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| [Terminé] Confluence - Alaric | |
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Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: [Terminé] Confluence - Alaric Dim 27 Fév 2022 - 8:21 | | | Sombrebois, 23 avril 1167
Depuis son réveil, le matin suivant cette rencontre plus qu'étrange avec une entité obscure nommée "Marbrume", les pensées de la mercenaire s'étaient vues grandement… perturbées. Impossible pour elle de se concentrer lors des entraînements. Impossible pour elle de suivre la moindre conversation tant les différentes voix de la créature résonnaient à ses oreilles comme pour se rappeler à son "bon souvenir", et ce, en permanence. Pourtant, après cette nuit, "Marbrume" ne s'était plus manifestée, si bien que la rouquine ne put s'empêcher de se demander si tout cela était bien réel… Il ne s'agissait pas d'un rêve, de cela, Aeryn en était certaine. Néanmoins, ne pouvait-il point s'agir d'une hallucination ? Une sorte de mirage, visible que par elle seule et qui, lentement, l'entraînait vers la folie.
Il ne fallut pas plus de deux jours pour que le comportement de la mercenaire et sa propension à l'isolement ranimée si soudainement, n'alerte les membres de sa meute. Ryn s'était enfermée dans sa chambre pour réfléchir, allongée sur son lit, le regard perdu dans le vague. Elle ressassait encore et encore les paroles de l'entité mystérieuse qui, au fond, ne lui avait pas appris grand-chose. En revanche, la mise en garde semblait très claire :
"Quelqu’un te cherche Aeryn. Pour le sang que tu portes dans tes veines. Pour le potentiel qu’il contient. Elle te hait et te convoite."
Qui, quoi, comment? La jeune femme n'en savait rien. Et puis, par où devait-elle commencer ?
Mais tu n’es pas la seule sur sa liste et tu vas devoir trouver tes pairs si tu veux préserver ta vie et sans doute les tiens par la même occasion.
Qui donc ?
Le capitaine et sa nouvelle amie, la prêtresse au cœur sombre et aux ailes de pierre. La catin aux livres et aux rêves brisés. Oh et celle qui veut la paix mais aux mains couvertes de sang, elle vient de revenir en mon sein."
Alaric… C'était bien la seule personne cité par l'entité que la mercenaire pouvait nommer sans difficulté. Les autres ne lui disaient strictement rien, mais elle savait que le capitaine était lié à une prêtresse… Peut-être pouvait-il l'aider… Mais qui d'autre ? L'entité avait également évoquée Nixeu, la femme à qui Aeryn devait son intégration au sein de la guilde … Néanmoins, celle-ci devait également la rapprocher de la personne qui la cherchait et que la rouquine devait fuir, sans même essayer de l'affronter.
Tout cela lui semblait si compliqué, trop compliqué pour une jeune femme seule et perdue…Mais si "Marbrume" avait raison, rester parmi les lames pouvait s'avérer dangereux pour tous ceux qui tenteront de se rapprocher d'elle. Et si…
"Je dois partir…" se dit-elle au matin du troisième jour. L'aube se levait à peine que la mercenaire faisait déjà les cent pas devant la porte du bureau de Faren pour lui demander une permission. Le maître-lame accepta, évidemment, il ne la retenait pas prisonnière après tout. Lorsqu'il lui demanda des détails, la jeune femme resta très vague, probablement trop vague pour ne pas soulever d'interrogation autant chez le maître que la guilde que chez ses collègues lorsqu'elle du leur dire "au-revoir". Néanmoins, il était hors de question pour Ryn d'impliquer ses collègues avant d'en apprendre plus… Et plus particulièrement, avant de s'assurer de sa santé mentale. Rien ne pouvait lui garantir que tout ce qu'elle avait pu voir ou entendre ne provenait pas de sa propre imagination. Aussi, mieux valait pour tout le monde que la mercenaire s'en assure elle-même plutôt que de prendre le risque de passer pour une folle auprès des siens.
Ainsi, privée d'une escorte fiable et expérimentée, il lui fallut ensuite trouver un moyen de rejoindre Sombrebois tout en espérant qu'Alaric s'y trouve encore. La mercenaire y laissa une grande partie de sa solde, mais elle réussit néanmoins à soudoyer un coutilier peu regardant afin de lui offrir une place parmi une caravane devant se rendre à Balazuc. Le reste du trajet, Aeryn allait devoir l'effectuer seule.
Trois jours plus tard, la mercenaire couverte de poussière et de sueur se retrouva devant les portes de Sombrebois. Les gardes à l'entrée avisèrent la nouvelle venue avec un regard à la fois sévère et perplexe.
-Je me nomme Aeryn Monclar, je suis venue voir Alaric… Le capitaine. Pourriez-vous lui signaler ma présence, s'il vous plaît ? C'est important…
Important ou totalement fou… Ce serait au capitaine de trancher.
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Jeu 3 Mar 2022 - 10:50 | | | Alaric ferma doucement la porte derrière lui. De l'autre côté, Rosen peinait à s'endormir ; son ventre toujours plus volumineux sursautait à mesure que l'héritier de Sombrebois se réveillait. Il ne fallait pas être une prêtresse pour deviner que le jour J ne tarderait plus ; le soldat en avait des sueurs froides. Les prédictions d'Odalie, si elles l'avaient toujours effrayé, étaient restées lointaines, abstraites tant que l'accouchement n'avait pas eu lieu. De même, les mises en garde d'Eve concernaient le bien-être de la baronne une fois son rejeton dans les bras. Un tournant se préparait inéluctablement et l'arrivée de l'héritier en marquait le point de départ. À moins que la conteuse n'ait relaté que de bonnes vieilles inepties, des contes chéris par une folle rencontrée sur les routes, à la faveur des Trois... Malgré ses réticences initiales, Alaric n'y croyait guère. Pour être honnête, il serait même surpris de découvrir que les visions de la diseuse de bonne aventure ne se déroule véritablement.
Dans sa chambre trônait contre l'un des murs vierges le bâton qu'elle lui avait donné. Sa nouvelle arme, plus symbolique qu'acérée. Rien que d'y penser, son cœur s'affolait. Pourtant, il tenait bon ; il n'avait pas le choix. Il devait faire bonne figure, afin de rassurer Rosen et son entourage. Ce n'était pas quand la blonde avait enfin décidé de se poser qu'il devait l'inquiéter. Il préférait la laisser croire à un futur plus beau et lumineux, même s'il était persuadé de l'inverse. Peut-être était-ce mal, mais Rosen avait enduré suffisamment de mésaventures ces derniers mois – années – et en rajouter une couche ne lui avait pas semblé être la meilleure des solutions. Alors, comme promis, il veillait sur elle, lui offrait des sourires bienveillants et l'encourageaient de bon cœur.
Il ruminait de sombres pensées, supposait d'obscurs futurs lorsqu'un garde l'interpella, alors qu'il pénétrait dans le hall principal de la forteresse. Son message était bref, mais soulevait des interrogations inquiétantes.
— Aeryn ? répéta-t-il. J'arrive.
D'un pas vif, il suivit son subordonné jusqu'à l'entrée du bourg où la rouquine patientait. En chemin, de nouvelles questions l'assaillirent. Pourquoi était-elle venue jusque Sombrebois ? Leur dernière rencontre, à Balazuc, ne datait que d'une quinzaine de jours. Il avait dû se passer quelque chose de suffisamment significatif pour qu'elle franchisse le pas. D'ailleurs, le garde n'avait parlé que d'elle, il n'avait jamais évoqué la présence d'autres mercenaires. Pourtant, malgré les grimaces éloquentes de la rousse en leur présence, Alaric avait deviné sans mal qu'elle les appréciait. Ou du moins, qu'elle les tolérait.
Quand il l'aperçut enfin, il dépassa le soldat sans y prêter attention et interpella son amie. D'un signe de tête, il remercia les miliciens avant de reporter son attention sur la mercenaire. L'inquiétude barrait son front plus que l'ennui, ses cheveux collaient à son visage et la poussière qui maculait sa tenue témoignait de la longue route qu'elle avait entreprise. Seule, comme il pouvait le constater.
— Viens, dit-il simplement.
Les yeux clairs de la rousse avaient parlé pour elle ; un langage que le capitaine de Sombrebois ne comprenait que trop bien. Il l'emmena dans les ruelles du bourg, lui proposa de déambuler sans but, si ce n'est d'éviter toutes oreilles indiscrètes. Quand Alaric fut certain que les ordres des ouvriers et les martèlements des ferronniers couvraient suffisamment leurs paroles, il prit la parole :
— Je suis content de te voir, mais...
Il secoua la tête.
— Je crois que Sombrebois n'est pas très sûr pour le moment...
Et les prédictions d'Odalie résonnaient encore, les gémissements de Rosen ricochaient toujours et l'arrivée de la mercenaire n'accroissait qu'un peu plus les tourments du garde. Il semblait apercevoir des rouages étranges, des mécaniques qui s'activaient, un schéma qu'il ne maîtrisait pas, mais dont il était un des acteurs principaux. Aeryn aussi ?
— Je suppose que tu n'es pas venue sans raison..
Il passa une main dans ses cheveux, anxieux. Il aurait préféré lui réserver un accueil plus chaleureux. Il avait rêvé de retrouvailles plus amusantes.
