La féline et l'ours [Sydonnie d'Algrange]

L'innocence, voire la naïveté de Sydonnie lui faisait sourire, d'une car c'était une belle pensée de se dédier autant à lui, et de l'autre, car c'était probablement impossible. Elle pourrait très bien réussir à se hisser dans la hiérarchie de la milice, impressionner des hauts gradés, recevoir les faveurs du Duc, pourquoi pas. Mais se faire gracier, impossible. Sa marque ne s'en ira pas comme ça, même avec toute la volonté du Duc, et même s'il y avait une solution à la marque, le Duc ne le permettrait sûrement jamais. Déjà parce que ce qu'il avait commit n'était pas un simple vole, et parce que les gens lui tourneraient encore plus le dos. A l'extérieur de Marbrume, les bannis se font cracher dessus, tabassés, exilés encore plus loin que les murs de la cité. Les gens ont prit l'habitude de les traiter comme des bêtes, de les voir comme telles et ce n'est pas une décision du Duc qui changera les esprits, surtout ceux des petites gens. Naïve, mais douce pensée. Il ne lui répondit pas cependant, par peur de la froisser, de lui faire perdre tout espoir le concernant.

Pourtant, le ton de Sydonnie n'était pas celui des plus joyeux tout d'abord, peut-être avait-elle prit le temps de penser dans la nuit à leur situation, à la sienne. Et que tout ça lui avait fait perdre le moral dès le matin, même avec l'intention de Chris à la faire sourire. Heureusement, elle semblait changer d'humeur, presque du tout au tout, d'un instant à l'autre, le banni se croyait bien trop dans les vapes du matin pour comprendre pourquoi. Mais par le simple fait de la voir sourire, il n'avait pas besoin de savoir le pourquoi du comment.

La question qu'il avait posé auparavant avait finalement fait son chemin, elle semblait se laisser prendre au jeu, avouant ses envies et le provoquant, comme à ses habitudes. Chris récupéra la chemise qu'elle avait lancé, la plaçant sur son épaule, sans l'enfiler. Comme il semblerait que la vue ne la dérange pas, l'homme se contenta donc de déposer le tissu sur son épaule, lui laissant pleine liberté pour l'observer.

—«J'imagine que je la mettrais avant de sauter par la fenêtre. Dit-il, haussant les épaules en souriant légèrement. "Je crois" ?» Répéta t-il ensuite à la femme.

Le doute s'était placé dans son esprit, essayer quelque chose n'était pas quelque chose qu'il avait envisagé. Pourtant, Sydonnie piquait sa curiosité, il n'était pas certain de savoir comment interpréter son doute sur la non-tentative de Chris, encore moins le fait qu'elle déboutonne son habit. L'homme se retourna, lui affichant alors son dos, il revint s'asseoir sur le bord du lit, avant de se laisser tomber, dans la même position qu'eut Sydonnie il y a quelques secondes.

«Ou alors, je peux encore rester une partie de la journée, il serait peut-être plus intelligent que je reste jusqu'à la tombée de la nuit, plus simple pour ne pas être vu. Je sais me repérer dans les égouts, et où me reposer en attendant les premiers rayons de lumière.»

Les yeux fixant le plafond, il évitait la vue de Sydonnie qui semblait vouloir se changer. Dans cette position, ne pouvant la voir, il pouvait penser sans être perturbé à la vue de sa douce, qui, à chacun de ses mots tendres, le faisait fondre. Il ne savait pas réellement quoi répondre à ses sentiments, évidemment, il ressentait la même chose, mais pouvoir les contrôler et pire, les manier pour les expliquer. Impossible actuellement. Pourtant, il espérait que sa proposition, repousser son départ, allait être prit comme une réponse dans le sens de Sydonnie.

La conversation des deux amants n’avaient semble-t-ils pas porter leurs fruits vers un quelconque rapprochement physique. Offrant la désagréable impression à Sydonnie de ne pas être au goût de son cher et tendre banni. Elle n’avait pas pris la peine de répondre aux interrogations, gardant pour elle une part de mystère, essayé de conserver les interrogations qu’elle avait fait naître dans l’esprit de son homme interdit. La jeune femme s’était vêtue, évitant de montrer son corps marqué par d’innombrables cicatrices et anciennes marques de coups de fouet. Le couple avait ensuite abandonné la demeure de la mère d’Algrange pour profiter encore un peu de la ville, la jeune femme offrant une visite guidé presque parfaite de Marbrume, passant de ruelle en ruelle, de commerce en commerce, elle avait pris le temps d’expliquer la naissance de certain bâtiment, l’histoire des lieux, ou encore les derniers événements marquants qu’elle avait rencontrés ici. Le duo avait ensuite abandonné la visite, pour se rendre dans un établissement plus fréquentable, un établissement de jeu que Sydonnie connaissait depuis son enfance, la chope sucrée. Une taverne dont les gérants avaient une passion pour divers jeux, ainsi il n’était pas rare de voir le lieu offrir des compétitions, ou des animations toutes plus intéressantes les unes que les autres. Le binôme s’était vu offert plusieurs chopes d’alcools et un repas agréable sous le regard bienveillant de la gérante qui avait cherché à en savoir un peu plus sur le beau compagnon de Sydonnie. Les deux avaient de nouveau préservé le mystère et respectant cette volonté, la dame Contignon n’avait pas cherché plus loin, semblant visiblement ravie de voir la milicienne en ‘bonne compagnie’. Après plusieurs instants de rires, de taquineries et d’écoute vis-à-vis du ménestrel qui remplissait la taverne de sa divine voix, le couple avait fini par abandonner l’endroit pour fouler une nouvelle fois les pavés de la ville.

Difficile de ne pas voir la complicité qui unissait le duo, difficile pour Sydonnie de ne pas s’attacher davantage à chaque taquinerie, ou regard. La jeune femme avait tenté de le rassurer de bien des manières, de lui faire voir autre chose que son environnement à lui. Pas bien complexe de faire mieux que la vie en extérieur de la ville, pas difficile de le rassurer quand il y a un risque de fangeux moindre. Quoi qu’il en soit la dernière journée en sa compagnie était passée à une vitesse folle, ni l’un ni l’autre n’avait pu réellement la voir défiler et quand les lueurs de l’astre avaient enfin menacé de disparaître, c’est une légère boule au ventre qui était apparue dans le bas ventre de la milicienne. Les angoisses qu’elle avait habilement dissimulées derrière ses grands sourires et ses petites mesquineries venaient de ressurgir dans son esprit, accompagné par une montagne de « Et si ». Sydonnie ne les avait cependant nullement exprimés prenant le partie de vivre au jour, de savourer l’instant présent, si un jour tout ceci devait s’arrêter, alors il en serait ainsi, mais ce jour, la jeune femme en était certaine n’était pas prêt d’arriver.

Les adieux furent difficiles, même si par fierté les deux amants avaient tenté de ne montrer que le meilleur d’eux même se promettant de se revoir vite, le plus vite possible. Difficile pour eux d’imaginer la complexité qui les attendait. Un au revoir pouvait en cacher bien d’autres et c’est bien finalement chacun d’un côté que cette parenthèse venait de se terminer, nulle ne pouvait savoir ou tout ceci allait les mener.