Marbrume


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 [Évent] Tu me rends chèvre.

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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyLun 2 Jan 2023 - 16:14
2 juin 1167
Usson

Si j'avais espéré retrouver un peu de calme en restant à Usson, autant vous dire je pouvais d'ores et déjà me mettre le doigt dans l'œil. À voir l'agitation qui régnait au centre du village, ce n'était vraisemblablement pas la bonne période pour cela.

Sombrebois venait d'être attaqué par une armée d'inconnus traitant des monstres avec eux. Beaucoup de personnes étaient mortes, d'autres avaient disparu sans laisser de traces, comme Alaric. Bref, c'était la merde au sud, mais dans le nord on préparer à accueillir des jeux. Au fond, pourquoi pas ? Le peuple avait besoin de se distraire et, quelque part, il semblait juste de vouloir distraire l'attention des curieux. Enfin, de ceux qui se seraient soucié de Sombrebois et surtout de ses habitants. Je n'ai certes jamais aimé ce bourg, mais de là à oublier cette nuit d'horreur… Non, certainement pas.

J'avais passé la matinée avec mes frères, mais lorsque les deux se mirent à parler chiffon, j'ai préféré déserter afin de prendre un peu l'air. Cela faisait un moment que je ne m'étais pas retrouvée seule. Si longtemps que j'avais presque oublié les quelques bienfaits de la solitude. Je n'avais pas à parler et encore moins à écouter qui que ce soit. Je marchais simplement, en silence, tout en observant les allées et venues des gens de la milice. Ils étaient plutôt nombreux dans le village. L'on se serait presque cru dans l'une de leur caserne. De quoi me donner envie de partir en courant. De ce que je compris, ils n'étaient pas en patrouille, mais uniquement pour aider à la préparation des fameux jeux. Je me demandais si Log se trouvait parmi eux. Peut-être était-il à l'auberge, pour y prendre un bain, sans doute… J'aurai tant aimé que ce fut le cas. Cela faisait des années que nous ne nous étions pas retrouvés en famille après tout… Enfin, c'est que je me disais avant de songer à la dernière conversation que j'avais eu avec Kaël et Ivaad… Voir Loghart y mettre son grain de sel me semblait… quelque peu usant.

Mais, malgré tout, je rêvais de les entendre rire, tous les trois, même si Elwin manquerait toujours.

Comme à mon habitude, je soupirais, avant de donner un coup de pied dans un cailloux et de continuer ma route. À dire vrai, je ne savais pas vraiment où aller. Je préférais éviter l'auberge, bien trop peuplée actuellement, mais je ne connaissais pas très bien Usson. J'observais simplement la place du village, ou plutôt les gens qui s'y trouvaient. Cela m'occupa un moment jusqu'à ce que mon attention se retrouve capturée par un haussement de voix. Juste là, sur ma droite, non loin du puits, se trouvait deux personnes, un homme et une femme. Le bonhomme ressemblait à l'un des marchands fort détestables qu'il m'arrivait de rencontrer sur le marché de Marbrume. L'un d'eux m'avait même accusé d'être une voleuse et, l'espace d'un instant, je crus même qu'il s'agissait de lui, mais non. Cet homme là était plus petit, bien qu'aussi gras que son homologue marbrumien et parlait tout aussi fort.

Les bras croisé sur son large poitrail, le marchand lorgnait d'un oeil noir le petit bout de femme qui se trouvait face à lui. Elle ne semblait pas se laisser démonter malgré la colère évidente du gros monsieur. De là où je me trouvais, je ne pouvais rien entendre de leur conversation. J'en compris quelques bribes, mais pas suffisamment pour savoir de quoi il en retournait. Méfiante, tout de même, j'observais attentivement le marchand, simplement parce que sa posture rigide mais tremblante ne m'inspirait rien qui vaille. A l'évidence, cet individu gérait bien mal les émotions fortes.

Aussi, je décidais de me rapprocher. Je ne comptais pas vraiment intervenir et encore moins me montrer indiscrète, mais … Dans le doute… Après tout, ils étaient nombreux à se montrer violents envers les femmes. Ils prenaient même cela comme un droit, même si je ne saurai dire pourquoi. La demoiselle était seule et même si quelques badauds les observaient du coin de l'œil, aucun ne semblait vouloir bouger.

Je veillais donc à me faire aussi discrète que possible et me contentait de regarder. Je restais ainsi, à quelques mètres du duo pendant un bon moment où rien de spécial ne se produisit… Du moins, ce fut le cas jusqu'à ce que le gros homme vint saisir le poignet de la jeune femme pour mieux le soulever. Je me précipitais vers eux tandis que le marchand leva son autre main avec la ferme intention de gifler la pauvre fille…

-Lâche-là, gros porc, crachais-je tout en me promettant de chercher à varier mes insultes.

-De quoi je me mêle, siffla le marchand tout en baissant sa main droite. Il me dévisagea de pied en cape avant de grimacer. Rien de bien étonnant à cela, une rouquine portant des vêtements d'homme, ça dérangeait souvent, surtout les hommes dans son genre. Va voir ailleurs si j'y suis, sorcière. C'est entre elle et moi.

-Commence donc par la lâcher, répliquais-je en serrant les dents.

-Pourquoi ferais-je une chose pareille ? Cette garce mérite une punition et, visiblement, toi aussi.

-Dans ce cas, viens donc me donner cette punition, lui dis-je en souriant. Tu viens ? Tu n'as que quelques petits pas à faire, cela ne devrait pas être si fatiguant..

Il n'en fallut pas plus pour l'agacer. Décidément, la faiblesse de ce goujat était affligeante… Mais après que le gros homme lâcha la demoiselle, rien ne se passa… Enfin si, une canne vint s'abattre sur sa tête et l'homme pesta allègrement avant de se retourner vers la main qui tenait le bâton …

-Bon sang, Ivaad ! grondais-je en croisant les bras.