— Que se passe-t-il, Aeryn ? |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Jeu 3 Mar 2022 - 15:30 | | | La patience n'était point une qualité possédée par la mercenaire. À peine eut-elle prononcée sa demande que la jeune femme se mit à faire les cents pas devant les portes, sous le regard étonné des gardes qui se demandaient ce que cette étrangère pouvait bien vouloir à leur capitaine. Les mâchoires serrées, Aeryn essayait tant bien que mal de réfléchir ou tout du moins, de remettre un peu d'ordre dans ses pensées grandement perturbées… Que pouvait-elle dire à Alaric sans passer pour une aliénée? Comment ? Quels mots devait-elle employer ? Au fond, arriver jusqu'ici représentait la partie la plus aisée de son plan. La suite s'annonçait autrement plus difficile tant cette histoire lui paraissait totalement folle voire même totalement grotesque … Les paroles de Marbrume résonnaient encore et toujours dans sa tête, soulevant toujours plus de questions, mais jamais aucune réponse.
Et si, tout cela sortait réellement de son imagination ? Après tout, il semblait bien plus logique que Ryn ait imaginé tout cela… Ainsi, ce manque de réponse paraissait bien plus crédible. Car, après tout, comment son esprit pouvait répondre à des interrogations dont elle-même ignorait tout…
Et si… Et si tout cela était vrai ? Que pouvait-elle bien faire contre tout cela ? Alaric pouvait-il réellement l'aider ?
Au bout d'un temps qui lui avait semblé interminable, le capitaine finit par la rejoindre… Aeryn ne pouvait plus faire marche arrière à présent. Cela, la mercenaire le réalisa en croisant simplement le regard du jeune homme comme si… quelque chose le taraudait à lui aussi. Peut-être était-ce seulement dû à la présence de la jeune femme en ces lieux, seule qui plus est. Mais pour l'heure, Ryn en doutait fortement.
Lorsqu'il l'invita à le suivre, la rouquine obéit sans discuter, se contentant de marcher tout en continuant de chercher les mots qui semblaient vouloir se soustraire encore et encore. Les questions du capitaine exprimaient effectivement une certaine inquiétude notamment concernant la sécurité du bourg bien que pour l'heure, la présence de la mercenaire en ces lieux semblait éveiller bien plus sa curiosité. Et qui pourrait l'en blâmer ?
Et si … Lui aussi avait-eu une sorte de vision comme ce fut son cas ? Avait-il reçu la visite surprenante de Marbrume ? Cela semblait bien peu probable même si, au fond d'elle, Aeryn aurait aimé ne pas se sentir aussi seule dans cette situation presque ubuesque.
-Je suis venue … Pour te parler d'une chose… lâcha-t-elle, soudainement prise d'une certaine agitation qui la poussa à marcher de nouveau. Je ne sais pas vraiment par où commencer, ni même si… Merde… Je ne sais même pas si cela mérite d'être exposé ici…
Toute cette histoire commençait à l'agacer sérieusement. Elle en voulait à cette entité pour l'avoir placé dans cette situation dérangeante et stupide. Comment pouvait-elle parler de tout ceci sans passer pour une folle ? Impossible pour la jeune femme qui doutait elle-même de ce qu'elle avait vu ou entendu…
-Je ne vais pas y arriver… C'est trop stupide. Je n'aurais pas dû venir jusqu'ici pour te déranger avec ces conneries, pouffa-t-elle nerveusement. Mais, dis-moi, pourquoi penses-tu que Sombrebois n'est pas sûr ? demanda-t-elle finalement comme pour s'offrir une petite accalmie entre deux explications bancales. Tout semble calme ici… J'veux dire… J'ai entendu les gardes parler. Mis à part l'état de la baronne qui s'apprête à accoucher, il ne semble pas se passer grand-chose dans le coin… Qu'est-ce qui t'inquiète au juste ?
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Dim 6 Mar 2022 - 11:50 | | | Plus qu'anxieuse, Aeryn était nerveuse. Alaric l'observait du coin de l’œil, chercher des mots qu'elle ne trouvait pas. Il arqua un sourcil interrogateur sans lui poser de question. Il préférait lui laisser le temps d'exposer les raisons de sa venue ainsi que la cause qui barrait son front d'inquiétude. Pourtant, d'un rire qui sonnait faux à leurs oreilles, la rouquine capitula à sa grande surprise. Le soldat s'arrêta en chemin et la dévisagea et croisa les bras sur son torse, affichant une moue dubitative, tandis qu'elle essayait de changer de sujet avec maladresse. Si la mercenaire espérait s'en sortir de cette manière, c'était loupé ! Alaric savait que son amie était loin d'être stupide : elle n'avait pas parcouru un tel trajet seule, n'avait pas pris ces risques inconsidérés pour quelque chose qui n'avait plus le mérite d'être énoncé. Que craignait-elle au juste ? Elle avait dit que c'était « trop stupide » ce qui n'éclairait guère le capitaine de Sombrebois. Il comptait bien la persuader de lui parler et il savait exactement comment parvenir à ses fins. De même, si elle espérait qu'il lui relate ce qui le tracassait, le soldat aurait besoin d'un coup de pouce.
— Ce qui m'inquiète est assez fou, avoua-t-il.
L'idée le frappa alors qu'il le lui répondait. Et si la rousse avait croisé Odalie qui lui aurait servi autant de prédictions douteuses, de visions obscures ? Non, cela n'avait aucun sens... D'après ses dires, la diseuse de bonne aventure s'était rendue vers le village des bannis – si du moins elle avait été capable de le trouver – une fois leur entrevue terminée. Certes, plusieurs jours s'étaient écoulés depuis et la conteuse aurait eu tout le temps de gagner la capitale depuis. Si la théorie demeurait plausible d'un point de vue chronologique, elle était faussée sur tous les autres plans.
— Alors crois-moi, je n'ai pas peur de tes... révélations.
Il soupira puis balaya les alentours du regard. Bien que plusieurs travaux aient été achevés au sein du bourg, peu d'endroits étaient disponibles pour discuter en toute tranquillité. Avant, il n'aurait pas hésité à l'emmener au château, mais les lieux étaient bien plus animés ces derniers temps, les prêtresses et servantes courant en tous sens pour servir au mieux la baronne, sans oublier quelques ouvriers et charpentiers qui retravaillaient et modifiaient pièces et salles de la forteresse. Avec Eïlyn, il bénéficiait de l'intimité de la tente de commandement... Ou de la convivialité de la taverne. Malgré les déboires de la rouquine avec la boisson, c'est là qu'il décida de l'entraîner. De toute façon, si elle désirait entendre la vérité, mieux valait qu'elle soit assise, une bière à la main.
À cette heure de l'après-midi, quelques tables sur la terrasse aménagée étaient occupées, mais Moe s'occupait du service seul, vadrouillant entre ses clients, bavardant à droite et à gauche. Il régnait toujours une ambiance chaleureuse et agréable qu'Alaric avait appris à apprécier en compagnie de son quartier-maître. Il espérait que la mercenaire s'y sentirait également à son aise.
— Bien le bonjour, capitaine ! s'exclama l'aubergiste, alors que les deux amis s'asseyaient à peine.
D'un signe de tête, l'homme salua la mercenaire, avant de reporter son attention sur Alaric.
— Comme d'habitude ? demanda-t-il, sourire aux lèvres.
Alaric opina, puis laissa Aeryn effectuer sa commande. Une fois Moe reparti derrière son comptoir, le soldat prit la parole.
— Depuis que Moe a ouvert, on n'est plus si mal ici, dit-il en souriant. Parfois, il a tellement de monde que ses deux filles font le service. D'ailleurs... Il a accepté l'aide d'un jeune garçon, ces derniers jours.
D'un geste du menton, le capitaine désigna Isaac. Le jeune adolescent, appuyé sur une canne, discutait avec la cadette du tavernier. Le petit bandit ne les avait pas vus, trop occupé qu'il était à apprendre les ficelles du métier. Ou à plaisanter. Moe lui avait avoué quelques jours plus tôt qu'il jugeait que Juliette passait un peu trop de temps à son goût avec le nouveau venu dans la famille. « Vous voyez, j'suis bien heureux qu'Isaac parle enfin ! C'est avec Juliette qu'il s'entend le mieux ! Moi, j'pensais que mes filles le verraient comme leur frère, mais...» Alaric s'était contenté de rire. Le soldat était persuadé que Moe en faisait des tonnes pour pas grand chose : après tout, les deux enfants avaient plus ou moins le même âge. Il était bon de le voir s'ouvrir un peu plus aux autres, maintenant qu'il avait définitivement intégrer la maison de Moe et qu'il capprenait à côtoyer les habitants de Sombrebois.
— Tu voudrais lui parler, tout à l'heure ?
L'arrivée de leurs boissons mit fin à cette discussion légère, nécessaire à la poursuite de la suivante. Alaric but une longue gorgée du breuvage amer, avant de reposer la chope avec délicatesse sur la table branlante.
— La baronne va bientôt accoucher, comme tu sais, se décida-t-il enfin. Quand l'héritier sera là...
Il haussa les épaules.
— Je ne sais pas trop ce que la couronne va faire. On m'a dit que... Sombrebois pourrait être une sorte de champ de bataille.
Il but à nouveau.
— Quand je t'ai quittée à Balazuc, en chemin, je suis tombé sur une femme étrange. Elle disait voir l'avenir.
