Motivations pour nourrir les pauvres ou intérêts personnels ? [RP Libre Commun]

Le jour se levait en ce 25 mars 1165, la fraîcheur du printemps en ce beau matin se faisait doucement sentir. Que c'était agréable surtout pour la journée qui s'annonçait et quelle journée ! Théodemar Ecuviel avait financé une distribution de nourriture et avait puisé dans ses propres réserves et elle était sur le point de commencer.
Voilà des semaines que la Corporation Ecuviel avait décidée pour redorer un peu son blason, de distribuer de la nourriture aux plus démunis. Au départ ce n'était que des rumeurs bien évidemment, quel pauvre bougre allait croire à ces sottises, hm ? Et pourtant ! Un contingent de mercenaires d'Ecuvie' avait déboulé dans le Goulot, aux aurores. Bloquant les quelques accès stratégiques de la première moitié du quartier, installant un véritable périmètre de sécurité tout autour du lieu de la distribution jusqu'à la deuxième partie du Goulot.

Sitôt le périmètre de sécurité installé avec plus d'une centaine de mercenaires aussi bien sur le sol que sur les toits, une heure plus tard des servants de la corporation Ecuviel installaient, eux, des tables de bois pour les différents aliments qui serviront à alimenter les pauvres du Quartier, du moins certains … sur chaque étals, il y avait un type d'aliment comme :
des cagettes de légumes ; poireaux, carottes, tomates pour la première table, de la viande sur une deuxième, du fromage de chèvre principalement sur une suivante, du pain sur l'autre et tout était en réserve pour regarnir les tables à la prochaine occasion.
Tout ce qu'il y avait sur ces étals pouvait nourrir une famille pour plus de deux semaines en se rationnant.

Puis les Prêtres du Temple arrivaient, une vingtaine tout au plus, triés sur le volet … nous n'allions pas tout de même confier cette distribution à des Prêtres véreux qui voudraient prendre pour eux seul de la nourriture … bien évidemment, les curés et les mercenaires qui auront participé à cette distribution recevront une part. Ils arrivaient donc et prenaient part à la distribution en ameutant avec des cloches et à coup de paroles les démunis qui hésiteraient à venir.
Puis vient ensuite les représentants de la Corporation Ecuviel avec son dirigeant, Théodemar Ecuviel et son Conseiller, Gondemar Rosalis. La distribution pouvait commencer.

***

Tout était fin prêt et j'étais là pour admirer mon œuvre. J'avais fais avec l'aide de Gondemar et de mes alliés, un projet de grande distribution de nourriture et j'étais fier de voir mon projet prendre forme et de ce que j'étais sur le point de faire. J'aurais certainement après cela gagné quelque point pour ma réputation. Je serais certainement vu comme le sauveur du peuple pendant que les Nobles gaspillaient la nourriture en banquet comme la récente réception chez les Clairmont pour fêter la réussite de l'Objectif Labret. Haha ! Aucun d'entre eux n'avaient voulu participer … du moins à ma connaissance et bien … ce n'est pas grave. Je récolterai la gloire, seul.

J'observais la scène, quelques timides s'étaient approchés, en effet … les Miliciens y avaient été un peu fort en arrivant ce matin pour établir leur périmètre de sécurité et les badauds ne voulaient certainement pas recevoir une seconde tournée de coups de matraque.
J'étais raide tel un piquet, habillé de manière simple ; Une tunique avec des épaulettes bleues avec son bas de la même couleur, mon fourreau à ma taille contenant mon épée et des bottes en cuir usées. A côté de moi ce trouvaient mes gardes personnels, une bonne dizaine. Gondemar Rosalis mon fidèle allié mais aussi trois Sergents de la milice, les coutiliers devaient être sur le terrain. Je me mis alors à murmurer à l'encontre de mon Conseiller.

« Vois mon ami, notre œuvre commence. dis-je avec un léger sourire dans la voix.

Il y avait longtemps que Gondemar espérait voir un tel jour arriver, mais il devait reconnaitre que cela avait demandé de nombreux efforts. De sa part, tout d'abord, pour tenter de convaincre son ami d'enfance du bien-fondé de cette action, usant de deux arguments primordiaux à savoir la réputation et leurs origines. Théodemar était un marchand aussi habile que rusé, difficile à convaincre, mais s'il avait fallu de nombreuses discussions pour en arriver à ce résultat, l'homme de haute taille savait que cela en valait la peine. Et Ecuviel dans tout ça ? Il lui avait confié un soir dernier avoir passé des nuits entières à mesurer et calculer les stocks dont ils disposaient, ce qu'ils pouvaient se permettre de donner et en quelle quantité, de façon à pouvoir réitérer leur action au moins deux autres fois lorsque cela sera nécessaire, en tenant compte de ce qu'ils pouvaient acquérir sans l'opération Labret, préférant attendre que l'endroit soit définitivement rentable plutôt que de risquer de finir le bec dans l'eau. Gondemar était fier d'avoir réussit à convaincre son ami d'enfance, tout comme il était fier de voir que celui-ci, bien qu'affirmant toujours que ce n'était que pour sa gloire personnelle, était malgré lui touché par ces gens qui, comme se plaisait toujours à le lui rappeler son Garde du Corps, étaient comme eux. Aujourd'hui nombre de gens allaient venir, tous ne pourraient sans doute pas manger autant qu'on pouvait l'espérer, mais cela leur permettrait de tenir quelques jours de plus en économisant la nourriture. Silencieux et immobile, figé comme une statue sévère, l'ex-soldat observait les allées et venues sans bouger d'auprès de celui qu'il se devait de protéger, ne parlant que lorsqu'on lui adressait la parole.

