devez continuer d'être patiente, et sur vos gardes, comme vous l'êtes, Mathilde... Surtout envers celui qui saura vous séduire. Soyez méticuleuse quand vous le choisirez. Il doit vous être complémentaire, pour vous qui démontrez quelle est votre force ; sinon ce veinard piétinera tout ce qui fait votre richesse, et ça... Dis-le... et ça me fera mal s'il vous gaspille...
Maintenant à ses côtés, il s'assit à son tour sur la table. Pensif, il apporta une main sur la dague qu'elle avait délaissée, se disant que, jamais, elle ne devrait s'en séparer. Il dégaina l'arme, doucement, tournant le clair de lame entre ses doigts, l'apportant sous l'expertise de son regard, s'assurant qu'elle soit suffisamment pointue, et bien aiguisée lorsqu'il passa le fil de son pouce sur son tranchant. Puis, humblement, il rengaina la dague dans son fourreau, la reposant sur le bois du meuble.
- Mathilde, j'aimerai... J'aimerai que vous me parliez toujours à cœur ouvert. Comme nous le faisons, maintenant... Si je suis le bienvenu chez vous, vous n'aurez pas besoin de dresser des remparts contre moi... parce que je ne suis pas en train de forcer vos défenses. J'aimerai seulement pouvoir entendre ce qu'il y a derrière ces murs. Juste vous entendre me plairait... Je ne suis pas l'un de ces asticots aux corps de lâches qui viennent s’agglutiner pathétiquement dans votre allée ; qu'ils bavent sur la valeur de votre ferme, ou le rapport coût et production de vos terres, ou sur la courbe de vos hanches que la bienséance me somme de taire.
Il soupira, baissant un peu la tête. Après tout, tant qu'il en était aux confidences, pourquoi s'arrêter là... Que tombe la corde.
- Ça fait depuis le mois d’août de l'an passé qu'on m'a affecté dans le Labret. Je vois beaucoup de choses, comme je vous l'ai dit... Jamais je me serai permis de vous épier, Mathilde, mais comme tout le monde vous appelait la « Veuve Dumas », mon regard s'est naturellement posé sur vous. Jusqu'ici je ne vous voyais qu'à travers une fresque, comme une chimère, belle et vivante, vaguant à vos occupations. Aujourd'hui, c'est différent... Nous parlons, vous m'invitez à partager un repas, et... je ne sais plus ce que je dois croire, ne serait-ce qu'espérer...
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| | | Mathilde VortigernFermière
| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] Lun 1 Juil 2019 - 3:06 | | | Elle haussa les épaules, incertaine. La question avait le mérite d'être excellente. Elle garda le silence un moment, et ferma les yeux pour y penser, les mains appuyée sur la table, le dos bien droit, bien que légèrement penchée en arrière, pour déplacer les tensions. A quoi devait-il s'attendre? Certainement pas à une promesse, il n'était qu'un inconnu. Un inconnu qui lui inspirait certes une certaine confiance, mais dont elle ne savait que peu de choses, après tout. Un milicien, en poste depuis un moment dans les parages, qui avait pris le temps de l'observer. Pendant un long, un très long moment. Mathilde trouvait ça légèrement étrange. Peut-être même un peu malsain. Il l’avait vue vivre avec Philibert et couler des jours heureux sur les terres ancestrales avec celui qui avait été un bon ami, plus qu’un époux aimé. Il l’avait vue porter le deuil, d’une façon qui lui ressemblait bien, en se noyant dans le travail, notamment grâce à ses voisins qui l'avaient aidée pour finaliser les récoltes. Il devait se douter que la solitude de l'hiver avait été une épreuve, pour elle qui avait longtemps été la plus sociable de la fratrie, et qu'elle avait accueilli l'arrivée du printemps avec soulagement. Il avait dû apercevoir Lisbeth, durant le peu de temps qu'elle avait passé à la ferme, sans se douter des sentiments passionnels qui les unissaient. Il devait avoir l'impression de la connaitre, et semblait se faire une image d’elle qu’il aimait beaucoup. Il idéalisait, sans aucun doute.
Elle, elle ne le connaissait pas. Le milicien semblait sans attaches, et venait de confirmer qu'il avait connu une perte tragique, celle d’un être cher, son épouse sans doute. Il était encore dans le brouillard du deuil. Si cette personne était sa seule famille, alors Mathilde comprenait le désespoir qui avait pu naître en lui, se faisant une place toujours plus grande dans le cœur de cet homme à mesure que le temps passait. Il savait se battre, elle l’avait vu, et ne craignait pas la mort, puisqu’il n’avait rien à perdre. Elle avait saisi les regards cruels qu’il portait à ceux qui attaquaient son tableau idéal. Il pouvait être doux et sensible la seconde d'après. C'en était presque effrayant.