Il chassa l'air d'un geste désinvolte.
— Je ne crois pas vraiment à tout ça, mais... Elle savait des choses qu'elle n'aurait pas dû savoir et elle aussi m'a parlé de l'héritier. Je crois que ce n'est pas une coïncidence. Il va se passer quelque chose ici, une fois que Rosen aura accouché. Je ne sais pas quoi, je ne sais pas quand, mais... Je reste sur mes gardes.
Il laissa planer un court silence, au cours duquel il observa son amie. Le prenait-elle pour un fou ? Était-ce pire que ce qu'elle désirait lui avouer ?
— Et toi, c'est quoi ta mauvaise nouvelle ? osa-t-il demander, une grimace sur les lèvres. |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Lun 7 Mar 2022 - 11:11 | | | -"Assez fou, hein," répéta-t-elle malgré elle tout en pouffant nerveusement face à ce descriptif qui semblait coller si bien aux raisons qui l'avaient poussé à entreprendre ce voyage.
Malgré tout, Aeryn avait encore besoin de temps pour trouver les mots. Les "bons" termes à employer autant pour se faire comprendre que pour éviter de passer pour une aliénée auprès de la seule personne que la jeune femme pouvait qualifier d'amie. Alaric pouvait bien affirmer de ne pas craindre les révélations de la mercenaire, rien ne de censé ne pouvait décemment le garantir. Après tout, ce qu'elle avait à lui raconter dépassait largement les frontières de la logique et de la vraisemblance.
Aussi, se contenta-t-elle de le suivre de nouveau, s'enfermant dans ce silence pesant, chargés de ses doutes et de sa peur constante et persistante d'être repoussée, rejetée. Elle l'imaginait déjà se gausser ouvertement, après avoir entendu ses fameuses révélations. Même si une telle chose ne ressemblait pas le moins du monde au tempérament du capitaine. Mais après tout, n'aurait-elle pas elle-même réagi ainsi à sa place ? Alors comment ne pas imaginer une telle réaction de la part d'Alaric si Ryn, elle-meme aurait été totalement incapable de prendre tout cela au sérieux ?
Alors, sans rien dire, la mercenaire s'installa à la place que son ami lui avait désignée. Toujours en silence, elle salua le tavernier avant de commander la même chose que le capitaine, même si elle n'avait ni soif, ni envie de finir ivre de nouveau. Elle l'écouta parler de l'endroit. Elle sourit en apercevant Isaac, occupé à discuter avec une jeune demoiselle qui semblait lui plaire.
-Non... répondit-elle au capitaine lorsqu'il lui demanda si elle souhaitait le saluer. Je doute fort qu'il ait envie de me voir, moi et ma face d'assassin. J'aime autant lui épargner les mauvais souvenirs que ma présence pourrait réveiller.
Comment pourrait-elle décemment se présenter devant le jeune homme après avoir tué son frère ? Impossible… Alors de nouveau, tout en trempant ses lèvres dans sa boisson, Aeryn écouta le capitaine parler de sa propre rencontre étrange avec une diseuse de bonne aventure, prédisant vraisemblablement quelque chose d'inquiétant. Une femme donc. Un être bien vivant composé de chair, d'os et de sang…Rien à voir donc avec l'apparition de "Marbrume" et sa fâcheuse à emprunter des voix pour ses propres prédictions obscures. Quelque part, Aeryn se sentit déçue par l'histoire d'Alaric. Elle aurait préféré l'entendre parler d'une entitée surnaturelle, tout comme celle qu'elle avait eu le malheur de rencontrer cette nuit-là… Elle aurait tellement aimé ne pas être seule…
Ainsi, quand le capitaine l'interrogea de nouveau, la jeune femme baissa les yeux sur sa chope. Elle déglutit bien péniblement, prit une profonde inspiration, avant de vider le contenu de son verre d'une traite. Nul doute que la mercenaire regretterait bien rapidement ce geste, mais qu'importe. Ryn s'empressa de commander une autre boisson, espérant y trouver le courage nécessaire pour contrer sa propre histoire.
-J'ai moi aussi fait une rencontre étrange, commença-t-elle en soupirant. Mais il ne s'agissait pas d'une personne, plutôt d'une chose dépourvue de visage… C'est assez difficile à expliquer parce que tout ce qui s'est passé ce soir-là, tout ce qui m'a été raconté, revient de l'impossible… Et, honnêtement, je ne suis même pas certaine que tout cela soit bien réel. Je crains… Je crains d'être malade, Alaric. Je crains que mon esprit soit en train de me trahir et que ma fin soit proche…
Par "fin", la mercenaire n'évoquait pas sa mort, mais plutôt la perte totale et définitive de sa santé mentale. Peut-être allait-elle finir enfermée quelque part, seule, dans une cellule que l'on réservait d'ordinaire aux fous et aux êtres devenus trop dangereux pour continuer à vivre au sein d'une société vérolée et agonisante.
-Cette créature s'est présentée à moi comme étant "Marbrume". Elle m'a parlé de tant de choses invraisemblables… Des choses inquiétantes… Mais il m'est vraiment difficile de tout développer. Je ne suis même pas certaine d'avoir tout compris… J'ai seulement une question à te poser. Ta réponse sera décisive car c'est une chose qui m'est impossible de savoir : As-tu récemment fait la rencontre d'une prêtresse … Une "prêtresse au cœur sombre et aux ailes de pierre" ? Je ne sais pas si cela signifie quelque chose ou non pour toi. Mais … s'il te plaît, réfléchi avant de répondre, c'est important.
Le regard effrayé de la mercenaire se fit plus perçant, plus profond et insistant, comme si elle tentait de trouver une réponse dans les yeux du capitaine, dans sa manière de se tenir … À travers lui. Sa réponse serait déterminante et déciderait du sort de la rouquine qui, plutôt que de perdre l'esprit, préférait perdre la vie quitte à se l'ôter elle-même.
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Jeu 10 Mar 2022 - 18:06 | | | Voir Aeryn vider sa chope d'une traite avant d'en commander une suivante ne rassura guère le capitaine de Sombrebois. Il avait un mauvais pressentiment : une appréhension qui ne le quittait pas depuis qu'il avait quitté Marbrume. Une fois son cocon chaleureux derrière lui, les mauvaises nouvelles et interrogations s'étaient enchaînées sans relâche. Pourtant... C'était également dans cette atmosphère étrange et pesante qu'il avait savouré quelques instants de joie et de complicité avec son quartier-maître, c'était là aussi qu'il avait rassuré Isaac et qu'il l'avait vu s'acclimater au bourg et à sa famille d'adoption. Un peu plus chaque jour, Alaric se rendait compte que les fugaces instants de bonheur qu'il parvenait à saisir côtoyaient sans cesse mystères et bouleversements. Alors il tâcha de se le remémorer tel un mantra et, son rythme cardiaque maîtrisé, ses craintes repoussées, il écouta avec attention la mercenaire. Malgré ses prédispositions, il ne s'était pas attendu à ça. Une créature sans visage ? Des choses invraisemblables ? Et lui, que venait-il faire là-dedans ? Et la prêtresse ? Il avait tant de questions à poser à la rouquine. Cependant, il se ravisa : la peur qui animait les yeux de son amie l'empêcha de quémander des réponses qu'elle ne possédait sans doute pas.
— Euh, fit-il, incapable d'aligner deux mots.
D'abord, il avait besoin de remettre un peu d'ordre. Aeryn avait rencontré une personne étrange – l'avait-elle seulement rêvée ? – qui lui avait fait part d'énigmes dont la résolution semblait tenir en une prêtresse qu'Alaric connaissait... Ou pas. Pas n'importe quelle prêtresse, non. « Au cœur sombre et aux ailes de pierre » Ce fut au tour du soldat de vider sa boisson, comme si, paradoxalement, l'alcool avait le pouvoir de lui remettre les idées en place.
— Odalie, la conteuse que j'ai rencontrée, peut-être qu'elle était prêtresse ? argua-t-il.
Il avait naturellement pensé à la diseuse de bonne aventure : elle avait sa place dans une discussion où le mystère trônait entre les lignes, où l'abstrait l'emportait sur le réel. Pourtant, à peine avait-il terminé sa phrase qu'il sut qu'il se trompait. Il se souvenait encore de son regard perçant, empli d'un amour maternel qu'il n'avait jamais su comment interpréter. Et si elle avait bel et bien des ailes, pour voguer entre les villages et dans les terres hostiles selon son bon plaisir, ces dernières n'étaient certainement pas faites de pierre.
— Mais...
Son menton mal rasé posé sur sa main, il réfléchissait. La seule prêtresse qu'il avait rencontrée dernièrement était sœur Isolde. Elle lui avait parlé d'une mésaventure qu'elle venait de vivre dans les marais. Capturée par une bannie nommée Priscilla, elle avait finalement eu la vie sauve, elle, ainsi qu'un autre prêtre qui l'accompagnait. À ce moment-là, nul doute que son coeur était assombri, partagé entre son éducation stricte et la dure réalité à laquelle elle avait été confrontée. Malgré sa place au temple, elle brûlait de découvrir l'extérieur, tout en le craignant. Isolde désirait comprendre un monde qu'elle n'avait fait qu'entrevoir. « Je n’ai jamais autant respiré depuis que j’ai quitté les murs, ressenti.» avait-elle dit. Peut-être avait-elle désormais l'impression d'être un oiseau en cage ? L'idée était farfelue. Cela ne pouvait être vrai, ce n'était déjà pas censé. Alaric releva les yeux vers son amie ; elle le fixait toujours, un mélange de crainte et d'espoir éclairait son regard.