- Je le vois oui et j'en suis heureux.

Pas un sourire cependant, l'homme de haute taille vêtu de noir des pieds à la tête arborant cet air fermé et strict qu'on lui connaissait. Le Conseiller portait encore le deuil dans son regard pourtant attentif, mais il éprouvait une joie sincère à l'idée que ce soir, des gens mangeront si ce n'est à leur faim, un peu plus que d'ordinaire. Nombre de Nobles avaient déclinés l'offre de Théodemar, pour différentes raisons, mais il en était encore certains qui n'avaient pas répondu et Gondemar espérait encore les voir venir pour apporter eux aussi une aide aux miséreux, ou ne serait-ce que leur prêter main-forte, ce serait déjà une bonne chose. Les Miliciens gardaient la zone avec la rigueur qu'on leur connaissait et quelques visages familiers pouvaient même être aperçus au sein de leurs rangs.

- Tu as bien fait, Ecuviel.

Souffla discrètement le Conseiller en laissant enfin une faible ombre de sourire passer fugacement sur ses lèvres, disparaissant comme elle était venu derrière son masque impassible qui lui faisait une terrible réputation, tout autant que l'épée courte pendant à son côté et dont il ne se défaisait jamais. Aujourd'hui allait être une journée que l'on oublierait pas.

Otto était venu au marché de "le goulot" dans le but d'acheter des peaux à tanner, aussi étonnant que ça pouvait sembler les affaires allaient bien pour lui, depuis que le braconnage était permis et que la faim poussait de plus en plus les gens à se faire chasseur, il y avait une chute des prix des peaux et une offre plus importante, mais il fallait prospecter pour découvrir de nouveau vendeur. Arrivé sur les lieux Otto vit une activité inhabituelle, une sorte de foire était en train d'être battit et beaucoup de soldat assurait la sécurité du lieu. interloqué Otto attrapa par le bras un gosse des rues qui passait par là.

"Eh toi le gamin, je te connais tu es le fils de la croque à l'œil. Est-ce que tu saurais me dire ce qu'il se passe dans le coin".

"Ils viennent de l'annoncer M'sieur, c'est le seigneur Ecuviel qui donne de la bouffe gratuitement!

"Donner de la nourriture aux pauvres, comment ça ?"

"Comme je te l'dit La Chicane, il donne, il veut rien" répondit le gosse.
Otto laissa le gosse filer avec sa compagnie de gamins errants

Otto était interloqué l'enfant avait appelé le marchand "Seigneur" Ecuviel, fichu ignare des rues Ecuviel n'était pas noble, il était riche, c'est tout, mais ce genre d'offense faite au noble était toujours une sorte de victoire pour Otto, il décida d'aller lui parler directement en se frayant un chemin en agitant sa canne, il se connaissait tout deux, au moins de vue, étant tous les deux marchands, il attendit un moment propice où le sieur serait disponible.

_ Ecuviel, tu veux acheter quoi, en nous donnant du pain ?

La nouvelle avait été propagée telle une traînée de poudre causant plus d'un éclat. Comme nombre d'habitants de la ville Pépin avait remonté les ruelles menant au Goulot. L'idée que ce soit un quelconque guet-apens ne lui effleura que très brièvement l'esprit. Et si c'était le cas, ma foi, Pépin veillerait à se remplir la panse avant d'être emportée les Trois savent où. Et s'il devait mourir ce serait avec un bout de pain dans la bouche, à défaut d'être dans la couche d'une femme. Il y avait bien pis comme ultime action avant de trépasser.

La foule s'était amassée en nombre. Avancer au sein de cette marée humaine demandait de l'astuce et surtout un habile jeu de coudes. Entrant la tête dans les épaules, Pépin louvoyait parmi les jambes et jupons, enjambant les pieds comme autant de racines traîtresses. D'un certain point de vue c'était comme mener une escapade au fin fond des bois.

Mais à trop regarder où il mettait les pieds, Pépin s'était perdu et déboucha, non devant un étal empli à craquer, mais auprès d'un vieil homme qui s'adressait à Theodomar Ecuviel. Et d'un ton qui n'avait rien de véritablement respectueux. Le soupçon suintait de chaque mot prononcé par le vieil homme. Ah, les soupçons ! En ces temps de disette, ils étaient légion.

Pépin s'incrusta dans la conversation à brûle-pourpoint, époussetant sa veste malmenée.

« Si Monsieur Ecuviel guignait le poste de Duc, je dirais qu'il le fait en ce sens pour nous pousser à la révolte populaire. Mais, à mon humble avis, je pense que c'est par charité. »

De la main, Pépin désigna les prêtres qui officiaient aux transactions et rameutaient la population par quelques vers bien choisis.

« Comme ces braves hommes en bure le proclament. Puis, après tout, vieil homme quelle importance ? Il faut parfois profiter de l'instant pré... » Le regard de Pépin s'était mis à détailler les étals, accrochant le peu qu'il arrivait à lorgner parmi les badauds empressés. « Ou mes yeux me trompent, ou le cidre que j'ai bu était trop fort. De la viande ? Je croyais qu'on distribuait juste du pain... Et je sens l'odeur du fromage de chèvre ! »

Autant dire que Pépin flairait un festin presque divin. Que les Trois en soient honorés. Pépin inclina la tête vers Theodemar.