Le silence n’avait duré que quelques secondes, un temps infiniment long pour celui qui attend une réponse, qui espère entendre les mots qu’il souhaite tant. Mathilde ouvrit les yeux, et prit une grande inspiration.
- N'espérez qu'un bon repas. N'était-ce pas là la plus sage des réponses? Sans promesse, sans risque de déception. Commençons par là, et s'il nous plait, eh bien, ce repas sera suivi d'un autre. Ou d'une promenade. Ou d'un menu service. Autant de prétextes pour nous revoir si l'envie nous prend. Et si vous découvrez, horrifié, que la veuve Dumas est totalement insupportable, n'écoute pas vos bons conseils et en plus cuisine très mal, eh bien nous resterons seulement deux étrangers qui se regardent, d'un bout à l'autre du chemin menant à cette ferme.
Elle sourit. C'était, pour le moment, tout ce qu'elle pouvait raisonnablement lui offrir d’espérer. Car Mathilde avait retrouvé sa raison, tandis que son coeur pensait encore à la flamboyante rousse qui avait quitté la ferme devant l'échec de cette relation naissante. Lisbeth aurait certainement vu d’un très mauvais œil cette invitation, pourtant bonne enfant. En fait, elle l’aurait tué dès le moment où il l’avait retenue en passant un bras autour de sa taille. Mathilde ôta les épingles de bois qui tenaient sa chevelure en place, tant bien que mal, et laissa ses cheveux se dérouler sur son épaule.
- Mais j'espère cette même honnêteté que vous me demandez de votre part. Pas de triche, pas de mensonges, pas de secrets pour faire comme si vous étiez quelqu'un d'autre. Et attention, j'ai un certain don pour démêler le faux du vrai.
Ce qui aurait pu sonner comme une menace n'était qu'une petite pointe taquine. Il avait employé de drôles de mots, sans doute bien choisis. Veinard, gaspiller, des petites choses à côté desquelles elle ne pouvait pas passer. C'était une fermière, pas une idiote. Il était peut-être amoureux de cette idée qu'il avait d'elle, et voguait entre une attitude pleine d'assurance et celle d'un enfant n'osant pas approcher d'un cadeau de peur de l'abîmer. Lui laisser se faire sa propre opinion de la réalité des choses était sans doute la meilleure façon de procéder. Au moins pourrait-elle s’en faire un ami, avec le temps.
Elle quitta son perchoir qu'était la table avec précaution. Il ne lui avait pas fait part de ses intentions. Partait-il réellement de suite? Attendrait-il encore un peu? Elle se planta devant lui, toujours assis, et le regarda, les mains sur les hanches, avec l'air de ceux qui ont l'intention de percer les mystères de ce monde.
- Alors, Alcide Lupin. Quelle est votre histoire, celle qui vous conduit aujourd'hui à marcher sous la surface d'un lac turbide où la vase se soulève à chacun de vos pas? Hm? Lupin, c’est pas un nom d’ici.
Elle se pencha lentement vers lui. Son dos tirait. Ses longs cheveux achevèrent de se dérouler, lentement, sur son épaule. Elle s'approcha encore, comme si elle allait murmurer quelque chose à l’oreille du milicien. Alcide ne bougeait pas, figé sur place par elle ne savait quelles pensées. Mathilde haussa un sourcil, se demandant ce qui pouvait bien lui traverser l’esprit à cet instant même. Elle tendit la main, et attrapa l'anse du seau d'eau qu'elle avait ramené, pour le tirer à elle. Estimant que raconter sa vie prendrait du temps, elle décida de préparer un encas. Peut-être que le premier repas, c’était pour maintenant. Et avec un peu de chance, le temps ferait son office, et Alcide Lupin, sauveur de la Veuve Dumas, deviendrait son doux soupirant. Ou un ami. Ou bien resterait-il définitivement l’étranger qui, le temps d’un repas seulement, avait devisé avec la veuve. Elle eut un sourire en coin alors qu’elle lui tournait le dos pour remplir un pichet d’eau fraîche. Pour une fois, Mathie, freine ton imagination, et prends le temps de faire les choses correctement. Elle décrocha ensuite une poêle en fonte de son support pour la mettre sur le feu.
- Une petite omelette et un morceau de pain? |
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| Sujet: Re: [Terminé] Juste un peu d'aide [PV Alcide] | | | |
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