— La dernière prêtresse que j'ai rencontrée s'appelle Isolde, finit-il par avouer. Elle officie à Marbrume. Peut-être que c'est elle... Je veux dire, c'est possible. Il lui est arrivé quelque chose ? Une bannie l'a...
Alaric suspendit sa phrase. « Il me semble que c’est la clé de beaucoup de choses mais je n’arrive pas à remonter sa trace. J’ignore pourquoi je vous dis tout ça, Alaric, pardonnez-moi. J’ai l’impression de pouvoir tout vous dire. » Le soldat déglutit. Odalie ne cherchait-elle pas le village des bannis ? Peut-être qu'Isolde ne s'était pas trompée et que cette mystérieuse Priscilla manigançait quelque chose de plus grand. Quelque chose qui intéressait suffisamment la conteuse... Quelque chose qui le concernait. Qui les concernait. Alaric leva les yeux vers le ciel. « Non, moi si j’étais une déesse, je pense que je ferais dans le suspens. Alors ne te prends pas trop la tête cap’, si jamais quelqu’un t’envoie quelque chose depuis là-haut, c’est pas fait pour que tu comprennes. » Dans les moments pleins de doutes, il était bon de se remémorer les paroles de sa seconde.
— Je pense qu'on a beaucoup de choses à se raconter.
D'un signe de main, il indiqua à Moe d'amener des boissons supplémentaires.
— Je crois que tu devrais rencontrer Isolde. Elle m'a parlé d'une bannie qui s'appelle Priscilla Dorvan, tu la connais ? Isolde était persuadée qu'il se tramait quelque chose de leur côté. Odalie, la femme qui m'a parlé de ses visions, elle se rendait au village des bannis. Je ne sais pas, Aeryn, peut-être que je suis fou, moi aussi. Mais je ne comprends pas... Je sais que je suis en danger, ici, à Sombrebois. Et j'ai toujours pensé que la couronne en serait responsable. On ne peut pas tout comprendre. Les Trois nous livrent seulement ce qu'ils veulent.
Moe leur servit leurs nouvelles boissons et déposa un petit plateau entre eux deux, recouvert de quelques morceaux d'un pain épais et de tranches de fromage. Le capitaine le remercia d'un sourire ; l'aubergiste s'éclipsa aussi vite qu'il était venu, comprenant l'importance de la discussion.
— Il se passe des choses... des choses étranges, affirma-t-il. Et toi et moi, je crois...
Il haussa les épaules.
— Qu'on peut influencer le destin qui se joue. |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Sam 12 Mar 2022 - 20:34 | | | Évoquer la chose de la sorte, ainsi à voix haute, avait quelque chose de perturbant. Tout cela semblait bien trop fou, trop stupide pour être partager sans perdre la face à défaut de la tête encore posée sur les épaules de la mercenaire… mais pour combien de temps encore ? La réponse d'Alaric se fit attendre tant les révélations de la rouquine le poussaient à la réflexion. Tout du moins, c'est ce que Ryn osait espérer sans pour autant ne point redouter le jugement de son ami.
Silencieuse, Aeryn l'observa un long moment veillant à ne point perdre patience malgré son empressement. Elle attendait presque comme si avait été l'un de ces condamnés à mort, les mains accrochées aux barreaux de la cellule que représentait son propre esprit. Alaric sembla hésiter… Supposant tout d'abord qu'il pouvait s'agir de la fameuse diseuse de bonne aventure avant de parler d'une prêtresse dont elle oublia aussitôt le nom. Néanmoins, elle nota que cette dernière se trouvait à Marbrume.
Le capitaine se perdit à nouveau dans ses réflexions et les pensées qui restèrent inaccessibles pour la rouquine qui se contentait de l'observer. Finalement, Alaric sembla trouver un lien entre la fameuse prêtresse -Isolde donc- sa mystérieuse voyante et une bannie…Que pouvaient bien faire les réprouvés dans cette histoire ? Cela, Aeryn l'ignorait totalement. En tout cas, son ami semblait croire que tout cela avait un rapport avec Sombrebois.
Alors, à son tour, la mercenaire essaya de se plonger dans ses souvenirs… Marbrume, à travers sa myriade d'énigmes, n'avait jamais évoqué les bannis… Néanmoins, il était vrai que la créature n'avait nommé personne, prétextant ne pas pouvoir apercevoir ce qui se tramait hors de ses frontières.
-Je ne connais pas cette Priscilla Dor… Truc. À ma connaissance, je ne connais aucun banni tout court d'ailleurs, répondit-elle avant d'avaler une nouvelle gorgée de sa bière comme pour faire disparaître l'amertume de ses pensées en la diluant avec celle de la boisson. Je ne sais pas si les réprouvés sont en lien avec toute cette histoire… Cette chose m'a simplement parlé d'une menace sans la nommer ou la décrire… Mais quoique cela puisse être… elle en aurait après moi...
Se perdant un instant dans la contemplation du liquide qui emplissait sa chope, Aeryn essaya de se remémorer les moments importants de cette foutu rencontre. Marbrume avait prononcé un mot étrange… Un mot que la mercenaire avait bien évidemment oublié…
-Cette menace voudrait devenir "celle qui mange le monde"... quoique cela puisse vouloir dire. Mais… quoi qu'il en soit, je ne suis visiblement pas de taille à l'affronter et je ne me sens pas de taille à pouvoir influencer le destin non plus...
Pour la première fois depuis longtemps, Aeryn se sentait particulièrement faible voire même totalement impuissante.
-Au fond, je ne suis qu'une idiote, Alaric… Je n'ai pas été formée pour affronter tout ça. Je ne m'en sens nullement capable… d'autant plus que je ne suis pas fichue de savoir de quoi il s'agit réellement… Je suis une inculte, un être stupide qui ne sait que se battre et encore… Visiblement, ici, cela ne me servira à rien puisque "je ne suis pas de taille à l'affronter". Et c'est pas moi qui l'ai dit...
Ainsi, les yeux toujours rivés sur le liquide ocre, Ryn faisait face à ses craintes. Réfléchir par elle-même n'avait pas fait partie de son éducation. Son père la voulait servile et meurtrière, rien de plus. Jusqu'ici, la jeune femme n'avait pu compter que sur sa volonté de survivre et d'exister simplement pour elle-même. Elle faisait tout pour participer à la vie de ce monde. Elle se battait contre ses propres instincts simplement pour s'intégrer et enfin bénéficier du droit de vivre… Et tout cela semblait sur le point de s'écrouler, aussi misérablement que l'avait pu l'être sa vie jusque-là...Comme elle se sentait stupide en cet instant… Stupide et inutile face à une menace dont elle ignorait absolument tout.
-Je n'ai malheureusement pas compris grand-chose des propos de cette entité. Je ne sais pas si elle était réelle ou bien simplement le fruit de mon imagination… Mais elle m'a parlé de toi, de cette prêtresse, d'une femme qui voudrait la paix mais qui aurait les mains couvertes de sang et d'une catin avec des livres… Je devais vous trouver… Tous… Le reste est totalement flou...
Dernière édition par Aeryn Monclar le Ven 18 Mar 2022 - 6:56, édité 1 fois |
| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Jeu 17 Mar 2022 - 11:41 | | | Alaric releva les yeux de sa boisson et toisa un moment son amie. Il était difficile d'admettre tout ce qu'elle lui racontait, et pourtant, il ne comptait pas les remettre en cause. Cette histoire d'entité qui s'était présentée à elle, les menaces qu'elle avait évoquées, cette envie de « manger le monde » qui n'avait ni queue ni tête le laissèrent songeur. Était-ce seulement possible... Qu'une divinité se soit adressée à Aeryn ? Laquelle des Trois ? Le père d'Alaric lui avait souvent dit que les hommes aimaient représenter leurs dieux, mais quels étaient ceux qui les avaient réellement vus ? Il était plus simple de vénérer une icône, une représentation afin de concrétiser cette croyance transmise de génération en génération. Alors, en partant du principe que le capitaine de Sombrebois ne connaissait pas l'apparence réelle des dieux, il demeurait plausible que cette dénommée Marbrume soit l'une d'elle. Le drame qui se jouait était si grave pour que la Trinité s'en mêle ? À moins que Celle-ci en soit l'instigatrice...
Le soldat attrapa un morceau de pain, dont il décomposa les mies petit à petit sans s'en rendre compte, attentif aux dires de la rousse. Il se retrouvait dans ses mots et ses doutes. Le discours qu'il avait tenu à Eïlyn après sa rencontre avec Odalie avait été similaire. Qu'est-ce qu'un idiot de soldat, qu'est-ce qu'une idiote de mercenaire pouvait faire dans tout ça ? Comment pouvaient-ils s'installer à la table des dieux, dépourvus de cartes et de jeu ? Ils étaient invités à une partie dont ils ne connaissaient pas les règles et, semblait-il, ne pouvait refuser de participer à la manche en cours.
— Arrête, murmura-t-il, les yeux toujours fixés sur les miettes qui tombaient mollement sur la table. Toi, on t'a peut-être dit que t'étais pas de taille, mais c'est faux. Moi...