-Je t'avais demandé de rester discrète, idiote ! me réprimanda-t-il avant de s'en retourner vers le marchand.
Quant à toi, je te conseille de disparaître de ma vue et vite… Mais d'abord, tu présentes tes excuses à la demoiselle.

Tout en frottant le haut du crâne, le gros homme à la bouche bée secoua la tête. Inutile de protester face à mon frère. Ivaad mesurait un peu plus de deux mètres et était aussi large qu'une armoire… De quoi calmer les pleutres, comme ce type-là.

- Euh… Oui… Je vous demande pardon. J'achèterai votre laine au prix demandé. Veuillez m'excuser mais j'ai beaucoup à faire. C'est que le temps passe vite… Aurevoir.

Et il détala sans demander son reste.

-Tout va bien madame? demanda-il en détaillant la jeune femme. Que s'est-il passé ?


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GuillemettePaysanne
Guillemette



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyLun 2 Jan 2023 - 17:03
Je suis arrivée au soir de la veille, avec mon petit troupeau. J'ai un arbre, à une demie-lieue d'Usson. C'est là que j'ai dormi, Capscha veillant à ce que les bêtes ne s'éparpillent pas. Au matin, j'ai flâné, laissé pâturé, guetté aussi, de derrière les haies, les carioles et autres ânes bâtés qui s'acheminaient en grouillant sur les voies poussiéreuses. Juin resplendit. Il dégringole de lumière âcre et lourde qui nous vient des vagues que pousse l'océan. Ces dernières semaines ont été humides, mais un étrange vent venu des terres est venu tout sécher en deux moulinets de bras. Et depuis quelques jours, la poussière mousse au-dessus des routes en gros champignons qui se repèrent de loin.

Je n'ai pas la plus traîtresse idée de ce qui motive une telle agitation à Usson. Mais c'est en m'approchant, vers le mitan du jour, que je me souviens. Le vieux m'avait parlé de la foire. Peut-être que ce sera celle-là. J'entends le mot jeux rebondir de grappes de commères en poignées de mâles bruyants. J'hausse les épaules.

Depuis avril, je sais que mon habituel acheteur de laine est occis et décapité. Je n'ai qu'une vague idée d'autres marchands filateurs qu'elle pourrait intéresser. Mais il est bien temps, les bêtes peinent sous leur amoncellement écru et verdi. J'ai 13 agneaux ventrus à vendre au boucher aussi. Mais après la tonte.
J'ai laissé les bêtes à la garde de Capscha, sous les futaies et à l'abri des curieux, les deux chiots attachés l'un à l'autre pour que Jason ne vienne pas se coller dans mes talons, et je pénètre le bourg. Je ne le connais que très peu, et l'émulsion frivole me hérisse l'échine. Je cherche le puits. De là, le gros Javèche m'avait parlé de ses concurrents, quelque part autour.
Je grince un peu, parce qu'il va me falloir demander. Ce que je fais, peu encline au sourire, mais on me répond quand même sans réticence. Mon bonhomme est une grosse baie couleur de jeune cerise, un ceinturon à dorures, et une moustache vulgaire. Je l'aborde.

Il me toise, et son sourire sous la moustache lui fait deux crocs de renard. Je renâcle à engager plus loin la discussion, mais si ce n'est lui, je n'ai pas de piste. Alors je lui annonce mes vingt brebis et treize agneaux à tondre, et je lui donne mon prix, sans réfléchir. Son cri d'indignation me prend parfaitement au dépourvu. Il me coupe ma part d'une bonne moitié, et je sens pointer mon exaspération juste sous mes côtes. Je voudrais feuler, mais ne peux que bafouiller des protestations.

- Le Javèche, vous savez...

- Aah mais le Javèche avait ses entrées ma petite dame ! Que j'n'ai pas ! A qui voulez-vous que je vende moi, au prix que vous me donnez ! Moi je vends aux artisans, moi ! Pas à la belle bleue de la cité ! C'est de la laine ! Pas de la soie ! Réveillez-vous morbleu !

Je renifle avec humeur, le front en avant, et mes yeux me brûlent un peu quand ils se dardent sur sa face confite. Je réponds sèchement, incertaine mais déjà furieuse, et quelques voyelles se répètent lamentablement. Je baisse un peu mon offre, mais mon amertume le gifle. Il me saisit au poignet, et à l'instant ou j'allais me jeter en arrière pour me dégager, une énorme queue d'écureuil vient m'éblouir une seconde. J'entends une voix claquer, et reste béate. On vient me défendre. Je ne réalise que ma bouche est ouverte que lorsqu'un homme de la taille d'un tronc de chêne intervient pour définitivement chasser l'importun.

J'ai les mains encore frémissantes de tension et d'angoisse. Quand il se penche sur moi, j'ai un geste de recul, et mon front se porte de l'avant par défense.

-Tout va bien madame ? Que s'est-il passé ?

- Ah... Merci... Euhm... Je regarde au sol. Il voulait discuter mon prix pour ma laine. Merci.

Pas le moment de laisser passer une occasion de se trouver un autre débouché. Et puis... La femme qui est intervenue semblait... bien sûre d'elle. Je me détourne presque ostensiblement du géant qui me surplombe et détaille la tenue de la rouquine. Je me sens très dérangée de voir ses cuisses si tenues dans ses justaucorps. Les chausses de cuir, les armes qui pendent, de part et d'autre de ses hanches. Je louche sur l'épée. Une épée ? Je redresse la tête, ébahie, et mes yeux rencontrent les siens. Un sourire goguenard lui soulève les pommettes. Je me sens ridicule.

Les bruits du monde autour me submergent d'un élan brusque. Je déporte mon regard autour de moi. Mon bonhomme a filé tout droit, et je n'ai aucune intention de lui donner la chasse. Je me demande s'il ne serait pas avisé de leur demander la direction d'un commerçant en laine.
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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyLun 2 Jan 2023 - 17:34
-De la laine ? demanda Ivaad en lorgnant la dame avec des yeux ronds comme des soucoupes.
-Oui, tu sais, c'est la chose qui pousse sur le dos des moutons, raillais-je ouvertement avant de lui donner un coup de coude.
-Mais… Bon sang, je sais ce qu'est de la laine ! dit-il clairement pour gagner en crédibilité auprès de l'inconnue. Je suis juste surpris !
- Bien-sûr, renchéris-je, tout sourire. Je me nomme Aeryn et voici mon frère Ivaad. J'espère que nous n'avons pas tout fait rater…
-Je ne pense pas, mais quoiqu'il en soit, la foire va ramener d'autres marchands bien plus sérieux que ce type-là. C'est que vous êtes pas si nombreux à élever des bêtes et tout le monde a besoin de se vêtir.
- Oui, enfin… Il me semble que la foire n'aura pas lieu avant la fin du mois…
- C'est vrai, soupira mon frère.

Sa main posée sur son menton attestait d'une grande réflexion. Il était très étonnant de voir mon aîné aussi soucieux pour quelqu'un, ce n'était pourtant pas son genre d'habitude. En y réfléchissant bien, il avait énormément changé depuis sa morsure, comme si la fange avait avalé sa colère. Il était peut-être stupide de ma part de penser cela, mais il me fallait trouver une raison valable à ce changement chez lui. J'en avais besoin.

- Kaël tout le monde ici. Il pourrait certainement vous aider, affirma-t-il, confiant.
- Kaël est notre frère aîné, me sentis-je obligée de préciser. Cela ne coûte rien de lui demander et puis… Si jamais, à cause de nous la vente ne se fait pas, nous vous devons bien cela.
- Oui, enfin… Si tu n'étais pas intervenu, ce … cet homme l'aurait probablement cogné.
- Mouais, soufflais-je malgré tout. Tu sais où se trouve Kaël ?
- Sûrement à l'auberge pour voir sa belle Marjolaine, rétorqua-t-il en souriant. On pourrait vous offrir le repas ? Histoire de nous faire pardonner …

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GuillemettePaysanne
Guillemette



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyJeu 5 Jan 2023 - 20:53
Le repas... A l'auberge ? J'hésite. L'idée me déplaît beaucoup trop. Mais... Un repas chaud... Et puis leur bon allant est rare. Et puis... Cette femme m'intéresse... J'ai beaucoup trop d'idées qui me tournent depuis ma rencontre avec le Comte de Corburg, et ces horreurs de Fangeux, cette atroce nuit et notre marche forcée sous la pluie, et ce demi-monstre dont j'avais percé le crâne... Je songe, les yeux braqués sur la rouquine. Et puis je m'incline brièvement, raide, le sourcil un peu contraint.

" Merci. On me dit la Mouette. "

L'homme s'épanouit d'un sourire, et d'un grand éclat de sa voix énorme, nous ouvre le chemin. La rouquine marche d'abord à son épaule, puis se déporte un peu plus à mes côtés. Je regarde ses jambes. La gêne de voir le dessin de ses cuisses ne me quitte pas. Et son épée qui clinque, et ses bottes de cuir qui tressautent. Mes idées s'envolent en spirale un peu trop vive. Je lui lance, un peu en retrait :

" Vous... vous vous battez avec ça je suppose ? "
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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyVen 6 Jan 2023 - 11:54
L'idée de me rendre à l'auberge, bourrée de monde qui plus est, ne me plaisait guère. Ivaad avait essayé de m'y traîner plusieurs fois dans la journée sans y parvenir et voilà qu'il trouvait enfin une excuse pour m'y pousser. Le saligaud, il ne nous manquait jamais une occasion, sachant que je ne pourrai m'y dérober dans pareille situation. Je me fit alors la promesse de lui faire payer cette trahison, plus tard. Et puis, il suffisait de la regarder pour comprendre que cette femme n'était pas plus enchantée que moi à l'idée de rentrer dans ce fichu bâtiment.

Néanmoins, pour l'heure, je me contentais de le suivre. Je me plaçais aux côtés de la jeune femme au regard étrange, cette "Mouette". Quel nom bizarre … Enfin, je supposais qu'il s'agissait là plus d'un surnom que d'un prénom. Mais même si l'origine de ce dernier m'intriguait, je préférais garder ma curiosité pour moi. Après tout, je restais incapable de discerner l'indiscret du banal. De plus, l'interrogatoire ou plutôt le jeu de Clay avait-eu le don de me faire ravaler toutes les questions que je pouvais bien me poser.

Mais bon sang, cette femme ne cessait de me regarder d'une manière étrange. Cela ressemblait presque à une inspection. Je pouvais bien être habituée aux œillades curieuses, sa manière de faire, si elle ne m'offusquait en rien, m'intriguait fortement

-Vous... vous vous battez avec ça je suppose ? me demanda-t-elle brusquement bien que timidement.

Sans m'en apercevoir, j'avais cessé d'avancer, contrairement à Ivaad qui pénétra dans l'auberge sans nous attendre. Je retournais donc vers Mouette en conservant d'un air interrogateur. À dire vrai, j'avais totalement oublié que je portais mes armes sur moi, même si, présentement, je n'en avais aucune utilité. Avec le temps, elles étaient devenues une habitude, comme une sorte de seconde peau dont il était impossible de me défaire. Je ne m'étais absolument pas aperçu de tout cela, jusqu'à ce que la question de cette inconnue ne me le fasse réaliser.

-Euh … Oui… Enfin, je les utilise quand je n'ai pas d'autres choix. Pourquoi cette question ? lui demandais-je à mon tour.

personne ne pouvait me formuler une telle interrogation sans avoir de raison derrière. Après tout, il s'agissait là d'armes plutôt communes. Tout le monde savait à quoi ces dernières pouvaient servir.

-Je suis, enfin, j'étais mercenaire. Elles font partie d'un uniforme dont je cherche à me défaire… A croire, que c'est une tâche très difficile. Je les ai enfilés par réflexe. Je n'en ai aucunement besoin par ici. ajoutai-je en souriant. Vous savez… Si vous ne le voulez pas, nous ne sommes pas obligées de le suivre…
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GuillemettePaysanne
Guillemette



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyMar 31 Jan 2023 - 18:56
Je la considère un instant, en silence. Elle avait lâché ça avec une nonchalance qui me laissait coite. Des armes... Quelques éclats de souvenirs défilent brièvement dans un fond de mon crâne. Des armes... Mes yeux se détachent un peu, parce que dans mon esprit, il y a quelques accrocs qui s'emboîtent soudain.

Vous savez… Si vous ne le voulez pas, nous ne sommes pas obligées de le suivre…

Ah... Peut-être que... Mais il y a le repas chaud... Je secoue la tête.

Si ça ne vous ennuie pas, je voudrais vous entretenir de ça... Un peu plus tard... Un doigt pointé brièvement sur le fourreau qui pend à sa cuisse. Des armes...

Elle hoche la tête avec un léger haussement d'épaule, et me précède dans le troquet. Il y fait chaud et suant, et je n'aime pas la rougeur des visages que l'on croise, ni les heurts de gros bras ou de grosses odeurs. Il plane, juste plaqué contre le plafond bas, une épaisseur verdâtre et rose, de fumet en grappes et de brâmes et de crachin de salive. L'ambiance est lourde de voix et saturée de vapeurs, d'écume d'alcool, de bruits de bois sur le bois, de bois sur le fer, de plat de main et de raclements de pieds de bancs.
Un grand bras se lève, une étoile de main énorme qui nous fait drapeau. L'Ivaad nous aspire jusqu'à lui, et je coule un oeil à la mercenaire : son déplaisir est franc comme du bronze.

Trois écuelles de noyer creux sont posées devant nous, avec de grosses cuillers de même facture. La poêle a longue queue, qui fut remplie depuis la marmite pendue tout le jour à la crémaillère de fonte et dans laquelle mijote la daube ou le brouet de l'aube au mitan de la nuit, est larguée au centre, et on se la tient pour pousser de la cuiller le jus épais et roux, les quelques légumes grossiers et les miettes de viande qui s'y dissimulent. Je salive tant que j'en avale de travers pendant que je remplis mon écuelle. Je me jette dessus. Le vif du ragoût comble ma bouche jusqu'aux naseaux et mes joues en gonflent. Le chaud du repas tombe en plâtrée d'argile dans mon estomac serré.

Dans le brouhaha constant, une douce joie vient me pétiller aux yeux. Les oignons crus, les lanières de semelle de chèvre et autres pommes acides auxquels je suis commune se sont volatilisés. Ne reste que la jubilation de la sauce comme une crème, et des navets comme du beurre, et de la large tranche de pain brun avec laquelle j'aspire toute trace de jus avant de tendre de nouveau l'écuelle avec force vers la poêle qui vient déjà d'être regarnie.

A la fin de la seconde tournée, je sens que mes épaules se sont dénouées, et que mes esprits me reviennent. Je n'ai même pas entendu mes compagnons de tout ce temps. A y songer, je crois avoir entendu tonner le rire du géant, en face de moi. La mercenaire, à ma droite, doit être en train de parler de quelque chose. Mais tant que je n'ai pas séché le fond de mon écuelle, je n'entends rien de défini.

C'est à cet instant que l'atmosphère me devient brusquement irrespirable. Et quand je redresse enfin mon dos, je vois une chope mousseuse m'être sans douceur claquée sous le nez, sur la table. C'est Ivaad, hilare, ravi comme un moine, qui m'incite sans que je ne décèle ses mots avec précision, à y plonger le nez.
J'hésite. Parce que ça y est, j'ai peur. Le monde et ses hommes m'assaille et m'écrase. Mais la mercenaire m'invite du coude, et je bois donc, à longues goulées, ce qui clôturera ce repas de fête que jamais depuis la fin du monde je n'avais su me permettre.
Je perds dix ans de vie. Une sorte de légèreté juvénile vient serrer mes abdominaux, contracter mes bras et durcir mon menton.

Les armes.

Je fixe l'oeil de la mercenaire. Ma décision est enfin prise.

Je voudrais que l'on parle de ça. avec, de nouveau, un doigt tendu vers ses fourreaux.
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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyLun 13 Fév 2023 - 21:14
Une chose était aussi sûre que surprenante en voyant la carrure de la Mouette : elle avait bon appétit. Je la laissais se repaître de son repas, gardant le silence pour mieux observer la salle et écouter quelques bribes de conversation. Personnellement, je n'avais pas très faim. Et, étant dépourvu du sens du goût, comme à chaque fois, je ne trouvais aucun plaisir dans la nourriture. Je grignotais néanmoins, juste histoire de ne pas froisser la cuisinière et pour éviter les remarques de mes aînés. Hors de question d'entendre un autre "mange, tu es trop maigre, Ryn". Non, plutôt crever.

Mouette aurait pu être discrète tant elle restait silencieuse, mais elle ne l'était pas. Tout en l'observant, je me disais qu'elle prenait plaisir pour nous deux. Sans doute ne mangeait-elle pas toujours à sa faim. Aussi, sans rien dire, j'ajoutais quelques morceaux de viande dans son écuelle. La demoiselle était tant absorbée par la nourriture qu'elle tenait en main qu'elle ne remarqua rien de mon manège. Tant mieux.

-Je voudrais que l'on parle de ça.me surprit-elle subitement tout en désignant mes armes.

Je la dévisageais aussitôt, cherchant à comprendre pourquoi elle s'intéressait tant à mes lames. Quelque part, et même si je la trouvais bizarre, cette femme m'amusais. Aussi, je poussais d'un bras tout ce qui se trouvait devant moi pour y poser mes dagues ainsi que mon épée. Mon geste surprit mes voisins de tablée. Certains se levèrent, probablement par crainte de se faire crever un œil. Ivaad éclata de rire tandis que Kaël, qui se trouvait un peu plus loin, me lança un regard qui se voulait réprobateur. Personnellement, cela ne me gênait en rien. Elle voulait voir mes armes, je lui montrais tout en prenant grand soin de lui expliquer leur usage.

-Ceci est une épée courte dite "à une main". C'est, supposément, la plus petite des épées. Mais je n'en suis pas certaine. Je sais les utiliser, je ne connais pas leur historique.

Il faut dire que ce genre de choses n'intéressait guère Rodrick. Notre père préférait nous apprendre à tuer, aussi vite que possible. Le reste, qu'il s'agisse d'histoire ou bien de confection, n'avait pas la moindre importance à ses yeux. Pourtant, le paternel en savait des choses, c'était un homme instruit et fils de maître d'arme. Par conséquent, il avait été formé d'une manière bien différente de la nôtre. Aussi, l'arme que j'exposais à présent avait été choisie pour moi par mon père, bien des années auparavant. Et, le plus étrange, c'est que je ne m'en rendais compte qu'en cet instant précis : je n'avais même pas choisie ma propre épée.

Ne laissant rien paraître de mes émotions, j'entrepris de lui exposer mes dagues. Les deux m'avaient été offerts, l'une par Elwin après ma convalescence, la deuxième par Finn peu de temps avant sa disparition.

-Des dagues, ou couteau de combat, soufflais-je alors. Faciles à prendre en main, mais il faut être près pour frapper. Tout comme l'épée, elles servent à trancher ainsi qu'à pointer. Elles sont également utiles pour parer les coups, en utilisant l'autre main.

J'en saisis une par la lame et lui tendit pour qu'elle puisse l'observer de plus près. Je ne pus cependant m'empêcher de penser qu'il lui serait alors très facile de me la planter dans la gorge. Pourquoi songeais-je à cela ? Sans doute parce que toutes ces années passées à combattre m'avaient rendu excessivement méfiante. J'étais usée. Fatiguée par cette inquiétude constante. Épuisée d'être constamment sur le qui-vive, prête à bondir.

Je me sentais comme un animal sauvage enfermée dans une cage depuis des lustres. Mais ma vivacité, ma combativité commençaient à m'abandonner. C'en était assez.

Décidément, cette inconnue me faisait prendre conscience de bien des choses, en s'intéressant simplement à mes armes.

-Que veux-tu savoir exactement ? lui demandais-je finalement.
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GuillemettePaysanne
Guillemette



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyJeu 16 Fév 2023 - 18:44
-Que veux-tu savoir exactement ?

Je la regarde fixement. Dedans moi, il y a un océan de lave qui est entré en soudaine ébullition. Une furieuse excitation, étranglée de crainte, de honte, de colère et de frustration bat de ses larges ailes contre mon coeur affolé. Je reste sombre, les yeux dilatés, et je vais lentement de la pointe de la lame à sa garde, puis aux mains de la jeune femme, et à son visage qui m'explique, qui reste un peu froid et traînant dans ses airs, comme sa voix vaguement rauque au fond, surtout quand elle baisse le ton. J'ai tant d'images qui me percent le crâne que j'en ai le tournis. Je presse mes deux paumes sur mon front, plante mes coudes sur la table, et m'immerge dans mes pensées.

Le fangeux écrasé sous mon tronc à la grange, son bleu éclaté en étoile contre la grande porte. L'énorme, difforme, qui émerge trempé de pluie, dans l'abri à foin où bivouaquait le Comte Mederich. Et puis le même, encore, gueule béante déchirée sous le menton, le crâne troué, à quelques centimètres de moi. Et l'horreur. La terreur sans nom. Et puis ma lame dans le crâne de "l'entre-deux", dans l'abîme sombre du petit bois dans la nuit, avec son air de monstre et d'homme tout à la fois, la cheville brisée et broyée par le piège à loup. Et puis le gros sanglier suant que le mercenaire borgne avait su retenir de mes trousses. Et puis... Et puis le fils mort dans son assiette, d'horreur, tout blanc. Et puis... Ah... le mari, et l'aîné, jamais revenus... Et puis... les parents, les frères, la soeur... Ma gorge se serre si fort que respirer en devient laborieux. Je m'enfile une large goulée de bière, pour la rouvrir, et ravaler toutes les larmes, tous les gémissements qui s'y sont agglutiné.

Sans regarder la rouquine, je lance, les yeux noirs et brûlants :

" Apprenez-moi... à tuer. "
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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyJeu 9 Mar 2023 - 11:58
En silence, je l'observait caresser ma lame du regard… Oui, "caresser" parce que, même si elle ne la touchait pas, elle ne la lorgnait pas comme l'aurait fait un guerrier. Ses pupilles, noires de jais, étaient si larges que je la pensais sous l'emprise d'une substance étrange et probablement interdite. Il y avait quelque chose chez cette femme qui me mettait mal à l'aise… Mais en même temps, je me trouvais intriguée par celle-ci.

Elle était bizarre, presque trop enfantine pour son âge. Néanmoins, à bien l'observer, il semblait évident que cette Mouette avait dû affronter de nombreuses épreuves. La question qui suivit m'en donna la preuve.

-Apprenez-moi... à tuer.

-Non, rétorquais-je froidement. Mon ton était aussi sec qu'une gifle et ressemblait fort à la fin brutale d'une interaction. Pourtant, aussi surprenant que cela puisse paraître, j'ajoutais :

-Une arme ne sert pas à tuer mais à rester en vie.

C'était bel et bien ce que je pensais même si cela ne ressemblait en rien à ce que mon père nous avait enseigné. Pourtant, j'aurais tant aimé qu'il nous explique cela ainsi. Sans doute aurais-je été moins agressive, moins brutale dans ma manière de vivre s'il m'avait parlé de défense et non d'attaque pure et dure.

-Tuer pour tuer ferait de toi une meurtrière. Une saloperie qui ne mériterait que la mort… Et je refuse d'aider quelqu'un à le devenir. En revanche, je peux t'apprendre à te défendre pour te protéger… A toi de voir ce que tu veux être.


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GuillemettePaysanne
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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptySam 1 Avr 2023 - 20:39
Non

Elle s'est durcie comme une pierre. Son nez s'est arqué et tout son profil se fige.

Une arme ne sert pas à tuer mais à rester en vie.

On dirait qu'elle se parle à elle-même. Je sens le glacé lui buter dans la poitrine pendant qu'elle rentre son menton, et renchérit, la bouche pointue comme une murène.

Tuer pour tuer ferait de toi une meurtrière. Une saloperie qui ne mériterait que la mort… Et je refuse d'aider quelqu'un à le devenir. En revanche, je peux t'apprendre à te défendre pour te protéger… A toi de voir ce que tu veux être.

Ah oui... Là, je te vois... C'est bien à toi que tu parles... Mais quand même, je suis humiliée. Et l'éclosion brûlante qui vient me colorer les pommettes vrille un peu ma gorge quand je réponds, l'oeil luisant.

Je tue si il faut. Qu'est-ce tu sais toi... Je me retiens de siffler comme une couleuvre.
Je tue si je dois. Et on sait bien qu'on doit. On doit si y'a du mâle, ou du chien, ou... du fangeux... Et moi j'ai vu tout ça... Et je veux... vivre mieux...

Je plonge le nez dans ma chope. Elle était presque vide. Je suis furieuse, je sens que ma voix s'est un peu trop démembrée sur la fin, que le feu de mes pommettes est encore bien trop vif, que l'aigu de ma voix a percé par moments dans le brouhaha des grosses voix mâles. Je sais que mes chevilles tremblent sous la table, et je frotte mes mains l'une contre l'autre, sur mes cuisses, pour leur redonner du solide.

Brusquement je me lève.

Mais tu veux pas, tu veux pas... Merci pour le repas...
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Aeryn MonclarMercenaire
Aeryn Monclar



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyLun 3 Avr 2023 - 15:30
L'humeur de la Mouette avait si brusquement changé que j'en fus surprise. Sans doute l'avais-je maladroitement vexée, comme à mon habitude…

Je tue si il faut. Qu'est-ce tu sais toi...
J'haussais un sourcil perplexe. À l'évidence, elle était furieuse.
Je tue si je dois. Et on sait bien qu'on doit. On doit si y'a du mâle, ou du chien, ou... du fangeux... Et moi j'ai vu tout ça... Et je veux... vivre mieux...

Visiblement, la mouette n'avait pas compris ce que je venais de lui dire. Peut-être m'étais-je mal exprimée. C'était bien possible. Je n'avais pas vraiment l'habitude de m'adresser à des inconnus… Du moins, pas pour ce genre de choses. Pour autant, je ne dis rien et me contentais de l'observer. Cette femme était une boule de nerf bien trop impulsive pour que l'on place une arme dans sa main de novice. Je pouvais certes l'être également, mais je savais manier mes armes et même dans ma colère, je savais placer ma retenue…

Je la vis vider sa choppe avant de se lever brusquement. L'on aurait dit une enfant boudeuse… Voire même capricieuse.

Mais tu veux pas, tu veux pas... Merci pour le repas...

- C'est bon, tu as fini ? lui dis-je en lui lançant un regard en coin.
-T'es plutôt du genre à agir sans réfléchir toi, non ? lui lança Ivaad avant de poser sa choppe.

Il se leva à son tour pour aller se placer derrière l'étrange demoiselle. Malgré sa blessure, sa grande taille le rendait particulièrement imposant, surtout aux côtés d'une femme aussi frêle que Mouette. Sa présence rendait sa fuite tout bonnement impossible. Il ajouta :

-Il y a des moments où il faut savoir réagir dans l'urgence… Mais la plupart du temps, mieux vaut prendre le temps de réfléchir. Que vient de te dire ma sœur, exactement ? A-t-elle réellement refusé de renseigner quoique ce soit ? Prends le temps de réfléchir puis réponds-moi.


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GuillemettePaysanne
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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyJeu 6 Avr 2023 - 13:41
J'hoquète d'indignation et la fureur (et la bière) me font monter le rouge aux pommettes et le feu aux yeux.
Je suis furieusement impuissante. Leur soudaine arrogance me fait chanceler, et je recule de petits pas pour me les mettre tous les deux dans le même champs de vision.

L'humiliation me cuit. Et elle me fait pointer les canines dans un bref mais mauvais sourire. Je veux sortir d'ici, très vite, pour fuir la brûlure de la honte et retrouver le silence de mes bois. Mais... Mon sourire a fait long feu. L'inquiétude s'est rassise sur mon front et en inverse le pli. Mais non... Mes yeux reviennent aux armes. Je déglutis.

Si vous avez décidé de me prendre pour un lapin de six semaines, mes enfants, on s'en sortira pas sans fâcherie. J'parle mal, c'est mon affaire, mais j'suis pas simplette. J'demande à voir comment on se sert de ça. J'demande pas de comment on moralise. La morale, c'est celle des Trois, et celle des arbres, et des loups. C'est comme ça que je vis... parce que c'est comme ça qu'on vit, dans le bois.


Butée, je darde de sous mes sourcils des regards durs et inquiets sur mes deux interlocuteurs. On a pris trop de place dans la taverne, et je saisis quelques rires goguenards et édentés parmi des regards vagues et les grands bruits de voix. Qu'importe !
J'ajoute, après une courte pause :

J'veux juste pouvoir tuer si c'est l'autre ou moi. Je sais tuer. J'ai eu fait... Parce que ça s'est vu obligé. Mais... avec ça... peut-être ç'aurait été plus vite... peut-être ç'aurait moins été par chance que j'en réchappe.
J'suis bergère moi ! J'suis pas d'vos villes ! Qui tu veux que je tue pour rien moi ! Comme si ça meurt pas déjà assez comme ça !


Je me bloque la gorge avec une main. Tais-toi ! Tu sens que tu te noues là ? Tais-toi. J'ai trop élevé la voix sur les dernières phrases. Et l'humiliation ne m'a pas quittée. Je tiens mon sol, mais je voudrais disparaître aussi sec, et m'en aller oublier cette journée sous les chênes et les érables.
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Aeryn MonclarMercenaire
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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyJeu 6 Avr 2023 - 14:50
L'indignation de la demoiselle m'arracha un rictus plus carnassier qu'amical. Sa colère me ramenait à la mienne et je détestais cela. Je voulais me débarrasser de cette vieille compagne, celle qui me tenait compagnie, de jour comme de nuit et qui faisait bouillir mon sang. Cette chaleur insoutenable, je là ressentais encore… Je voulais m'en défaire au plus vite, sans avoir à la cogner, sans avoir à tout casser. Je voulais simplement que tout cela cesse.

Sa rage et sa révolte amusaient énormément mon frère qui se gaussait face à elle. Elle ne l'impressionnait pas le moins du monde, elle n'impressionnait personne… parce que c'était une femme. Parce qu'elle était maigre et plus petite qu'eux. Ça aussi, ça m'énervait.

-Ça suffit, grondais-je finalement de ma voix rauque, pleine de hargne.

Je me relevais brusquement, faisant aussitôt taire mon frère. Il avait dû remarquer le changement, dans la couleur de mes yeux, dans la tension dans mes muscles. Pourtant, je ne voulais pas lui laisser plus de place… à cette maudite colère qui menaçait encore de prendre possession de moi.

-Tu dis que tu veux apprendre mais tu rejettes la première leçon, grondais-je.Viens avec moi… Ou bien ne vient pas. Fais comme tu veux. Tu peux tout aussi bien retourner dans tes bois si tu le souhaites. À toi de voir.

Je quittais la grande salle et l'auberge afin de regagner la fraîcheur du soir. J'avais tellement chaud que j'imaginais me retirer la peau pour enfin pouvoir respirer. Je fis les cent pas pour me débarrasser de cette sensation atroce qui me rongeait les chairs et menaçait mes os.

Cette colère… Je n'en voulais plus.
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Aliénor Montfort de BrieuComtesse
Aliénor Montfort de Brieu



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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyDim 11 Fév 2024 - 14:20
Que c’était étrange ! Ah oui, pas de doute là-dessus. La taverne était pleine de badauds malingres et amusés, claquant les choppes sur les tables lissées par le temps, laissant flotter un air très curieux d’animation. Usson était habituellement plus calme, plus solennelle. C’était un petit bourg d’honnêtes gens, qui s’en venait des champs et des étables ; on les reconnaissait facilement à leurs mains calleuses pleines de terre, et à ce teint buriné par les jours blafards d’un hiver qui n’en finissait jamais. S’il eut fallu décrire la chose, il s’agirait sans doute aucun d’un mélange grossier de boue et de rire, de sillons de larmes et de cris. Pas d’doute, c’était étrange. La Camille, une petite jeune et jolie comme cœur, dansait à en perdre haleine dans le vacarme des conversations mêlées de bière au goût de pisse, et de pisse à l’odeur d’houblon. Tous vibraient d’une émulation nouvelle apportée par les jeux, qu’ils disaient. La vieille Margot, elle, elle n’y voyait qu’un amoncellement de problèmes.

Elle avait toujours vécu dans l’coin. Son père était chaudronnier, comme son grand-père avant, et ensuite son frère et le fils de son frère. Elle, elle avait eu la chance de se marier au Paul, le seul tavernier du coin. Elle l’avait aimé, du moins le pensait-elle maintenant qu’il était mort. C’était y’a si longtemps qu’à y repenser, ses articulations lui tirèrent une affreuse grimace. Bref, elle avait marié le Paul et s’était retrouvé matrone d’la petite entreprise, avait fait deux beaux enfants –morts eux aussi. Elle était seule à présent, mais c’était ici chez elle. Lorsque l’bon roi avait parlé de reprendre le Labret, elle n’avait pas hésité une seconde à déguerpir du trou à rat qu’elle s’était trouvé après l’arrivée des Horreurs. C’était pas vraiment une fille d’la ville, elle s’y serait jamais faite, puis toute cette bouillasse et le manque d’air frais lui collaient des douleurs arthritiques sévères, tant et si bien qu’on aurait bien dit une p’tite vieille. Non, elle était bien mieux ici, dans sa taverne, dont elle s’occupait avec soin – du moins, elle avait réussi à réunir assez d’oseille pour embaucher le brave Pierre pour le faire à sa place. Le gamin s’activait tous les jours sous sa commandanture ; il était pas finot mais il travaillait sans se plaindre, ce qui était déjà pas mal.

Mais cette fête là… Elle cracha un molard sur le sol, qui goutta entre les lattes de plancher, derrière le comptoir. Ça lui faisait un drôle d’effet, comme quelqu’un qui riait à un enterrement. C’était déplacer d’s’amuser quand, au-delà du mur d’enceinte, la chienlit n’attendait qu’une chose : les manger tous crus. La Margot elle avait plus vraiment peur de caner, c’était dans l’ordre des choses à son âge, mais elle n’avait pas très envie de se laisser boulotter par le mari d’la voisine. D’jà qu’la vieille bique l’avait accusé dans sa jeunesse de séduire son jules, pour sûr qu’elle l’attendrait dans l’Autre-Monde pour régler ses comptes si le vilain venait à croquer son mollet. Faut dire qu’à une époque, elle avait été belle, p’t’être bien la plus jolie de tous les environs. C’est pour ça qu’elle avait fait un beau mariage, et qu’elle n’avait pas fini au champ comme ses deux cadettes. Le Paul lui avait fait la cour l’année de ses quatorze ans, et l’vieux il avait pas tenu longtemps avant d’accepter de les marier. Pour sûr, elle aurait même pu épouser le fils du cordonnier deux ans plus tôt ! Mais il était laid comme un pou, elle avait fait des pieds et des mains pour s’en dépatouiller avant qu’il ne soit trop tard.

Bref, elle avait eu d’la chance au départ, mais après, tout ce qu’elle avait eu, s’eut été à la sueur de son front. Elle avait trimé comme une dingue dans cette masure. Mais sa spécialité ne reposait ni sur sa cuisine – mangeable mais sans plus – ni sur l’affreuse piquette qu’ils servaient alors. Non, elle, elle avait toujours eu l’œil vif, l’ouïe fine et l’esprit éclairé. Alors elle profitait toujours de laisser trainer une oreille ou deux, devenant peu à peu la source d’information de tout l’bourg ! Quelle fierté elle avait à raconter ce qu’elle avait entendu des nouvelles de la capitale, ou des baronnies. Ça f’sait rêver les jeunes qui voulait s’en aller à la ville, ça donner du grain à moudre aux vieillards et surtout, ils consommaient jusqu’à ce qu’elle soit à court d’histoire ; et dans une taverne, on n’est jamais à court d’histoire ! Puis les années étaient passées, et si elle pouvait plus vraiment danser la gigue comme à l’époque, elle avait pas b’soin qu’on lui répète deux fois les choses. Alors quand la rouquine, ses frères et la ptite bergère étaient entrés, elle avait eu vite fait d’les repérer. Ils avaient pas la mine des gens commodes d’ici, puis elle avait jamais été à l’aise avec les gens qui portaient des armes. Ils causaient que des ennuis. C’était un petit groupe aussi étonnant qu’la bergère – reconnaissable à son odeur de crottes de bique – f’sait bien tâche au milieu.

Craignant qu’elle soit embêtée, la Margot s’était laissé écouter les conversations, un sourire aux lèvres. Alors que le ton montait entre les deux petites poulettes, elle s’approcha du Pierre, la canne à sa gauche, donnant à sa démarche chaloupée un cliquetis sympathique. Il était afféré au comptoir, mais s’arrêta net dans son activité pour écouter sagement les consignes de la vieille, qui lui demanda l’air de rien de faire v’nir preste la petite brunette. Il laissa sur place son chiffon, et se lança dans la foule pour parvenir à la damoiselle, lui montrant du doigt la tenancière alors qu’il parlait. De là où elle était, elle n’avait réussi à distinguer que « vous voir… la vieille… comptoir ». C’était assez pour satisfaire la demande. Et quand la ptiote se décida à se laisser porter par sa curiosité, elle l’attendait toujours sagement, dans un coin, la canne à la main.

« — Bah alors ma p’tite c’est d’drôle d’amis qu’t’as là ! On a pas l’habitude d’voir un ptit brin d’femme comme toi avec des gars comme ça. Tu t’serais pas attiré des ennuis par hasard ? »
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GuillemettePaysanne
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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  EmptyDim 18 Fév 2024 - 21:19
Je me sens toujours fumer l'écarlate par les joues et les naseaux. La jeune rouquine s'extrait avec une humeur lasse et lourde de notre altercation. Le gros rire goguenard de son frère me hérisse jusqu'aux cervicales et je rentre un peu le coup dans mes épaules. Sortir. Sortir. Les odeurs me suffoquent un peu, et la tête commence à me tourner. Je fais un pas vacillant dans le sillage de la jeune rousse quand on me prend par le coude et qu'on m'invite prestement, après un murmure dans l'oreille, à rappliquer derrière le comptoir. Je reste saisie, toute raide dans mon élan. Je voulais tant sortir que ça m'étourdit. On insiste un peu, et en haussant le ton. Le géant frère de la rousse grince de la gorge en se la raclant. Il a fini de rire. Je claque un coup d'œil dans son sens, qui ne l'atteint même pas, mais me laisse deviner sa carcasse.

Je veux filer. Je me glisse alors entre les gros corps vers le derrière du comptoir, et la satisfaction aigue de la vieille qui m'y attend, ses mains couturées de rides croisées sur sa canne, son cul enjupé tenu par son tabouret haut, me frappent comme une tapotade sur la joue.

« — Bah alors ma p’tite c’est d’drôle d’amis qu’t’as là ! On a pas l’habitude d’voir un ptit brin d’femme comme toi avec des gars comme ça. Tu t’serais pas attiré des ennuis par hasard ? »

" Eh ? " Héberluée, je me retourne presque, puis comprends. La bière sonne encore contre mon crâne et mes joues. " Ah... " Je songe. " Un peu. Qu'est-ce que c'est d'être prise pour l'infante souillon du bourg hein ? " Je m'enhardis un peu sur la fin de phrase. Puis me dédis presque. " Mais pas qu'on m'veuille du mal non ! " En agitant les paumes face à la vieille. Trop de sons et de chaleur, je ne regarde pas bien mon interlocutrice. J'ajoute : " C'est-y si sauvage que de vouloir apprendre à tenir la lame ? " que je regrette aussitôt. J'ai vu briller un éclat perçant, puissant, dans l'œil d'aigle qui me toise. La lippe se fait pointue un bref instant.
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MessageSujet: Re: [Évent] Tu me rends chèvre.    [Évent] Tu me rends chèvre.  Empty
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