« Que les Trois vous bénissent. »

Pépin avait bien appris sa leçon. Il avait veillé à nullement laisser sous-entendre que sa route avait déjà croisé celle de l'homme par le passé. Se relevant, le nain lorgna vers l'homme qui suivait Ecuviel comme une ombre. Curieusement un frisson glacé lui dévala le dos. L'homme ne lui inspirait pas la sympathie.

Otto avait prévu le cas de figure qui lui arriva Ecuviel ne lui rendit même pas un regard et poursuivit ce qu'il était en train de faire, comme si Otto n'existait pas, c'était de bonne guerre, il avait autre chose à faire et les manières d'Otto n'étaient pas des plus polies.
Le marchand se retourna et Otto baissa les épaules, comprenant qu'il n'y aurait pas de réponses à sa question.
il parla pour lui même de façon informelle, en s'adressant à quelqu'un qui lui avait parlé, mais dont il n'avait pas entendu les propos.
"Sacré snob, ils sont pareils que les nobles, même pas ils te regarde quand tu leurs parles"

Otto leva la tête pour voir si quelqu'un avait gouté sa raillerie, mais il comprit qu'il était tout seul sur terre sur ce coup, car seul un nain paraissait intéressé par ce qu'il disait, un peu démoralisé, il chercha à se consoler en profitant de l'aubaine.
Il rajouta pour lui même dans une semi alienation.
"Mais si je suis pauvre! assez pauvre pour que les riches ne répondent même pas à ce que je leurs demande"
Il s'assit à une table et dit : "Faites passer les tartines, je suis pauvres" et comme personne ne lui répondit, il se servit tout seul en disant Na!"
A coté de lui le nain qui lui avait tendu la réplique, cherchait aussi à profiter de l'agape. S'adoucissant il lui dit :
"Compères je vois à ta bestiole que tu es chasseur, partageons ce repas nous parlerons du metier."
Il montra le furet du doigt :
Tu sais que c'est un super rabatteur de lièvre ça, bien plus sociable qu'un aigle, et moins emmerdant qu'un chien, c'est pas perdu ta méthode, je te félicite de ta malice. Dis donc tu vendrais pas des peaux, toi, j'en recherche je suis tanneur

Spoiler:

Gondemar observait avec attention tout ce qui se faisait et écoutait d'une oreille ce qui se disait, notant l'attention d'un Milicien qui s'approcha de Théodemar avec l'intention de lui parler d'un problème de sécurité. Si le Garde du Corps fit un pas pour s'interposer, son ami d'enfance lui fit rapidement signe de le laisse passer, s'éloignant pour discuter avec lui au moment même où un grincheux lançait une interrogation au riche marchand. Se sentant visiblement ignoré et prenant la mouche, l'ex-soldat haussa un sourcil en l'entendant maugréer, tandis qu'à ses côtés se trouvait à présent un homme que le Conseiller reconnaissait, mais qu'il savait devoir passer incognito. Un dernier regard aux alentours, puis il s'avança vers les deux hommes, leur adressant un regard à la fois neutre et songeur.

- Ecuviel a été appelé pour régler une affaire, mais je suis sûr qu'il reviendra vers vous pour vous écouter tout à l'heure, vieil homme.

Gondemar ne pu retenir un bref et furtif sourire en coin à la mention de la viande et du fromage, puis s'avança pour prélever un copieux morceau de fromage qu'il tendit lui-même à son interlocuteur, posant l'espace d'une seconde sa main sur son épaule malgré l'odeur qui se dégageait de lui.

- Mangez à votre faim et profitez-en. Ecuviel n'a pas oublié d'où il venait et il a décidé de partager cette nourriture avec ceux qui en ont besoin. Ceci vous appartient à tous, quoi qu'on en dise.

Lui-même s'abstint de prélever quoi que ce soit, non seulement parce qu'il avait mangé avant de venir, mais également parce qu'étant l'ami d'enfance de Théodemar, il bénéficiait d'un traitement de faveur, pour ne pas dire égal à celui qui prodiguait aujourd'hui bonne et -presque- honnête provende. Un autre regard sur les alentours lui suffit pour constater que tout demeurait en ordre et que chacun était libre de se joindre à la foule, de rompre le pain, quelques légers rires commençaient même à se faire entendre et, bien qu'il soit d'un naturel sombre et rigide, Gondemar ne pu s'empêcher de sentir son coeur se réchauffer en voyant des gens manger avec appétit.

- Je suis le Conseiller d'Ecuviel. Je puis prendre vos plaintes et vos recommandations si vous le désirez, elles lui seront transmises sans faute, vous avez ma parole.

Qui avait connaissance de son passé pourrait se demander ce que valait la parole d'un déserteur, mais qui le connaissait vraiment savait qu'il n'en avait qu'une et n'y dérogeait jamais. S'écartant de quelques pas pour laisser le libre accès à toute cette nourriture, il continua de surveiller les alentours et, un peu plus loin, son ami d'enfance, d'un regard vif et acéré, comme s'il s'attendait à une attaque à chaque instant.

Theodemar était un homme occupé, et l'intervention inopinée d'un milicien empêcha ainsi Pépin d'avoir une quelconque réponse. Néanmoins le nain ne s'en formalisa pas. Il eut, néanmoins, le geste d'opérer un pas en arrière lorsque Gondemar Rosalis s'avança vers eu. Dans un fol instant, mille et une théories explosèrent dans l'esprit du nain alors que l'ombre de Theodemar tendait le bras... ramenant un morceau de fromage qu'il tendit au vieil homme. La surprise de Pépin redoubla en écoutant l'homme parler. Comparé à sa carrure sa voix était presque... douce. Il n'avait pas l'accent rude, grasseyant, des miliciens ou perfide des coupes-jarrets. C'était déconcertant.