Il haussa les épaules.
— On m'a dit qu'un soldat pouvait changer le cours de l'histoire aussi sûrement qu'un roi.
Il marqua une petite pause avant d'ajouter :
— Je sais pas si c'est vrai. Mais je pense qu'on peut influencer le destin, Aeryn. Si tout est déjà écrit, à quoi bon ?
Il secoua la tête.
— C'est normal qu'on ne comprenne pas ces... Messages et ces visions. Nous ne sommes que des mortels et les dieux le savent.
Les paroles d'Isolde résonnaient en lui, mêlées à celles de son quartier-maître. Les rencontres qu'il avait effectuées ces derniers mois, ces dernières semaines se liaient entre elles au rythme de ses mots, elles prenaient un sens nouveau tandis qu'il en délivrait l'aboutissement à la mercenaire. Plantant ses prunelles dans celles de la rouquine, il avait délaissé pain et chope pour enserrer vigoureusement la table, à s'en faire blanchir les jointures de ses doigts calleux.
— Les Trois nous poussent peut-être à nous revoir et nous retrouver, Aeryn. Mais ce sont nos choix qui influencent nos vies et celle des autres. Tu aurais pu ignorer cette vision et ne pas m'en parler. C'est toi qui a choisi de venir, pas Marbrume.
Était-ce l'effet de l'alcool qui rendait son discours aussi passionné ?
— Ces rencontres ne sont pas le fruit du hasard... Je ne sais pas si c'est une bonne idée, mais... Tu dois trouver Isolde. Parle le lui de tes visions, mais aussi d'Odalie et des bannis. Je ne sais pas, peut-être qu'elle a appris quelque chose sans le savoir, elle aussi ? Ou qu'elle connaît les autres personnes que tu dois trouver ?
Peu habitué à parler autant et aussi rapidement, le capitaine de Sombrebois se tut un moment, le temps de reprendre son souffle et de boire une nouvelle gorgée. Le liquide ambré le réchauffait ; à défaut d'apaiser son tempérament, il l'exaltait. Par les Trois – ? –, Alaric aimait ça. Malgré les frustrations et l'anxiété, malgré les doutes et ses craintes, il raffolait de l'adrénaline coulant dans ses veines, de l'excitation qui le gagnait, à mesure qu'il avançait. Pas de monstre à chasser, mais une créature plus abstraite à saisir, un puzzle à taille humaine avec lequel il devait composer.
Un sourire qu'il espérait communicatif sur les lèvres, il fit tinter sa chope contre celle de la mercenaire.
— T'es pas seule, Aeryn. Nous sommes tous des idiots. Mais on peut encore faire les bons choix. |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Ven 18 Mar 2022 - 9:56 | | | "On m'a dit qu'un soldat pouvait changer le cours de l'histoire aussi sûrement qu'un roi"
-Alaric, je suis la première à dire que l'on peut influencer son propre destin… Je refuse même d'envisager le contraire...Mais là, cela n'implique pas que toi ou moi. C'est quelque chose qui me dépasse totalement.
Soupirant amèrement, la mercenaire vida de nouveau sa chope espérant ainsi perdre ses réserves tout en gagnant en courage. Cette rencontre avait mis à mal sa volonté, sa raison. Jamais auparavant Aeryn ne s'était aussi perdue, elle ne savait plus ce qui semblait juste ou non et remettait en cause absolument tout de ses choix à son existence tout entière. Avait-elle seulement le droit d'imposer cela à toutes ses personnes, qu'elles soient connues ou non et de les entraîner avec elle dans cette folie...
-Je ne sais pas ce qu'était cette entité exactement, mais l'on ne peut pas parler de divinité. Elle semblait n'être là que pour observer une petite partie du monde, ce qu'elle faisait visiblement depuis très longtemps. Et je commence sincèrement à me dire que les Hommes donnent beaucoup trop d'importance aux Dieux.
En était-ce simplement ? Impossible de répondre à cette question là. Pour Aeryn, il ne s'agissait que de simples statues comme celles que l'on trouvait parfois dans les cimetières. Des gisants dressés à la verticale représentant un être bien vivant et probablement tout aussi humain que le capitaine et elle-même, disparu depuis longtemps. L'imagination des Hommes savait créer et imaginer des fables depuis la nuit des temps. Rien n'était plus simple que transformer un humain en être extraordinaire qu'il serait plaisant de vénérer.
Qui étaient-ils après tout ? Marbrume n'avait-elle pas affirmé qu'Etiol était un être incroyablement doux ? Que s'était-il donc passé pour que les Hommes en viennent à le craindre et à le répudier de la sorte? L'espace d'un instant, les pensées de la rouquine s'égarèrent dans l'image de sa propre statue, celle qui, en tout cas, représentait une personne qui lui ressemblait énormément. Néanmoins, préférant oublier ce détail quelque peu dérangeant, la mercenaire veilla à chasser cette image bien précise de son esprit. Après tout, une personne aussi insignifiante qu'elle ne méritait pas de voir son image immortalisée.
Quoiqu'il en fut, Alaric semblait penser avoir mis le doigt sur quelque chose… Une chose que cette fameuse prêtresse pourrait être susceptible de comprendre.
-Passer pour une folle devant toi est une chose, Alaric… Mais parler de tout cela à une femme inconnue, une représentante des Trois qui plus est, en est une autre. Et si… Je ne sais pas mais… Si elle pensait que je suis une sorcière ? Avec mes cheveux roux et mes habits d'homme, j'inspire plus facilement la méfiance que la confiance, figure-toi, railla-t-elle songeant aux regards méprisants des clercs lorsque ces derniers se posaient sur elle.Une rouquine portant un sombre présage… Peut-être aurai-je droit à mon bûcher personnel...
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Mar 22 Mar 2022 - 11:18 | | | — Je te comprends, avoua Alaric. Je...
Il hésita un instant avant de lui répondre.
— Je n'ai pas envie d'entraîner d'autres personnes avec moi, dans le cas où je ferai de mauvais choix.
Le soldat baissa les yeux sur sa chope, se perdit un instant dans les ondes à la surface de sa boisson. Elles lui évoquaient sa propre situation. Les conséquences de ses actions et décisions s'étendaient, lentement de temps à autre, plus rapidement lorsque la table – sa vie – basculait un peu trop, à tel point qu'elles venaient caresser les flancs du godet, une limite que rencontrait la bière. Mais quelle était sa limite à lui, si ce n'était de mourir ?
— Mais je ne peux pas non plus gagner seul, renchérit-il en relevant son visage vers la mercenaire. Et je crois bien que... Tout ça – il écarta les bras, englobant aussi bien la terrasse de la taverne que l'intégralité du monde – nous dépasse tous. D'une certaine manière, nous sommes tous embarqués et... C'est nous qui décidons le rôle que nous voulons y jouer.
Il avait du mal à croire que ces paroles s'écoulaient de sa bouche. Il y a quelques années encore, jamais il n'aurait été capable de réfléchir aussi loin. Alaric se contentait de subir son existence, de se laisser porter par des courants contraires, ballotés entre remords et regrets, perdus dans le passé et incapable d'appréhender le futur. Mais il avait fait des rencontres, bonnes et mauvaises, certaines plus importantes que d'autres. Toutes avaient eu le mérite de lui faire ouvrir les yeux petit à petit, de le transformer et de l'influencer. Il avait appris à se connaître et à se découvrir, à comprendre ses motivations, à vivre.
— Peut-être que nous accordons trop d'importance aux dieux, concéda-t-il, même s'il n'en était pas tout à fait convaincu.
Les Trois avaient toujours été là. Comment ne pouvait-on pas leur consacrer les égards qui leur étaient dus ? En outre, la définition de Marbrume que lui avait fourni Aeryn correspondait en tout point à l'image qu'il se faisait de la Trinité : « Elle n'était là que pour observer le monde, ce qu'elle faisait depuis très longtemps. »
— Mais de toute façon, nous ne savons pas ce que font les dieux ni comment interpréter leurs paroles, énonça-t-il ne se souvenant des paroles d'Eïlyn. Je crois qu'il ne faut pas minimiser leur rôle, mais il ne faut pas s'en remettre uniquement à eux non plus.
Il but une gorgée de plus, observa le reste du breuvage et estima qu'il valait mieux ralentir son rythme. Il se souvenait encore trop bien – ou pas justement – comment ses soirées avaient terminé, une fois qu'il était lancé avec sa courtilière. Certes, Aeryn n'était pas Eïlyn, mais il préférait ne pas prendre de risque, surtout vu le sérieux de leur conversation et le mal-être de son amie.
Alaric arqua un sourcil interrogateur avant de sourire. Les craintes de la mercenaire étaient justifiées, mais il ne pouvait s'empêcher de les trouver amusantes. Bien sûr, elle ne connaissait pas Isolde, mais il était certain que la prêtresse n'allumerait pas un bucher sous les pieds de la jeune femme.
— Parle-lui de moi, elle me fait confiance.
