[Terminé] - La petite vertue au service des Dieux

Gudrun n'avait toujours pas touché à sa tasse. Elle avait conscience que c'était très impoli, mais elle avait la gorge nouée par la situation.

- Oui, la prostitution existe, et elle existera toujours, c'est un mal nécessaire, mais ce n'est pas le rôle du Temple de l'encourager.

Cette déclaration pouvait sembler étrange dans la bouche d'une prêtresse, mais Abielle semblait déjà au courant de sa foi de toute manière.

- Et s'il continue dans cette voie... Nous ne valons pas mieux que des animaux si nous nous abaissons à cela. Une vie sans morale, sans Dieux... Pas mieux que des Fangeux, en vérité.

Abielle continua d'expliquer son raisonnement à ses trois invités, et termina en la fixant.

- Je ne peux pas revenir sur mes convictions Demoiselle. Vous semblez être convaincue de la justesse de votre cause, mais vos arguments ne peuvent pas me toucher. Je ne peux pas les approuver. Je vois bien que nous n'arrivons pas à faire la charité à tous ceux qui en ont besoin, alors... Faire naître d'autres bouches à nourrir, sans père pour assurer leur subsistance... Mais vous semblez bien au courant de ma situation, et vous savez donc que je ne peux pas être une menace pour votre ordre. Mais ce que moi, je ne peux pas crier au grand jour, d'autres le pourraient.

Gudrun tourna son regard vers les miliciens. Théophile semblait bouleversé par le souvenir de sa défunte épouse. S'il ne lui avait pas dit qu'il était veuf, elle aurait cru que sa femme était encore en vie. Son soutien n'avait rien d'assuré. Quant au dénommé Orian, il sirotait son thé, l'air toujours aussi satisfait et tranquille. Elle ne pouvait pas être la seule à s'indigner devant cette situation !

- Et vous Messire Larcher, cela vous plaît-il d'être considéré comme un mâle reproducteur ? Et de considérer ces femmes comme des chèvres à saillir ? Êtes-vous un bouc Monsieur ?

J’aurais été heureux de rester dans mon coin, à calmement siroter mon thé aux herbes dont j’avais déjà oublié le nom, à observer avec discrétion les formes de notre hôtesse qui ne semblait pas porter beaucoup d’importance au fait de les couvrir.

Mais le sort en avait décidé autrement. Je levais doucement les yeux vers la prêtresse, à l’annonce de mon nom, écoutant la suite avec des sourcils haut levés. J’étais comparé à un bouc, et si en temps normal la formulation m’aurait fait rire, il me semblait déplacer de faire le pitre en cet instant.

Mais la perche était trop bonne pour ne pas en profiter au moins un peu.

« Vous êtes sacrément perspicace, Sœur Gudrun. Ainsi me voyez-vous curieux de découvrir ce qui m’a découvert entre ma barbichette, à la pointe naissante, les parties intimes très malodorantes caractéristiques des boucs, ou bien encore les cornes qui poussent au plus profond de mon séant », questionnais-je, sans toutefois laisser sous-entendre une quelconque colère, mais quittant quelques instants mon éternel sourire, le troquant contre une expression sibylline. « Et pour m’arrêter dans mon sarcasme, je me permets de vous répondre par d’autres questions : cela vous plait-il de vous considérer comme juge et bourreau de la décision divine en ce qui concerne la protection des femmes, que vous considérez de peu de vertu, de Marbrume ? De vous considérer messagère d’Anür, ou peut-être même papesse officieuse, donnant voix et opinion allant au-delà des autorités qui vous ont accueilli les bras ouverts ? »

J’avalais le thé restant d’une gorgée, avant de reposer dans un claquement sonore la tasse sur la table.

« Et pour me retourner ma propre question, qui suis-je pour juger les décisions des autorités représentantes de la Trinité ? Je suis un homme simple, madame : mon royaume et les véritables messagers me disent quoi faire, je m’exécute, en bon milicien que je suis. »

Théo écouta avec attention les explications de Dame Papillon concernant les Filles. Pourquoi tout devait-il toujours être aussi compliqué ? La chose se résumait finalement à accueillir des prostituées, et faire en sorte que pour une fois les clients laissent leur semence faire effet pour récolter neuf mois plus tard….Certes la créature divine enroba ça d’autant de couches, toute celles qu’elle ne devait pas avoir sur elle, que ça paraissait être une belle entreprise.

