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| [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric | |
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Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Ven 9 Aoû 2019 - 16:15 | | | 18 Juillet 1166 Des années que la fange s’était abattue à travers les contrées, des mois qu’elle avait frappée Mabrume pour mieux replonger ses habitants dans le chaos. Le temps, la vie continuaient à s’écouler, les souvenirs restaient particulièrement vifs dans l’esprit de la milicienne. Pourtant, tout s’était passé si vite que parfois elle se demandait s’il ne s’agissait pas d’un mauvais rêve. Évidemment, ses cicatrices lui prouvaient bien le contraire. Deux mois avaient finalement été nécessaires pour se remettre de ses blessures, deux semaines supplémentaires pour qu’elle retrouve pratiquement toutes ses capacités. La situation en ville restait mitigée, les tensions toujours autant présentes. La reprise du travail, couplée à sa nouvelle fonction n’avait pas été simple non plus. Pour autant, elle s’était évidemment donné corps et âme à surveiller les intérieurs de la ville, jusqu’à ce que l’extérieur ne lui manque trop du moins. Son regard ne cessait en effet de se poser sur l’horizon. Comment avait évolué l’extérieur depuis la perte du goulot ? Comment se portait le Labret ? Traquemont ? Les bourgs et les routes ? Comment étaient organisés les mordus ? Sans surprise, peu de monde se portait volontaire pour repartir à l’extérieur, surtout lorsqu’on avait la bonne excuse des priorités du Roi. Et sans surprise, ce fut finalement Serena qui allait demander l’autorisation à mener une mission externe avec son équipe. Qui le lui refuserait ? Elle avait fait ses preuves dehors, tout comme les membres de sa coutellerie. C’était donc une mission de repérage officielle qu’elle comptait entreprendre. Dès l’autorisation donnée, la milicienne se mit en marche. Elle prépara ses affaires, en amenant avec elle un cadeau qu’un ami lui avait offert avant son départ. L’idée de lui rendre visite durant son séjour suffit à lui faire étirer un simple sourire. Oui, le voir était malgré elle l’une de ses motivations premières et cela pour un tas de raison, mais surtout : elle devait lui parler. Elle s’équipa donc soigneusement de son arc et de ses lames, dont celle offerte par ses supérieurs, puis regagna un cheval réquisitionné pour l’occasion. Le voyage se passa sans encombre, même si elle devait avouer avoir été emportée par une étrange sensation en quittant la Citée. Peut-être qu’à forcer de rester à l’abri au sein des remparts, on perdait la force d’affronter le monde extérieur ? Peut-être craignait-elle plus qu’elle ne l’admettrait jamais de retomber sur une de ses créatures ? Difficile à dire, mais elle ne put s’empêcher d’admirer les murs avant de définitivement partir au sein des marais. Sans surprise, les patrouilles étaient moins ordonnées qu’auparavant, les forces étant mobilisées à Marbrume et au Labret. Certains villageois semblaient même avoir le sentiment d’être de plus en plus délaissés, oublié. Pouvait-elle leur en vouloir lorsque cela n’était que la vérité ? Arrivée au Labret, son cœur se retrouva heureusement plus léger. Ici, l’ordre semblait encore régner et les champs de plus en plus resplendissants. Elle connaissait d’ailleurs une fermière qui devait travailler d’arrache-pied. Sans doute, irait-elle également la voir avant de repartir, mais pour l’heure, Aymeric était sa priorité. Le trouver ne fut pas bien compliqué, rares étaient les nobles logés aussi loin de l’Esplanade. Son cheval l’amena donc au-devant d’une résidence anciennement abandonné. Le soleil était encore haut dans le ciel et plusieurs travailleurs s’activaient à leurs tâches respectives. Bien des regards curieux finirent par se poser en sa direction. « Je suis à la recherche d’un homme ! Balafré, brun, avec un air toujours grognon. Un noble combattant qui en ferait rêver plus d’une jusqu’à ce qu’il n’ouvre la bouche ! Il se serait perdu par ci selon mes sources ! Quelqu’un l’aurait aperçu ? »Un sourire espiègle était à ses lèvres tandis qu’elle faisait un portrait peu avantageux de son un ami. Finalement, elle descendit alors de son cheval, avant de crier haut et fort dans une amicale provocation : « Aymeric ! C’est comme ça qu’on accueille ses invités ?! »Nul besoin de se comporter trop formellement avec lui, elle le savait bien alors à quoi bon ? Attendant qu’une personne daigne se manifester pour l’accueillir, ses yeux se baladèrent sur le domaine à possibilités impressionnantes.
Dernière édition par Serena de Rivefière le Lun 3 Fév 2020 - 20:42, édité 4 fois |
| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Mer 14 Aoû 2019 - 21:12 | | | Quatre mois qu'il est installé au Labret et il commence enfin à voir le début de la fin des travaux. Trois mois que les événements du Chaudron ont eu lieu. Presque trois mois aussi qu'il héberge une part de la Compagnie des Lames, le temps qu'une meilleure solution soit trouvée. Et tout ceci anime finalement assez bien la vie du Comte de Beauharnais.
Avec l'aide de la Compagnie des Lames, les travaux pour réparer la "ferme" Pessan, qui tient du château, a gagné du temps. Il pensait finir pour l'automne, il pourrait avoir fini un mois plus tôt. Les clôtures sont faites et devraient permettre d'accueillir du bétail dans un avenir pas trop lointain. Un grand clapier, qui se remplit de lapin, et un poulailler ont été construits. Pour l'heure, quelques poules mais il a fallu trouver des astuces contre les renards. Côté lapin, les pièges ont fini par fonctionner, mais il y a aussi pas mal de monde à nourrir. Les oeufs du poulailler permettent quelques économies en nourriture et Aymeric les partage volontiers avec les fermiers de la Pessan. Et un lapin de temps à autre, pour les quatre fermiers, parfois pour la soigneuse, puis il ne faut pas l'oublier lui, sa fille, la domestique, l'érudite et Guillaume, le palefrenier. Les ventes sont donc nulles pour l'heure, mais ça améliore un peu le quotidien et ça donne du cœur à l'ouvrage.
Guillaume, lui, est heureux. En plus des deux chevaux du Comte, il s'occupe des chevaux de la Compagnie, d'une vache et de son veau. Cela laisse peu de lait, mais les quelque surplus sont confiés au fromager d'Usson. Les premiers fromages à pâte dure vont arriver et si, une fois encore, cela améliorera le quotidien, il pourra faire des premières ventes et des premiers dons. C'est pour cela qu'il a "exigé" un fromage à longue conservation. Au goût, c'est bien meilleur, puis il le sait, ça aide bien les miliciens qui partent en mission. Pouvoir garder sa bouffe trois quatre jours, et qui soit autre chose que de la viande séchée, c'est intéressant quand on est surpris par une météo capricieuse. Et si Aymeric n'est plus dans un logement appartenant au Roi, il convient de continuer à être bien vu. Son exploit lors de la chute du Chaudron lui aura valu d'être positivement remarqué. Continuer à soutenir la Milice, avec sa forge et de la nourriture, et aider ainsi le Labret et les habitants de Marbrume, il considère cela comme un sacerdoce. Et qu'il travaille à perte pour l'heure ne l'inquiète pas trop, ces pertes restant raisonnables, et il a des économies.
Mais c'est aussi parce qu'il est économe qu'il travaille lui même aux réparations. Faire appel à des artisans aurait été utile mais coûte des sous. Il achète le matériel, reçoit des conseils et c'est la Pessan qui paie, car après tout elle est la propriétaire, mais se montrer raisonnable aide aussi un partenaire commercial à vous faire confiance. Aymeric fait du bon travail et ne coûte pas trop cher, cela aidera pour les investissements plus tard. Il ne doute pas qu'Apolline avait prévu un budget plus conséquent pour la restauration de sa ferme. Et comme il veille aussi au bien être du personnel, que ça soit le sien ou celui de la Pessan, le bilan devrait apparaître comme positif.
Et c'est pendant qu'il réparait un volet au premier étage qu'il entendit des cris féminins et il mit un petit temps à reconnaître Serena de Rivefière. C'est la seule blessée à qui il a rendu visite après les événements, et à qui il a offert son ancien arc, en espérant qu'à son réveil, elle apprécie le geste. Mais, si pour ses affaires il est revenu à Marbrume, il n'a pas été prendre de ses nouvelles. Car forcément, il aurait été amené à croiser Sydonnie d'Algrange, devenue Sydonnie de Rivefière, épouse de Roland, héritier qui n'a plus rien de noble à ses yeux. Parler à son épouse aurait pu être perçu comme un aval pour ses actions dans le chaudron et Aymeric s'y refuse. Il se refuse également à raconter ce qui s'y est passé. Mais forcément, cela n'aide pas à revoir Serena, son amie, ou Merrick, ou Artorias, compagnons de combat.
- Je n'accueille mes invités que quand je les ai invités ou qu'ils se sont annoncés, Coutilière !
Un signe de la main pour qu'elle me repère et avant de descendre la rejoindre, j'ajoute :
- Messieurs dames, je vous présente la coutilière de l'externe Serena de Rivefière, qui a vaillamment défendu les abords du chaudron et sauver des milliers de vie par son action. Visiblement remise de ses blessures, du moins physiquement.
Vu le boucan qu'elle a fait, Aymeric joue la carte de l'humour et se presse de descendre du premier pour rejoindre Serena et l'inviter chez "lui". Il lui fait un tour d'horizon rapide, indiquant là les champs qu'il veille mais qui appartiennent à la Pessan et de l'autre côté l'espace qui devrait bientôt être utilisé pour l'élevage, puis la fait entrer dans la bâtisse immense, puis dans son bureau.
- Que me vaut l'honneur de ta visite ?
S'il s'agit d'une visite officielle, après tout elle est coutilière, les choses se font à peu près dans les formes. S'il s'agit d'une visite officieuse, il se détendra un peu. |
| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Jeu 15 Aoû 2019 - 16:52 | | | Elle rit en entendant le son de sa voix alors qu’elle relève la tête pour le voir. Visiblement en forme, elle se sentit néanmoins bien plus gênée lorsqu’il s’amusa à la présenter telle une héroïne. Ce n’était pas le premier ni le dernier à la traitée de cette façon, mais elle ne se considérait pas comme telle, au contraire. Et puis, il y avait bien plus de mérite dans toute cette histoire. Un peu embarrassée donc, Serena lança de simples sourires aux quelques curieux avant de confier son cheval à l’un des palefreniers.
Son regard se posa finalement sur la silhouette de son ami, s’avançant à lui pour aller le saluer plus convenablement. De là, elle le laissa lui décrire un peu les lieux où ils se retrouvaient, prenant le temps de contempler les champs, le domaine et les différents projets en cours de préparation. Difficile de ne pas être épaté par le travail déjà accompli. L’avenir du domaine Pessan semblait des plus prometteurs et cela ne pouvait que la ravir sincèrement.