- Je suis le Conseiller d'Ecuviel. Je puis prendre vos plaintes et vos recommandations si vous le désirez, elles lui seront transmises sans faute, vous avez ma parole.
« Oh moi j'ai aucune plainte. Au contraire je salue le geste, m'sieur le conseiller. » argumenta le nain en agitant les mains.

Sa méfiance ne s'était pas totalement endormie, néanmoins la sincérité transparaissait dans sa voix. Pépin avisa alors le vieil homme qui s'était adressé à lui observant, amusé, combien il était encombré entre la part qu'il s'était lui-même arrogé, et celle offerte par Gondemar.

« À nous deux, ce devrait être simple à partager. Tout seul, vous risqueriez de vous éclater la panse. »

Le fumet avait intrigué Bianca qui sortit son museau du col de Pépin, ses yeux brillant telles des billes noires. Le dresseur avait même oublié qu'elle était là. Elle avait du se glisser sous ses vêtements sans qu'il ne la remarque.

« Oh je ne suis pas chasseur, simplement dresseur. J'aide à faire fuir les rats des demeures. Ils grouillent dans tout Marbrume. Je ne vends pas de peaux malheureusement. Je laisse les cadavres à ceux que ça intéresse. Mais peut-être que le conseiller d'Ecuviel en connaît qui pourraient vous fournir des peaux ? Ou vous trouverez peut-être votre bonheur dans la foule ? »

La foule, justement, continuait à grossir sans cesse. La sécurité semblait sans faille et le troupeau minutieusement surveillé. Jusqu'au moment où une voix éclata. Serrant un morceau de pain contre lui, un garçon aux pieds nus fonça à la rencontre des trois hommes. Son front heurta les jambes de Gondemar si violemment que l'impact l'envoya rebondir sur le sol. Avec un regard de bête traquée, l'enfant agrippa le pain, défiant du regard un des adultes l'empêcher de le lui arracher. Peu à peu une voix se rapprochait hurlant « Au voleur ! »

Spoiler:

La distribution allait bon train, tout semblait se passer merveilleusement bien ... C'est alors que je vis le vieil Otto dit la Chicane venir près des etals. Apparemment le Vieux tanneur fou s'était résigné à venir, lui qui n'était pas le dernier à ma critiquer dans les bas fonds. Haha ! Donnez du fromage aux rats et ils reviendront. Donnez un quartier de viande à un chien et il deviendra votre meilleur ami.

Je n'entends pas les paroles du vieillard car un coutilier de la Milice attira mon attention plus loin pour me parler d'une affaire. Je fis signe à Gondemar de poursuivre sans moi et je suivi le soldat.

Il m'attira dans un coin et me dit avec un sourire.

-"Mes hommes en ont eu deux de plus ... Des météques. Dont un banni."

*Très bien. Allez dans la taverne ''La bonne Pinte.'' avec vos prises, montrez ceci au Tavernier...* je lui tendit un Ecu de couleur rouge qu'il prit. *Et il vous fera entrer dans un tunnel. Toujours en ligne droite et vous arriverez au labo.*

-"Trés bien."
Je l'empoignai alors par le bras et je le regardai dans les yeux avec un regard menaçant.

*Aucun faux pas. Discrétion absolue. Si il arrivait que cela se sait, que je fais des expériences sur des humains, je nierai votre existence et cette conversation puis je vous ferai tuer vous et votre femme. Compris ?*

-"Oui monsieur."

Je desserai alors mon étreinte sur son bras et il partit dans la direction opposée pour faire sa sale besogne.
Je retournai ensuite vers les étals de nourriture. La foule était plus nombreuse que tout à l'heure. Voyez moi ce bétail, haha.
Je vis alors Gondemar entrain de parler à un homme de petite taille ... Je le connais ce nain, Pépin Duchesne. L'homme que j'avais recruté il y a moins de trois semaines dans un bordel. Ainsi donc il était venu aussi.

C'est alors qu'un jeune homme, un enfant plutôt, contourna le périmètre de sécurité pour s'empêtrer dans les pieds de Gondemar et il semblerait que le malotru avait volé un quignon de main qu'il collait à son torse tel son coeur.

Je m'approcha alors de mon vieil ami et du petit pendant que des miliciens accouraient pour capturer le voleur. Il ne devait pas avoir plus de 9 ans, le pauvre enfant était amaigri par la faim, des cicatrices de vérole se voyaient sur son visage juvénile, ses yeux étaient marrons et il avait une chevelure brune lui arrivant aux oreilles. Il était vêtu seulement de hardes miteuses ... Il me rappelait moi à son âge. Je m'abaissa alors son niveau et dit avec un sourire.

*Quel est ton nom, jeune homme ?*

''Mar ... Marc. Seigneur..." me répondit-il avec une certaine anxiété dans la voix.

Je le pris alors dans les bras et me relevai pour faire un signe aux Miliciens que ce n'était rien et qui n'avaient plus rien à faire. Je reporta mon attention sur le jeune homme dans mes bras.

*Ne me donne pas du ''Seigneur'', mon petit. Je ne suis pas un Noble et ...* je regardai alors la foule devant moi agglutinée tel un troupeau de boeufs.