En un sens ça l’était, pour les filles en tous cas. Avoir vu Gisèle lui avait rappelé la précarité de la situation de la femme, et son histoire. Comme beaucoup, elle avait fini dans le milieu par un mauvais concours de circonstance : mari décédé et qui avait des dettes dans une maison de jeu, un enfant à nourrir, un second qui avait fini par décéder car elle n’avait pas les moyens de payer ses soins...Quelques mois plus tôt, elle avait réussit à faire rentrer son aîné en apprentissage, n’ayant plus à s’inquiéter de le nourrir et l’habiller. Sa situation s’était améliorée et elle avait remboursé une bonne partie de ses créanciers, mais elle n’avait plus d’avenir dans autre chose. Elle ne pouvait plus reprendre son ancien métier de couturière, aucun client ne serait venu dans la boutique en connaissant son passé…
Ici, quelque chose de nouveau s’ouvrait pour elle. C’était une bonne chose, elle le méritait.

Alors que Théo réfléchissait à cela, Soeur Gudrun et Ori s’étaient lancés dans une joute verbale dans laquelle il ne souhaitait surtout pas s’immiscer. Quand deux chiens se grognent dessus, il n’est aucunement question de se placer au milieu au risque de se faire mordre...Tentant à nouveau de mettre sa jambe hors de portée du peton tentateur de leur hôtesse, le borgne soupira théâtralement.

« La question est réglée pour moi…La seule femme avec qui j’aurais voulu repeupler Marbrume n’est pas là... Et je ne fais pas parti de ces hommes qui se contentent de semer des bâtards partout Abielle. »

Ce qu’il en était pour les autres, ça ne le regardait pas. Chacun fait ses choix en son âme et conscience…
Si Ori voulait faire le « bouc », il était drôle de s’imaginer l’homme avec les cornes de l’animal, qu’il s’en donne à coeur joie. Il n’avait pas l’air d’un mauvais bougre, le genre d’homme qui à minima ne maltraitait pas ses compagnes
Si Soeur Gudrun préférait invectiver tout ceux qu’elle croisait, grand bien lui en fasse, tant qu’il n’en était pas la victime...Quoi que, la colère lui allait plutôt bien, les yeux brillant d’une féroce conviction…

Sa pupille unique alla jauger Dame Papillon, la scrutant son visage pour délaisser ses courbes désirables. Son regard d’archer se fit vigilant à la réaction de la demoiselle. D’un calme tranchant avec l’énervement de ses compagnons, il tenta de voir jusqu’où toute cette mascarade avait été pensée.

« Car c’est ainsi que certains les traiterons. Les filles dans les bordels prennent des herbes pour se protéger. A part quelques exceptions, ce ne sont pas elles qui font les illégitimes dont vous parlez. Croyez-vous que ce soit juste de leur imposer ça ? Prier les Dieux ne les protégera pas des autres enfants, ni de leurs parents. Comment les en protègerez-vous ? D’ailleurs, comment seront-ils élevés, ces enfants ? En quoi le temple pense t-il pouvoir mieux subvenir leurs besoins quand ils auront des dizaines de ces petites terreurs à gérer ?»

Pour avoir lui-même un handicap et subir des moqueries depuis petit, il savait parfaitement ce que pouvait ressentir un de ces futurs petits bonhommes. Tous n’auraient pas le caractère pour rebondir, ou au contraire en deviendrait ultra-réactifs. Le Temple avait-il réellement pensé à toutes ces questions avant de se lancer dans la nurserie à grande échelle ?
Combien de ces petits la milice allait-elle devoir protéger ou arrêter car le Temple aura joué avec le divin ?

Le milicien pris enfin la tasse qui lui avait été servit et ferma les yeux en humant le parfum, puis pris quelques gorgées. Un léger rictus aux lèvres, son ton se fit plus léger.