Dans le bureau, la milicienne scruta l’environnement plus par reflexe que par réelle curiosité. Toujours aux aguets lorsqu’elle se trouve dans un lieu étranger et à l’extérieur, elle prit le temps d’analyser rapidement où elle se trouvait avant de reposer toute son attention sur lui. Elle luit sourit, un sourcil arqué.
«Parce qu’il me faut une raison pour venir te saluer ? »
Elle laissa planer un court silence avant d’ajouter.
« Plus sérieusement, je n’ai pas encore eu l’occasion de te remercier. »
Sa main se porta alors à son arc pour lui montrer qu’elle l’avait bel et bien reçu et le portait avec elle. C’était une attention qui l’avait touchée, elle devait bien l’avouer. Tous deux ne semblaient pas toujours être sur la même longueur d’onde, mais elle savait l’apprécier. Ses mains allèrent donc décrocher quelques lanières à sa ceinture pour y décrocher un fourreau et le présenter au noble héros.
« Ce n’est pas grand-chose. Elle n’a pour ainsi dire rien de spécial, mise à part m’avoir accompagnée longuement à travers les âges. J’espère qu’elle te sera autant utile qu’à moi. »
Il s’agissait de son ancienne épée, sa première. Elle était de bonne facture, mais relativement simple. Évidemment, ce qui la rendait si précieuse à ses yeux était les souvenirs qui l’accompagnaient. Elle avait toutefois décidé que sa place serait mieux aux côtés d’un autre combattant, maintenant qu’elle avait reçu une lame bien plus spéciale.
Elle souleva donc la lame encore précieusement enfouie dans son fouteau de ses deux mains, afin de la présenter avec respect. Sourire aux lèvres, elle observa les réactions de ce dernier, espérant qu’il accepte le geste.
« Tu sembles t’être bien installé, ici à ce que je vois ! Un vrai p’tit coin de paradis. » Elle le détaille un moment et ajoute. « Tu vas bien ? ... Je suis désolée pour ta femme, j'ai appris il y a peu. Et ton enfant.»
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| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Lun 19 Aoû 2019 - 21:07 | | | Ces lieux sont mieux décorés que son ancienne maison à l'Esplanade, pour une raison simple : Cela n'est pas chez lui. Il en a "hérité" avec les meubles et n'a rien changé à l'agencement, puisqu'il n'est pas chez lui. Il y a bien ces trois statues sur l'âtre, des statues des Trois, qu'il prie régulièrement. La piété du Comte n'est pas un leurre pour être bien vu et il reste fort discret sur son attachement aux Trois et sur les dons, généreux, qu'il fait au Temple. Depuis qu'il est Comte, ses dons ont doublé, passant de un à deux écus d'or par mois, ici au bénéfice du Temple d'Usson. Il ne prend pas pour sien les dons faits par les fermiers ou par son personnel et fournit aussi le Temple en peau, pour aider les jeunes mariés pour leurs noces. Il n'a pas trouvé de cerf pour l'heure, mais fera don des bois si cela se reproduit. Alix a le même tempérament. Du temps où elle était dans la rue, si un petit travail lui permettait de confectionner quelques gâteaux, elle les offrait pour les orphelins du temple. Ici, elle coud, elle s'occupe de sa chèvre et continue d'en faire bénéficier le temple, à la grande fierté du paternel.
Ainsi donc, la visite est officieuse. Voilà qui m'arrange. Je craignais un besoin de la Milice en viande. Ma production de viande de chèvre à Marbrume est répartie entre la Chope sucrée et la Caserne, mais c'est au niveau des fromages que l'aide offerte par la fermette des faubourgs est utile. Alors certes, ici, j'ai prévu de faire de l'élevage aussi, mais je doute pouvoir produire quelque chose avant l'automne au plus tôt, et le moment où je pourrai vendre de la viande est encore un vague projet utopique. Je peux à peine faire paître mes deux chevaux pour l'heure, une vache et son veau, de quoi démarrer une toute petite production de fromage avec la fromagère d'Usson. Fromagère qu'il rend chèvre à vouloir un fromage à pâte dure, qui se conserve vraiment mieux, qui a plus de goût, mais prend du temps à affiner. La rentabilité est moindre, car rares sont ceux prêts à payer plus chers un fromage parce qu'il a de meilleure qualité de conservation ou de meilleures qualités gustatives, mais Aymeric y tient. Souvenir du temps où il était milicien, à chasser le braconneur. Ici aussi, il faudra attendre l'automne pour les premières ventes. Ce seront les premières ventes "Pessan Beauharnais". Alors, certes, du fromage, un peu, et surtout pour la Milice, mais faut bien commencer quelque part. Puis ça sera un gage de qualité, ça, j'y tiens. Le Comte ne vend pas de la merde. Mais bon, avec les taxes et ce que prend la fromagère, puis ce qu'on gardera pour nous, on ne fera à nouveau pas encore de bénéfice.
J'offre à Serena un vrai sourire quand elle m'offre son épée, réalisant qu'elle aussi a du recevoir du Roi une épée de haute facture. J'ai eu un peu de mal à changer d'arc, mais je ne regrette rien. Et il ne faut pas être grand clerc pour réaliser l'importance du cadeau qu'elle me fait.
- Je ne suis pas un grand bretteur, je préfère les dagues, mais cela ne m'interdit pas d'apprécier les jolies armes. Celle-ci est simple, usée un peu, bien équilibrée. Elle a du vécu. Alors, si tu me le permets, plutôt que de la porter, j'aimerai la poser sur le mur, avec deux-trois clous pour la soutenir. Une épée offerte par une héroïne, ça a de la gueule, et je passe divers contrats ici.
Le début de discussion est courtois. Quand elle admire l'installation, je lui demande simplement.
- Tu veux rester un jour ou deux ? On pourra en profiter pour s'exercer à l'arc, je me sens un peu seul dans ce domaine ici. Puis c'est pas comme si on avait des pièces qui manquent. La compagnie occupe les deux derniers étages, mais au premier, il me reste trois chambres de libre. Ca sera l'occasion pour faire un ragoût de lapin en prime. Tu verras, la nourriture qui sort directement de terre, y'a que ça de vrai !
Avec une invitée, on pourra sacrifier un des lapins, ils engraissent bien, mais toutes les femelles ne sont pas fertiles. Bon, quelques-uns commencent à être domestiqués, donc nés en captivité, là où d'autres sont encore le produit d'un piégeage réussi. Mais il faut faire le tri entre les femelles qui font des lapereaux, celles qui n'en font pas et les mâles qui s'intéressent aux femelles à séparer des paresseux qui ne s'intéressent à rien, et ceux qui s'intéressent aux autres mâles. Il y a plein de choses qu'il me faut apprendre. La suite est plus surprenante et je dois marquer un temps avant de lui répondre.
- Je pensais la chose connue, pour être franc. Et puisqu'il faut être franc, cela ne me fait rien. J'ai juste ressenti de la colère sur le moment même, mais par la suite, j'ai vaqué à mes projets sans m'en inquiéter...
Je réalise que mes propos sont flous, alors je décide d'expliquer. Forcément, ça fera encore un laïus long comme un voyage entre Marbrume et le Labret par temps orageux, mais tant pis.
- Début octobre, quand j'ai repris le rôle d'héritier, la famille était ruinée, si on oublie mes économies personnelles. La seule chose que je pouvais vendre était mon titre et je n'allais pas être trop regardant. Il me fallait des cours aussi. J'étais pas très doué en étiquette ou en alphabétisation et il fallait quand même donner le change, mon paternel n'étant plus en état de représenter notre nom. C'est ainsi qu'Aalicia a débarqué. J'ai rapidement compris qu'elle avait le sou et l'ambition de redevenir noble et comme j'ai dit, je ne pouvais pas être regardant. L'origine de sa fortune était discutable, sa vertu encore plus, mais elle m'a assuré qu'une fois lié devant les Trois, elle respecterait les attentes du Temple, qu'elle serait fidèle et aimante et j'ai promis de ne pas nuire à son enfant à naître, qui n'était pas de moi.
Un mariage loin d'être un mariage d'amour. Le Comte qui ne voulait pas de son titre épousait la veuve noire, mais il devenait fortuné et elle pouvait devenir Comtesse, tout le monde était content.
- Puis j'ai appris que j'avais eu une fille par le passé. J'avais... fricoté avec une sang bleue à l'époque où tout le monde ignorait que j'étais fils de Comte la veille d'un départ en mission qui allait durer plusieurs semaines et à mon retour, j'ai cru qu'elle ne m'avait pas attendu. Nous ne nous étions rien promis, et elle s'est mariée depuis. Mais sa grossesse a été cachée et la petite abandonnée au Temple. En découvrant ma bonne fortune, la génitrice d'Alix a estimé que je pourrais assurer un avenir à notre fille et j'ai fini par la retrouver, puis je l'ai adoptée, ce qui n'a pas été simple. Sauf qu'Aalicia, sachant qu'elle potait un enfant qui n'était pas de moi et découvrant une enfant de moi qui n'était pas d'elle, a mal vécu nos retrouvailles père fille et a voulu me forcer à faire un choix. Quand elle a compris que mon choix se porterait sur Alix, elle a tenté la fugue. En quittant le domicile conjugal, elle a renoncé à une promesse faite aux Trois et je n'ai même pas pris la peine de la faire rechercher. Je l'ai déclarée disparue et j'ai pris possession de tous ses avoirs, comme mon statut d'époux m'y autorise. La mort de mon père a suivi de peu. Elle allait être comtesse mais a péché par orgueil. J'imagine qu'elle est morte dans sa fuite avec sa suite. Ce n'était pas une mauvaise personne, dans l'absolu, mais je t'avoue que je n'y songe plus du tout. Mais je me remarierai avec une épouse qui a des valeurs et pour laquelle j'éprouve de l'attachement. Puis qui pourra me donner un fils. Son rang et sa fortune ne joueront plus un rôle. Mais pour l'heure, je suis encore marié, jusqu'à ce que le mariage soit dissous par le Temple, et je continue de respecter mes voeux. Foi, Force et Honneur... Souvent j'en suis fier, mais parfois c'est difficile.
Un sourire un peu triste, puis puisqu'on y est, une question :
- Et toi ? Tu arrives toujours à échapper à la corvée ? Tu as su faire renoncer tes vieux maintenant que tu es une héroïne et que tu as pris du grade ? Je t'avoue que je n'étais pas trop au courant des rumeurs du temps où je vivais à l'Esplanade, alors en vivant ici, tu imagines bien... |
| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Mar 20 Aoû 2019 - 20:41 | | |
« Une héroïne ? Arrête un peu… Je ne le mérite pas, toi en revanche… »
Elle lui sourit simplement alors qu’elle ne lui dicte que les faits. Et pour appuyer ses dires, elle s’amusa à lui jouer une petite révérence tout en ricanant. Il était agréable de retrouver ici un ami. Se séparer de sa lame était douloureux, mais elle savait que sa place était mieux ici. Et cela même si elle ne servirait que de décor. Au fond, elle pourrait toujours être utile, à disposition en cas de besoin et c’était le plus important.