Le capitaine de Sombrebois avait toujours du mal à comprendre pourquoi, d'ailleurs. Maintenant qu'il y pensait, elles étaient nombreuses à lui accorder du crédit, alors qu'il n'avait pas démontré grand-chose jusqu'à présent. Il n'avait pourtant pas essayé d'attirer l'attention et savait qu'il n'était pas doté d'un charisme particulier. Mais Isolde l'avait immédiatement apprécié, Aeryn lui avait avoué dès leur première rencontre qu'il était facile de lui parler, et Eïlyn lui avait serré la main avec cette conviction propre aux miliciens, lui signifiant qu'elle mettrait sa vie entre ses mains, si la situation l'exigeait. Quant à Eve... Non, il ne valait mieux pas penser à Eve. Son prénom risquait de lui échapper par inadvertance, un sourire idiot fleurirait encore sur ses lèvres et tous ses soucis s'évanouiraient.
— Elle s'est confiée à moi alors qu'elle ne me connaissait pas, expliqua-t-il. Et pourtant, elle m'a aussi raconté des anecdotes étranges...
Un déclic se fit. Une idée idiote. Un lien inexplicable. Une comparaison absurde.
— Euh... Tu sais, la bannie l'a épargnée, mais Isolde n'était pas seule. Il y avait un prêtre avec elle. Je ne me rappelle plus son nom... Magnus ? Quelque chose comme ça. Apparemment, durant son séjour dans les marais, il a cru voir Anür. Et si...
Il fit une moue dubitative, mais pleine d'espoir, ses yeux ancrés dans ceux de son interlocutrice.
— Et s'il avait eu une vision comme la tienne ? |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Mar 22 Mar 2022 - 14:41 | | | " Je te comprends"
De cela, Aeryn en doutait fortement sans pour autant remettre en cause les capacités de son interlocuteur. Le problème venait tout particulièrement du fait que la mercenaire, peinant encore à mettre de l'ordre dans cette histoire ubuesque, ne se comprenait pas elle-même. Comment le pourrait-elle après tout ?
Alaric rejoignait ses pensées en affirmant ne pas vouloir entraîner qui que ce soit avec lui. La crainte du "mauvais choix" poussait également Aeryn à s'éloigner des autres ou bien à les rejeter promptement, tout cela dans le but de ne pas avoir à regretter ses décisions foireuses. Venir jusqu'ici ressemblait à s'y méprendre à l'un de ces choix douteux … Bon sang, mais pourquoi ne remettait-il pas en cause les paroles de la jeune femme ? Comment pouvait-il la croire aussi aveuglément quand tout, absolument tout ce qui sortait de la bouche de la mercenaire évoquait une bien sombre folie ?
-Justement, Alaric, rétorqua la rouquine d'une voix étrangement calme. Dans quoi sommes-nous embarqués exactement ?
À son tour, la mercenaire baissa les yeux sur sa chope comme si celle-ci pouvait avoir une quelconque réponse à lui donner. Évidemment, elle ne trouva rien dans ce verre si ce n'était le vide… Le néant…
-Quel rôle puis-je jouer ici ? Se battre n'est pas bien compliqué quand on y pense… Il suffit de sortir son arme et de frapper jusqu'à ce que vienne la fin… Mais quand l'ennemi est inconnu ou "irréel", comment pouvons-nous espérer combattre et en sortir victorieux…
Lentement, Aeryn releva la tête. La fatigue étirait ses traits, creusait si profondément son regard gonflé par les cernes que l'on pouvait aisément l'imaginer morte.
-Face à l'inconnu et l'ignorance, je dois bien reconnaître que tu es bien plus courageux que moi, Alaric, murmura-t-elle en souriant. C'est bien ce qui me dérange dans cette histoire… L'ignorance… Le fait de ne rien savoir de ce qui nous attend dehors. Je ne suis pas assez intelligente pour comprendre les énigmes, j'aime quand les choses sont claires… Limpides… Je n'ai été élevée que pour suivre des ordres sans réfléchir, j'étais même très douée pour ça… Et quand j'y pense, cette époque commence à me manquer cruellement.
Jouant avec sa chope, Ryn répéta dans sa tête tout ce qu'elle venait de dire… Ses révélations, aussi vraies fussent-elles, lui arrachèrent un sourire rempli d'amertume et de dégoût pour elle-même. La vie qu'elle menait autrefois avait beau être misérable et sans but, celle-ci restait simple malgré tout. Pas de question ou de responsabilité. Aucune relation bonne ou mauvaise avec les gens extérieurs à sa famille… Aucune déception. Aucune crainte mis à part celle de décevoir son père.
-Les Dieux, les Hommes… au fond, c'est du pareil au même. Est-ce que les divinités sont réellement immortelles après tout ? Quand j'y repense, je me dis que non… Que les Trois ne nous ont pas abandonnés mais qu'ils sont simplement morts, eux-aussi...
Être rousse et prononcer de tels propos… Des paroles douteuses pouvant aisément être qualifiées de blasphématoires par n'importe quel croyant… De quoi mettre le feu au bûcher que le Temple réserverait probablement à la mercenaire si celle-ci continuait ainsi. Aeryn n'avait pourtant pas pour habitude de se morfondre. Bien au contraire, la jeune femme veillait toujours à ne pas se laisser atteindre… Pourtant, cette fois, tout semblait beaucoup trop compliqué pour ses propres capacités qu'elle jugeait bien trop faibles.
-Si tu penses que lui parler de toi sera suffisant pour lui assurer que je ne suis pas totalement barge, alors soit... railla-t-elle. Mais penses-tu vraiment que cette … Sœur Isolde... puisse m'aider ou seulement croire suffisamment ce que je raconte pour me donner quelques informations supplémentaires?
De nouveau, Alaric en revint au récit de la prêtresse, mais cette fois pour évoquer un tout autre Clerc. Un homme prénommé Magnus qui, selon les dires du capitaine, aurait croisé Anür elle-même dans les marais.
-La sirène en personne...dans les marais… Voilà qui est original, pouffa la rouquine. Je te l'accorde, il est bien stupide de ma part de me moquer de cette prétendue vision après ce que j'ai moi-même vécu. Néanmoins, tu avoueras que cela ressemble fort à une hallucination. Si ce prêtre avait été fait prisonnier par les bannis, il y a fort à parier que ce dernier ait subi quelques mauvais traitements pouvant causer ce genre de vision. Je reste pragmatique, Alaric… J'ai déjà bien du mal à croire ce que j'ai vu moi-même cette nuit-là, alors je te laisse imaginer ce que je pense de cette histoire...
Repoussant la chope devant elle, Aeryn se releva doucement avant d'étirer ses membres. Peu importe ses propres croyances ou ses doutes, rester ici les bras croisés ne servirait à rien.
-Et bien, je suppose que je n'ai plus qu'à rentrer à Marbrume… Merci pour cette conversation. Je saluerai cette prêtresse de ta part.
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Jeu 24 Mar 2022 - 12:13 | | | — Courageux... Ou complètement fou, murmura-t-il avant de vider le reste de sa boisson.
Aeryn avait raison : il n'avait aucune idée dans quoi il s'embarquait. Il lui semblait que les Trois l'avait poussé sur un radeau minable, qui prenait l'eau plus qu'il ne naviguait. Il avait souvent bu la tasse, avait essayé de se dépêtrer du courant violent qui l'emportait toujours un peu plus loin. Et puis il avait trouvé une rame – ou plutôt, cette dernière l'avait trouvé. Depuis, il maîtrisait son vaisseau ; il n'apercevait que de floues silhouettes en face de lui, trop loin pour parvenir à les effleurer, mais il ne coulait plus. À mesure qu'il progressait, son navire s'était munis d'autres atouts, d'autres aides qui l'avaient secondé. Néanmoins, un doute subsistait : était-ce le bon chemin ? Il était semé d'embuches retorses, d’obstacles mystérieux que la mercenaire aurait choisi d'éviter avec le plus grand soin, alors que lui-même s'y était jeté à corps perdu. Le fleuve continuerait de s'écouler sans eux. Il pourrait aussi se contenter de s'asseoir sur la berge, de le regarder serpenter entre les différents paysages, sans oser y mettre un pied. Car ne fallait-il pas être fou, pour embrasser un tel torrent ?
— Je ne peux pas regarder sans rien faire. Oui ce serait plus facile, admit-il. Mais... Tu n'as pas envie, toi ? D'agir si tu en as la possibilité ? Je... J'ai besoin d'être utile, Aeryn.
Alaric inclina la tête. Certes, il valait peut-être mieux que la rousse ne prétende pas ce genre de choses au sujet des dieux face à une prêtresse de Marbrume. À n'importe qui, d'ailleurs. Le capitaine de Sombrebois était déjà mal à l'aise à l'écoute de ce genre d'insinuation. Il pouvait concevoir la méfiance qu'elle ressentait vis-à-vis de la Trinité, lui-même avait douté à plusieurs reprises, lorsque sa vie s'était complexifiée, encore et encore. Lorsque les dieux lui refusaient sans cesse la mort, tandis qu'ils prenaient les vies de ses proches. Mais il ne pouvait accepter que le ciel soit vide au-dessus de sa tête. Les traditions étaient trop ancrées en lui ; si elles étaient réellement vaines, alors, Alaric n'aurait pas d'autre impression que de vivre dans un mensonge effroyable.
— Tu ne devrais pas dire ce genre de choses, dit-il finalement, d'un ton neutre.
Il ne désirait pas la réprimander – qui était-il pour juger ? – mais il ne pouvait hocher la tête à ses paroles condamnables. Le soldat soupira, se renfrogna face au ton moqueur de la mercenaire. Une fois de plus, il ne pouvait lui en vouloir : elle avait cru qu'elle était complètement folle, sans doute avait-elle pensé, en le retrouvant à Sombrebois, qu'il la sermonnerait, lui affirmerait à quel point toute cette histoire était grotesque. Au lieu de quoi, elle était tombée sur plus dérangé qu'elle. N'était-il qu'un idiot pour se fier à toutes ces visions, pour croire en des liens qui, à coup sûr, n'existaient que dans son esprit tordu ? Avait-il tant besoin d'action et de hauts-faits qu'il s'était inventé toutes ces coïncidences ?
— Mais, tenta-t-il une dernière fois, tu ne peux pas faire la sourde oreille. Je comprends que tu désires rester... pragmatique, mais tu ne peux pas faire comme s'il ne s'était rien passé. Tu n'es pas folle, Aeryn...
Il pensa à Rosen et à son comportement versatile. À ses convictions changeantes et défiant toute réalité.
— Je crois que lorsqu'on est fou... On ne s'en rend pas compte.
Surpris, il l'observa se relever avant de lui faire ses adieux. Parce qu'elle croyait s'en aller ainsi ? Elle était exténuée, elle ne pouvait reprendre la route pour un trajet aussi long et périlleux aussi rapidement. Et certainement pas avec de la bière pour unique nourriture dans l'estomac. Plaquant ses mains sur la table, Alaric se leva d'un bond.
— Pas question que tu repartes déjà, l'arrêta-t-il. Mange quelque chose, ajouta-t-il, désignant du menton l'assiette que Moe avait apportée à laquelle la rouquine n'avait pas touchée. Repars demain matin, d'accord ? Ce n'est pas comme si tu allais gagner beaucoup de temps en repartant cet après-midi... |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Sam 26 Mar 2022 - 10:39 | | | " Courageux... Ou complètement fou" avait-il rétorqué, arrachant ainsi un sourire railleur à la mercenaire qui ne pouvait s'empêcher de croire que les deux étaient liés.
Peut-être n'était pas si folle, finalement...Du moins, c'est ce que son manque de courage et de volonté actuel pouvait laisser sous-entendre. Aeryn détestait cette position fâcheuse, mais discuter avec Alaric lui avait au moins permis d'accepter ses responsabilités dans cette histoire. Accepter ne revenait évidemment pas à la capacité à prendre les bonnes décisions. La rouquine n'avait toujours été qu'un simple soldat totalement dépourvu d'esprit stratégique et le resterait probablement. Son rôle ne pouvait donc pas être celui du meneur qui, dans tous les cas, ne pouvait aucunement être alloué à une femelle. Personne ne suivrait une femme, rousse de surcroît… Plus particulièrement si cette dernière affirmait avoir été guidée par une entité mystérieuse portant le nom de la capitale du duché. Mieux valait rester réaliste, d'autant plus lorsque l'on se trouve dans l'incapacité de pouvoir traduire les énigmes de la créature.
Néanmoins, Aeryn ne pouvait que se reconnaître dans les propos du capitaine. Ce besoin d'utilité, la rouquine ne le connaissait que trop bien.
-Je sais… Et c'est pareil pour moi. Après tout, si je ne peux être utile à personne, alors pourquoi rester en vie ? répondit-elle en fermant brièvement les yeux. Je ne suis pas en train de dire que je ne veux rien faire, Alaric… Seulement que je ne sais pas quoi faire à mon niveau et c'est… extrêmement frustrant et dérangeant pour moi.
Lorsque le capitaine la réprimanda gentiment pour ses propos concernant les Dieux et leur possible mortalité, Aeryn se contenta de sourire. Évidemment, la jeune femme n'était point assez inconsciente pour affirmer de telles choses face à n'importe qui, mais elle avait confiance en Alaric, suffisamment du moins pour ne pas craindre de le voir allumer lui-même son bûcher. Peut-être avait-elle tort de se montrer si confiante. Après tout, ils ne se connaissaient que depuis peu de temps et rien ne pouvait lui garantir une éventuelle trahison de sa part. Néanmoins, la mort l'effrayait probablement beaucoup moins que la solitude, même si cette dernière s'échinait à la préserver en repoussant quiconque essayant de se rapprocher d'elle.
-Très bien, je garderai les opinions pour moi... souffla-t-elle, amèrement. Je ne cherchais pas à te faire adhérer à mes croyances ou à mes impressions foireuses.
Alaric semblait pourtant croire aveuglément à cette histoire de vision… ou plutôt "ces histoires". Il n'éprouvait aucune gêne à affirmer que la rouquine n'était pas folle, quand bien même pouvait-elle en douter. La folie pouvait arborer tant de visages différents qu'il devenait impossible de s'y repérer.
" Je crois que lorsqu'on est fou... On ne s'en rend pas compte."
- Peut-être… Peut-être pas. Je ne saurai dire… Mais il est difficile de ne pas douter de sa propre santé mentale lorsque l'on assiste à ce genre d'événement. Ce que je crains dans cette histoire, c'est d'entraîner d'autres personnes avec moi. Si je dois courir vers ma perte, j'aime autant le faire seule et préserver les innocents… J'aurais… Ouais… J'aurais préféré que tu me rejettes finalement. Que tu confirmes que rien ne va plus chez moi et que je suis effectivement bonne à enfermer, même si ce n'est pas une fin enviable et que cela m'effraie. Cette folie serait simplement morte avec moi… Mais là… Si tout cela est vrai… Bon sang… Qu'adviendra-t-il de tout ça ?
Sans même s'en rendre compte, le regard de la mercenaire s'était posé sur Isaac toujours occupé à compter fleurette à la demoiselle en face de lui. Tous ces gens autour d'eux avaient déjà tant perdus et, pourtant, ils continuaient de vivre en croyant en l'avenir. Pourquoi continuaient-ils de tomber amoureux, de se marier et d'avoir des enfants si ce n'était point le cas ? Alaric, lui-même, éprouvait ce genre de sentiment pour une femme et nourrissait probablement ce genre d'espoir… Celui de construire une famille et de vivre une existence plus normale. Aeryn avait beau rejeter ce genre de perspective, il n'éprouvait nullement le désir de nuire aux rêves des autres, bien au contraire… Aussi, si cette soeur Isolde pouvait l'aider à remettre de l'ordre dans ses idées pour lui donner le courage d'agir, alors il lui faudrait la trouver et ce, le plus rapidement possible. Faren ne lui avait pas accordé énormément de temps avant de devoir reprendre son poste. Elle ne pouvait priver les loups de l'un de leur élément après tout.
Il lui fallait donc repartir au plus vite… Mais, apparemment, le capitaine ne l'entendait pas de cette oreille puisqu'il lui demanda d'attendre le lendemain pour reprendre la route. Aeryn soupira, jetant un regard dégoûté à l'assiette trônant sur la table. Après réflexion, la mercenaire réalisa qu'elle ne s'était pas alimentée depuis son départ et n'avait fait que picorer avant celui-ci. Pourtant, elle connaissait fort bien les conséquences d'une dénutrition autant sur l'esprit que sur le corps.
Alors, plutôt que de lutter bêtement en ayant parfaitement conscience qu'elle se nuisait à elle-même, Aeryn se réinstalla à table, malgré son manque évident d'appétit.
-Je partirai à l'aube, dans ce cas... soupira-t-elle en prenant un morceau de pain. Hormis tout cela… Parle-moi un peu de toi. Il y a du nouveau te concernant ? lança-t-elle avec l'intention de se changer les idées en retrouvant un semblant de normalité.
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| | | AlaricGarde de Sombrebois
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Mar 29 Mar 2022 - 16:31 | | | — À ton niveau... répéta-t-il, un murmure à peine audible entre ses lèvres.
« À notre niveau, tout ce qu’on peut faire c’est continuer à vivre, aussi intensément qu’on le peut, et en prenant les joies où elles se trouvent, même temporaires.»
— Mais quel niveau veux-tu avoir ?
Une question étrange, Alaric le savait, mais il n'avait pas trouvé d'autres mots pour exprimer sa façon de penser. Lorsqu'Eïlyn lui avait tenu ces propos, il s'était posé la même question sans être certain de trouver une réponse convenable. Bien vite, il avait été partagé entre l'acceptation de son niveau – un ordinaire capitaine d'un bourg reculé qui n'avait aucune maîtrise sur son destin – et le niveau qu'il désirait atteindre. Il avait trouvé son idéal entre les bras et les intrigues d'Eve, dans la protection qu'il désirait lui apporter. Il s'était senti investi d'une mission, d'un but, avait retrouvé une force enfouie en lui, disparue auparavant sous les assauts de la tristesse et de la colère. Désormais, le capitaine de Sombrebois se sentait utile, important : il soulèverait des montagnes si c'était l'unique manière d'influencer sa destinée.
Aeryn était en proie au doute. Pas de ses visions à proprement parler, mais d'elle-même. Son caractère pragmatique la poussait à se remettre en question, non pas pour sa propre santé, mais pour les conséquences que cette dernière pourrait avoir sur ses proches. Malgré leur discussion, elle n'en démordait pas : elle craignait d'entraîner dans sa chute une flopée d'innocents. Comme Alaric l'avait supposé, elle aurait préféré qu'il s'en détache, plutôt que de la suivre dans cette prétendue folie. Mais le soldat ne pouvait pas : dernièrement, il avait assisté à trop d'événements mystérieux, avait observé trop de coïncidences pour ne pas croire une annonce sibylline de plus. Il pensa à soeur Isolde qui avait, elle aussi, ressenti les changements qui, lentement mais surement, traçaient leurs cours dans leurs petites vies. Le fruit du hasard, des Trois ou de quelques autres figures occultes, Alaric était incapable de le dire ; le saurait-il seulement un jour ? Sans doute pas. Mais il n'avait plus envie de subir sa vie. Il avait envie de la vivre... Aussi intensément qu'il le pouvait.
— On ne sait pas, répondit-il simplement, un pâle sourire sur les lèvres.
D'un autre côté, ne pouvait-il s'empêcher de penser, s'il savait déjà à l'avance ce qu'il adviendrait « de tout ça » la vie serait bien moins excitante. Aeryn n'a peut-être pas tort... Je suis fou. Il soupira et passa une main dans ses cheveux décoiffés.
— Quand les fangeux sont arrivés, raconta-t-il soudain, j'ai... J'ai tout perdu.
Son regard s'obscurcit, comme toujours lorsqu'il plongeait dans de vieux souvenirs. Au moins avait-il le mérite de ne plus s'y noyer.
— C'était un fameux changement, hein, les fangeux, ajouta-t-il comme s'ils pouvaient désormais en rire.
L'alcool aidait à détendre ses traits d'ordinaires crispés, à se confier à l'une de ses seules amies.
— Mais on est toujours là et... Cette fois... Cette fois je ne veux plus le subir. Je dois au moins essayer même si...
Il pensa aux nombreux dangers qu'il côtoyait, aux embûches qu'on lui avait promis. Aux créatures des marais et aux ennuis causés par la baronne, s'ajoutaient des conflits dont il ne connaissait presque rien, des jeux de puissants auquel il voulait participer, une relation intime aux allures d'impossible dont il se nourrissait à chaque seconde.
— Même si je dois mourir, finit-il par dire. Au moins, je n'aurai pas de regrets.
On décidait de ses premières fois, il n'en allait jamais de même pour les dernières. Le dernier sourire de sa mère, la dernière promenade en compagnie d'Ellaine... La dernière lettre d'Eve. Sa dernière beuverie avec Eïlyn.
— C'est peut-être la dernière fois qu'on se voit, Aeryn ! Alors tu peux bien rester jusqu'à l'aube.
Il lui offrit un sourire chaleureux avant de se rasseoir, rassuré par la réponse de la rouquine. D'un signe de main, il commanda deux nouvelles boissons, apposa ses avants-bras sur la table, ses yeux ancrés dans ceux de la mercenaire. Par où commencer ? Il rit en secouant la tête.
— Oh t'sais, depuis que je t'ai quittée à Balazuc, c'est un peu... compliqué. D'abord j'ai rencontré cette Odalie. Puis, quand j'suis rentré, la baronne était partie, la châtelaine avait quitté le bourg quelques jours plus tôt.
Il haussa les épaules. L'effet du breuvage commençait à se faire sentir sur l'emploi de ses mots et le ton plus insouciant qu'il employait, malgré la gravité de la situation.
— Ma seconde devait tout gérer. Alors à nous deux, on a dirigé le bourg. Rosen s'est calmée depuis qu'elle est rentée, mais j'ai toujours beaucoup de travail, entre le château et la milice.
Il se saisit de la nouvelle chope déposée bruyamment devant lui et en vida une longue rasade.
— Eïlyn est une femme brillante, il faudra que j'te la présente. J'crois que vous devriez vous entendre. Et puis, tu sais bien...
Hésitant, il marqua une petite pause. Les yeux baissés sur la table, il se prenait d'admiration pour les aspérités du bois et les vestiges d'anciennes chopes renversées qui sillonneraient le meuble pour toujours.
« Il vaut mieux que ni moi, ni d’autres n’aient conscience de son identité pour l’heure.»
Alaric se ravisa.
— Même si on a peur des conséquences... J'crois qu'il est bon d'être accompagné. |
| | | Aeryn MonclarMercenaire
| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric Mar 29 Mar 2022 - 20:39 | | | "Mais quel niveau veux-tu avoir ?"
Quelle question… Décidément, Alaric avait le don étrange de pousser Aeryn à la réflexion plutôt que dans ses retranchements. Celle-ci d'ailleurs, lui arracha un sourire tant la mercenaire fut surprise de l'entendre.
-Je ne peux répondre à cette question, Alaric… Quoi qu'il en soit, je ne suis que moi et je le resterai et ce, qu'importe ce que peut être ce fameux "niveau"... rétorqua-t-elle tandis que son sourire s'effaçait peu à peu.Comme toujours, je me contente d'avancer à mon propre rythme. Et j'estime qu'il y a un fossé entre ce que je veux devenir et ce que je deviendrai.
Et encore fallait-il vouloir devenir quelque chose ou quelqu'un. Aeryn n'avait jamais nourrit d'ambition particulière outre celle de survivre. Elle faisait tout pour cela d'ailleurs. En s'entourant de ses semblables parce qu'elle savait qu'il lui serait impossible d'espérer survivre en étant seule. En repoussant, chassant, tous ceux ou celles qui cherchaient à se rapprocher d'elle et qui pouvaient représenter un danger pour elle. La rouquine ne pouvait aucunement se permettre de flancher et préférait ne se mêler aux autres que très partiellement.
-Je me sens utile en tant que Lame, soupira-t-elle. Je trouvais cela plutôt suffisant, moi. Je n'aspirais d'ailleurs pas à plus que cela…
Pourquoi Marbrume l'avait contacté si ce n'est que pour respecter une promesse faite à sa mère ? "...une femme qui t’a porté m’a rendue service il y a des décennies de cela et je lui ai fait la promesse que si un danger tel que celui-ci se présentait à toi. Je t’apporterais mon aide." Quel genre de service sa mère aurait pu rendre à une ville ? Et puis… Qui était réellement Arianne Monclar ? Était-ce seulement son vrai prénom d'ailleurs ? D'après ce que Faren lui avait raconté, son père et elle avaient dû fuir lorsque la famille de sa mère s'était de nouveau manifestée à elle… Et si… Ce visage dans le masque de Marbrume était celui de sa tante, cette fameuse sœur qui fut autrefois si proche d'Arianne ? Et cette statue… Pouvait-elle représenter cette femme plutôt qu'Aeryn elle-même comme la mercenaire ébranlée avait pu le croire en l'apercevant. Comme elle regrettait de ne pas avoir été plus observatrice à ce moment-là. Comme elle regrettait de ne pas s'être montrée plus curieuse lors de cette conversation avec Faren. Quelque chose lui échappait et la rouquine détestait cela et pourtant, la mercenaire continuait d'éluder tout ce qui semblait être trop compliqué pour elle.
Ryn n'allait jamais au fond des choses… Simplement par peur de ce qu'elle pouvait découvrir en essayant. Alors comment ne pas douter d'elle-même quand, finalement, Aeryn ne se connaissait pas ? Et, dans ce cas, comment pouvait-elle seulement se faire confiance ? Impossible… Encore une fois, rien n'allait…
Alaric évoqua le dernier changement brutal subi par leur monde. La Fange, ce fléau qui changeait les hommes en monstres assoiffés de sang et de chair. Et le capitaine n'était pas le seul humain dans ce monde à avoir tout perdu. C'était même probablement le cas pour toutes les personnes présentes dans l'auberge ce jour-là… Hormis Ryn qui, grâce à ses pertes avaient, pu regagner une liberté et une identité depuis longtemps oubliées.
-Aussi tragique que fut son apparition, je ne serais pourtant pas là aujourd'hui sans elle… avoua-t-elle timidement, gardant sa tête baissée pour ne pas avoir à affronter le regard du capitaine.
"Ne pas subir le changement… Et comment faire autrement?"songea-t-elle en soupirant essayant de s'imaginer nager à contre-courant ou, plus particulièrement, se noyer en essayant.
Peut-être était-ce réellement la dernière fois qu'ils pourraient discuter ainsi, là, assis autour de quelques bières et d'une assiette de charcuterie. Au fond, peut-être était-ce même son dernier repas, sa dernière nuit… Alors oui, pourquoi ne pas rester un peu et continuer à discuter… De tout, de rien… Chercher un semblant de normalité dans un monde qui avait perdu la sienne. Reconnaître un ami au milieu d'une foule d'inconnus, d'une masse que la mercenaire voyait informe, indistincte.
Ainsi, tout en achevant sa nouvelle boisson, Aeryn prit grand soin d'écouter Alaric parler de son quotidien. Il avait des responsabilités, probablement trop, mais le capitaine semblait y tenir et s'en sortir malgré tout… Ce rôle lui convenait parfaitement et il aurait été bien stupide de la part de la rouquine de ne pas le voir, malgré la fatigue qui étirait les traits du capitaine. Sans doute n'avait-il pas pu revoir l'élue de son cœur. Cette personne à l'identité tenue secrète qui avait su opérer un certain changement chez lui.
"Même si on a peur des conséquences... J'crois qu'il est bon d'être accompagné."
- Qu'est-ce que tu veux dire par "être accompagné" ?lui demanda-t-elle le plus sérieusement du monde.
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| Sujet: Re: [Terminé] Confluence - Alaric | | | |
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