*En voyez vous ? Voyez vous des Nobles, rassemblés ici ? Derrière moi ? Non, bien évidemment ! Ils préfèrent bouffer comme des porcs, jeter leur argent mar les fenêtres pendant que le glas de la fin du monde sonne aux portes de notre Cité Protectrice ! Pendant que vous, NOUS ! Mourrons de faim , nous sommes réduits aux meurtres. Aux vils besognes, à la prostitution ... Au vol. Pour survivre pendant que ces chiens vivent tranquillement dans leurs tours d'Ivoire à attendre la mort ! Voyez vous un seul de ces faisans ici ? Nooon ! Seul moi et mes associés sommes ici, humbles bourgeois et commerçants mettant en commun nos vivres pour vous parce que nous connaissons nos origines ! Nous ne renions pas le lieu de notre naissance ! Je suis né, ici ! J'ai cherché pendant toute mon enfance des pièces dans cette boue ! J'ai volé pour survivre comme ce petit ! Vous me connaissez, certains personnellement pour savoir que mes dires sont vrais, pour les autres grâce aux rumeurs colportaient par des jaloux mais je ne vous oublie pas ! ET JE SUIS ICI POUR LE PROUVER ! GLOIRE AU PEUPLE DE MARBRUME !*

JE regardai alors la foule en levant mon bras gauche en l'air pendant que le droit soutenait le jeune garçon qui avait gardé son morceau de pain et je regardai la foule avec un sourire puis Gondemar a qui je hochai la tête.

Otto faillit applaudir, mais se dit que tout cela était dangereux, Otto détestait les nobles, mais il n'était pas crédule, et se souvint des manieres avec lesquels ils résolvent les émeutes, en coupant la tête aux meneurs. Théomar Ecuviel était visiblement un agitateur démagogue, mais il avait commis une erreur en révélant dans son discourt qu'il avait commencé sa carrière en volant. Ca n'était pas coherent avec la défense des pauvres et de l'orphelin, car qui ceux les défendent, en général n'aiment pas le vol.
Il devait sans doute avoir avoué cela, soit afin de faire pénitence, ou alors il pense qu'être un voleur peut sembler etre une bonne chose aux yeux de ceux pour qui il s'adresse, ce qui voudrait dire qu'en organisant ce buffet Ecuviel voulait surement embaucher des hommes des bas fond, pour accomplir une tache.
Otto secoua la tête et se dit à voix basse.
"Allons bon, un rassemblement de voleurs!"
Otto cracha par terre. Il se tourna vers le nain.
Ah tu es un Dératisateur d'accord, c'est un boulot honnête, cela au moins, mais ne pas récupérer les corps, c'est du gâchis. La plupart des chasseurs n'osent presque plus dormir dans les bois et nous allons manquer de fourrure. Avec six rats, tu as un repas et une paire de botte fourrée, Ok c'est pas une belle peau et ça demande beaucoup de travail pour les coudre, mais moi je suis preneur."

Otto se leva et montrant la direction de son échoppe
"Je retourne au boulot, ça sent l'émeute par ici je prefere l'odeur de charogne de ma boutique."

Gondemar avait à cœur de surveiller la distribution de nourriture, laquelle était d'une importance vitale pour quiconque venait se servir, car il était évident que nombre d'entre eux n'avaient pas mangé à leur faim depuis bien trop longtemps. Il faillit même sourire lorsque l'homme de petite taille alla rejoindre le vieil homme tout en saluant le geste, jetant un regard en direction de Théodemar et fronçant les sourcils à la vue des messes basses qui semblaient se faire. Allons bon, qu'est-ce que son ami préparait encore ? Qu'à cela ne tienne, il n'eut guère le temps de s'approcher que déjà on criait au voleur, avec un petit bonhomme qui filait entre les jambes des adultes, fonçant en aveugle pour fuir les gardes de la Milice qui le poursuivait déjà comme un vulgaire criminel. Et dire que Ecuviel avait demandé qu'on laissa tout un chacun se servir... L'enfant qui le percuta tomba à la renverse, trop faible sans doute pour tenir sur ses jambes et le Conseiller baissa les yeux sur lui, non pas avec l'air de l'incriminer, mais celui de s'inquiéter de le voir ainsi serrer son morceau de pain contre lui. Faisait-il donc si peur que ça ? Mais avant qu'il n'ai pu faire davantage que lever la main en direction des hommes en arme pour qu'ils cessent leur inquisition, Théodemar était déjà à genoux devant l'enfant, le questionnant sur son nom avant de le prendre dans ses bras. Rares étaient les fois où il agissait ainsi et Gondemar se demanda l'espace d'une seconde de quoi il retournait, avant d'entendre le discours enflammé de son ami.

- Évidemment.

Souffla-t-il à voix fort basse, jetant des regards sur la foule et les gardes, se demandant à quel moment au juste l'un des rares Nobles faisant également des distributions en secret allait montrer le bout de son nez pour protester. Et puis, si certains demeuraient bien à l'abri dans l'Esplanade, d'autres au contraire se battaient hors des murs de la cité, comme à Traquemont par exemple. Ainsi ce discours ne rendait-il pas honneur à tous, mais Ecuviel était connu pour ne pas bien s'entendre avec les Nobles, justement à cause de son origine plus humble. Au signe de tête, Gondemar répondit de même, saluant le vieil homme qui affirmait préférer s'éloigner avant que l'émeute ne commence. Tout à fait d'accord avec cette crainte, il s'approcha de son ami d'enfance, venant murmurer à son côté.

- Ne peux-tu point faire comme nous avions convenu ? Attiser la colère des Nobles nous attireras des ennuis dont nous pouvons nous passer.

Loin d'être un couard, le Conseiller songeait cependant que le Duc lui-même pourrait prendre ombrage d'un tel discours si -ou plutôt quand- celui-ci lui parviendrait aux oreilles et cet homme-là n'avait qu'un mot à dire pour que leurs têtes soient tranchées ou qu'on les bannissent. Loin de Gondemar l'envie d'être ainsi exclu de la Cité où il était né et avait grandit, encore qu'il savait d'ores et déjà qu'il rejoindrait Traquemont sans hésiter. Au moins serait-il encore utile là-bas en cas de bannissement.

Spoiler:

Le discours de Théodemar se propagea, telle une vague, au sein de la foule. Pépin but les paroles, trouvant en elles l'écho des mots que le marchand lui avait tenu au sein de la maison close. Malgré ses manières distinguées, son art de la plaidoirie, l'homme se targuait de faire partie du peuple de Marbrume. Il ne crachait pas sur ses origines, les exposait sans aucune pudeur au risque de déplaire à certains. Comme ce fut le cas avec le tanneur qui renâcla, proposant de se retrancher dans sa boutique.

« Prenez soin de vous, vieil homme. » lui glissa Pépin. « Que les Trois vous guident. Je songerais à vos conseils. »

Si revendre des peaux de rats pouvait lui rapporter quelques pièces, l'idée méritait d'être creusée.

La foule grossissait commençant à inquiéter la milice déployée en guise de sécurité. Le petit Marc n'osait bouger, se demandant si le Seigneur Ecuviel avait encore besoin de lui ou s'il pouvait partir sans crainte de représailles. Une voix gueula par-dessus le brouhaha des chuchotements, éclatant avec la violence d'une balle de fusil.

« Les nobles nous volent not' pain ! Ils méritent pas d' vivre dans leurs châteaux ! »

Des approbations se mirent à éclore comme autant de fleurs au printemps. La rage grondait en Marbrume. L'objectif Labret avait beau avoir réussi, personne n'oubliait les morts qui avaient imbibé, de leur sang, le sol, les sacrifices d'anonymes et de proches, l'attaque des Fangeux sur la ville. Personne n'avait oublié. Une autre voix répondit à la première.

« On a qu'à aller leur réclamer leur pain ! »
« Et du beurre ! »
« Qu'ils viennent trimer comme nous z'autres. Qu'ils aillent au Labret retourner la terre ! Qu'ils bossent ! »

Approbations et acquiescements au sein de la foule. Un poing se leva, sentencieux.

« Allons les chercher ! Les comtes, les ducs, et leurs bonnes femmes. On va réclamer ce qui nous est dû ! »

La colère grondait, les poings se levaient. Pépin frémit. La foule se transformait en une horde de chiens sauvages affamés. Bave aux lèvres, leurs yeux brillaient d'une lueur de fureur. Ils n'avaient plus faim de pain, ni de fromage. Ils réclamaient la justice populaire, l'ordalie et le sang.

Voyant Marc trembler, Pépin se permit de s'adresser à Theodemar.

« Devriez le laisser partir. Qu'il rentre chez lui avant que ça tourne à la vinasse. »

Spoiler:

Attablé dans la salle de repos de la caserne, Xandra contemplait son verre la tête sur son bras, écoutant les autres d’une oreille distraite.

Il parait qu’il l’ont retrouvé, les collègues de la nuit.

Çà y est ? Alors, ils vont en faire quoi ? La bannir ?

Je sais pas s’ils l’ont livrés, en fait, je sais juste que le George lui a bien pété le conet !

Xandra se demandait certains jours, presque tous en fait, ce qu’elle foutait là. Elle avait toujours eut tendance à embellir la réalité, la milice n’avait pas échappé à la règle.
Louis est entré dans la pièce, pendant que les autres continuaient à raconter l’histoire avec moult détails croustillants sortit de leurs imaginations.

Hé Louis ! Tiens, bois, ça te fera du bien.

Je suis allé jeter un œil du coté du Goulot, voir si je pouvais rafler un truc.

Il a jeté quelque chose sur la table, la rousse n’a pas eu besoin de relever la tête pour devenir de quoi il s’agissait. Çà sentait meilleur que ce qu’on avait l’habitude de leurs servir et son estomac c'est manifesté.

Tenez les gars et...toi.

La rousse qui avait un peu trop forcé sur la bière se contenta de lever le pouce.

C’est vrai que c’est aujourd’hui, la distribution d’Ecuviel.

Cette fois, la jeune femme a daigné se redresser sur sa chaise, d’un geste un peu rapide qui lui fit tourner la tête.

Qu’est ce t’arrive ?

Ils ont besoin de monde ? Je dois y aller à tout prix.

Je te rappelle que c’est pas ta mission. Pis j’en ai ramené de la bouffe, pourquoi tu veux t’emmerder ?

Bonne question, à laquelle elle n’avait pas envie de répondre. L’écu rouge, Gond, c’était l’occasion de les revoir sans avoir l’air de l’avoir cherché, en prime.

C’est pas tes affaires.

C’est les gueux, ça te manque ?

La jeune femme termina sa bière cul sec et sans répondre a prit la direction de la sortit, Keran trouverait le moyen de l’affecter à la sécurisation. Il l’avait à la bonne après tout.

***

Xandra arriva bientôt sur les lieux, il y régnait une certaine effervescence ce qui n’avait rien d’étonnant. Elle reconnu la voix de Théodemar, non sans une certaine émotion, en plein discours. Elle se demanda s’il était sincère ? Ce qu’il cherchait à provoquer surtout en abordant la question des nobles ? La rousse sourit, elles ne les portaient dans son cœur non plus, héritage de la rue.

Elle tapota le bras de son collègue de l’intérieur qui correspondait à la description du coutillé.

Je te remplace. Retourne à la caserne.

Les deux miliciens se sont regardés, étonnés.

T’es qui toi ?

T’occupes, ordre du Sergent Vart. Va lui demander, il te le confirmeras.

Satisfaite, la jeune femme prit rapidement la place du grand blond, bien contant d’arrêter de faire le planton ici, et observa autour d’elle. Pour le moment le plus important était de bien faire son travail. Les revoir attendrait la fin de la journée, à moins que…Il s’avéra que les retrouvailles allaient avoir lieu plus tôt que prévue.

« Allons les chercher ! Les comtes, les ducs, et leurs bonnes femmes. On va réclamer ce qui nous est dû ! »

Ça sent l’émeute et je me retrouve avec..toi.

Je sais faire le boulot...

Les chiens s’agitaient déjà, Xandra fronça les sourcils, ignorant la panique qui commençait à naître chez son nouveau camarade, repéra le trouble fait et se fraya un chemin jusqu’à lui. D'autres miliciens commençaient déjà à l’encercler non sans mal, ça s’échauffait sévère.

Il fallait le faire taire et vite, calmer les esprit ou ceux qui étaient là parce qu’ils en avaient vraiment besoin n’auraient pas l’occasion d’en profiter…

Mon discours était reçu par l'approbation de la majorité de la population présente. Certains accusés même les nobles de voler la nourriture de leur labeur ... Ce qui était en partie vrai , oui .. La noblesse se fichait de nous autres vivant dans les bas fonds.
C'est alors que mon ami me fit réfléchir ... Si cela venait aux oreilles des Nobles et plus particulièrement aux autorités ducales, j'aurais des ennuis mais et alors ? Cela les ferait sûrement réfléchir. Mais je soupirais et lui dit:

«La Noblesse ne mérite pas ses privilèges . ils ne savent pas s'en servir ! Regarde, bon dieu ! Il n'y a pas un seul noble, présent ! Elle n'aide pas la population qu'elle est censée protéger ! Mais ... Tu as raison...

Je reporta mon attention sur les citoyens qui semblaient sur le point de l'émeute et la milice était de mon avis... Elle s'approcha lentement, l'arme encore au fourreau.
Un sergent s'approcha de moi et me murmura à l'oreille qu'il fallait qu'il agisse sinon une émeute éclatera. Je lui intima de ne surtout rien faire . je ne voulais pas que cette distribution dérape en bain de sang puis vient le nain qui me conseilla de laisser partir le jeune Marc. Bien au contraire, je le réajusta dans mes bras et dit

-Mes amis ! Mes amis, allons ! La noblesse se joue certainement de nous mais en ces temps de peur, de misère ... De guerre ! La révolte ne doit pas être à l'ordre du jour ! Nous jouerons le jeu de ces derniers ! Ils ont la milice, des chevaliers, des armes ! Et nous ? Qu'avons nous ?! Des fourches ? Des marteaux ? Des chemise de lin ? Nous ne sommes pas apte à combattre ! Nous ne pouvons faire cela ! Au lieu de combattre des faisans, concentrons nous sur ces maudites créatures que sont les Fangeux !»

Je regardai alors la populace de gauche à droite avec mon poing gauche levé vers le ciel jusqu'à ce que j'apercoive une jeune rousse au côté d'un milicien... Je reconnu la jeune Xandra Erkal. La jeune femme de notre ancien groupe de voleurs ... Ainsi elle était devenu milicienne, on dirait.
Je lui adressa un grand sourire en espérant qu'elle me reconnaisse et surtout qu'elle me voit.

Gondemar fut assez d'accord avec le Pépin lorsqu'il s'adressa à Théodemar au sujet de l'enfant. Hélas, comme toujours, l'homme n'en faisait qu'à sa tête et son ami d'enfance l'écouta parler des Nobles qui abusaient de leurs privilèges en se retenant de lever les yeux au ciel. Par Rikni, tout cela allait finir dans un bain de sang, les Miliciens s'avançaient déjà parmi la foule, armes au fourreau, mais la main sur la garde de leur épée... et une chevelure rousse fut ainsi aperçue au milieu de plusieurs silhouettes, une chevelure surmontant un visage fin que l'ex-soldat reconnu immédiatement et qui manqua lui arracher un sourire, n'eut été la situation présent. Ecuviel choisit ce moment pour orienter son discours, enfonçant encore un peu plus le couteau, mais cherchant à dévier la colère des pauvres gens sur les Fangeux, responsables de tous leurs maux, ou presque.

- Bien dit.

Approuva alors le Conseiller, jetant un regard à la foule qui sembla réfléchir rapidement à ces paroles, avant que des "OUAIS C'EST VRAI !" ne résonnent, parcourant l'ensemble des gens comme une vague allant grossissante. Profitant d'une ouverture, ce fut Gondemar en personne qui s'avança, se plaçant un peu en avant de son ami en mettant ainsi en valeur sa haute taille qui l'empêchait toujours de passer inaperçu. La voix grave et l'air sévère, sans trop trop sérieux au vu de la situation, il parla avec force et volonté.

- Personne ne peut combattre la Fange l'estomac vide ! Profitez de cette nourriture que nous vous offrons en ce jour, car elle est pour vous et vos proches, pour nourrir vos corps fatigués de lutter et pour vous apporter un peu du réconfort que vous méritez. Toutes les vies sont importantes ! Protégez-vous ! Protégez vos voisins ! Et tous ensemble, ainsi unis, nous finirons par venir à bout de ces maudits Fangeux !