Sa contemplation s’arrêta net lorsque le noble chevalier vint lui faire une proposition des plus surprenantes. L’invitation était tout à fait inattendue, surtout de sa part. Ainsi, ses yeux s’étaient mis à écarquiller longuement, le temps que son esprit fasse toutes les connexions.
« Avec plaisir ! Cela me fera du bien également, mais je ne pourrai pas rester trop longtemps… Je souhaite rendre visite à une certaine fermière avant de retourner à mon devoir. Maintenant que tu es ici, tu dois certainement la connaître : Mathilde Dumas. Elle était à mes côtés lors de l’invasion. Aussi vaillante que n’importe quel soldat. J’espère qu’elle va bien. »
La retrouver après ce qu’elles avaient vécu n’était pas anodin. Au contraire, c’était même quelque chose de réellement important pour elle. Une étape parmi tant d’autres pour mettre les mots sur ce qui s’était passé et pouvoir continuer à avancer. Oh, elle avait un peu de retard, elle le savait… mais ses blessures l’avaient figé dans le temps. Désormais, la milicienne tentait de se retrouver, à son rythme.
Et en parlant de reconstruction, elle ne pouvait qu’admirer les progrès de son camarade. Et cela malgré les quelques rumeurs concernant la disparition de sa femme encore enceinte. L’occasion pour elle de lui témoigner son soutien en signe de respect. En revanche, jamais elle n’aurait imaginé que le sujet était si… sensible, compliqué et discutable. Son visage pali à mesure qu’Aymeric lui contait son récit. Elle qui était désormais si loin des affaires de la cour, n’avait jamais été mise au courant de la situation dans laquelle se trouvait ce dernier, pas dans les détails du moins. Lèvres pincées, elle ne put que baisser la tête en réalisant les faits.
« … Pardon… je ne voulais pas… »
Ses paupières se refermèrent pour contenir ses émotions. Une grande inspiration plus tard, elle conclut.
« Tu as fait du chemin. Regarde où tu en es… Tu peux être fier. »
Le ton et le regard se voulaient rassurants. Elle n’était personne pour juger lui ou son épaule et leur acte. Il n’était pas non plus sa place pour elle de commenter quoi que ce soit. Tout ce qu’elle pouvait dire était qu’il avait réussi à avancer malgré les difficultés et pour cela… oui, il pouvait bien relever la tête.
Le retour de flamme en revanche fut bien moins agréable pour elle. Un rire qui n’avait pourtant rien de joyeux franchit ses lèvres alors qu’elle baissa son regard.
« On peut dire ça… »
Le regard triste à son tour, elle devinait devoir lui donner un peu plus d’explication. Nerveusement ses doigts allèrent tapoter le bois de son bureau tout en s’éloignant comme pour remettre inconsciemment de la distance entre eux.
« Père est mort lors de l’invasion, tel un soldat. »
Pensive, son regard n’était plus là. Sans doute qu’elle revoyait l’image de son père, son sourire, son autorité, ses leçons… Une perte douloureuse qui l’attristait encore aujourd’hui. Aucune larme ne traversa néanmoins ses joues et laissa le temps à son ami de comprendre tout ce que cela pouvait bien impliquer.
« Pour l’heure, Roland a bien mieux à faire que de se soucier de moi. Mère également. Et puis, même s’ils venaient à vouloir m’utiliser, je doute qu’ils trouvent le moindre prétendant. » Elle déglutit alors que sa main vint instinctivement se poser sur son ventre. « Pas avec de telles blessures. » En effet, beaucoup craignait qu’avec de telles blessures, elle ne puisse plus confectionner la vie. Comment le pourrait-elle lorsque le berceau avait été aussi abîmé ? C’était du moins ce que la plupart de ses soigneurs pensaient. Ainsi, en prenant déjà en compte sa situation, son caractère et maintenant… ça, peu de chance qu’un homme veuille un jour la prendre pour épouse. Elle pourrait s’en réjouir, elle devrait même. Mais maintenant qu’elle était ainsi démunie, un vide habitait son cœur.
« En parlant de mon frère… »
Le sujet étant trop sensible, la milicienne revint sur l’une des raisons de sa visite, reposant un regard des plus sérieux sur le Comte.
« J’aurai aimé que tu me racontes votre combat… lors de l'invasion...»
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| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Lun 26 Aoû 2019 - 20:01 | | | - Moi, j'ai juste fait mon boulot. Et entre nous, j'aurais préféré être resté ici plutôt que d'assister à cela. Tant le couronnement que le tournoi, où on m'a quand même collé une armure. Et le reste, j'en parle même pas !
Bon, au niveau de l'image, ça m'a sans doute aidé. Je suis un héros, youpie ! Mais j'aurais préféré conserver un certain anonymat, histoire de monter mon projet tranquillement. Heureusement, elle accepte de loger ici et j'en suis heureux, cela apportera un peu d'animation puis une autre présence féminine pour Alix. C'est que je souhaite qu'elle voit le plus de femmes au profil différent, ici une noble guerrière, pour savoir son univers des possibles et choisir son futur en ayant vu une pléthore de choix.
- Je vais prévenir Bérénice de faire préparer ta chambre et de prévoir un couvert de plus, et qu'on mangera du ragoût de lapin.
c'est assez enjoué que je quitte un instant mon bureau, avant de revenir quelques minutes plus tard. Outre l'information donnée à Bérénice, j'ai pris et tué deux lapins. Par contre, je laisse à Bérénice le soin de les vider et dépiauter. Visiblement, elle prend du plaisir à le faire. Et soit dit en passant, elle s'est vraiment améliorée depuis son engagement. Mais la priorité reste Serena.
- Alors comme ça, Mathilde a pris part au combat à tes côtés lors des événements ? Je t'avoue que je l'ignorais. J'ignorais même qu'elle s'était rendue à Marbrume pour le couronnement. J'en aurais entendu parler si elle avait été blessée, donc comme mon Alix et moi-même, elle s'en est sortie sans dommage. Faut croire que de venir d'ici porte chance. Alors oui, je connais Mathilde, mais d'avant mon installation. Par ton biais, d'ailleurs. Tu avais parlé de deux habitants du Labret qui t'avaient aidée et comme je prospectais pour l'Ordre, je suis allé les trouver. Si Lanre ne donne plus signe de vie, pour Mathilde, un accord avec l'Ordre a pu être trouvé, même si je l'ai quitté. Elle reçoit de l'aide en termes de bras et aussi pour payer moins d’impôts, ce qui je l'espère lui facilite la vie. Je l'ai revue une fois avant les événements, mais après j'ai eu trop de travail. C'est que retaper et clôturer, ça prend du temps. Tu lui remettras mes salutations ?
Bon, mon explication sur Aalicia a jeté un froid. Je balaie ses excuses d'un geste de la main, pour lui signifier que ça n'a vraiment pas grande importance. Mais c'est moi qui jette un froid en posant une question que j'imaginais innocente.
- Mes condoléances pour ton père, je pense que tu y étais attachée. Si je ne me trompe pas, c'est donc Roland le pater familias maintenant...
Je l'ai dit sans joie, juste pour noter l'information. Cela fait donc un abruti de plus dans la cohorte des nobles, on est vraiment pas aidé. Et dire que cet incapable passe pour un héros. Mais bon, je ne vais pas le salir devant sa soeur qui le tient en estime, du peu qu'il a compris, puisqu'elle se réjouissait que sa meilleure amie l'épouse. Finalement, l'étiquette a du bon, ça oblige à réfléchir pour ne pas commettre d'impair. L'annonce de sa stérilité est un autre coup dur, et si je ne veux pas nier sa douleur. Par contre, l'étiquette s'envole quelque peu. C'est qu'on est pas maître en apprenant, et la "diplomatie" n'est vraiment pas le fort d'Aymeric.
- Ne crois pas que je veuille mettre en cause le diagnostic de gens bien plus compétents que moi, puisque dans le domaine j'y connais rien. J'imagine que les soigneurs t'auront dit qu'il sera difficile d'avoir des enfants, voire impossible, avec tes blessures et c'est probablement vrai. Mais Serus est celui qui au final décide. Alors, certes, une épouse sans blessure est plus rassurante, puisque surtout dans notre monde on épouse surtout un ventre, parfois une dot. Mais qui sait, la nature et Serus peuvent parfois être joueurs. Je te dis ça aussi parce que tu pourrais imaginer que comme il n'y a pas de risques, tu pourrais te détendre dans quelques bras confortables. J'ai eu une petite surprise comme ça de mon côté. Je ne regrette absolument rien, sinon de l'avoir appris fort tard. Toi, forcément, tu serais au courant bien plus tôt. Mais je suis fou de ma petite Alix. Son adoption est effective. Elle est vicomtesse de Beauharnais et elle apprend assidûment son rôle. Et d'autres. Je lui laisserai le choix, et je pense qu'elle commence à le comprendre. Mais mondaine lui plait bien jusqu'ici et je ne la freinerai pas. Même si entre nous je lui souhaite un métier bien plus utile.
Effectivement, ma vision de la noblesse n'a pas changé depuis que je suis devenu Comte. J'essaie d'être l'un de ceux qui ne soit pas un parasite ou un inutile. Je le dis moins. A elle, je le dis. Après tout, elle a aussi posé des choix courageux, comme rejoindre la milice. Par contre, quand elle me parle de son frère et du combat, je me ferme comme une huître, et mon regard perd en sympathie. J'hésite entre garder le silence et lui confier des indices. J'opte pour la seconde option.
- Il n'a pas osé en parler ? TU M'ETONNES ! Alors, chère Serena, ce qui se passe sur le front reste au front, seuls ceux qui l'ont vécu peuvent échanger sur le sujet. Comme tu vas le faire avec Mathilde j'imagine. Vois-tu, je pourrai ressentir le besoin d'échanger dessus, moi aussi, mais ça ne serait certainement pas avec ton frère. Quand je pense qu'il a le statut de héros...
La grimace que je fais exprime le dégout le plus profond, mais je reprends vite contenance.
- Et si on évitait les sujets qui fâchent ? Je n'ai pas envie de te mentir et si j'exprime le fond de ma pensée, il faudra que tu me tues pour laver l'honneur de ta famille. Ce n'est pas à moi qu'il faut en vouloir parce que le "Comte de Rivefière" refuse de te dire ce qu'il a fait dans le Chaudron. Mais pour faire simple. Il ne sera pas le bienvenu ici et je pense qu'il le sait. Et je refuserai tout net qu'il soit le précepteur de ma fille, même si dans ce domaine il devait être le plus compétent.