« En effet, délicieux votre thé. Votre sœur devrait venir en prendre une tasse plutôt que de maltraiter ce pauvre mur. »

Le bruit avait peu à peu augmenté de fréquence, ponctuant leur conversation comme l’aurait fait un oiseau particulièrement loquace sur le rebords de la fenêtre. Autant dire que ça pouvait vite devenir pénible.

HRP:

Elle avait écouté les dents serrées la réponse de Messire Larcher, bien consciente que sa tentative pour le secouer avait outrepassé les limites de la bienséance. C'est pourquoi elle ne répondit rien quand celui-ci lui asséna une réplique cuisante, ses paroles et ses gestes montrant un certain agacement. Si la fierté de Gudrun en prenait un coup, la retenue, la politesse et la dévotion du milicien étaient admirables. Il semblait être un fidèle du culte comme on en voyait trop peu.

Théophile et Abielle commencèrent ensuite à discuter des détails de ce sordide système. Comme si cela importait ! Quelle hypocrisie ! S'imaginait-il qu'en allant "culbuter" des femmes aux quatre coins de Marbrume, ses actions étaient plus honorables ?

C'est à ce moment qu'elle les interrompit, ne pouvant plus réprimer son emportement. Les critiques d'Abielle sur ses manières avaient fortement contribué à cette explosion.

- Alors ça, c'est trop fort ! s'exclama-t-elle en se levant de sa chaise.

Elle se mit à marcher dans la pièce de long en large, agitant les bras inconsciemment.

- Vous rendez-vous compte de vos paroles Théophile ? Vous avez reconnu devant moi pas plus tard que tout à l'heure que vous étiez un visiteur de bordels chevronné ! Est-ce que vous vous imaginez que vous n'avez semé aucun "bébé divin" en chemin ? C'est hautement improbable ! Même si cela m'en coûte, je ne peux qu'aller dans le sens des déclarations de Demoiselle Abielle. J'ai vu trop de femmes en souffrance à cause d'hommes comme vous.

Les hommes étaient décidément bien naïfs dès qu'il s'agissait de ces choses là. Elle fixa Orian de nouveau.

- Oui, en vérité je vous le dis, Messire, tout comme Théophile, vous me semblez plus influencé par la tenue de cette Demoiselle que par la justice. Vous semblez être un croyant fidèle, alors faites abstraction de la tentation, et faites plutôt ce que vous dicte votre foi !

- Et vous Abielle ! Ne venez pas me parler de charité quand vous vivez dans un endroit aussi luxueux ! Comment pouvez vous croire que vous aidez l'humanité en mettant en place ce système ? Vous voulez prendre la place d'Anür en son royaume ? Vous voulez supprimer la souffrance, la douleur et la misère d'un coup de baguette magique ? La déesse elle-même ne pourrait pas le faire ! Toute action a une contrepartie, et...

... et Etiol ne trouverait qu'une nouvelle façon d'entrer dans nos vies. C'était aussi simple que cela, et ce n'était pas au Temple de lui en donner l'occasion. Ah, qu'il était frustrant d'être ici, à Marbrume, au milieu de personnes aux moeurs aussi dépravées. Cette pensée n'apaisa pas sa colère, au contraire. Elle finit par se taire néanmoins, et arrêta sa marche frénétique. Elle avait fait ce qu'elle avait pu, tant qu'elle avait eu une lueur d'espoir de convaincre au moins un des deux hommes. Mais il allait peut-être lui falloir admettre sa défaite et abandonner le champ de bataille, à son grand regret.

Peut-être mon argumentaire avait-il fait mouche, car la prêtresse n'avait osé répliquer à mes quelques tirades, toutes piquantes soient-elles. Ou peut-être s'était-elle tout simplement résignée à ce que je ne sois qu'un rouage dans la machine, ce qui n'était en soit pas bien loin de la vérité. Quoi qu'il en soit, elle s'était tue, laissant Théophile l'opportunité de déblatérer des choses qu'il ne connaissait pas vraiment.