Nul besoin n'était de louer qui que ce soit, hormis peut-être la Trinité, mais l'heure était au rationalisme et à l'appétit, pas aux convictions profondes qui pouvaient attendre encore un peu. Gondemar écarta grand les bras et eut un léger sourire qui, bien que grave avec son regard dur, n'en demeurait pas moins sincère.

- Allez servez-vous ! BON APPÉTIT MESSIEURS-DAMES !

Ceux qui n'avaient pas encore eu le temps de se servir, faute d'arriver plus tôt, le firent sans attendre alors que d'autres reprenaient une portion autant que cela leur était possible. On se rua sur les tables et le festin qui était ainsi servit, on fit la queue, plus ou moins correctement, on se passait les fromages et on rompait le pain, dans un début d'allégresse qui réchauffa le cœur de l'ex-soldat qui resta à les observer quelques longues secondes avant d'adresser un signe de tête à Théodemar puis, avisant Xandra qui approchait, lui fit signe de les rejoindre avec un certain empressement.

L’érudite arrivait peut-être au pire des moments. La présence de la nourriture mettait tous les appétits malmenés par la disette en émois. La présence milicienne et les discours haineux n’arrangeaient point le tout.

Au début elle se tenait loin. De toute manière, elle n’avait guère le choix ; car même chez les petites gens une hiérarchie de force s’installe. Les hommes, plus robustes et forts, s’étaient faufilés à travers la foule. Les femmes avaient tendance à rester à l’arrière attendant que ceux-là se servent. Leur tour viendrait ensuite s’il restait encore des victuailles.

Comme beaucoup, la jeune mère s’attendait à ce qu’on distribue uniquement du pain. Mais les vivres étaient exposés nombreux et varier. De la viande. Cela faisait combien de temps qu’elle n’avait point mangé de viande ? Elle n’arrivait plus à se souvenir. Les morceaux qu’elle achetait parfois, elle les donnait à l’enfant. Car son petit corps ne pouvait grandir sans ces nutriments indispensables. Le lait aussi. C’était le lait qui lui manquait le plus. Quant au fromage… L’idée de tenir entre ses mains ce petit graal blanc ne lui venait même plus à l’esprit depuis quelque temps. Preuve que la famine de Marbrume avait fait taire toute ses plus simples espérances.

Petit à petit, elle parvint à se rapprocher des tables et du promontoire d’où vociféraient l’Ecu Rouge et son acolyte. Si elle connaissait le premier pour travailler dans ce qu’il appelait « son laboratoire », jamais elle n’avait vu l’autre. Elle les écouta se répandre en propos haineux concernant les nobles. Et, pire, elle entendit la foule leur répondre. Un homme près d’elle vociféra un appel à l’émeute et les miliciens vinrent le chercher aussi sec. Une rousse dont elle croisa à peine le regard et grand blond en armure. Elle s’écarta pour les laisser faire. Elle ne voulait pas être mêlée à quelconque effronterie ou fanatisme collectif.

Puis, ce furent les Fangeux qui furent mis au centre du débat. Les Fangeux, la cause de tous les maux. Depuis son apparition, le Fléau réunissait bien mieux les fidèles qui oubliaient alors d’aller brûler un chat, un déviant ou un désaxé religieux.

Ballotée de droite à gauche, la jeune femme écoutait et se demandait à quelle récupération politique Théodemar Ecuviel s’attendait. Que lui importaient la voix et la colère de toutes ses personnes ? Pourquoi cette quête de gloire ? Etait-ce son image d’illustre sanguinaire qu’il essayait de déformer ? Pourquoi vouloir conquérir le cœur des Bas Quartiers ?

Déjà, elle savait que celui qu’on surnommait l’Ecu Rouge travaillait dur sur le cas des Fangeux. C’est pour cela qu’il l’avait recrutée. Il ne cherchait donc point à lever une révolte. Ou peut-être que si, tout compte fait. La jeune femme n’en savait rien. Au fond, elle était ici comme l’autre grande majorité : un estomac vide et ivre de toutes ses senteurs oubliée qui se dégageait des aliments.

Bientôt, elle fut près des tables. Aussitôt elle fit profil bas, craignant que Théodemar la reconnaisse. Comme elle l’eut craint, la table qui portait la viande était prise d’assaut. Elle se tourna vers un endroit où on donnait quelques tubercules. La viande s’avariait tandis que les topinambours, les navets et les carottes se consommaient jusqu’à deux semaines après. Alors elle les choisissait avec soin, les fourrant dans sa besace.

Par erreur elle leva les yeux. Elle croisa le regard de son maître. Il la détailla, et elle avait honte de se tenir ici. D’être de ceux qui faisait partie de son équipe et qui se trouvaient encore et toujours du mauvais côté de la table. Le dévisageant avec la douceur qui lui était propre, la jeune mère, un peu bousculée à droite et à gauche, posa son regard sur l’enfant qu’il ne desserrait pas. Parce qu’elle avait aussi un petit homme qu’elle chérissait, elle détectait toute l’angoisse de celui-ci. Détresse qu’elle était loin d’approuver. Ce garçon devait avoir une mère, lui aussi.

— Lâchez le, Ecu Rouge. C’est un enfant.

Elle ne sut point s’il l’entendit. Peut-être avait-il dû lire sur ses lèvres ? Qu’importe. Elle baissa les yeux en signe d’obéissance et s’apprêtait à essayer de repartir. Mais le monde l’oppressait et l’agitation palpable risquait de tourner d’une minute à l’autre au débordement.