Et j'espère fermement que si un autre combat devait avoir lieu, il aurait la décence d'admettre qu'il est un incapable, un idiot et un lâche et qu'il se retirera du champ de bataille, mais ça, je ne le dirai pas. |
| | | Bérénice MonetPaysanne
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Mer 28 Aoû 2019 - 10:47 | | | Elle s’était accoudée à la fenêtre, un doigt entre les lèvres, en se demandant d’où pouvait bien venir ce cri. Non pas que c’était dérangeant, parce du brouahaha, c’était tout juste si maintenant il n’y avait plus que ça. L’air était devenu gai. Ca lui faisait un drôle d’effet. Et si au début elle ne s’était pas sentie particulièrement enjaillée à l’idée que toute une compagnie occupe les étages supérieures du domaine, et qu’il lui arrivait encore de les dévisager avec un qui-vive habituel, une méfiance silencieuse quoique indiscrète, elle pestait parfois en son for intérieur en se demandant si monsieur le Comte ne pouvait pas tout simplement héberger des prêtres et des prêtresses, pour changer. L’animation qui découlait de tous ces gens qu’elle voyait s’affairer malgré elle et tout autour, lui déplaisait grandement moins que ce qu’elle était prête à reconnaître. C’était la vie qui s’élevait en même temps que l’été, que les fleurs sauvages, et qui répandait son odeur comme une traînée de pollen. Elle en respirait des relents. Un regain qui lui suscitait pourtant parfois du dégoût.
C’était une fille, ou plutôt une femme qui se présentait là, mais habillée à la façon d’un homme. Bien armée avec ça. Mais une femme quand même, mais ça sentait déjà bien mieux qu’un homme. Elle détestait les hommes, sauf peut-être le Comte de Beauharnais, mais ça non elle n’en était pas encore persuadée. En tout cas le portrait que la jeune femme fit du Comte devait être bien dressé, puisque la servante reconnut immédiatement qui était dépeint. Ce fut avec un rictus moqueur qu’elle ferma la fenêtre et disparut dans les couloirs. Elle n’était pas du genre enfin à épier des conversations qui ne l’intéressaient pas. Somme toute puisque ces deux-là semblaient se connaître et s’entendre assez pour se permettre ce type de familiarité, la jeune femme devinait que l’hospitalité du Comte lui donnerait bientôt du travail supplémentaire. Mieux valait donc se rendre en cuisine.
D’ailleurs, elle ne s’y trompa pas. Quelques temps plus tard, il apparut, lui donnant ses ordres et lui abandonnant deux lapins qu’elle mit de côté. Mieux valait d’abord apporter les rafraichissements et s’occuper de la chambre avant d’y traîner l’odeur du sang des bestiaux. Le vidage appelait toujours une certaine fragrance, forte. Délicieusement attirante. Sur cette pensée elle prépara un plateau avec deux coupes et un pichet et se dirigea enfin vers le bureau du Comte. Mais au moment où elle s’apprêtait à toquer, son geste resta suspendu dans l’air ; la conversation lui glissa dans les oreilles, et le Comte paraissait lancé dans l’une de ces longues tirades. En tout cas, cela n’arrangeait pas les affaires de la domestique qui ne savait plus si elle devait interrompre son maître ou bien repousser l’inévitable. C’était qu’elle s’accoutumait encore sur certains points, elle n’était pas du métier après tout. La vie de paysanne était bien plus simple en société ; on pouvait bien être une ratée des bonnes manières que personne ne s'en souciait.
Le sujet semblait brûlant. Voilà il était embarrassant d’entrer comme ça, sur des mots qui paraissaient épineux. Enfin, elle n’allait pas rester là toute la journée non plus ; c’était qu’il y avait le lit à faire, les lapins à préparer. Cela la décida, de toute façon elle se fichait bien de ce qui se disait ou ne se disait pas. Alors on l'entendit toquer assez faiblement.
Elle pénétra la pièce, plateau en main, mais seul le tintement des coupes qui y siégeaient sortait sa présence et sa démarche de leur silence. Les pas la séparant de la table de travail du Comte lui paraissaient infiniment longs. Elle veilla à ne pas se montrer maladroite, puisque d'ordinaire elle ne l'était pas. Enfin, elle finit malgré tout par déposer, sans grande cérémonie, son plateau devant les principaux intéressés. Bérénice ne savait pas faire de chichi, évidemment. Mais comme elle ignorait si l'on attendait d'elle qu'elle dise quelques mots ou bien se taise avant de disparaître comme elle était apparue, elle se demanda ce qui ne la ferait pas paraître aux yeux du Comte ainsi que de son Invitée, trop indiscplinée.
Elle profita du temps qui lui était imparti pour remplir les coupes et envisagea la marche à suivre. Ce faisant, son regard finit par se porter sur celui de la milicienne. Fut-ce alors ces yeux ornés par ces reflets et ces éclats de pierres précieuses, comme une intensité parfaite qu'elle contempla alors un peu vivement, mais la servante portait maintenant dans l'angle de sa bouche un petit étonnement, un frémissement. Elle se sentait finalement assez mal à l'aise, parce qu'elle apprenait encore à bien se comporter, et que sa confusion, elle le savait, devait lui donner à cet instant un air stupide. Sa nervosité lui arracha finalement un sourire maladroit, quoique spontané. Elle bredouilla un « Bonjour » ô combien pitoyable et nervé de stress qui installa fatalement une carnation fiévreuse sur ses joues, puis, sur ces entrefaites elle jeta un petit coup d’œil au Comte, mais comme elle n’avait rien à lui dire et qu’il l’impressionnait toujours d’une certaine façon au point qu’il l’aurait rendu plus empotée encore, elle ne demanda pas son reste et y vit une occasion pour s’enfuir. Tout de suite et le plus loin possible. Elle regretta de ne pas avoir un trou de souris. C'était toujours pratique.
C'est ainsi que sur une prestation aussi digne que celle d'un bouffon de roi, on put voir Bérénice se décomposer sur place, trouver tout juste le chemin de la sortie, à vive allure si bien qu'elle manqua de se prendre la porte -ou bien qu'elle se prit peut-être dans la confusion, d'un vilain coup sur l'arrête du nez, avant de disparaître purement et simplement.
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| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Jeu 29 Aoû 2019 - 21:13 | | |
« Bien sûr ! »
Maintenant qu’il le mentionnait, il était vrai qu’elle se souvenait vaguement de lui avoir parlé de ses rencontres au Labret. Cela ne faisait que quelques mois que les événements s’étaient produits et pourtant cela lui paraissait si lointain. Presque toute une vie s’était écoulée dans son esprit. Cela lui fit réaliser à quel point les choses avaient changé en l’espace de si peu de temps. La société, la ville, son entourage et même elle-même n’avaient pas été épargnés. La suite de la conversation l’amena d’ailleurs à poursuivre cette pensée. Main posée instinctivement sur son ventre, elle avait confié une partie de ses lourdes pensées à son ami. Son visage s’était aggravé par une tristesse sans fond. Elle avait perdu bien des personnes, bien des choses lors de l’invasion. Évidemment, elle n’était pas la seule et faisait même partie des chanceuses au vu de sa situation. Mais cela n’enlevait en rien à la douleur.
« Oui… C’est ce qu’ils m’ont dit. Je ne peux qu’espérer la bénédiction de Serus.»
Elle souriait sans joie aucune. Expliquer était difficile, mais elle était un peu comme un enfant dont on privait d’un jouet dont il ne s’était jamais intéressé. Ce n’était qu’une fois cet objet retiré, qu’elle avait finalement posé son intérêt dessus. Voulait-elle un enfant ? Non, la réponse n’était pas si simple. Elle avait juste l’impression de s’éloigner de plus en plus du droit chemin et avait atteint, semble-t-il, le point de non-retour. C’était donc assez nerveusement qu’elle repensait à sa condition avant de se focaliser sur celle du Comte.
De là, son visage reprit un peu de vie et de tendresse. Qui aurait imaginé Aymeric si attachée à sa petite fille ? Non, maintenant qu’elle le voyait ainsi, ce n’était pas si étonnant. Il avait toujours eu la carrure d’un chef, d’un meneur et le voir donc en chef de famille, avec des enfants sous sa direction n’était pas quelque chose d’incohérent à son image, au contraire. Et cela amusa beaucoup Serena de l’imaginer totalement épris pas sa fille, Alix.
« Es-tu en train d’essayer de me dissuader, ou au contraire, m’encourager ? Parce qu’à te voir si rayonnant, ce genre de surprise n’a pas l’air si mal.» Elle ricana doucement avant de reprendre avec plus de sérieux. « Je suis soulagée de te voir si bien portant. Le rôle de père te va comme un gant… et j’en suis sûre, Alix est chanceuse de t’avoir à ses côtés désormais.»
Oui, voir la joie, le bonheur sur le visage d’un ami faisait un bien fou. Surtout que cela n’était plus si fréquent au vu du contexte actuel. Or, Aymeric semblait très bien s’en sortir dans ce domaine-ci. Ses projets se portaient bien, sa famille aussi, enfin si on omettait son épouse évidemment. Dans tous les cas, il ne se laissait pas abattre et c’était une force qu’elle admirait chez lui. L’atmosphère était si bonne et sincère que Serena crut bon de profiter de l’occasion pour amener un sujet plus délicat encore sur la table.
Erreur.
Sa réaction réussit à la faire sursauter. Ses yeux écarquillés remplis d’incompréhension et d’interrogation, elle écouta tenir vaguement des propos peu élogieux sur son frère aîné et ses faits d’armes. Difficile aussi de ne pas remarquer le mépris sur son visage et dans ses yeux. Et si bien entendu, elle s’était attendue à de la réserve sur leurs actions, elle n’avait jamais imaginé pareille...
« Aymeric ! »
Ses sourcils s’étaient froncés et sa gorge serrée à ses propos. Jamais personne n’avait osé tenir pareil parole sur sa famille en sa présence, encore moins sur son aîné. Elle ne pouvait lui en vouloir pour son honnêteté, mais cela restait bien douloureux à entendre et à imaginer. Qu’était-il donc arrivé au Chaudron pour qu’ils réagissent ainsi ? Jamais Roland ne lui avait paru si éloigné. Mais, il serait mensonge de dire qu’elle avait tout tenté pour le faire parler. Au fond, elle craignait certainement d’entendre la vérité. Et le comportement d’Aymeric la faisait d’autant plus douter. Le visage baissé, les lèvres pincées, le regard perdu, elle mit à temps avant d’insister.
« Je… .»
Par le temps de terminer sa phrase qu’un bruit à la porte vint brusquement les interrompre. Encore tendue et évidemment frustrée d’être ainsi coupée, elle posa un regard sévère sur la femme qui se présenta à eux. Naturellement, son regard s’adoucit légèrement en comprenant alors l’identité de l’intruse. Habituée depuis bien longtemps à être accompagnée de domestique, sa présence ne la surprit pas plus que cela. Ses manières en revanche… Oh, on ne pouvait pas dire qu’elles étaient mauvaises, non, mais maladroites. La milicienne devina assez facilement que la femme n’était pas habituée à tenir ce poste, par encore en tout cas. Heureusement pour elle, Serena ne faisait nullement partie de ces nobles trop à cheval sur les codes de conduites. Ce fut d’ailleurs tout l’opposé lorsqu’elle réalisa à quel point la jeune femme était nerveuse en leur présence. Un sourire doux se dessina sur ses lèvres comme pour la rassurer et l’encourager.
« Bonjour et merci. .» Ses yeux la regardèrent s’en aller, disparaître telle une souris prise en piège. Silencieuse durant toute son intervention, elle ne put retenir un rire léger lorsqu’elle finit par s’échapper. Absolument pas moqueuse, c’était plutôt attendri, et compatissant qu’elle eût observé sa maladresse.
« Bénérice, mh ? .»
Oui, pour l’heure Serena accepta de mettre le sujet de son frère de côté. Elle n’avait après tout pas envie de gâcher la soirée. Mais bornée comme elle était, Aymeric devait bien se douter que ce n’était que partie remise. En attendant, l’intervention sur celle-ci donnant une formidable excuse pour changer de sujet.
« Encore maladroite, mais je la devine bien attentionnée. J’espère ne pas l’avoir effrayée… Il faudra lui dire que je ne mords pas ! Enfin pas tout le temps ! .»
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| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Mar 3 Sep 2019 - 20:12 | | | Le sujet de sa stérilité est douloureux pour Serena et même un Aymeric peut le comprendre et c'est pourquoi je n'insisterai pas trop sur le sujet. Mais étrangement, c'est elle qui le relance, mais pas pour parler de son infortune mais pour parler de ma bonne fortune.
- Te dissuader sans doute, car c'est un choc quand on y est pas préparé. Moi, j'ai eu la chance de la découvrir alors qu'elle était déjà une enfant. Elle est plus proche de l'adolescence que de ses premiers pas. Alors c'est sans doute un âge magique pour un papa. Elle a soif d'apprendre, elle s'imagine que je sais tout, elle s'intéresse à tout, sans trop de préjugés. Elle a de l'énergie à revendre et est capable d'avoir des activités. Elle s'occupe de sa chèvre, des oeufs, elle fait de la couture. Les jours chauds et ensoleillés, je l'emmène avec moi poser des pièges, qu'on fabrique. Elle chasse le chat, elle apprend à grimper n'importe où, bon, certes, pas des activités de nobles mais des activités indispensables quand on vit à l'extérieur, et le Chaudron nous l'a prouvé, indispensables tout court. Si les gens s'étaient préparés, le bilan aurait été moins lourd parmi les civils.
Et avec un bon commandement, il aurait été moindre parmi les miliciens aussi, encore plus du côté des chevaux. Cette attaque était une hérésie et on leur a offert une statue ? Bordel, ils devraient être cités en exemple de ce qu'il ne faut pas faire. Mais eux au moins ont la décence d'être morts. Tout ceci nous éloigne d'Alix
- Bref, et même si elle m'épuise parfois un peu, Alix est un rayon de soleil. Mais ma domestique, Bérénice, qui a un fils d'un an, fils qui donc vit ici, m'apporte moins de joie. Oh, pas parce qu'il n'est pas de mon sang, je me vois mal le traiter comme de la merde, je savais qu'il existait quand j'ai engagé sa mère. Il balbutie quelques mots, il tient à peine debout, il bave, il semble s'intéresser à un truc puis change complètement de sujet, même du regard. A son âge, je ne le comprends pas, je ne vois pas quoi en faire et il m'énerve. Il est mignon comme tout, mais lui, je n'arrive pas à communiquer avec. Lui, je ne vois pas le potentiel. Quand il va voir la chèvre et qu'il veut lui faire une caresse, il la gifle. Et bizarrement, j'crois bien qu'il m'aime bien. En fait, cette "chose" m'intrigue. Tu vois, plus grand, j'aurais pu lui apprendre les armes, la monte, le bricolage et c'aurait été drôle, mais là...
Le pire, c'est que j'l'aime bien, le fils de Bérénice. Juste, avec Alix, j'ai l'impression de savoir quoi faire, alors qu'avec lui, pas du tout. Mais si j'peux l'aider à se bâtir un petit avenir, je ne m'en priverai pas. Après tout, Guillaume l'a bien fait pour moi. Et j'en étais là de mon bon esprit quand elle a abordé son frère et bon sang, j'ai eu du mal à contrôler ma colère. Et j'ai bien cru que ça allait partir en dispute quand elle m'a interpelé, offusquée, alors que je m'étais contrôlé. S'il y a bien un domaine où l'on est différent, c'est sur l'amour que l'on porte à nos frangins respectifs. Mais à la différence du sien, le mien a la décence d'être mort. Comme quoi, ce ne sont pas toujours les meilleurs qui partent les premiers.
- ... !
Bérénice rentre au moment où ça allait exploser, timing parfait, la tension retombe d'elle-même.
- Merci Bérénice...
Deux simples mots, je la sais en manque de confiance. La suite le prouve, elle commet deux trois maladresses sans que Serena ou moi ne le relevions. Serena tente de désamorcer l'affaire, je saisis la balle au bond.
- Elle est courageuse et n'a pas peur d'apprendre. Elle était ouvrière agricole mais prête à accepter n'importe quel travail. Elle m'a inspiré confiance et a bénéficié d'une courte formation dans une auberge pour apprendre les gestes nécessaires pour bien faire un lit ou faire cuire les viandes. Et franchement, elle s'en sort bien. Mais elle craint tellement que je change d'avis, que sa bonne fortune disparaisse, que je la renvoie donc, qu'elle se met un peu trop de pression. Elle n'est pas totalement à sa place ici, tout comme moi, qui suis Comte et non intendant, ou Guillaume, qui est surtout un maître des chevaux et se retrouve avec d'autres animaux. Ca me fait penser. Ici, chacun doit gagner sa gamelle. Demain, et j'espère que tu ne l'as jamais fait, tu trairas la chèvre et tu iras chercher les oeufs. Je présume qu'Alix sera ravie de t'expliquer. Si tu l'as déjà fait, c'est moins amusant.
Je lui souris.
- Souvent, mon personnel mange avec nous, je n'aime pas mettre une distance entre nous. Alors tu pourras le lui dire toi-même, que tu ne mords pas. Evite le "pas tout le temps", elle le prendrait au premier degré. |
| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Lun 16 Sep 2019 - 15:45 | | |
Pour le coup, elle ne pouvait qu’approuver les dires du Comte au sujet des enfants et encore. Pas à l’aise, ni très fan des enfants de base, elle devait avouer déjà les trouver plus intéressants et approchables que les bambins. Au moins, pouvait-elle essayer de communiquer avec, contrairement à un bébé qui… restait un domaine totalement inconnu.
« J’ai toujours été admirative devant la patience des mères à l’égard des enfants. Elles ont un don. »
Qu’elle n’a visiblement pas, car elle ne ressent simplement aucune attirance envers eux, au contraire, elle préfère les fuir. Elle espérait d’ailleurs pouvoir éviter le contact avec cet enfant, le petit du moins, car elle ne se voyait vraiment pas réussir à faire quoique ce soit avec. L’idée lui donnait même la chair de poule, mais elle préféra ne plus trop y penser pour l’heure. Elle improvisera un sourire de politesse au pire des cas et un maigre compliment, voilà. Bon plan.
Heureusement d’ailleurs que la mère de ce dernier vint interrompre leur conversation avant qu’elle ne dégénère significativement. Visiblement, elle devrait choisir, meilleure occasion pour aborder un sujet bien plus sensible qu’elle ne l’aurait pensé. Finalement, ne souhaitant guère se disputer davantage, Serena saisit l’occasion pour dévier la conversation et revenir sur une atmosphère plus amicale.
« Je suis sûre qu’elle saura parfaitement s’adapter… Tout comme toi ou ce Guillaume. »
Non, elle se faisait pas trop de soucis pour eux. Ils avaient l’air partir sur de bonnes bases alors, il n’y avait pas trop de raisons. Peut-être, éviter d’organiser un bal tout de suite ici, mais au vu du caractère du Comte, c’était logique. En revanche, elle ne pouvait pas en dire autant pour elle-même lorsqu’elle apprit les tâches que lui réservait ce dernier.
Ses yeux écarquillés parlaient d’eux-mêmes. Naturellement, jamais elle n’avait encore essayé de traire la moindre bête, mais était-ce cela ou la présence d’Alix qui l’angoissait autant ? Difficile à dire, mais une chose était sûre, elle priait les Trois pour qu’il ne daigne pas la laisser trop longtemps seule avec sa gamine.
« Je sens qu’on va bien s’amuser… »
C’était dit avec un peu de nervosité, mais en soi, elle le pensait quand même un peu. Et puis, l’idée de travailler ne la dérangeait pas, au contraire, elle était ravie de pouvoir – essayer – de se rendre utile. Ça lui changerait de la fange et des marais en tout cas.
« Oh… » Surprenant, ou pas finalement, mais c’était vrai qu’elle n’avait pas l’habitude de voir les domestiques manger à table. Elle sourit. « Tu as raison, c’est plus convivial ainsi ! Je compte plus le nombre de fois que j’ai invité Margareth à faire de même, mais… » Une idée lui vint soudain. « Oh ! Elle pou… » Serena s’arrêta immédiatement dans son élan en se remémorant les mots du Compte à l’intention de son frère. L’invité à venir pour qu’elle puisse apprendre à ses côtés semblait …compromis. Un soupir lui échappa. « Je suis sûre qu’elle serait ravie de lui donner conseil, si un jour vous veniez à passer par Marbrume. » Malaise. Elle se doutait bien qu’il refuserait. Elle chercha donc à contourner la chose en se dirigeant vers la porte.
« Bien, décrivez-moi donc votre ouvrage, mon Comte ! Il me tarde d’en apprendre davantage ! »
Elle sourit en sa direction avant de sortir elle-même du bureau, observant alors avec un peu plus l’endroit avec curiosité, l’invitant donc à lui faire un peu visiter.
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| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Dim 29 Sep 2019 - 13:14 | | | Alix s'apaisait un peu de la folie vécue à Marbrume, pendant le couronnement. Bien que la campagne ne soit pas exempte de dangers, la vie régulière qu'elle menait et la présence de son père, des mercenaires qui vivaient chez eux, et de Bérénice, apaisait l'enfant, diminuait ses craintes et ses cauchemars de jours en jours.
Elle avait donc pratiquement récupérer sa joie de vivre. Elle continuait de s'adonner avec passion à la couture, à l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, et se complaisait dans la compagnie des lapins, des poules et de sa petite chèvre qu'elle s'ingéniait à soigner chaque jour. La présence d'enfants avec qui jouer et rire ne lui manquait pas, car elle était habituée à la présence des adultes pour seule compagnie ; mais elle n'était pas fâchée, chaque jour, de tisser des liens plus forts avec le petit Alfred, qu'elle adorait. Il était si drôle, avec ses grands sourires naïfs, ses grands yeux innocents, ses balbutiements de bébé - mais la petite fille avait de la peine à comprendre pourquoi Bérénice ne semblait pas à l'aise qu'elle s'amuse avec l'enfançon. Maman-nourrice avait toujours besoin d'aide, et en tant qu'ainée de la "fratrie" un peu étrange avec lequel Alix avait grandie, elle avait pris l'habitude de les prendre en charge autant que possible.
Mais avec papa, la situation était différente. Elle était chez elle dans cette immense demeure, et elle avait la chance de ne plus devoir gagner son pain - ainsi seuls les liens affectifs étaient les plus importants.
Et ce matin-là, Alix se sentait remplie d'énergie. Elle avait soif d'apprendre, de faire plaisir à son père, encore et encore, sans doute à l'excès, dans la crainte à jamais informulée qu'il ne meure sans qu'elle ait pu lui démontrer combien elle l'aimait. Dans la peur de tout perdre si elle n'apprenait pas assez vite, et qu'encore une fois, elle se retrouve sans rien, sans ressources, sans espoir ni avenir.
C'est ainsi qu'elle avait commencé par chercher son père dans le jardin, car il était souvent attelé à réparer tout ce qui le nécessitait dans le domaine ; mais un mercenaire du Capitaine, occupé à s'entrainer, lui avait alors indiqué qu'il était rentré à l'intérieur avec une femme. La curiosité piqua aussitôt le nez de l'enfant. Une femme ? Son ancienne épouse peut-être ? Ou une nouvelle compagne de lit de son père ? Inconsciemment, elle détesta immédiatement l'idée. Devoir renoncer à tout l'héritage, se préoccuper à nouveau de comment elle allait vivre dans l'avenir la remplissait d'effroi, tout cela parce qu'un petit garçon pouvait naitre ! Ce n'était vraiment pas juste - mais de toute façon, c'était ainsi. Les Dieux décidaient de tout, et tout ce qu'il fallait faire, c'était prier.
Ce fut donc avec un mélange de crainte et d'excitation que la petite fille réintégra le salon, à petits pas. La porte du bureau était fermée, mais des voix s'en échappait. Elle serra un peu son ouvrage contre elle, pour se donner du courage ; et fila à la cuisine pour demander à Bérénice de faire chauffer du lait aux épices, avant de déposer un peu de gâteau à la carotte sur deux assiettes. Vite, elle ramena le tout sur une petite table, et sursauta un peu, quand enfin, la porte s'ouvrit sur une jeune femme étonnamment musclée, mais aux traits beaux et bien dessinés.
Alix finit par s'avancer, un peu intimidée.
- "Bonjour.. bienvenue au domaine de Pessan ! je suis Alix. Euh... vous voulez un peu de lait aux épices ?"
Bien décidée à se montrer bonne maitresse de maison, l'enfant s'inclina avec toute la grâce dont elle était capable, et dédia un sourire un peu nerveux à son père et à sa compagne... anxieuse de mieux de la connaitre.
- "Les mercenaires m'ont dit que quelqu'un était arrivé, alors je dois vous accueillir !"
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| | | Aymeric de BeauharnaisComte
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Dim 6 Oct 2019 - 22:04 | | | Décidémment, cette discussion est pleine de surprise, concernant les enfants.
- Je présume qu'il en ira différemment quand ton frère aura son premier enfant. On se découvre des trésors de patience quand il s'agit de son sang. Et les heureux parents seront ravis de confier le petit monstre à tata Serena, surtout quand il sera difficile. Tu ne peux t'imaginer les confidences qu'on me fait maintenant que j'ai le statut de "papa".
Mais trêve de sourires, voilà qu'on parle de mes gens. Bérénice doit s'habituer à son statut de domestique, je suis bien d'accord avec ça. Mais les avantages sont suffisamment nombreux pour qu'elle s'y fasse. Puis j'estime être un patron correct. Pas toujours agréable, ne rêvons pas, mais correct. Par contre, je tique un peu sur "ce" Guillaume.
- Guillaume est palefrenier. il travaillait déjà pour notre maison du temps de mon grand-mère, en tant que fils de son père. Puis il a travaillé pour mon père, comme palefrenier, à la mort du sien. Il fait partie de ceux qui ont suivi le Comte lors de l'invasion de la Comté. Lorsque mon frère est mort avec les chevaux, il devait perdre son travail, mais j'ai choisi de le garder. Parce qu'il m'a élevé et m'a appris la nature, les chevaux et m'a encouragé dans mes décisions, espérant pour moi le meilleur, et pas l'image. Lorsque les de Beauharnais sont entrés dans Marbrume, il est le seul à m'avoir salué. Il a même affirmé être fier de moi, et que milicien du Duc, c'était un poste respectable. C'est plus qu'un domestique, c'est un père de substitution. Et pour ne rien gâcher, l'élevage que j'envisage ne fonctionnera pas sans lui. Je le paie à sa juste valeur, mais il m'aurait suivi même si je le payais moitié moins. Voilà jusqu'où va sa loyauté.
Faut pas croire, je lui aurais bien fait la tête, pour le principe. Même si je sais pertinemment qu'elle pensait à bien pour mes gens de maison et leur adaptation. Guillaume retrouve ses racines ici, et Bérénice ne les a pas perdues. C'est plus pour l'érudite qu'il s'inquiète, mais elle semble se plaire ici, elle aussi. Mais pas de doute, le visage déconfi de Serena quand elle réalise qu'elle va devoir traire une chèvre vaut tout l'or du monde. E-PI-QUE ! Raah, il y a des petits bonheurs simples. Et je pense qu'elle va savourer le moment. Je ne sais pas si c'est la perspective de traire la chèvre ou d'être avec Alix qui l'effraie le plus. Et pourtant, cette femme a déjà affronté du fangeux et passer une nuit seule dans les Marais.
Je soulève un sourcil en voyant sa réaction quand elle réalise que je prends souvent mes repas avec les domestiques. Je lui ressortirai volontiers l'importance de l'équipe, que sans eux je n'arriverai à rien, ce qui est vrai, mais il n'empêche, je réalise une fois encore que je mets décidément l'étiquette bien à mal. Mais, histoire d'être franc, j'ai été tellement habitué à la Cantine à la Milice que de manger seul dans un baraquement me met mal à l'aise. Alors que dehors, ça ne me pose aucun souci. Le reste, ce sont surtout de bonnes excuses. L'esprit d'équipe ne serait pas brisé si Bérénice mangeait tranquillement dans une autre pièce avec son fils et elle ne s'en porterait pas plus mal. Le seul avantage, c'est qu'ils peuvent m'exposer leurs doléances sans trop de craintes. Je suis plus souple quand je mange, plus à l'écoute aussi.
Bon, Serena souhaite faire le tour du propriétaire et ça n'a vraiment rien de choquant, mais c'est le moment où Alix, certainement poussée par la curiosité, se décide à nous rejoindre en nous proposant du lait aux épices. Une idée à elle. Bérénice aurait opté pour un vin, même si elle sait son Comte de patron peu friand de ce breuvage.
- Vicomtesse de Beauharnais, j'ai le plaisir, l'honneur et l'avantage de vous présenter la coutilière Serena de Rivefière. Comme vous pouvez l'entendre à son particule, à savoir le petit "de", Serena est de lignée noble, et pourtant elle a fait le choix de prendre les armes quand les femmes y furent autorisées. Ce n'est pas la première milicienne que nous accueillons chez nous. Peu avant notre départ de l'Esplanade, nous avions déjà accueilli une plus haute gradée encore : la Sergent Sydonnie d'Algrange. Et bien, figure-toi que ladite Sydonnie a épousé le frère de Serena et que les deux sont d'excellentes amies. Tout comme je suis ami avec Serena, parce que nous partageons un trait commun celui d'avoir choisi la milice avant notre rang, à un moment de notre vie.
Mon sourire à Alix est large, bien que cette cicatrice sur la joue le rende un peu "spécial" et grimaçant. Alix en sait désormais sa sincérité.
- Serena, je vous présente ma fille, la Vicomtesse Alix de Beauharnais. Elève assidue, tant dans le domaine des lettres que des armes, qui devient habile à la chasse aux chats, aucune raison que je la prive d'un entraînement qui a fait preuve de son efficacité et dans l'escalade, tout en maîtrisant déjà mieux que son père l'art de l'étiquette et toutes ces fadaises qui plaisent tant à la Cour et si peu au Comte, sauf quand il s'agit d'elle. Nous allions faire un tour du propriétaire et je serai ravi que tu nous accompagnes, jeune fille. D'autant que Serena doit gagner sa croute et que je lui ai donné comme tâche de traire la chèvre et de ramasser des œufs, pour le repas de demain matin. Je pense que tu seras parfaite pour lui montrer comment faire.
Alors, Aymeric ne s'attarde pas trop pour les pièces existantes au rez-de-chaussée. Les maisons à l'esplanade ont les mêmes atours, salle d'eau, bureau, salon, cuisine, coin cave, il les désigne simplement.
- Il n'est pas plus utile que je t'explique pourquoi j'ai fait abattre l'escalier qui mène au premier ni pourquoi j'ai fait blinder les portes et fenêtres. Alix, Serena est comme moi une milicienne de l'externe qui voyage parfois en solitaire dans les marais. Elle connaît donc les principes de sécurité que je ne cesse de répéter, car la moindre erreur peut avoir des conséquences dramatiques. L'immense avantage, ici, est que la maison soit en pierres, et en pierres épaisses. il reste une chambre d'ami au premier, tu l'occuperas et tu repartiras le ventre plein demain matin pour aller voir Mathilde. Bien, on va sortir par devant et faire le tour.
Chose dite, chose faite, mais il en profite aussi pour donner une information de plus.
- J'héberge actuellement une partie de la Compagnie des Lames, ils occupent les deux derniers étages, ce qui n'a que des avantages. Les nouvelles lois royales ont amené à nous des bannis suite à des morsures et ils ont besoin de vivre, eux aussi. Les vols et agressions augmentent, je ne t'apprends rien. Mais attaquer un domaine où vivent une dizaine de mercenaires et un comte archer qui a survécu au Chaudron, cela nous offre une réelle sécurité. Puis, entre nous, comme la Compagnie rend des services et qu'ils sont considérés comme les "hommes de l'intendant" puisque je les accueille, leurs bonnes actions aident à ma réputation, ce qui facilite encore mon intégration par ici. Alors, ce petit parterre est hautement décoratif. C'est Bérénice qui s'en charge et elle le fait avec goût. Je me dis que les parterres de fleur devant les maisons pourraient devenir une mode aussi à l'Esplanade. Comme quoi, le Comte grincheux qui fuit ses condisciples peut aussi s'avérer raffiné et surprenant...
J'ai tenté de le dire sérieusement, mais mon rire est venu tout gâcher. Bah, qu'importe, je suis convaincu que ça pourrait plaire, aux dames principalement. L'inconvénient, c'est que ça attire les insectes, mais bon.
- Sur la droite, au loin, tu vois deux fermes. De vraies fermes. Autre chose que ce bâtiment-ci, pompeusement nommé "la Ferme Pessan" mais qui tient du petit château et qui dans les faits était surtout une résidence secondaire de campagne. Deux familles vivent dans chaque maison. Ce sont des fermiers. Ils s'occupent de tous les champs cultivés. Ceux-ci appartiennent à la Pessan, j’œuvre pour assurer leur sécurité et les aider si je le peux. En échange, ils me fournissent, moi et mes gens de maison, en légume. Je les fournis en viande quand je le peux, au retour de chasse. J'ai aussi prévu la visite d'une soigneuse pour eux, le métier prend tellement de temps qu'ils ont rarement l'occasion d'aller voir un soigneur pour un petit bobo. Et tu le sais comme moi, un petit bobo peut vite tourner en catastrophe. Et eux sont ravis que la grande bâtisse soit occupée, ça leur fait du passage, de la protection et des ventes aussi, parce qu'il faut bien que la Compagnie se nourrisse, elle aussi. Et cela fait que je retrouve un peu le domaine de mon enfance, même si je n'en suis pas le propriétaire. J'essaie de gérer au mieux tout ça.
C'est un vrai tour du propriétaire qu'il lui fait, et il essaie d'être un peu didactique, aussi pour Alix, qui peut-être ne réalise pas encore tout à fait en quoi certains choix de son père sont réfléchis. La Vicomtesse se doute que j'aurai accueilli le Capitaine même sans besoin de protection pour le domaine, car je lui suis redevable. Mais prévoir une soigneuse pour du personnel agricole, c'est assez novateur, tout comme le regard que le Comte porte sur le petit personnel. Aymeric a connu les petits travaux, leurs difficultés et il sait se mettre à la place d'autres artisans et travailleurs, même s'ils œuvrent dans des domaines que lui ne maîtrise pas, comme l'agriculture ou la couture, par exemple. Mais il reste un bon négociateur, pas parce qu'il sait arnaquer les gens, mais parce qu'il sait faire sentir à l'autre qu'il respecte son travail. Et que donc, il ne l'arnaquera pas. Il veut des contrats où chacun est satisfait. Lui en ne payant pas trop cher. L'autre en tirant un bel avantage. Et l'équilibre se trouve quand chacun y met du sien. Et Alix est du même moule de ce point de vue, elle respecte le travail des autres et s'y essaie. Elle ne trouve pas choquant de ramasser des crottes de chèvre ou de coudre, ou d'aider pour la vaisselle. Et Alix a mérité tous ses repas jusqu'ici, comme chacun ici.
- Alors, ici, ces champs, ce sont des prés, des lieux où je peux faire paître des animaux. Outre mes deux chevaux et le tien, il y a ceux de la Compagnie. Et Guillaume est heureux, car cela fait un mini cheptel. Possible même qu'on ait un poulain du côté de la Compagnie d'ici au printemps. J'ai fait l'achat d'une vache qui attendait un veau. Là, il a un mois et demi. Grâce au lait produit par sa mère, on a démarré une petite production de fromage à pâte dure. En septembre, je pourrai en vendre à la Caserne d'Usson, tout comme ma fermette des faubourgs fournit la caserne de Marbrume. Pas en quantité monstrueuse, mais le bon fromage qui reste bon quand on passe trois jours dehors, il vient de chez nous. Pas exclusivement, j'espère.
Cela peut sembler anodin, il peut y avoir des choses bien plus importantes qu'un peu de viande ou un bout de fromage de temps à autre, mais Serena pourra sentir qu'Aymeric en est fier, de son fromage à pâte dure. C'est qu'ils sont peu nombreux à prendre ce temps. En période de disette, dès qu'on peut manger, on mange. Prendre le temps est un luxe, et les seuls qui peuvent réellement en bénéficier sont ceux qui doivent rester plusieurs jours dehors. Et par les temps qui courent, ceux-là sont rares. Bon, Aymeric évite d'expliquer que le veau ne deviendra pas taureau avant un sacré bail, puis qu'il faudra une autre vache pour qu'il commence à faire des petits, que forcément il devra vendre la mère, ce qui fera d'un coup énormément de viande, mais qu'il ignore où en sera le monde à ce moment. Donc, ici, c'est un projet à long terme, qui fera une grosse rentrée, mais une seule. Il montre aussi quelque chose de particulier.
- Cela, c'est notre outil à économie. Le bois, c'est sympa, mais cher, surtout quand il faut le brûler. Et une bicoque pareille, ça met du temps à chauffer. Alors, on fait des bûches en bouse. Un mélange bouse paille bien sêché brûle bien et ne nous coûte rien, sinon qu'on doit les mettre dans les moules. Alors ce moule est frais, celui-ci date d'une semaine, celui-là de deux, et la réserve, là, on la laisse sécher encore un peu, mais elle est bonne à consommer. On va faire de très grosses réserves, pour quand l'hiver viendra. D'autant que quand la Compagnie partira, on aura moins de... source de chauffage. Cela n'est pas odorant. Je te conseille de faire pareil à l'Esplanade. C'est Guillaume qui m'a fait découvrir cela et je ne regrette pas. En plus, cela se range mieux que les bûches qu'on passe des heures à fendre. Et des heures, dehors, quand la Fange se balade...
Ce n'est pas l'idée la plus brillante du monde. Serena pourra remarquer que les chevaux, la vache et le veau, dans leurs enclos, ont accès au cours d'eau, ce qui est une réelle facilité. Remplir un abreuvoir est un boulot lourd. C'est plus simple de donner à boire à des poules, des lapins et une chèvre. Un ou deux seaux d'eau suffisent. Et avec l'aide des mercenaires, ramener de l'eau par une chaîne n'est pas compliqué. Faut juste être économe quand le temps est couvert. Il serait dommage de perdre un homme parce qu'on a mal géré les gourdes.
- Et voici le coin petit déjeuner. Bon, les lapins, c'est le clapier, faut juste songer à les nourrir, mais rien qu'avec l'herbe, ils peuvent se débrouiller. Là, c'est le poulailler, je présume que tu l'avais deviné. Les oeufs sont en général dans les nids, mais parfois, faut chercher un peu. Et parfois, on en laisse deux ou trois, histoire qu'il y ait des poussins. On peut alors manger les poules qui se font vieilles ou celles qui font trop de bruit... Et au bout de la corde, tu trouves la petite chèvre. Je vais laisser Alix t'expliquer comment on la trait et comment on gère son lait. C'est un boulot fort matinal, j'espère que vous savez vous réveiller, Coutilière
Il passe une main dans les cheveux d'Alix et la laisse quelques instants avec Serena, ce qu'elle vivra certainement comme un gage de confiance. Elle a une mission, apprendre quelque chose à la dame milicienne et Aymeric est convaincu qu'elle le fera bien. Tout comme il est convaincu que Serena gardera les sens aux aguets pour ne pas qu'elles se laissent surprendre par un éventuel fangeux, même s'ils se font rares par ce temps. Quand on a connu les marais, l'attention ne se relâche pour ainsi dire jamais, sinon dans des murs. Il rejoint le salon et s'y installe, des questions plein la tête. Doit-il réellement parler de ce qui s'est passé dans le Chaudron ? C'est qu'il y tient, à son amitié avec Serena. Les vrais amis sont rares.
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| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Jeu 21 Nov 2019 - 16:29 | | |
Comme tout à chacun, le Comte de Beauharnais avait ses défauts, néanmoins l’une de ses principales qualités résidait dans sa droiture et sa loyauté. Chose qu’il lui rappelait à l’instant en parlant si gracieusement de son palefrenier. Certains auraient jugé qu’il portait très d’estime pour ses employés, mais Serena ne pouvait que comprendre son intérêt. Elle-même se trouvait étrangement chanceuse d’avoir encore Margareth et Marcelin à leur côté depuis de nombreuses années.
Acquiesçant donc à ses propos, elle laissa la conversation suivre son cours jusqu’à finalement l’heure de la visite. À peine eut-elle le temps d’ouvrir la porte qu’une frimousse pointa le bout de son nez. Surprise, la milicienne s’arrêta net pour détailler l’enfant dont elle avait aisément deviné le nom. Alix de Beauharnais, ses oreilles avaient entendu ce nom dans bien des situations sans jamais pouvoir y mettre un visage. Voilà chose faite. Et elle devait bien avouer être un peu perplexe. S’était-elle attendue à une demoiselle plus sauvageonne ? Peut-être. Ses yeux allèrent instinctivement en la direction du père cherchant ainsi les similitudes dans les traits de leur visage alors que ce dernier venait à les présenter.
Mal à l’aise et désarmée face à l’innocence d’une enfant, il fallut un peu de temps à la milicienne pour choisir ses mots. Sourire sincère, mais un peu crispé, elle aussi ravie que nerveuse à l’idée de passer du temps avec cette dernière. Finalement, ce fut en prenant l’allure et la gestuelle d’un chevalier que Serena s’inclina devant la jeune vicomtesse pour la saluer.
« C’est un honneur de vous rencontrer… Votre père n’a de cesse de faire vos éloges. »
Redressée, elle détailla à nouveau la jeune femme avant de se reconcentrer sur le Comte. Peut-être aurait-elle du glisser un mot sur leur ressemblance frappante ? De mémoire, les femmes faisaient souvent ce genre de réflexion, mais pour tout avouer, elle n’avait jamais compris en quoi un bébé, un bambin encore une enfant pouvait autant ressembler à son parent. Pas qu’elle les trouvait particulièrement différent, simplement on pouvait lui présenter le fils de l’aubergiste comme son enfant, elle y croirait également. Bref, elle préféra pour l’heure ne rien ajouter jusqu’à ce que Aymeric redonne quelques explications à la petite.
« Même les guerriers les plus chevronnés ne peuvent garantir protection là dehors. C’est pourquoi il ne faut jamais sous-estimer le danger… C’est une chance d’avoir une telle bâtisse, mais plus encore d’avoir un père expérimenté, car elle seule ne suffit pas à défendre du danger. »
Combien de forteresses étaient tombées face à la fange ? Les murs devaient être utilisés intelligemment pour tenir à l’écart toutes menaces et elle espérait aussi que la jeune fille en ait parfaitement conscience. Suivre les règles n’était jamais chose aisée à son âge, mais il était crucial pour elle de les accepter. Et puis, il n’avait pas que la fange dont il fallait se méfier. Mais ça, elle devait déjà s’en être rendu compte à travers son jeune âge en ces temps troubles.
La présence de la compagnie des lames la surprit un peu, sans pour autant la déranger. Il n’était pas si rare pour la milice de travailler en collaboration avec un deux mercenaires. Pour autant, cela ne voulait pas dire qu’elle leur prêtait sa confiance. Après tout, à ses deux, on trouvait de tout et n’importe quoi au sein de mercenariat. Et puis, ils manquaient cruellement de discipline, mais… La compagnie avait sa réputation et elle ne doutait pas qu’Aymeric resterait vigilant. Elle l’espérait du moins.
« Les habitants de la citée avaient besoin de coupables sur qui déverser peurs et colères. La cour n’a rien trouvé de mieux que de pointer du doigt ceux venant d’échapper à une mort certaine… »
Le mépris, la déception se devinèrent aisément dans les paroles et le regard de la milicienne. Comme beaucoup, elle avait placé de nombreux espoirs en ce nouveau souverain qui n’avait pas attendu plus de temps pour lui faire perdre toute attente en bannissant de pauvres innocents.