J'étais prêt à replonger dans une nouvelle tasse de thé, fraîchement remplie par mes propres soins, quand Abielle - si je ne me trompais sur son nom ? -, s'excusa au nom de ... Eh bien au nom du temple je suppose, de l'attitude de la soeur Gudrun. Lui adressant un sourire, je me concentais dans un premier temps de lever ma tasse avant d'en boire une gorgée.

Et ainsi en serais-je parfaitement resté là, si la soeur n'était revenue à l'assaut en m'assaillant de nouvelles tirades, après avoir complètement décrédibilisé les braves paroles du pauvre Théophile.

« Ma soeur, Anür m'a donné des yeux, et je compte bien m'en servir », lançais-je en troquant mon air sibyllin avec un sourire orné d'un regard espiègle. Je n'étais point prompt à la colère, et les rares moments qui y faisaient appel ne duraient guère. Cette conversation ne ferait pas exception. « De la même manière, l'on m'apprend que je peux conjuguer tentation et foi, comprenez bien qu'en homme simple, ascendant bouc, je ne compte pas aller à l'encontre des directives qui m'ont été données. Je ne suis point professionnel de la foi, je ne fais que me fier à ce que d'autres, tels que le frère Thomas, ont demandé de moi. »

L’esprit de l’archer s’arrêta un instant à l’évocation de la deuxième sœur Papillon traînée par deux miliciens. La façon dont Abielle avait regardé les deux hommes pendant ces quelques mots eu le don de rendre son imagination fertile. Son esprit lui montra tour à tour plusieurs images de lui-même et Monsieur le Bouc s’occupant de calmer la sœur de leur hôtesse, d’une manière très très personnelle et de plus en plus déshabillée.

Secouant la tête pour effacer ses délicieuses images, qui commençaient à réveiller à nouveau son deuxième cerveau, ses yeux se fixèrent sur Dame Papillon pour écouter les explications qu’elle donnait quant au traitement qui serait réservé aux enfants. L’image qu’elle peignait semblait idyllique, réglant les problèmes que les enfants des bas-quartiers rencontraient généralement. Théo n’était pas pour autant convaincu que ce soit suffisant. Leur statut resterait celui de bâtards, au milieu des nombreux demi-frères et sœurs que leurs mères porteraient.

« Vos arguments sont convaincants, mais... »

La prêtresse coupa la réponse qu’il allait donner à Dame Papillon. En plus c’était pour le traiter d’amateur ! Il bougonna tel un enfant.

« Mesdames, je sais me retirer à temps quand même... »

Soeur Gudrun ressemblait à un fruit mur prêt à exploser, et Ori semblait prendre plaisir à la faire monter en pression. Comme dans une farce de mauvais goût, tous deux s’étaient focalisés sur des idées opposées, et chaque argument d’Abielle ne faisait qu’accentuer leurs désaccords. Théo ne voyait pas comment apaiser les choses. Après tout, il était venu au temple pour prier à la base, pas pour se retrouver dans cette scène surréaliste, poussé à copuler d’un côté, et traité de dépravé de l’autre.

« Soeur Gudrun, il est peut-être temps de quitter les lieux, qu’est-ce que vous en dites ? Nous avons chacun les réponses que nous sommes venus chercher en ces lieux, et surtout je ne suis pas sûr que vous laisser tous les deux dans la même pièce soit bénéfique »

Théophile se leva prestement, puis regarda tour à tour la prêtresse et l’autre milicien afin d’obtenir leur adhésion. Il fallait bien qu’il se trouve au temple pour être celui qui calmait les esprits...
En dernier recours, il se tourna vers Dame Papillon, un léger sourire accroché aux lèvres.

« Merci pour votre temps Abielle. Je n’adhère pas au concept, mais si on me pose des questions, je serais franc et me rappellerais de vos mots. »

Sa pupille tenta de ne pas dévier de nouveau du visage de la maîtresses des lieux. Il n’avait pas envie que Soeur Gudrun le considère comme un obsédé...

