Forcer la chance ou la laisser faire [Finn - Terminé]

Son contact était crispé sur sa peau rendue humide par l'air des thermes, il pouvait percevoir ses craintes rien qu'à ces quelques gestes et regards qu'elle avait, aux hésitations qu'il entendait dans sa voix... et pourtant elle ne s'enfuyait pas cette fois, ce qui était à la fois un soulagement et une agréable surprise.

- Je n'attends pas que tu me répondes tout de suite si cela doit te faire t'enfuir.

Répondit-il aussi doucement que possible, avec un sourire qui se voulait bienveillant, même s'il fallait reconnaitre que c'était des mots très difficiles à prononcer et qui, si un jour les choses devaient mal tourner, lui laboureraient le cœur sans aucune pitié. En attendant de voir ce qu'il adviendrait, tout ce qu'il pouvait faire était de laisser le temps à la chasseuse de se faire son propre avis. Ilhanne semblait en tout cas vouloir ouvrir son cœur malgré la difficulté que cela représentait, lui confiant le fond de sa pensée, y compris en ce qui concernait Margaux son amie d'enfance. Finn ne chercha pas à l'interrompre, pourtant il fut étonné en réalisant que, peut-être... non, probablement, la rousse se sentait en quelque sorte moins attirante que la serveuse. L'idée qu'il ait pu entretenir une relation avec celle-ci tout en courant après elle aurait pu l'offusquer, voir même le vexer, si Ilhanne ne s'était pas mise à l'étreindre délicatement, avec une lenteur qu'il imita en passant ses bras autour de ses épaules pour la presser doucement contre lui. Une telle proximité, avec la nudité qui allait avec, il n'en avait guère que rêvé jusqu'à présent et voilà que tout se concrétisait, bien que ce soit grandement éloigné de ses fantasmes les plus inavouables. A la place il ne fut pas enfiévré ni enclin à des choses que la morale réprouverait, mais bel et bien à rassurer celle qui, enfin, franchissait d'elle-même le gouffre les séparant jusqu'à présent.

- Ne sois pas désolée, tu n'as rien à te reprocher.

Son sourire revint fort heureusement, sa bonne humeur aussi, dispersant un peu le malaise qui semblait avoir pris dans une gangue les deux jeunes gens. Sa main caressa le dos de la chasseuse en évitant soigneusement son flanc blessé, l'autre le faisant avec ses cheveux dont il adorait la teinte, alors que ses lèvres venaient embrasser son front.

- Il m'est impossible de voir une autre femme que toi, c'est encore pire que si j'avais des œillères.

Finn lui adressa un sourire en coin, espiègle et amusé, avant de poser doucement son front contre le sien, plongeant ses yeux clairs dans ceux de la chasseuse, le souffle brûlant autant à cause de l'eau que de la proximité de leurs deux corps dénudés.

- Je ne te cacherais jamais rien Ilhanne, jamais. Et si tu as des questions, pose-les-moi sans détour, j'y répondrais toujours et point ne me défilerait.

C'était, à défaut de pouvoir lui promettre monts et merveilles, ainsi qu'une vie loin du malheur et du danger, tout ce qu'il pouvait faire pour essayer de la rassurer au mieux à l'égard de ce qui était en train de naitre entre eux deux, quoi que ce fut.

Tout avait l’air si honnête, si vrai quand ça sortait de sa bouche. Ça pourrait sembler stupide, d’ailleurs ça devait l’être. Mais tout dans ses gestes, dans ses mots, dans toute sa façon d’agir semblait naturel.

Blottie contre le lui son contact avait quelque chose d’apaisant, derrière toute l’anxiété que causait cette situation parfaitement inconnue. Beaucoup de choses auraient dû me gêner, mais je n’y faisais pas vraiment attention, je profitais simplement de cette peau qui irradiait une douce chaleur donc la surface était bosselée par les muscles qu’on sentait rouler, frémir, se contracter juste en dessous. J’aurais presque protesté quand il nous avait séparés même si c’était que de presque rien, mais ça remarque m’avait plutôt fait rire, doucement rire, un rire peut être un peu cynique. Si je n’avais laissé personne avant Fin s’approcher de moi, j’avais bien vu au fils des années ceux qui avaient essayé de se rapprocher de Margaux, et cette phrase ne m’était pas familière. Fatalement, ça ne s’était pas toujours bien passé, plus d’une fois d’ailleurs le baratin n’avait pas pris.

S’était une jolie promesse à laquelle j’avais envie de croire, sans vraiment pourvoir m’en persuader. Nous verrions bien, il avait largement mérité le bénéfice du doute, même peut-être pouvoir considérer sa bonne fois.

Qu’est-ce que je pouvais bien répondre à ça ?

Dans ma poitrine, ça s’emballait, ça ne s’emballait pas que maintenant, ça s’emballait depuis que Finn était arrivé, depuis qu’il s’était rapproché. L’avoir si près, si peu habillé, pouvoir le toucher, me sentir, au moins un peu, tranquillisée par ce qu’il disait, n’avait rien arrangé.

J’avais posé pas très assurée ma main sur sa joue, caressant doucement la pommette du bout du pouce, avant de l’embrasser, bien moins maladroite que la dernière fois, plus sûre que s’était bien ce que je voulais.

Si je ne pouvais lui promettre quoi que ce soit, je pouvais au moins lui faire le cadeau de quelques nouveaux pas vers lui.

L’ambiance, le moment, dans mon esprit ça se troublait un peu. Le baiser s’était fait un peu plus empressé, ma main descendant le long de son cou, puis dans le haut de son dos, avant que je l’arrête effarouchée parce ce même empressement.

La chaleur, la tension, le désir et l'appréhension, tout cela se mêlait, l'empêchait de respirer calmement et profondément, troublait son esprit autant que la proximité du corps de Ilhanne, leur nudité, l'affection qu'il y avait entre eux malgré les aléas de ces dernières semaines. Finn aurait pu lui déclamer des poèmes -bien qu'il n'en connaisse aucun- il aurait pu soulever des montagnes -bien qu'il en soit physiquement incapable- et aurait tenté l'impossible pour qu'elle daigne lui accorder ce que son cœur autant que son corps désirait, mais plus que jamais il avait conscience que la brusquer provoquerait l'effet inverse, sans possibilité de retour. C'est ainsi qu'il avait décidé de la laisser venir à lui et, si cela le surprit, il ne le montra que lorsque la main vint caresser sa joue, lui faisant brièvement fermer les yeux et se détendre un peu. Le Mercenaire avait l'impression de vivre le plus doux des rêves, mais ce fut le baiser de la Chasseuse, plus assuré et empressé que la dernière fois, qui le tira de son début de transe pour le faire réagir à son tour. Ses mains se pressèrent un peu plus dans le dos de la jeune femme dont il répondit au baiser avec la même passion, se retenant malgré tout de s'épancher plus avant et de lâcher la bride. "Rien qu'un baiser" se répétait-il pour ne pas céder, savourant son contact, sentant les mains douces stopper leur mouvement dans son propres dos. Rouvrant les yeux, il sourit tel un chat venant de bouter au meilleur des poissons, mais la tendresse demeurait sous la passion et son sourire fut heureusement plus doux qu'affamé. Il avait envie de plus, mais il ne pouvait le prendre par lui-même, car ce n'était point ainsi que fonctionnait Ilhanne.

- Je ne t'obligerais à rien même si tu devais continuer plus avant.

Le self-control, rares étaient les fois où Finn avait du autant en user et en abuser, tant son corps bouillonnait de l'intérieur et que ses muscles hurlaient pour faire resserrer leurs prises sur ce corps à portée d'un plus grand contact encore. Nombreux étaient ceux qui, manquant de bienveillance ou même de respect, lui avait déjà jeté à la figure qu'il n'était qu'un jeunot romantique qui finirait vieux et puceau faute de prendre de force ce qu'il désirait, mais à son sens il y avait toujours eu des limites à ne pas franchir et, bien que cela couta de demeura immobile malgré plusieurs tremblements nerveux agitant son corps, il parvint à ne pas bouger et à sourire à la jeune femme.

- Je pourrais t'embrasser et te serrer contre moi pendant des heures.

"Jusqu'à la fin des temps" avait-il pensé, mais c'était le genre de parole qui aurait pu effrayer et, conscient des pincettes qu'il prenait avec la Chasseuse, décida que lui voler un baiser n'était pas cher payé. Revenant à la charge, il se fit plus brûlant et plus passionné, ses lèvres capturant les siennes alors qu'il l'étreignait étroitement contre sa propre nudité, prenant garde malgré tout à ce flanc blessé qui l'avait conduite jusqu'ici. Hélas, comme tout homme emporté par l'instant, Ilhanne pu sentir l'effet qu'elle lui faisait contre son ventre, grandissant et grossissant, bien qu'à aucun moment les mains de Finn ne dérivèrent de son dos ou ses épaules. On ne pouvait pas tout contrôler et il fallait reconnaitre que cela faisait près d'un an qu'il n'avait pas eu l'occasion d'être en charmante compagnie. Alors si en plus de cela il était amoureux...

Toute la tension de son corps, ses petits tremblements, la passion dans la caresse de ses lèvres, tout ça, ma peau, ma bouche, le ressentaient, l’appréciaient, ça trouvait écho quelque part au plus profond de moi, flattant, caressant, quelque chose qui se réveillait doucement. Puis ses mots… Ses mots qui vibraient dans mon esprit embrumé, empâté parce qui se passait autour et en moi. J’avais cette impression agréable et terrifiante que j’allais finir par ne plus rien contrôler. Lâcher prise, en quelque sorte, s’en remettre complètement à lui-même si ce n’était que pour quelques instants.

Je n’avais pu faire autrement que prendre part à cette embrassade brûlante, me serrant contre lui, mais ma crainte de l’inconnu instaurant une certaine retenue. Me serrant contre lui un peu hésitant, sentant tout l’effet que ça pouvait lui faire.

L’entaille tiraillait désagréable, mais supportable, la douleur sûrement étouffée, rien qu’un peu, par tout ce qui bouillonnait dans mes entrailles et dans ma tête.

Quelque chose que je n’avais pas ressenti, du moins jamais comme ça. Un peu de trouble, un peu de chaleur, un peu de malaise aussi parfois à la trop grande proximité d’un homme, mais pas que je me souvienne cette envie de toucher, de plus.

Il fallait lui dire…
J’avais déjà dit tellement. J’avais l’impression de lui avoir tellement montré. Je pouvais pas occulter ça, surtout pas avec ce qui se passait, surtout pas avec ce que je surprenais à envisager, à désirer sourdement, tout au fond.

« Finn… Je… Je ne suis jamais allé plus avant. »

Je lui avait glissé à l’oreille, cette confidence, appréhendant un peu, complètement, sa réaction. Je n’en étais ni fière, ni honteuse, s’était juste une conséquence de se cache que j’avais mis sur cette partie des relations humaines. Je voulais pas voir, je voulais pas comprendre, je voulais pas concevoir que s’était possible. Mais ça avait changé, à cause, ou grâce, à Aéris.

Enlacer conte Finn, je profitais du contact de sa peau, mon esprit aux prises avec la prédiction de ce qu’il pourrait bien penser de ce que je venais de lui avouer un peu du bout des lèvres. Je laissais mes doigts parcourir la peau de son dos y dessiner des volutes, des entrelacements.

Et si ça le faisait rire ? Ce n’était pas si terrible en fait.

Et si ça le faisait fuir ?

Combien d'hommes auraient profité de la situation ? Combien, à l'heure actuelle, auraient argué que la vie allait bientôt s'éteindre et qu'il fallait profiter de chaque instant ? Il y en aurait pour penser à la blessure de la jeune femme, pour ne pas vouloir lui imposer ça, quand d'autres au contraire n'en aurait rien eu à faire. Elle était là, dans ce bain chaud, collée contre lui, leurs deux corps bouillonnant à cause des températures et du désir qui s'emparait d'eux... et Ilhanne ressentit le vif besoin de se confier, d'avouer une chose qui, par les temps qui couraient, n'étaient pas si ordinaires quand on était pas de la Noblesse. Elle n'était jamais passée à l'acte. Finn en fut surpris, mais pas autant que ce qu'on aurait pu croire, car il avait eu le temps d'y réfléchir longuement et l'avait très fortement soupçonné, sans jamais en avoir confirmation, tout du moins jusqu'à maintenant. La nouvelle le fit cligner des paupières, puis écarter doucement la chasseuse par les épaules pour mieux la scruter, longuement, silencieusement... Damn it, il ne pouvait pas lui faire ça, pas ici, dans cet état, avec cette blessure comme avec cette terrible faiblesse, ce presque abandon qui la rendait plus désirable encore, lui dont l'envie était clairement dressée sous la surface de l'eau fumante. Mentalement, l'homme se traita d'imbécile et offrit un sourire rassurant à celle qu'il tenait par les épaules.

- Alors il faut que ça soit un moment inoubliable.

Puis il l'étreignit de nouveau, soupirant à son oreille en fermant brièvement les yeux.

- Mais pas maintenant, tu n'es pas en état. Tu aurais plus mal qu'autre chose.

Sa main effleura la peau à proximité de la blessure puis remonta bien vite dans le dos de Ilhanne qu'il désirait plus que tout. Si la pauvre avait eu accès à son esprit, elle aurait pu voir défiler toutes les insanités qu'il voulait partager avec elle, tout ce qu'il voulait lui faire découvrir, à lui arracher des cris et des soupirs à n'en plus finir... Au lieu de cela, Finn se contentait de l'étreindre, se martelant en silence qu'il leur faudrait prendre un moment rien qu'à eux, dans une jolie chambre proprette avec un lit convenable, pour qu'au moins cette fois la chasseuse ne regrette rien.

- Je te désire comme un fou Ilhanne, si tu savais à quel point... Mais on m'a toujours dit qu'une femme devait être traitée comme il faut et que pour vous, cet acte était très précieux, presque sacré.

C'était en tout cas ce que sa mère lui avait toujours répété, y compris quand lui et une jeune fille de son village étaient passés à l'acte dans les foins. Si son père avait été assez fier de le voir être devenu un "homme", sa mère avait voulu s'assurer que les deux jeunes gens avaient bien eu conscience de l'importance de ce qu'ils avaient fait. Sans être un fils à sa maman, l'on pouvait dire qu'elle avait toujours fait en sorte que son enfant devienne quelqu'un "de bien". Ainsi le Mercenaire soupira-t-il de nouveau dans le cou de celle qui avait su capturer son cœur, s'écartant à regret avec un maigre sourire, le regard empli de tendresse.

- Tu dois d'abord guérir ta blessure, ensuite si tu veux toujours de moi, on... je te promet que ce sera parfait.

Tout du moins autant que cela pouvait l'être compte tenu du monde dans lequel ils vivaient, mais il comptait bien lui faire oublier tout le reste, la faire s'abandonner entre ses bras jusqu'à en perdre tout repère, jusqu'à l'extase et au-delà. Bordel, il devait vraiment être devenu fou, complètement fou.

Le moment de flottement avait été assez terrible, me faisant m’interroger si j’avais bien fait, ou non, d’avouer. Si je n’aurais pas juste dû me taire, attendre, voir et peut-être avoir la mauvaise réaction au mauvais moment comme ça semblait se profiler. Quand il nous avait écartés précautionneusement, j’avais pensé au pire, ou du moins, au moins agréable, le rire carrément cynique, ou l’affirmation que je mentais. J’étais une gamine des bas quartiers, je venais de dépasser la vingtaine, tout ça ne jouait pas en la faveur de ce que j’avais confié, je la savais.

Mais finalement ça s’était envolé quand il avait semblé accepter, me serrant à nouveau contre lui. Je savais même pas si je méritais tant d’attention. Si on m’avait demandé mon avis, j’aurais sûrement dit que non, n’étant une casse pied parmi tant d’autres.

Je l’écoutais parler, promettre. M’amusant de la différence de point de vue que je pouvais constater. Si je n’avais pas souvenir de discusions poussé avec Val’ sur ce sujet, j’avais souvent entendu Margaux me conter, les malheurs désopilants de sa vie privée. Pour elle, ce n’était pas sacré, sans pour autant être sans importance, elle en parlait comme d’une distraction agréable. Après, je la connaissais, elle jouait la détachée un peu blasée, mais au fond, elle croyait encore un peu aux jolies histoires, ce qui lui valait quelques déconvenues parfois.

Ne pouvant pas juger, même pas vraiment imaginer. J’avais juste ce que j’avais entendu et ce que je sentais, ce qui se passait dans mon propre corps là, tout de suite.
Mais il devait avoir raison, vu qu’il avait raison pour la blessure, d’ailleurs, j’avais frémi, quand il avait effleuré les abords de la griffure. Il avait ravivé un peu plus la douleur, sans le vouloir vraiment. Quelques choses en moi étaient un peu déçues, un peu frustrées de tant de raison.

« T’es bien sûr de toi. »

J’avais décidé de prendre la partie de la moquerie, pas une moquerie sale, un peu méchante, au contraire, je m’amusais de la situation. Je voulais juste essayer de faire baisser la tension qui s’était emparée de nous.

Après l’avoir éclaboussé d’une jolie gerbe d’eau, je m’étais éloignée pour rejoindre le bord. Il fallait mettre un peu de distance, que la tempête se calme.

« J’peux pas te dire quand je reviendrais la prochaine fois, parce que j’en ai aucune idée. »

Je repartais demain dans la matinée, tôt dans la matinée, comme d’habitude. Je ne restais jamais longtemps de toute façon.

Est-ce que ça allait le fatiguer à force, d’attendre, toujours attendre ?

Il avait sourit et, si Ilhanne avait encore eu quelques doutes quant à la bonne volonté de Finn, elle ne pu plus en douter en le voyant se détendre, la plaisanterie ayant été appréciée à sa juste valeur et accueillie bien volontiers, dissipant la tension qui perdurait encore entre eux deux suite à tant de sérieux. Lui-même était davantage habitué à sourire et à être enjoué que grave et presque moralisateur, mais il fallait bien que sa détermination transparaisse parfois, surtout lorsqu'il s'agissait de la jeune femme à qui il répondit avec un amusement certain face à sa petite moquerie.

- Je ne dis que la vérité, tu devrais le savoir depuis le temps.

Et ça, c'était direct dans son égo pour le gonfler un peu, mais ça ne faisait jamais de mal de rire et c'est ce qu'il fit, brièvement, mais avec une légèreté là encore bienvenue. La Chasseuse l'éclaboussa à cet instant précis et s'éloigna un peu, mettant de la distance entre eux pour leur permettre de reprendre un peu leur souffle et leurs esprits. Inspirant profondément, le Mercenaire se fit une raison en silence, refusant de laisser paraitre la moindre déception, y compris lorsqu'elle lui affirma ne pas savoir quand est-ce qu'elle reviendrait. N'était-ce pas ainsi à chaque fois ? Pourtant elle semblait toujours comme inquiète de sa réaction, comme si à la longue il pourrait fort bien changer d'avis et décider de l'abandonner. Gagnant l'un des bords à quelques mètres de là, il s'assit dans l'eau et soupira, contenté par la chaleur bienveillante des thermes qui l'aidait à évacuer toute frustration, lui permettant ainsi d'afficher un air confiant, serein et souriant.

- Tant que tu prends garde à toi, cela me convient. Je t'ai dit que j'attendrais, alors ne t'inquiète pas de la date de ton retour, mais bien du chemin à parcourir.

Finn entreprit de s'étirer pour dénouer ses muscles et ses articulations, quelques craquements se faisant entendre, accompagnés d'un soupir expiré un peu trop fortement, presque en éclat de soulagement. Il allait devoir songer à s'échauffer plus encore et à s'étirer tout autant s'il ne voulait pas se rouiller ni perdre en souplesse.

- Pour ma part, nos premières missions vont nous êtres prochainement attribuées et j'ai hâte de voir ce que l'on nous réserve. Qui sait, peut-être que protéger un convoi pour le Labret en fera partie.

Chose qui l'intéresserait certainement, fut-ce véritablement dangereux et emprunt de nombreux périls mortels. L'homme avait hâte de se montrer utile tout en gagnant sa vie et il espérait bien que les missions allaient pleuvoir, même s'il se doutait qu'au début elles viendraient au goutte à goutte.

J’avais prouvé plus d’une fois être capable de prendre soin de moi, la griffure était gênante et douloureuse parce qu’elle était récente, mais elle n’avait rien d’handicapant. Une fois les fils retirés, ça serait comme si rien n’était jamais arrivé, à part un nouveau trait pour zébrer ma peau.

« Bien sûr que je vais faire attention. Je vais aller sans armes, une nuit de pluie, alors que des fangeux ont été aperçus près du fort, dans les marais. »

Un peu d’ironie, un peu de moquerie et un sourire amusé. L’instant était amusant, léger on se défaisait doucement de ces envies qu’on ne pouvait pas vraiment assouvir. Du moins, il l’était jusqu’à ce qu’il parle de ses espérances pour ses prochaines missions.

« Le Labret … »

Cette grande étendue de terre fertile qu’on essayait de coloniser, on en avait entendu parler au Traquemont du Labret, et peut-être même autant qu’a Marbrume, après tout s’était notre châtelaine qui avait conduit le convoi, s’était ses couleurs qui avaient, entre autres, protégé les migrants, volontaires ou non.

« J’y finirais peut-être un jour, des hommes de Traquemont y sont resté après la migration pour aider à sécuriser les lieux, parfois il y a des échanges des envois renforts. »

On ne voyait plus le Chevalier de Nouet dans les murs du fort et la nouvelle de sa mort ne s’était pas rependue. Il devait être resté le bas.

« Valériane était dans l’escorte, pas moi. Encore particulièrement échaudé par une mission d’sauvetage qui s’était mal passé dans une vieille mine aux fins fonds du marécage, j’m’étais pas porté volontaire. Mais elle m’a tout raconté et rien que ses mots, ça f’sait froid dans l’dos… »

La mine, même pas entrée dedans j’avais déjà failli y rester, emportée par Jonas le pauvre condamné. J’avais gardé longtemps un bleu u niveau ou ses doigts s’étaient agrippé avec la force du désespoir sur ma jambe avant de glisser.

Je faisais pas ça parce que ça me plaisait, je faisais pas ça parce que j’avais une envie folle et irrésistible de planter du fangeux. Non, rien de tout ça, s’était juste qu’il faille faire quelque chose et que je pouvais faire quelque chose. Simplement se contenter de se terrer derrière des hauts murs, et attendre que ça passer, et prier pour que le fléau disparaisse, ça n’allait rien arranger, bien au contraire.

J’imaginais à peine la terreur qui avait dû prendre ma sœur et tous les autres aux tripes quand ils avaient vu les mordeurs leur sauter dessus. Déjà, voir une silhouette au loin dans les marais nous faisait souvent rebrousser chemin, dans nos mauvais jours, alors voir une centaine, peut-être plus foncer sur soit, tout crocs et griffe dehors.

« Tu devrais pas avoir l’air si heureux et impatient d’aller t’faire déchiqueter. »

Personne ne devrait.
Ça m’avait rendu morose, Finn devenait doucement une nouvelle personne pour qui j’allais m’inquiéter, me demander si quelque chose ne lui était pas tombé dessus malheureusement un jour, sortit des murs de Marbrume. Mais lui, il ne passerait pas régulièrement par Traquemont lors d’escorte de convois.

Margaux avait tort, ce n’était pas juste une personne de plus à voir pendant mes passages dans la cité.

Finn n'avait pas réalisé que parler du Labret pourrait plomber l'ambiance et pourtant c'est ce qu'il venait de faire à l'instant. L'expression d'Ilhanne s'était immédiatement modifiée, passant d'un léger amusement à une certaine inquiétude, la poussant alors à parler de ce qu'elle savait de cet endroit et des zones qui l'entourait. Un lieu dangereux où la mort rôdait sans cesse, où le danger était présent à chaque seconde qui passait et où bien des gens étaient morts pour permettre à l'endroit de revivre et de perdurer, jusqu'à maintenant. Rares étaient les fois où la Chasseuse évoquait la peur qu'elle pouvait éprouver, aussi hocha-t-il gravement la tête à ses mots, affichant un sourire sans joie quand elle le réprimanda doucement sur son impatience d'aller se faire déchiqueter.

- Ça va sans doute te paraitre stupide, mais j'ai envie de leur apporter la paix.

Le Mercenaire entreprit de se frotter les bras avec l'eau chaude, se décrassant machinalement au fur et à mesure qu'il parlait, ayant besoin d'occuper ses mains alors que son esprit voyageait un peu plus loin et que son regard fixait le bassin dans lequel il se trouvait, esquivant ainsi le beau visage de la jeune femme à laquelle il tenait tant.

- Je ne te l'ai jamais dit et c'est vrai que nous n'en avons jamais spécialement parlé, mais j'ai déjà rencontré un Fangeux, une fois. Il était seul, ou en tout cas j'ai pu m'enfuir avant que d'autres ne me tombent dessus, mais avoir du le tuer a été... source de beaucoup de chagrin.

Chagrin, le mot qu'il n'employait que très rarement et jamais pour parler de lui, en aucune occasion que ce soit, si ce n'est une fois en tête-à-tête avec Le Capitaine, lors de son recrutement pour intégrer la Compagnie des Lames. Tout était alors bien plus frais et il n'avait pu s'empêcher de verser quelques larmes, tandis qu'à présent ses yeux secs fixaient l'eau avec insistance, comme si l'apaisement se trouvait là, sous son nez.

- Les réfugiés arrivaient par centaines et j'ai voulu aller chercher mes parents pour les mettre à l'abri dans la cité. J'ai chevauché durant des heures jusqu'à notre village, mais c'était déjà trop tard, il n'y avait plus personne de vivant là-bas.

Sa mâchoire se crispa, sa gorge se serra et il fronça les sourcils au souvenir qui défilait dans son regard, alors qu'il se revoyait encore descendre de sa monture et entrer dans la demeure familiale, allumer une bougie juste à temps pour voir le Fangeux qui venait de descendre l'escalier de la maison, lui faisant face telle une apparition fantomatique et cauchemardesque. Et de la même façon qu'il avait du faire face au monstre, Finn releva finalement ses yeux clairs sur Ilhanne, la fixant avec une dureté trompeuse, comme accusatrice alors qu'elle n'était point visée.

- Mon Père a essayé de me tuer, parce qu'il était devenu l'un de ces... monstres. C'est l'un de ses outils qui m'a sauvé la vie, c'est avec son propre marteau que je l'ai abattu, comme un animal enragé.

Cette fois sa gorge se serra pour de bon et il marqua plusieurs secondes de silence, l'humidité de ses yeux menaçant de se manifester alors qu'il inspirait pour garder contenance. De nouveau, ce sourire forcé revint à la charge, cette fois clairement identifiable, comme lorsqu'elle lui avait tourné le dos la première fois.

- J'espère qu'Anür l'a accueillie auprès d'elle et j'espère que Rikni me donnera la force de tuer tous les Fangeux que je rencontrerais, parce que personne ne mérite de finir comme ça... personne.

Et cette fois-ci il se tut, ne disant plus un seul mot, incapable après le dernier prononcé d'une voix tremblante d'en dire davantage. Il avait rencontré la jeune femme pendant qu'elle était la plus vulnérable, à présent c'était son tour de baisser un peu les barrières et de montrer quelque faiblesse, fut-ce plus ancien que ce qu'elle avait vécu. La confiance, ça marchait dans les deux sens.

La détresse humaine c'était toujours dur à supporter. Là tout de suite s’était d’autant plus compliqué à supporter. Je pouvais pas lui servir le numéro compréhensif mais ferme que j’avais l’habitude de faire. Je voulais pas qu’il m’imagine insensible à son malheur à sa détresse alors que c'était pas vrai.

Je m’étais approché doucement, pour passer une main dans ses cheveux rendus humides par l’atmosphère des thermes. Sans vraiment savoir si c'était convaincant, j’essayais d’être délicate, la délicatesse, ça n'avait jamais été mon fort.

« Tu me l’as déjà dit … »

La dernière fois, pendant qu’ils marchaient, il me l’avait déjà dit. Ça n’en rendait pas moins l’acte terrible, difficile, fin’ à ce que je pouvais imaginer, plus concevoir d’ailleurs plutôt qu’imaginer. Je voyais surtout qu’il avait pu avoir l’opportunité d’abréger ses souffrances, de ne pas lui imposer trop longtemps la condition de bête.

« Tu m’avais juste pas dit comment. »

Avais-je soufflé en m’installant contre lui. Ça n’avait rien à voir avec tout à l’heure, rien du tout. Pas de fièvre, pas d’empressement, juste de la compassion et l’envie sourde de pouvoir mettre des pansements sur ses blessures.

Personne ? Vraiment ?

Je n’étais pas tout à fait de cet avis. Mais ce n’était pas tout à fait le moment pour en parler. Un jour peut-être, un moment moins fragile. Si même moi je m’en rendais compte c’est que c'était particulièrement flagrant.

Posant un peu hésitante la main sur son épaule, j’avais parlé presque à mi-voix. On était toujours seul, mais savait-on jamais que quelqu’un arrive.

« Au moins t’as des souvenirs heureux de ton père. Ils vont finir par prendre le dessus. Pour moi, le mien ça a toujours été un ivrogne braillard et sale qui frappait Val', et moi quand elle était pas là, ou qu’elle pouvait pas l’empêcher, pour extérioriser … se défouler. »

Ma sœur faisait tout pour me le cacher le plus possible et les premières années, ça avait marché. Trop jeune pour comprendre, pour faire le lien entre les cris rauques et les marques de coup sur la peau de Valériane. Puis l’esprit avait muri et même quitté la pièce, n’avait pas suffi, même les linges qu’elle essayait de mettre pour calfeutrer la chambre ça ne suffisait plus, ça n’étouffait plus. Puis a grandir, à l’ouvrir, j’étais devenu une source d’agacement pour lui aussi.

« On ne va pas jouer à celui qu’a eu la vie la plus pourrie, parce que j’ai incontestablement gagné. »

J’avais forcé un sourire amusé et le ton qui allait avec. S’était loin tout ça, ça n’éveillait plus grand-chose à part une colère et une culpabilité sourde. Pendant ce temps ma main glissait le long de son bras…

« Mais pense que tu as eu la chance d’le connaître avant, de l’aimer avant et qu’au moins c’est toi qui as mis fin à ses souffrances. J'suppose que c’était la plus belle chose que tu pouvais faire pour lui, même si ça a cassé quelque chose en toi. Y a toujours moyen de réparer, ou de faire avec. »

… pour finir par attraper sa main.

Ah oui, c'était vrai, il le lui avait déjà dit, mais sur l'instant il avait été trop absorbé pour s'en rappeler, trop plongé dans ses souvenirs. Ainsi la dernière fois il avait su garder pour lui les détails, tandis que là il les confiaient bien volontiers. Ilhanne lui parlait si doucement qu'il ne pu que sourire faiblement, la regardant s'installer à ses côtés en acquiesçant légèrement. Elle su trouver les mots qui apaisèrent Finn, lui contant à son tours quelques détails de son passé qui ne manquèrent pas de l'attrister. Pourquoi fallait-il que les gens souffrent de la cruauté humaine ? Cela lui échappait pleinement, car hormis pour défendre ce que l'on chérissait, il ne comprenait pas qu'on puisse désirer infliger de la souffrance à autrui. Ainsi alors qu'elle lui parlait, il vint caresser sa joue d'une main chaude, l'écoutant sans l'interrompre, son regard rivé au sien, à son visage qu'il scrutait en silence, jusqu'à sourire un peu plus quand elle affirma avoir gagné.

- Incontestablement.

Le serrement qu'il éprouvait lui fit secouer la tête, le Mercenaire se sentait le devoir de lui faire une promesse éternelle quant à ce qu'elle avait vécu.

- Sache que jamais je ne lèverais la main sur toi Ilhanne, jamais... Et si l'on devait te faire le moindre mal, quand bien même tu sais te défendre, je ne laisserait personne s'en sortir à bon compte.

Ce qui présageait effectivement une certaine violence vengeresse, mais il s'agissait là de protection et d'affection, pas de gratuité. De même, il songea que si jamais elle lui demandait son aide pour sa sœur, il n'hésiterait pas à répondre présent. La Chasseuse avait vraiment les mots et, alors qu'elle attrapait sa main, il l'entoura de ses bras et la pressa contre lui, non pas avec la passion qui les avaient animés l'instant précédant, mais avec une tendresse et une douceur certaines. Soupirant dans son cou, il savoura ce contact en se détendant visiblement, fixant l'eau au-delà de l'épaule de la jeune femme contre laquelle il avait appuyé son menton.

- Je ferais avec oui, et je te remercie pour tes paroles. Je suis heureux de t'avoir dans ma vie.

Il sourit pour de bon et garda Ilhanne contre lui, passant ses mains dans son dos, avant de l'écarter doucement, lui faisant signe de bouger de sa place.

- Tiens, retourne-toi, je vais te masser les épaules, tu dois être courbaturée.

Finn allait bien mieux, le moment d'égarement était passé et il avait envie de profiter de cet instant qu'ils avaient rien que pour eux, de quoi leur permettre de se changer un peu les idées après cette discussion un peu trop sérieuse.

Finn parlait beaucoup, surtout pour dire ce qu’il pensait ce qu’il ressentait ce qui n’animait. Sur ce point je devais être son exact opposé. J’aimais pas parler, je me sentais tellement ridicule à essayer de mettre des mots sur des choses qui n’avaient de sens souvent que pour moi. Comme il aimait faire des promesses. Des mots aussi sincères qu’il aient l’air, s’étaient toujours des mots. Mais je pouvais pas lui dire, je le connaissais pas tant que ça, mais j’avais l’intime conviction que ça allait le vexer. J’attendrais donc de voir. Mais je pouvais me permettre tout de même une petite remarque.

« Tu sais, j’ai plus six ans, tu l’as dit toi-même je sais me défendre. »

Le souffle de son soupir dans mon cou laissa une petite traînée froide.

Être dans sa vie… en pointillé surtout, pour le moment jamais simplement. Je comprenais pas vraiment ce qu’il me trouvait, je comprenais pas tout à fait … plein de chose en réalité.

Un massage des épaules, ça n’aurait pas été de refus, loin de là, les muscles de cette partie de mon corps devaient être une boule de nœud, pourtant, j’avais préféré, ne pas bouger. Je savais pas trop pourquoi, j’avais l’impression qu’il avait besoin d’attention autre, ou s’était peut-être moi. Repenser à avant, repenser à ma vie avant la fange, ça avait fait monter cette sourde mélancolie. Tant pis si la porte venait de s’ouvrir, grinçant légèrement, j’avais posé doucement mes lèvres sur les siennes, les effleurant presque.


La mère Martin avait décidé de s’accorder une pause dans sa journée de bénévole au temple pour se rendre aux thermes et profiter de la tranquillité des lieux à ce moment de la journée.

Son linge de bain sur l’épaule, son petit sac contenant ce qui lui restait de produit d’hygiène sous le bras, elle s’avança ses pas résonnant doucement dans les grands espaces. Elle avait posé son petit matériel à côté de son bassin habituel et allait s’apprêter à retirer sa robe quand elle entendit le bruissement le l’eau qu’on troublait.

Si la vieille femme était une bonne trinitaire, elle n’en était pas moins une petite mamie furieusement trop curieuse. Elle se demandait qui pouvait bien avoir le temps de traîner ici à cette heure. Précautionneuse, elle avança jusqu’à l’origine du bruit.

Elle put d’abord voir la haute silhouette du torse de Finn, qu’elle ne reconnut pas tout de suite. Il avait fallu qu’elle tousse pour interrompre le baiser et dévoilé son visage et celui de sa partenaire de bain. Elle en fut quelque peu médusée, il fallait dire que la petite Barrowmer était connue pour être plutôt froide avec la gente masculine.

« Je suppose, jeune homme, que cette fois, vous vous en équarrissez de son état à la suite d’une rage de dents ? »

Son regard inquisiteur se posait sur les deux jeunes gens.

Bien sûr qu'aucun d'eux ne savait de quoi demain serait fait, au même titre que Finn était conscient que Ilhanne ne serait pas toujours là, qu'une bonne partie de sa vie était à Traquemont, à chasser et combattre les Fangeux, tout comme lui-même se devait de travailler comme Mercenaire et de pouvoir un jour à son tour faire ce qu'il désirait... Mais ils avaient pour eux cet instant fort précieux, ce moment qui n'appartenait qu'à eux ainsi que la promesse d'un autre qui serait beaucoup plus intime et passionné. En attendant ce jour, la jeune femme vint l'embrasser de nouveau par elle-même, ravivant la flamme et rendant l'homme parmi les plus heureux que pouvait encore compter ce monde. Il répondit à son baiser avec un mélange de tendresse et de passion, contrôlant son impatience d'aller plus avant tout en lui offrant un baiser enfiévré, ses mains la plaquant doucement contre son torse alors qu'il s'abandonnait à quelques caresses sur ses fesses. Il ne prit pas garde lui non plus au son de la porte s'ouvrant, ou, s'il l'entendit, son cerveau refusa de transmettre l'information correspondant à l'arrivée potentielle d'un intrus qui choisit de se manifester de lui-même. Ou plutôt d'elle-même.

« Je suppose, jeune homme, que cette fois, vous vous en équarrissez de son état à la suite d’une rage de dents ? »

Cette voix lui était familière et, pris sur le fait, il s'écarta un peu pour y voir plus clair et tomba sur l'image de la vieille voisine en train de les regarder avec un air qu'il interpréta comme étant à mi-chemin entre mécontentement et amusement. Honteux car n'étant point démonstratif question nudité et ayant conscience de la deux leur, il se racla la gorge et laissa le soin à la Chasseuse de se couvrir un peu dans l'eau si elle le désirait, se plaçant devant elle pour couvrir de son buste le champ de vision menant à sa poitrine dénudée.

- Non ma bonne dame, j'ai la chance d'avoir reçu d'elle un baiser comme je n'en espérait plus.

Et Finn sourit, tout heureux, avec ce regard un peu rêveur qu'on les amoureux qui viennent de voir leurs espoirs se concrétiser, bien qu'il n'ai pas encore consommé cet amour jusqu'au point qui les lieraient plus encore. On aurait pu en douter cependant au vu de leur état et des vêtements posés près du bassin, cependant il était heureux que l'eau chaude lui arriva un peu au-dessus de la taille, sans quoi il aurait eu l'air bien malin avec son engin dressé fièrement à l'air libre. Passant une main sur sa nuque, un peu gêné malgré tout, le Mercenaire se racla la gorge pour s'éclaircir la voix.

- N'ayez crainte, nous n'avions pas prévu d'être indécents en ces lieux.

L'endroit ne s'y prêtait pas, ou plutôt si, mais il était hors de question de salir cette eau dont tout un chacun profitait chaque jour que les Trois faisaient. Hésitant et ne sachant que faire, il demeura planté là contre le rebord du bassin, espérant que Ilhanne lui vienne en aide d'une manière ou d'une autre. Non parce que les petites mamies, ça n'était pas vraiment son truc.

La gêne, la mortification, l’envie de se terrer quelque part d’un coup et de jamais ressortir. Autant dire qu’il n’y avait rien d’étonnant au fait que j’avais piqué un fard monstrueux, rabattant mes cheveux devant ma poitrine, faute de mieux pour me couvrir pour l’instant. D’ailleurs, il fallait absolument remédier à ça, tout de suite !

Et Finn qui faisait un peu le malin, mais pas trop heureusement…

« J’espère bien, vous êtes quand même dans l’enceinte étendue du temple… »

La mère Martin avait agité les doigts de manière fichtrement caricaturale.

Pressée de trouver mon linge pour me sécher, et quelques vêtements que j’avais piqués à Margaux histoire d’avoir quelque chose de propre à enfiler par-dessus un bandage. Le sang de fangeux, s’était bien, au moins ça les faisait pas baliser, par ce qu’on ne pouvait pas le confondre avec du sang humain, mais ça n’en était pas moins affreux à retirer de n’importe quoi. Je m’étais appuyée contre le bord su brassin pour me hisser dessus, ce qui fut une mauvaise idée, le geste de trop, du moins pour un point qui céda non sans m’arracher un grognement de douleur étouffé.

« Oh, mais vous êtes blessée mon petit. »

Perspicace mamie.

« Oui, c’est pas si grave, je vais juste bander tout ça, pour éviter que ça bouge pas trop. »

Au moins, la griffure avait fait diversion de la situation, ça avait eu au moins ça de bien. J’avais regardé moi-même comment ça avait fini après mon petit exploit de trop. J’étais pas certaine de demander à Margaux de faire un nouveau point, celui qui avait lâché était vers le centre. ‘Fin, j’avais fait ça après avoir au moins passé une serviette autour de ma taille.

« Mais laissez-moi, vous aidez voyons.

- Oh non, non c’est pas la peine...

- Oh mais si voyons. »

Je jetais un regarde emplit de détresse à Finn. Pitié j'avais pas vraiment envie de me faire emmailloter par la mère Martin, je préférais qu'elle n'en apprenne pas trop, elle, elle traînait dans le quartier toutes les journées, si elle croisait Val' j'avais pas envie qu'elle puisse lui donner trop de détails.

La voisine décidément bien digne de toutes les personnes âgées qu'il avait pu croiser s'avérait être un peu moralisatrice sur les bords, parlant du respect dû au Temple avec emphase, tout du moins jusqu'à-ce que Ilhanne ne tente de sortir du bassin en se hissant sur le bord à leur niveau. Le grognement qu'elle lâcha fit s'inquiéter de concert les deux autres personnes présentes, Finn s'avança rapidement malgré la résistance de l'eau, s'approchant pour voir de quoi il retournait et retenant une grimace en voyant qu'un point avait sauté. Il la laissa observer à son tour tout en écoutant la petite mamie qui insistait pour l'aider, déclenchant ainsi un regard désespéré de la Chasseuse à l'intention du Mercenaire, lequel compris immédiatement le message silencieux qu'elle lui envoyait. Peu importait la raison, elle ne voulait pas que la voisine l'aide, aussi hocha-t-il fermement la tête avant de la contourner, levant sur leur indiscrète un sourire éclatant.

- Laissez ma bonne dame, c'est à moi de m'occuper d'elle.

Profitant qu'ils soient dans l'eau, il souleva doucement Ilhanne dans ses bras en prenant garde à sa blessure, la maintint serrée contre lui avec précautions, puis se dirigea vers les marches menant hors du bassin et qui permettait ainsi aux gens d'y entrer progressivement. Sa nudité se dévoila à mesure que ses pas le portaient hors de l'eau et il prit sur lui pour continuer d'avoir l'air détendu, bien que la jeune femme pu constater une certaine tension dans la crispation de sa mâchoire et de son sourire. Non, il n'était pas du genre exhibitionniste, cependant il espérait bien que la vieille femme tournerait le dos à cette vision et, si jamais ce devait ne pas être le cas, endurerait-il cette honte le temps de porter Ilhanne jusqu'à ses vêtements, ce qui ne lui prit pas plus de quelques secondes. La déposant délicatement au sol comme s'il avait craint qu'elle ne se brise, il songea brièvement qu'il n'avait pas prit de serviette avec lui, faute d'avoir réfléchit plus avant, et attendit que la rousse termine de se sécher pour lui emprunter la sienne, prenant une fois encore sur lui d'être ainsi nu comme un ver hors de l'eau.

- Vous voyez ? Elle va très bien et ne risque rien, vous n'avez pas à vous inquiéter.

S'empressant de se sécher, Finn entreprit de se rhabiller à une vitesse surprenante comme s'il avait eu les Fangeux à ses trousses, se détendant déjà une fois vêtu de la chemise de lin allant sous son armure de cuir, finissant d'enfiler ses vêtements en soupirant de contentement d'être de nouveau couvert. Jetant un regard à Ilhanne, il lui adressa un sourire amusé et complice, attachant son épée à son côté avec la merveilleuse sensation d'être de nouveau complet, s'occupant alors des multiples attaches du haut de son armure de cuir.

- Je ne sais pas toi, mais moi cette petite baignade m'a ouvert l'appétit.

Une façon comme une autre de prendre congé de la vieille voisine tout en profitant de l'occasion pour passer encore un peu plus de temps avec la Chasseuse. Si jamais celle-ci acceptait, il en serait ravit, après si en sortant des Thermes elle lui expliquait avoir dit oui pour pouvoir simplement s'éclipser, il comprendrait aussi. Pourvu qu'elle accepte réellement cependant, il avait véritablement faim après avoir cavalé partout et s'être un peu baigné, sans parler de toutes ces émotions.