« Ridicule. »
Avait-elle finalement lâcher en fermant un instant ses paupières, encore hantée par les visages, les regards et les cris désespérés du peuple qu’il était censé protégé. Mais l’heure n’était pas à la colère et elle n’oubliait pas la présence de l’enfant. Un maigre sourire rassurant raviva son visage alors qu’elle reposa son attention sur la visite.
« J’espère que tu me feras l’honneur d’en gouter le moment venu. Pour ce qui est du…chauffage… J’espère réussir à convaincre Mère d’accepter l’idée, car si tu dis vrai, nous pourrions effectivement faire beaucoup d’économie. »
Avoua-t-elle sans vraiment être sûre d’y parvenir. Les nobles n’étaient pas encore tous prêts à abandonner leurs conforts et leurs manières alors… Elle soupira intérieurement avant d’observer les animaux, notamment les poules et la chèvre qu’elle allait de voir apprivoiser. Mais pour l’heure, ce n’était pas les bêtes qui l’inquiétaient le plus, mais bien la vicomtesse. Lâchant un sourire forcé à son vieil ami, elle le regarda s’éloigner d’un air désemparé avant de poser son regard aux alentours, puis sur sa jeune enseignante.
« Et bien… Jeune vicomtesse, je vous écoute ! En espérant que vous me pardonnerez ma maladresse…»
Oui, parce qu’on est clair, les mains de l’ancienne Vicomtesse de Rivefière n’étaient bonnes qu’à manier les épées.
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| | | Alix de BeauharnaisVicomtesse
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Ven 22 Nov 2019 - 10:49 | | | Son père était si drôle ! Il faisait semblant de tenir aux convenances pour lui présenter son amie. Même si c'était elle aussi une noble, il n'était pas si cérémonieux d'habitude, et cela amusa tout de suite Alix, qui s'employa à faire une révérence encore maladroite devant la coutilière. Il fallait dire qu'elle était tout de même impressionnée de voir désormais tant de nobles, de dames bien nées - qui plus est, qui devenaient des combattantes pour protéger la ville. Voilà une chose, parmi toutes les autres, qui l'impressionnait, aussi murmura t-elle d'une voix un peu plus timide qu'à l'ordinaire ses salutations.
- "Je suis encore plus heureuse de vous accueillir à la maison. C'est merveilleux que papa rencontre ses amies, et ce sont les miennes aussi, alors. Mais.. je suis désolée, je ne suis pas encore une si belle vicomtesse qu'on a besoin de me dire "vous". Papa est trop gentil, j'essaie juste de l'aider à la maison !"
Elle rougissait de savoir que son père vantait ses mérites. C'était si bon, si merveilleux d'être aimée, et jamais, jamais, elle ne l'abandonnerait, ni ne partirait loin ! Même s'il avait un fils, elle prendrait soin de tout le monde, pour que chacun puisse vivre heureux et en sécurité. Docilement, l'enfant suivit le mouvement, curieuse de savoir comment son père allait présenter la maisonnée, mais aussi de la demande de son père que leur invitée, que son amie gagne de quoi manger le lendemain matin. C'était bien étrange même - mais après tout, Serena ne semblait pas mal le prendre : c'était probablement une blague entre eux, que la fillette accepta d'un sourire. Ils continuèrent la visite. Aymaric était si fier de ses productions - la ferme, la forge, les parterres de fleurs de Bérénice, les fromages, les bûches de merde séchées. Alix était loin d'en rire, parce qu'elle savait précisément combien coûtait le bois, en dangers, en or, en travail. L'année précédente, elle ne s'était pas montré assez forte pour les couper, ces bûches, pour chauffer convenablement la maison des petits, et elle était plutôt heureuse et soulagée qu'ils aient pu trouver une solution.
L'évocation des bannis de l'Esplanade lui fit plisser le front, effacer son sourire. Alors, tout doucement, lorsqu'elles furent laissées seules près des animaux, elle reprit la parole. Il fallait que les gens sachent la vérité, sachent vraiment pourquoi ceux qui avaient été mordus devaient partir de Marbrume.
Lentement, l'enfant s'assit sur un petit tabouret, caressant doucement l'échine de sa petite chèvre.
- "C'est notre chèvre, il faut être doux avec elle. Mais je voulais vous parler d'un sujet plus difficile... Tout à l'heure, vous avez dit que c'était pas juste pour les gens d'être banni parce qu'ils avaient des marques de la Fange, mais... c'est à cause de la Secte. Quand il y a eu l'attaque, le Roi m'a demandé, avec quelques autres personnes, de mener l'enquête sur ce qui s'était passé et de nous occuper des gens. Et j'ai appris des choses ... ceux qui sont mordus par la Fange peuvent devenir des Fangeux. C'est comme ça qu'il y a eu des fangeux à l'intérieur des murs, au Chaudron. Des gens de la secte a fait venir des gens infectés par les égouts, et ils ont mordu une vieille dame qui a été très malade. Et elle s'est transformée ensuite. La transformation n'est pas immédiate, elle peut mettre du temps, et quand on est mordu, au moins on a une marque qui dit qu'on peut se transformer. Ils sont envoyé ici parce qu'il ne faut pas que Marbrume tombe. Et nous, on peut mourir, on est loin. Ils pourront toujours envoyer d'autres personnes pour récolter à manger. La seule chose que je ne comprends pas, c'est ... où est passé le reste du monde ? Dans quel état il est ? Il doit bien y avoir d'autres villes où il y a des survivants. La ville du Roi, enfin, du vrai roi, elle doit aussi avoir des murailles. ... Bref. Tu vois, il faut traire comme ça."
Joignant le geste à la parole, la petite fille se baissa, saisissant le pis de la chèvre de ses petites mains ; et, accomplissant un aller-retour en serrant un peu ses paumes contre le membre tout chaud, fit jaillir le lait par giclées dans le seau posé en dessous.
- "Tu vois, c'est tout simple."
Elle lui offrit un petit sourire.
- "On est jamais complètement en sécurité, mais je suis rassurée que la compagnie des Lames soit là pour aider papa à protéger la maison. Je ne suis pas très douée à la lance. Et... et j'ai peur de mourir. Je crois pas que j'arriverai défendre comme il faut Bérénice et Alfred, et aussi Guillaume. Moi, j'aurai voulu devenir une belle dame comme la comtesse de Pessan, et une bonne maitresse de maison. Et puis aider papa aux comptes. Mais je sais bien qu'on fait pas souvent ce qu'on veut, dans la vie. Il faut d'abord survivre, et on verra bien pour l'avenir. Tu as un amoureux, toi ? Est-ce que c'est papa ?"
Ça y était, c'était demandé. Ce serait mieux de savoir, pour apprendre à encaisser et passer à autre chose. Elle était plus forte que le malheur, que l'incertitude. Elle devait mener une vie près de son papa et le protéger ; préserver ce qu'elle pouvait. C'était ainsi qu'elle ferait son devoir de fille. |
| | | Serena de RivefièreCoutilier
| Sujet: Re: [CLOS] Une journée s'achève, une autre se lève, mais les souvenirs restent. | Aymeric Sam 23 Nov 2019 - 21:19 | | |
Voir cette petite la faisait inévitablement penser à sa propre enfance. Les temps étaient bien différents à l’époque et c’était dans l’insouciance qu’elle avait pu grandir. Contrairement à elle, qui visiblement avait déjà connu et vu le pire. Oui, c’était en l’écoutant parler de Marbrume, de l’attaque, des sectes et des marques que Serena prit conscience de son application. Elle était présente lors de l’invasion… Aymeric l’avait déjà mentionné, mais ce n’était que maintenant qu’elle le réalisait pleinement. Ce n’était pas une simple enfant qui se tenait devant elle, mais l’une des rares survivantes. Et ce constat la rassurait comme la peinait profondément.
Imaginer cette petite au milieu de ce chaos était tout bonnement insoutenable. Pour autant, il était réellement fascinant de voir l’innocence et le sourire sur son visage après toutes ces épreuves. Oui, la voir ainsi donnait réellement l’envie d’avancer et de la protéger. Aussi, Serena ne put que sourire à sa malicieuse question.
« Pourquoi ? Tu as peur de le perdre ? »
Mi-taquine, mi-sérieuse, la milicienne observa longuement la jeune fille avant de reprendre plus sérieusement.
« Ton père est un ami. Je ne peux pas prétendre le connaitre par cœur, mais je peux te certifier une chose : peu importe la femme qui se présentera, elle ne comptera jamais plus que toi.»
C’était une évidence. Il suffisait de le voir, de l’écouter parler de sa fille pour le comprendre. Personnellement, elle ne connaissait personne d’autre capable d’illuminer ainsi son visage en tout cas. Mais maintenant que cette parenthèse était fermée, restait à revenir sur les propos graves de celle-ci.
« Concernant le reste… Personne ne sait ce qu’advient du monde. Je suis convaincue que d’autres cités quelque part doivent aussi persister, mais… J’ai beaucoup marché avant d’arriver, jusqu’à Marbrume tu sais… Et là où je vivais, se trouvaient aussi des remparts et un château. Cela n’a pas empêché la fange d’y entrer. Et une fois une forteresse complémentent envahie, c’est très difficile de la reprendre. Cela demande beaucoup de forces, de courage… et de sacrifices, sans même être certain d’y arriver. C’est pour cela qu’il est important de respecter des règles de sécurité et aussi à se défendre ou au moins bien se cacher. Tu as à la chance d’avoir un bon enseignant en la matière pour cela… Profites-en. »
Oui, à ses yeux, il était primordial qu’Alix apprenne correctement à se défendre afin d’augmenter ses chances de survies en cas d’attaque. Il était donc important pour elle qu’elle en prenne conscience, même si cela pouvait paraître difficile pour une enfant. Un sourire rassurant vint néanmoins se glisser sur son visage lorsqu’elle reprit.
« Mais cela ne t’empêche pas de tenir une maison. Au contraire, tu deviendras plus remarquable encore. J’en suis sûre ! »
Aucune idée si elle s’était montrée maladroite ou non, convaincante ou non, mais elle avait parlé le fond de sa pensée avec le plus d’honnêteté possible. Maintenant, restait à essayer sa leçon et pour cela, elle était bien moins à l’aise. La chèvre face à elle, elle analysa longuement la situation avant d’approcher lentement sa main pour la caresser avec douceur. Rassurée, elle alla ensuite doucement poser ses mains sur le pis de l’animal avant d’essayer d’imiter les gestes de la petite. Elle avait si peur d’être maladroite et faire du mal, qu’il lui fallut plusieurs tentatives avant de finalement réussir à récolter un peu de lait. D’abord surprise, puis simplement fière d’elle et partagea un vif sourire avec l’enfant.
« Alors, qu’en pensez-vous maîtresse ? »
Sourire aux lèvres, Serena poursuivit encore un peu l'expérience en fixant ses propres mains.
« Et toi, dis-moi... Tu te plais ici ? Les gens ne sont pas trop durs ? »
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