HRP:

Ses demandes restèrent lettre morte. L'éclat espiègle avait reparu dans les yeux d'Orian, Abielle affichait désormais un air méprisant, et pire que tout, Théophile la prenait en pitié. Rien ! Rien ne s'était passé comme elle l'aurait souhaité ! Elle aurait mieux fait de se rappeler à quel point ses prêches étaient peu convaincants et rester à sa place. Mortifiée, elle regarda Abielle ouvrir la porte et la jeter dehors, ne lui laissant même pas la dignité de s'en aller par elle-même. Gudrun referma son grand manteau et sortit à grands pas, sans un mot et sans un regard en arrière, la tête droite et le visage fier. Le dépit et une colère froide restaient néanmoins dans son cœur, lui laissant un goût amer.

Elle prit le chemin de la sortie, longeant ces couloirs de débauche, apercevant parfois l'une de ces pauvres filles par l’entrebâillement d'une porte. L'air frais transformait un peu plus à chaque instant sa colère en tristesse. Elle n'avait rien en commun avec ces gens, elle aurait voulu rentrer chez elle, dans son pays natal, avec ceux qui partageaient ses valeurs...

J'observais la prêtresse quitter les lieux à la hâte. Il était à peu près certain que, si nous étions amené à nous revoir, je serais amené à faire face à une animosité certaine. Mais peut-être n'était-ce là qu'un préjugé, du goût de ceux-là même qu'au moins deux d'entre nous lui reprochaient. Peut-être la soeur n'était-elle pas aussi rancunière que nombre de ses confrères. Si elle n'avait été clémente envers moi, je devais bien admettre que son minois n'était pas de ceux dont il m'aurait déplu de partager la couche.

Secouant la tête pour sortir de ma torpeur, et sans doute pour m'éviter quelques idées aux accents trop érotiques pour qu'ils ne soient acceptables, je me raclais la gorge.

« Excusez-moi, c'est l'émotion. C'est la première fois que je vois un mur s'enfuir ; les temples sont vraiment lieux de tous les miracles », lançais-je, sur le ton de la plaisanterie. « Toute agréable que fut cette rencontre, ma "bonne volonté" atteint ses limites, et il est temps pour moi de fuir à mon tour. Je serais néanmoins ravi de partager un peu de ma personne avec l'un d'entre vous si l'envie s'en faisait sentir. Je vous souhaite la bonne journée. »

Et sur ces belles paroles, je disparaissais de la pièce, non sans faire une rapide révérence à l'adresse de notre hôtesse.

Alors que le borgne écoutait les remerciements de Dame Papillon, et ce qui ressemblait fort à une nouvelle invitation, Soeur Gudrun quitta les lieux de manière théâtrale. L’air froid et pincé qu’elle affichait indiquait clairement qu’elle ne chercherait pas à remettre en cause ses propres pensées. Son départ se fit en silence, seulement marqué par le bruit sec de ses pas.

L’archer n’aimait pas ce qu’il se passait en ce moment. Surtout qu’il était sûr qu’au fond, la prêtresse avait ses bons côtés. Elle était venue l’aider après tout, il lui en devait une. Même si Abielle et Orian étaient dans leur bon droit de l’envoyer paître, il n’était pour sa part pas un adepte d’une ironie aussi mordante. En tous cas pas dans ce cas de figure, pas quand quelqu’un semblait impliqué avec autant de foi dans les préceptes divins.
La prêtresse pouvait être mordante, le borgne était persuadé qu’elle faisait pourtant de son mieux pour aider les autres.

Saluant rapidement ses deux interlocuteurs, Théophile quitta hâtivement la pièce dans l’espoir de rattraper Gudrun, n’entendant pas la proposition fort alléchante de Orian de partager un moment. Pour sûr, une bonne bière aurait été bienvenue après cette entrevue des plus épuisantes !

« Soeur Gudrun ! »

Il n’avait pas crié son nom trop fort, étant donné les lieux dans lesquels ils se trouvaient, et pourtant quelques têtes se tournèrent à son passage. Le temps qu’il s’excuse auprès des lésés, celle qu’il pourchassait avait déjà tracé son chemin, le laissant seul dans ce couloir où les rires chaleureux des filles d’Anür ne lui tirèrent qu’un frisson glacé dans le dos.

HRP: