Marbrume


-40%
Le deal à ne pas rater :
-40% sur le Pack Gaming Mario PDP Manette filaire + Casque filaire ...
29.99 € 49.99 €
Voir le deal

Partagez

 

 Malins & Caprins - Guillemette

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : 1, 2, 3  Suivant
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 12:20
4 Avril de l’an 1167
Plateau du Labret
Aux environs de Genevrey




Les doux jours étaient arrivés et pourtant, il n’avait fait que pleuvoir depuis le début du voyage.
Les Hardis Roukiers avaient laissé la cité de Marbrume dans leurs ombres alors que pointait le début du mois. Ils étaient partis l’âme légère, le pied dégourdie et le chibre vaillant, prêt à fendre la lande et les lieues, au devant de la Fange et des dangers qui se cachaient dans les futaies. Mais la première averse avait rapidement douché tout leurs espoirs, la seconde avait réussit à remplir de boue leurs caboches et la troisième, qui ne s’était toujours pas arrêté, avait joué le rôle de la hache du boureau. Autant dire que point personne n’était bien jouasse dans cette triste et belle assemblée qu’était les aguerris Roukiers. 

Plus aucuns Corbiens. Se répétaient Mederich quand il posait son regard torve sur la petite dizaine de larrons qui lui collaient le joufflu depuis qu’ils avaient passé les portes. Plus aucuns de ses anciens compagnons d’armes. Ils reconnaissaient à peine la trogne de ceux là, et pourtant, ils étaient partis les plus vaillant. Pour la plupart chevaliers natifs sans seigneurs, nobliaux d’épées étrangers, queuteras en quête de gloire à ses cotés ; mais aucuns n’avaient encore de réel prestance à ses yeux : ils étaient comme des mouches attirés par la belle merde que représentait la gloire et le pouvoir. 



Mais les temps n’étaient plus à faire la fine bouche. Le Comte de Corburg se devait de ratisser large s’il voulait gonfler les rangs amoindris de son ordre. Il lui fallait des manieurs d’aciers et des bons, c’était cela le plus important. 
En parlant d’acier, c’était exactement la raison de sa venue sur en pays du Labret. Il avait passé commande de casques à un fameux forgeron de la cité. Avec ces couvres-crânes, il souhaitait récompenser les plus vaillantes de ses recrues. Même si la dépense était astronomique en vue de ses finances actuel, Mederich souhaitant conserver un certain prestige. C’était dans l’apparence que la noblesse se démarquait de la gueusaille. Un point important.



Alors, pour être certain de la qualité du minerais qu’on expédierait dans la Cité. Le Comte souhaitait se rendre en personne à Salers, apprécier la cargaison et enfin, accompagner en retour le convoi. La route était longue, trop d’intermédiaires possible, trop de petites frappes prêtent à tout pour quelques sous. C’était aussi un bon moyen de juger de la qualité de ses ouailles ; vérifier qu’ils n’étaient pas qu’une bande de braque à sang-bleu ayant décidé de trouver une place au chaud dans un ordre qui n’aurait pour vocation qu’à en ajouter à leurs mérites par appartenance. Autant dire que le Vieux Rab était prêt à en faire baver plus d’un, ils n’étaient pas ici pour enfiler des cailloux.

La pluie avait rendue la plaine grasse. Genevrey n’était pas loin et il était temps de faire halte. Mederich ordonna qu’on investisse un vieille appentis mit à l’abandon par quelques métayers disparus. A l’intérieur, ils firent du feu, bouchonnèrent les chevaux et commencèrent à préparer de quoi ce rationner.

Tandis qu’il scrutait les flammes, sa flasque d’eau de vie en main, le Comte fut troublé par une forte agitation. Il put d’abord entendre le cri d’un enfant qu’on égorge, puis un grand fracas avant quelques rires, puis le silence.
Enfin, deux têtes se présentèrent dans l’entrebâillement e la porte. C’était des hommes à lui, d’on il avait oublié le nom. Le plus hardis s’avança, fier comme s’il venait de terrasser un dragon.



«  Monseygneur, voici quelques bonnes viandasses pour nos panses. Mirez donc, j’ai fais bonne trouvaille derrière la grange : un troupeau entier de cornues. Celle ci, point farouche, je l’ai estourbi moi même de ma lame, bien préparée cela fera met de choix point n’est-ce ? Et il y en a d’autres ! Une pour chacune s’il le faut ! » 



Mederich ne sut que répondre devant le cadavre ensanglanté de la chèvre qui répandait son sang partout sur le sol de terre battue. Sûr que cela ferait bombance. Mais cet imbécile avait-il vraiment besoin de lui présenter sa viande morte encore chaude sous le nez ? Il allait lui rétorquer quelques bonnes intentions quand, à la porte, un invité se présenta.






Dernière édition par Mederich de Corburg le Mar 8 Fév 2022 - 13:39, édité 1 fois
Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 13:04
Filasse, cette pluie. Je lui donne des airs de cheveux d'une finesse arachnéenne, à cette pluie d'avril, ruisselant comme des graviers contre ma mante détrempée.
Je n'aime pas la pluie, et les bêtes non plus. Je suis assise sur mes talons, tentant de m'incruster au plus profond d'un énorme tronc de saule, mes bras enroulés autour de mes jambes, ma capuche épaisse me gouttant sur le nez.
Derrière moi, la prairie morne, devant, les brebis, et au-delà, la prairie morne. Les nuages sont si bas qu'en s'essorant ils sèment de leurs longs tentacules gris, et on les voit se coller le mucus sur les faîtes pointus des résineux. Je me suis réfugiée là, parce que dans le tronc du saule, il y a comme une alcôve, creusée dessus l'écorce, et que j'ai le dos au sec. Mais le ciel continuera de baver ainsi jusqu'au soir, c'est bien certain.
Le bruit est un frottement de cheveux sur l'oreille, ou un roulement de minuscules sabots, par milliers, sur la paume des feuilles bleues, sur les têtes des grandes iris, et sur les tiges des jeunes herbes. J'enfonce mon front dans mes bras, et ferme les yeux. Je grelotte légèrement. Il sera bientôt temps de rentrer.

Un soudain bêlement moribond me jette sur mes talons. Capscha bondit et file comme une vipère, en contrebas sur ma droite. Le cri devient vite guttural, spasmodique. Un loup ! Je saisis mon bâton, sors mon coutelas de ma botte, et me précipite. Capscha revient à moi à la vitesse d'un grêlon et s'écrase sur mes genoux. Elle gémit, les crocs à peine dénudés. C'est pas un loup ? Je reprends ma course, une pointe furieuse naissant dans le creux du ventre.

Émergeant dans un petit bas de côte, un toit noir aussi irrégulier que si on en avait mangé des morceaux, griffe le ciel gluant de son arête luisante. J'ai à peine le temps de deviner deux corps sombres, troubles sous l'averse, en ouvrir la large porte, et sur le dos de l'un...

Un rugissement me déchire la gorge. Je rejette ma capuche en arrière en m'élançant à leur suite. Une flopée de jurons me dégueule de la bouche comme de grosses glaires. Je m'écrase de l'épaule contre la porte à peine rabattue en hurlant.

Une troupe de bandits, couverts de boue et de poils hirsutes, darde leurs yeux de poissons, humides et luisants, sur ma gueule distordue. Les mots me manquent tant ma fureur m'étrangle, et je fais saillir mon bras tout d'un bloc pour aller serrer la grosse boule de la gorge de celui qui tient ma chèvre sur l'épaule.

" Je te crèverai ordure ! "

Mes yeux me brulent tant ils voudraient saillir, et la colère commence à me faire sonner les oreilles. Je me souviens, suffocante, que j'ai mon coutelas dans ma main gauche. Tandis que je plante mes doigts plus profond dans la chair tendre de la gorge, une paume vient se fracasser sur mon nez, et ma tête bat en arrière comme une cloche. J'envoie à l'aveugle ma lame vers le haut, et un coup sec et brutal me la fait voler d'entre les doigts. Je n'ai pas lâché la gorge, et je sens deux grosses pattes s'arrimer à mon bras.
Un mince doigt de raison vient me glisser que j'ai probablement eu le cœur plus brave que le bon sens... Je grince un peu : Cap...scha, la tête tirée en arrière à me casser l'angle de la nuque.
Mais elle ne bondit pas. Je l'entends gueuler, et claquer de ses crocs, mais elle doit être restée au travers de la porte. Je ne vois rien de mon entourage, mais mon corps tordu gémit dans mon crâne en tintant.
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 14:13




Par les Saintes-Mamelles de Rikni, pesta le Comte pour son fort intérieur.


Voici donc qu’à la place d’un hôte bien séant venu chercher le couvert et le gîte auprès d’une bonne braise, débarque telle la tempête une furie à l’odeur aussi entêtante que celle de la chèvre qui vint de passer de vie à trépas. Mederich observe la scène tel une statue faite du marbre le plus résistant ; autrement dit, il ne bouge point, n’élève qu’à peine le sourcil, laisse vaquer à priori un ou deux souffles de sphinctèral non contrôlé, avant de s’envoyer une bonne rasade de son distillat de Tourbechai acquis à prix d’or. Non point que le spectacle ne lui déplaise, à dire vrai, il battre la lande en compagnie de ces faquins de coquins commençait sérieusement à l’ennuyer. Comment pouvaient-ils être tous, à ce point insipides ? Cherchant à ce dégoter faveurs à tout prix ; il en était convaincu, s’il avait fait passé le message que manger sa merde était notion de haut-fait, pour sur que certains d’entre eux auraient déjà quelques dents noircis et une haleine à faire recourir un fangeux. 
Cette surprise quasi nocturne devint donc, pour lui, un spectacle presque ravissant. A n’en point douter qu’il s’agissait la de la métayère à qui on avait prélevé un membre de son troupeau. Mais était ce possible de réagir ainsi pour un simple morceau de carne bêlant ? Manifestement oui. Le comte dut s’avouer que, pour avoirs des couilles, cette donzelle en portait une belle paire. Il doutait que la moitié de ses larrons n’aient put faire la même chose. Bien que, c’était folie de sauter à deux pieds dans une salle remplie d’hommes d’armes bardés d’acier et de lame pouvant vous ôtes la caboche ou vous percer le cuir.

La limite entre folie et bravoure était tout compte fait, bien mince.

Parmi les cris, les rires et les gueulades, c’est néanmoins une lutte pour la vie qui se joue.
La bergère farouche à réussit à faire couler le sang d’un chevalier soit disant aguerris ; le cabochard saigne de la gorge d’une blessure qui, aurait put le tuer si personne n’était intervenu. Personne étant actuellement incarné par le dénommé Côme de Broque, sûrement l’unique homme en qui Mederich placé un tant soit peu de confiance dans cette assemblée. C’était un ancien ferrailleur ayant vécut et survécut à moult affrontement, un homme qui avait à peut prêt son âge, avec qui il partageait à peut prêt les mêmes convictions, mais à qui la vie n’avait pas fait les mêmes cadeaux. Les Dieux avaient voulus qu’il soit Comte de Corburg, la ou le dénommé de Broque, n’était et ne serait à tout jamais, qu’un chevalier aux veines bleutées, sans terres, sans familles et presque sans sous. Qu’importe, tant qu’il tenait sa lame dans le bon sens.
Aujourd’hui, le Tueur de Chèvre lui en devait une, et une bonne.



A la porte, un cabot hurlait à la mort tandis qu’il observait sa maîtresse se faire légèrement rudoyer, mais surtout, maîtriser par le vieux chevalier. Les jappements du pisteur déclenchèrent bientôt l’ire des propres molosses de Mederich, trois gros limiers à truffes velues qui, bien que vieillissant, étaient toujours prompt à élever de la voix. Attachés à des longes, ils se mirent à tournoyer comme des petits démons, cherchant à mordre l’intrus poilus qui se tenait à la lisière des ombres. S’en fut trop pour Mederich.



«  Suffit. Assez ! Couche. Couche. » gronda t-il d’une voix ferme qui fit fermer leurs clapets à ses molosses. L’injonction n’eut pas grande effet sur l’autre cabot, mais on s’y entendait au moins un brin mieux maintenant. L’ordre eut aussi pour effet de faire fermer leurs grandes gueules à certains des chevaliers, toujours hilares. Mederich crut même en voir un, commenter à se coucher, se croyant viser par l’ordre. Imbécile.


Signant en direction de Côme, l’intéressé compris d’instinct et conduit la jeune femme aux côtés du Comte. Elle était toujours sous bonne garde, mais le Vieux Rab ne souhaitait pas qu’on puisse dire qu’il fusse mauvais avec la populace. Alors, même s’il exécrait devoir être bons avec la gueusaille, il n’avait plus le choix.



«  Calme toi vilaine. Calme. Et calme donc ton corniaud ou il finira par le fer. Bien, maintenant, nous voici face à un dilemme. Tu as fais coulé le sang d’un homme, te rends tu à l’évidence ? Ce dernier pourrais t’occire sur le champ et laissé ton corps à la merci des corbeaux sans que cela n’ai d’importance à mes yeux. Mais, nous t’avons manifestement causé un tord que tu as souhaité régler, à ta manière et avec courage. Qualité rare chez les gens de ta condition. C’est cet acte qui te permets, de respirer et d’éviter que j’ordonne à mes hommes qu’ils ne te labourent comme un champ de blé. Es-tu donc prête à accepter que nous discutions de ta réparation ? Nous avons la soirée. Et cela tombe bien, il y a de la chèvre à manger. »




Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 15:01
J'ai lâché le cou. Je m'en rends compte tard, parce que ma tête est toujours tenue par une paume épaisse comme du noyer collée à mon menton, poussant en arrière. Le bras qui s'était agrippé au tueur est emmanché comme dans du fer, qui le tire vers l'avant. Je vois, à l'envers, un bout de ciel morveux et le haut du chambranle. Et des étoiles commencent à danser en voile goguenard devant mes cils. Je pourrais pleurer tant ma nuque hurle d'agonie.
Je sens que ça s'agite, j'entends tonner, gronder, ricaner à gros gargouillis. Ma gorge gémit toute seule, mes gencives souffrent de la pression de mes dents. Je voudrais bouger mes jambes, mais jusqu'au bassin, je suis raide comme une souche foudroyée.

Brutalement, mon menton est libéré. Incapable de rebasculer ma tête, je me la saisis par les cheveux et grince de douleur en la redressant. Mais il faut voir. De toute urgence. Mon bras n'a pas été relâché, et une mâchoire de métal comprime mon épaule. Je me vois comme mes agnelets quand je les enfourche sur ma nuque : aussi frêle et inutile. Une mouche dans une patte de lynx. La peur commence à buller son petit rire immonde dans mes viscères. Quand mes yeux cessent de tourner tous seuls, ils se heurtent lourdement à une face dont les traits semblent avoir fondu puis durci. Je sens avec horreur mes yeux se dilater et mes genoux se vider brutalement. Mais je suis toujours tenue. Je ne tombe pas.

" Calme toi vilaine. Calme. Et calme donc ton corniaud ou il finira par le fer. "

La voix croasse et grince comme une vieille porte de grange. Capscha, ânonné-je sans souffle, sans voix, les yeux encore ronds, béats, pendus à ce visage qui me toise et me méprise. Je crois que ma lèvre tremble. Je parviens à lever une main, et claquer de mes doigts. Je ne sais même pas si la chienne m'a vue.

" Bien, maintenant, nous voici face à un dilemme. Tu as fais coulé le sang d’un homme, te rends tu as l’évidence ? Ce dernier pourrais t’occire sur le champ et laissé ton corps à la merci des corbeaux sans que cela n’ai d’importance à mes yeux. Mais, nous t’avons manifestement causé un tord que tu as souhaité régler, à ta manière et avec courage. Qualité rare chez les gens de ta condition. C’est cet acte qui te permets, de respirer et d’éviter que j’ordonne à mes hommes qu’ils ne te labourent comme un champ de blé. Es-tu donc prête à accepter que nous discutions de ta réparation ? Nous avons la soirée. Et cela tombe bien, il y a de la chèvre à manger. "

Plus son discours avance, plus s'échauffe, juste à côté de la peur, une espèce de ressac bilieux. Il croît, se gonfle, monte à mes joues, et enfin éclot sous mon crâne. L'humiliation. Je sens frotter sa langue rugueuse contre ma gorge et l'enflammer, je la sens contracter mes épaules et saillir sur mon cou. Mon menton tremble toujours, mes yeux demeurent hébétés comme deux lunes mouillées, mais ce souffle voudrait me rugir par les babines, laisser voir les crocs, hérisser l'échine. Je veux me dégager les bras de la poigne du soudard. Je sursaute des épaules, en gestes brefs, et me décale d'un pas. Je me sens remettre de mon âme dans mes membres. Ma nuque me cuit encore. Je baisse le menton, le front en avant, et ne le regarde plus que d'en dessous de mes sourcils. Ma bouche entr'ouverte laisse à mon halètement le temps de retrouver son calme. Mais la fureur me contraint. Je me sens bête acculée, et mes souvenirs sur le plateau, en solitaire, fuyant les "choses" de jour comme de nuit, résonnent à mes oreilles en susurrements écœurants.
Je ne peux pas réfléchir. Je fais glisser mon regard qui se voudrait d'acier sur la compagnie qui nous regarde. Des clébards hilares, leurs gueules en fosses sombres, les yeux qui me dévorent d'une goguenardise insupportable.

Capscha gémit près de la porte. Elle s'était donc calmée. Je remonte ma face pour l'afficher à plat à l'homme qui me surplombe. Son air suinte le vice et l'arrogance. Le pli de ses lèvres est blanchâtre de vieille salive. Ses petits yeux sont porcins, noirs comme des billes, pointus et brutaux.

" Es-tu donc prête à accepter que nous discutions de ta réparation ? Nous avons la soirée. Et cela tombe bien, il y a de la chèvre à manger."

Sa dernière phrase me revient. Je serre les poings que je tiens raides le long de mes cuisses. L'impuissance est bien la pire des humiliations. Je siffle :

" Réparation ? "

Je n'ai aucune proposition à faire. Je ne voulais pas perdre ma chèvre. C'est bien tout. Elle m'a fait deux gros mâles cette année. Quand elle les appelait, ça m'évoquait les chatons des noyers, au plein chaud de l'été. Elle faisait comme des grelots, et ses deux énormes jumeaux lui soulevaient les reins en se jetant aux tétines. Son nez délicat me surprenait régulièrement à se glisser dans ma paume, dans mon dos, quand je songeais en respirant vers l'horizon. Réparation... Laissez-moi sortir de là, c'est tout ce qui me vient... Je creuse ma cervelle, l’œil, toujours noir de nuit, racle le sol et le bas des murs. Outils, armes, bêtes, tout y passe, rien ne reste. Alors je tends la main, brusque du geste, du menton, de la voix :

" Payez-la. "

Le tout pour le tout. Je veux sortir d'ici, fissa.
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 17:43




« Combien ? » Croassa le Comte comme le Vieux Rab qu’il était.



Autours de la cocasse assemblée, les Roukiers se remettaient à l’ouvrage, à peut prêt comme si rien ne s’était passé. Parmi les vainqueurs de la soirée, l’Estourbeur de Chèvre était entrain de panser ses blessures et scrutait, d’un oeil torve, la jeune femme. On pouvait clairement lire dans ses mires béates d’enfant gâté d’une trentaine passé, qu’il souhaitait avec l’avidité d’un feu de forêt, prendre sa revanche sur la jeune branche qui soupait presque en compagnie du Comte de Corburg. Cet homme était un imbécile, et il n’existait pas pis imbécile que ceux ayant le sang-bleu, car ces fieffés la, pensait forcément qu’ils étaient au dessus du lot. Dans un sens, ils avaient bien raison, mais ils oubliaient trop souvent que du même rang, d’autres, nombreux, avaient de quoi leur fourrer du fer dans l’oignon. Cet homme qui ne portait toujours pas de nom au yeux de Mederich, serait sans conteste un rival à la paysanne, capable du pire, prêt à tirer du surin dans un coin sombre quand tout les regards se porteront ailleurs. Un imbécile, et un lâche qui plus est.
Si Mederich avait été à sa place, il aurait fait amende honorable. Si un gratte-terre avait réussit à lui faire couler le vermeille sur tabard, pour sûr qu’il l’aurait tranché du haut en bas sans demander son reste ; supérieur hiérarchique ou non. Dans un certains sens, c’était presque ce qu’il avait attendu du jeune homme, il l’aurait sans douter surpris, et en bien.
Mais le bougre ronger son gland dans son coin, trop occupé à savoir si sa glotte ne pendait pas mollement jusqu’à ses couilles.

Son compère de bataille, le dénommé Porteur de Cadavre, était aussi le maître queue de la soirée. Le bon au visage hideux avait terminé de retirer les abats et les viscères. Il s’occupait maintenant de préparer la viande pour un gueuleton de Roy - ou presque. Ca ne restait en réalité qu’une vieille chèvre à peine assez grâce pour caler la bidoche d’un bon mangeurs et ils étaient une dizaine. Pas de quoi en sortir un fromage du cul d’un ours à vrai dire. Mais l’intéressé prenait néanmoins soins de préparer sa cuisine comme s’il se trouvait en compagnie de Sigfroid le Grand lui même. Encore un qui cherchait à en imposer par un talent qui lui serait complètement inutile une fois la Fange venue. Ou s’imaginait-il entrain de partager quelques bonnes recettes avec un non-mort ? Pensait-il faire diversion ? Pis, croyait-il pouvait en tuer un d’ennui ? 
Sans point douter. Corbiens, que vous me manquez. Pensa fugacement le Comte.



« Oui combien ? Il me semble vous autres bouseux accordiez une valeur élevé à vos têtes de bétails. Ne cherche pas à me truander la gueuse, car je suis au fait des prix du marché. Aussi serais-je généreux, mais point trop. Il ne sera pas dit chez les cul-terreux que Mederich de Corburg à dépensé plus qu’il n’en fallait pour une vieille carne à peine bonne à donner du lait. Soit juste et je le serais. Il se peut même que nous faisions affaire ce soir, mes hommes on faim et il te reste, manifestement, d’autres biquets dans la plaine. »



Mederich ne regardait qu’à peine la jeune femme, préférant siffloter sa flasque tranquillement, conscient de son rang. Dans l’air, s’élevait les premiers relents de viande grillée. Une odeur de chèvre pour sûr, mais qui bien cuite, ferait plaisir aux papilles.





Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 8 Fév 2022 - 20:35
" Combien ? "

Je sursaute. Le gras de la voix est venu s'empâter sur ses lèvres qui clapotent avec une brusquerie de fouet. J'ai baissé les yeux, je ne vois plus que le sol, irrégulier, semé de traces de bottes boueuses. Je me sens très sale tout d'un coup. Visqueuse. Je veux sortir de là. Mais... Mes élans de fuite me font bondir d'indignation, la raison surenchérit alors de la dangerosité du lieu, du bonhomme, des sbires. Je bous, tourne en rond, sens que la panique point son groin sale entre mes côtes. Je déteste ces hommes, je sens le fiel se faire liquide comme de la lave, et sillonner mes muscles jusqu'à les intoxiquer. Une haine fluide, si glaciale qu'elle me brûle du dedans. J'ai serré mes poings si fort que je me plante les doigts dans les paumes, que mes mains vrombissent, que les ailettes de mes narines battent la cadence de mon souffle qui se raccourcit. Je bute à tous mes murs. Fuir, rugir, rager, déchirer, terrifiée, s'échapper, disparaître.

« Oui combien ? Il me semble vous autres bouseux accordiez une valeur élevé à vos têtes de bétails. Ne cherche pas à me truander la gueuse, car je suis au fait des prix du marché. Aussi serais-je généreux, mais point trop. Il ne sera pas dit chez les cul-terreux que Mederich de Corburg à dépensé plus qu’il n’en fallait pour une vieille carne à peine bonne à donner du lait. Soit juste et je le serais. Il se peut même que nous faisions affaire ce soir, mes hommes on faim et il te reste, manifestement, d’autres biquets dans la plaine. »

Ah... Je suffoque un peu moins serré. Anûr-Mère, j'ai quand même plus seize ans ! Je pousse les engrenages de la réflexion. Fort, plus fort, parce qu'ils se sont sacrément grippés à la violence de mes déchirements. Faire des affaires... D'autres biquets... Dame ! Ils en veulent d'autres hein... Je pose mon coude dans une de mes mains, contre mon sein, et appuie mes doigts sur mon front. Je souffle discrètement, verrouille patiemment chaque angle de visage et jusqu'à la moindre lumière dans mes yeux. Je m'imbibe de mon mépris par touches de plus en plus fines, subtiles. Jusqu'à ce que se glisse un petit serpent de sourire sous ma pommette gauche. Le sourire qui n'a pas d'espoir, de choix, et qui choisit le front à l'abandon.

C'est lui, le porc, qui m'en sort d'ailleurs. Il me hisse hors de mon angle avec ses "affaires" là. Je garde ma tenue, et compte mes agneaux. Je les compte eux, sans lever la tête, du coin de l'oreille surtout. Neuf. Neuf je crois. Il leur en faudra bien deux de plus, s'ils sont gras comme il faut.

Je me retiens de m'autoriser une inspiration de courage, et me limite à relever le front avec lenteur, sur juste quelques pouces. Je le regarde toujours d'en dessous, et sa laideur d'âme, son orgueil, sa vindicative et suffisante nature le déforme plus encore. Je le hais avec la brusquerie d'un feu d'incinération, d'un bras de foudre qui abat un tronc en l'ouvrant comme une poire. Mais j'ai recomposé mon visage. Mon front est lisse, tendu, mes lèvres pincées, mes paupières figées.

" J'ai. Pour deux agneaux gras de plus, et pour le vol de ma naisseuse, ça fera 4 écus. "

Je ne peux retenir une pointe de fureur mêlée d'angoisse de tordre un peu le haut de ma lèvre. Je me dis que je devrais demander plus. Que je ne peux pas revenir sur mes mots maintenant. Que j'espère qu'il ne me frappera pas. Que je veux me tirer de là. Mais encore égorger les deux crétins qui m'ont volé une bête sous mes yeux. Impuissance maudite, maudite !
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMer 9 Fév 2022 - 13:42




Les relents augmentaient et on s’indignait dans la belle bande. Pendant que commençaient à roussir sur un feu sans fumerolles, les cuissots dépiautés d’une bêlante à qui le destin à réservé de l’acier, des vivats s’élevaient des gorges des plus hardis, réclamant de quoi s’amuser. Beau spectacle à quoi s’adonnait ainsi les bretteurs aux parties grattantes et à la langue toujours pendante. Ces coquins n’avaient même pas la descente de laisser Mederich faire le premier pas, le prenez t-il pour autre chose qu’un mâle alpha ? Ces faquins n’étaient pour la plupart, que des pisse-merde à belle étendard, rien de bien valeureux qui n’avait sans point douter, jamais rencontrer de fangeux. Alors, quand ils se mirent à brailler comme des gorets, clamant à la haute qu’ils feraient bien de la ribaude leur déjeuné, s’en fut beaucoup pour le Vieux Rab, qui trouvait que la jeune génération n’avait réellement rien conservé de bon en elle. Devaient-ils réellement être plus bas que lie, l’apocalypse du monde ancien ayant frappé à là porte ? Etait-ce réellement une bonne raison ? Pour sûr que non.



Se relevant aussi sec qu’une trique, aussi imposant qu’un créant, aussi grinçant qu’un gond à qui il aurait manqué plus que de l’huile pour frémir, Mederich de Corburg affichait la tête noir, la mine sombre des soirées à qui le contrôle échappait.



«  Veuillez fermer vos clappes à purin Messieurs et fermez les fort. Le premier qui fera encore une seule remarque sur la virginité de notre hôte, je lui collerais moi même ma dague dans l’oignon histoire de lui faire passer l’envi fissa de se servir. Je suis convaincu que certains apprécieront par dieux. Maintenant silence. Mangez. »



Les quelques rires gras se turent pour se transformer en borborygmes inaudibles. Ils étaient pour la plupart des imbéciles, mais au moins savaient-ils obéir quand un ordre était donné. C’était un minimum, ou sinon rien ne les différenciés d’un simple coutilier. 
Toujours sombre, mais plus jouasse, il se déconcentra sur la jeune femme après s’être caler le séant sur un coussin de tissu malmené par les âges et les voyages.



«  Ton prix est acceptable la donze. Tu recevras ta somme et un écu de plus pour le dérangement. Mais d’abord, cherche tes agneaux, je ne paierais rien que je n’ai pas vu de mes yeux. En suite, présente toi, car tu passeras la soirée avec moi. Tu dois être du coin, et j’ai besoin de me mettre aux nouvelles. Quels rumeurs dans le Labret ces temps ? »





Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMer 9 Fév 2022 - 18:41
Le fracas des voix grasses, tonnantes, sadiques rebondit comme des rocs contre les planches de bois de la grange. La pluie dehors n'a pas cessé, et elle chuinte son sanglot las par la porte ouverte, dans laquelle Capscha, tremblante, est toujours à l'arrêt. Je sens monter la menace. Rester est une perspective qui me met de plus en plus en alarmes. Après la fureur, qui tombe sans se presser, l'angoisse se déploie. Je regarde les soudards, tous plus sales et hilares les uns que les autres, et mon ventre se serre. Il y a là, en tas, comme des vêtements souillés, un bon gros morceau de ce que je peux haïr chez les hommes. Très furtivement, la silhouette lourde et tranquille de mon défunt mari se glisse contre ma poitrine. Je déglutis. Je baisse vite à nouveau la tête, parce que je ne sais plus que faire de moi. Le danger est oppressant. Leurs allusions me heurtent comme des vagues, et bien qu'attendues, elles me gèlent les os.

« Veuillez fermer vos clappes à purin Messieurs et fermez les fort. Le premier qui fera encore une seule remarque sur la virginité de notre hôte, je lui collerais moi même ma dague dans l’oignon histoire de lui faire passer l’envi fissa de se servir. Je suis convaincu que certains apprécieront par dieux. Maintenant silence. Mangez. »

Quand il se met à mugir, l'éraillé de sa gorge fait trembler la peau flasque de ses pommettes. Toujours traitée comme un sac de sable, il m'extrait tout de même un peu de leur vicissitudes. Enfin, jusqu'à ce qu'il change d'avis.
Et c'est là que mon cerveau se remet à tourner. Il a bien dit : Mederich De Corburg, tout à l'heure. Un noble. Et la piétaille est à ses ordres comme des rats suivent le corbillard... Il se vautre par terre, dos au mur, et me toise. Sa voix grave sonne quand il me dit :

« Ton prix est acceptable la donze. Tu recevras ta somme et un écu de plus pour le dérangement. Mais d’abord, cherche tes agneaux, je ne paierais rien que je n’ai pas vu de mes yeux. En suite, présente toi, car tu passeras la soirée avec moi. Tu dois être du coin, et j’ai besoin de me mettre aux nouvelles. Quels rumeurs dans le Labret ces temps ? »


Je reste saisie un instant, puis me tourne vers la porte, après un bref mouvement de menton. Dehors. Laissez-moi sortir. Je fouille le sol et repère mon coutelas, juste à la lisière de leur cercle. Je me penche en passant à côté, et le fourre dans ma botte aussitôt saisi. J'entraîne Capscha d'un bout du doigt sur sa tête inquiète, ignorant avec une sainte horreur les quolibets qui me percent le sein et le dos.

La lie des hommes ! La lie !
Je prends l'air gluant de cette filasse de pluie en plein la face. La porte derrière moi est refermée, et un gros rouleau de soulagement broie mes articulations. Dehors. Enfin. Je ferme les yeux.
Je ne réfléchis pas longtemps. C'est un noble. Je n'ai pas le choix. Le troupeau s'est tenu sage, aux alentours immédiats de la bergerie. Attraper les condamnés ne sera pas chose aisée...
Je m'accroupis dans l'herbe, me trempant un peu plus les cuisses, à quelque distance de l'antre souillée et bourdonnante, et laisse venir. Il me faut mon temps de recomposition, à moi aussi. L'humiliation cuit encore ma cervelle, mais j'ai baissé les armes. Les chèvres viennent les premières, protester contre la pluie de leur nez délicat. Les brebis restent à distance de deux longueurs bras au plus proche. Capscha les cercle lentement, et resserre leur rang. Après des minutes qui me soulagent et m'imbibent de pluie comme une grenouille, je me redresse lentement et cherche dans le gris des laines mouillées mes deux jeunes. Je leur filerai le boiteux. Et le gros à houppette. Je vais l'attraper en premier celui-là d'ailleurs. Je repère sa mère à sa queue plus longue que les autres. Il est collé à son flanc, la tête sous la mer de nuage. Elles se sont toutes pressées comme ça, pour protéger de l'eau leurs yeux et leurs fronts. Les chèvres s'ébrouent devant mes jambes.

Je m'approche lentement, l'air ailleurs, pose les doigts sur les dos de laine, et brusquement, me saisis d'une patte arrière de mon petit bonhomme. Il braille d'affolement à grosse gorge. Très vite, je passe mes jambes de part et d'autre de son dos, attrape les deux pattes de devant, et le bascule sur le cul. Voilà. Il se tait, là. J'attends que les secousses dans le troupeau se calme. C'est rapide. Je le remets d'aplomb, toujours entre mes jambes, et le guide avec difficulté vers la porte de la grange. Je signale à Capscha de faire suivre le reste du troupeau. Le petit lutte, puis file en avant, lutte encore, cherche à se retourner, bêle un peu à sa mère. Je tiens bon. Il est loin d'être si petit que ça. J'en ai un du même acabit, que j'ai choisi pour en faire un bélier, mais celui-là était juste derrière dans la course. Qu'importe.

J'arrête les bêtes à dix pas de l'entrée, et signale à la chienne de les garder ici immobiles. Mon troupeau n'est pas bien gros, une trentaine de têtes adultes tout au plus. Deux agneaux et une chèvre de moins, ça fait un trou. En général, je ne les vends qu'au compte goutte. Deux par deux tout au plus, mais après mûre réflexion. Je n'ai pas de quoi me permettre de manquer, plus tard. Je préfère garder mes écus bien vifs, sur pattes. Je vends la laine une fois par an aussi. Je me souviens quand je devais tailler au couteau les balles de poils collants des brebis, pendant la fange. L'an dernier, je les ai tondues pour la première fois, avec de vraies cisailles, à Najac, prêtées pour l'après-midi par un berger de là-bas. Il m'a pris ma laine dans la foulée.

Je remets mon agneau sur le cul, penché en arrière contre mes cuisses, puis prends une grosse inspiration, et gueule :

Hé là ! J'ai l'agneau !

J'hésite à ajouter un "messire", mais me mords la langue.
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyJeu 10 Fév 2022 - 8:35




La bergère peu causante s’en était allé sans grands mots, droit direction l’extérieur à la recherche de proies qu’elle n’avait pas vraiment eut envie de chasser. Mederich la regarda s’éloigner en arquant un sourcil broussailleux, car, dans la démarche de la donze, il pouvait décrypter une résignation pragmatique qui lui donnait à réfléchir sur la condition même de l’être humain aujourd’hui. Alors que derrière les hautes murailles de la Marre de Brume, les badauds transpiraient d’effrois à la seule pensée d’une paluche mise à l’extérieur, cette jeune femme qui n’avait connut que la violence du monde du dehors, n’avait même pas hésiter à quitter son abris. Au contraire, elle avait même semblé soulager de s’extirper, l’espace d’un instant, aux oeillades de ses hommes.
L’existence pouvait être bien différentes en fonction des armes que vous donnez les dieux. Par sa simple façon de vivre, cette éleveuse de chèvre à l’odeur musqué, en avait plus dans les braies que nombreux autres fanfarons se targuant d’être les défenseurs de l’humanité. Si elle avait été de noble lignée, il lui aurait fait une offre. Quoique cette option n’était pas totalement mise de coté.

Tandis qu’elle s’affairait au dehors, Côme de Broque vint prendre place à ses cotés. Il affichait la mine triste habituel. Cet homme avait toujours l’air au bord des larmes, la lippe basse, les traits fondant, l’oeil perdu. Bien que Mederich sache qu’il n’en était rien, que cette façade cachait un tueur chevronné, le faciès de ce compagnon lui faisait toujours le même effet.

« Nous devrions la tuer Monseygneur. » Annonça t-il après un instant long, de silence.

« Nous devrions. » Admis Mederich sur le même ton froid.

« Elle se targuera d’avoir presque mit à mort un chevalier en armure. La lande sera parcourue de rumeurs à notre sujet. De mauvaises rumeurs. »

« Pour sûr. » 

« Dois je m’en occuper ? »

« Non. »

« Mais les rumeurs Monsey… »

« Ton engagement m’honore chevalier de Broque, mais nous ne verserons pas le sang d’une innocente ce soir. Que les bouseux parlent. Leur existence est courte, ils n’ont que ça à faire. »

« A vos ordres. » Marmonna Côme avant de s’enfermer dans un nouveau mutisme.



L’instant qui suivit vit les chevaliers des Hardis Roukiers se servirent en chèvre cuite. On apporta le meilleur morceau à Mederich et le Comte prit un instant certain pour vérifier qu’aucuns de ces fils de truies n’avaient craché dans sa gamelle. Il n’y distingua rien et ce mit alors à manger. C’est une fois le menton dégoulinant de graisse caprine qu’a la porte, la voix fluette mais puissante de la donzelle se fit entendre.

Deux hommes se portèrent à sa rencontre et lui débarassèrent de ses agneaux avant de lui faire signe de s’approcher du feu de camp comtal. Elle était manifestement attendue à son ancien poste, en compagnie de Mederich et de Côme. Quand il la vit approcher, elle semblait pareil à une louve, prête à mordre et à déguerpir en cas de danger. Sans un mot, Mederich lui posa cinq écus sur un morceau de moellon, la somme convenue.

« Bien, nous avons fait affaire. Maintenant assis toi et mange. Il serait impoli de refuser, comme il est tout à fait aussi impoli de ne pas se présenter à son hôte. Ne t’as t’on rien appris à Genevrey ? Ou viens tu d’Usson ou de Najac ? Allons, nous n’allons pas te manger. »



Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyJeu 10 Fév 2022 - 19:03
Je ramasse les écus, et les glisse dans ma besace. Les brebis attendront. Je n'ai vraiment pas le choix. Je le regarde tandis qu'il m'ordonne de me joindre à lui. Ma nuque me cuit tant je suis persuadée que ses soudards me dévêtent sans vergogne de derrière. Je m'assieds de très mauvaise grâce, sur mes genoux repliés, encore aux aguets, prête à bondir sur mes pieds au moindre sursaut malséant. J'ai déjà, en esprit, ouvert la porte, et me suis faufilée en anguille en la claquant derrière moi. Si je joue sur la fuite, je courrais sûrement plus habilement qu'eux dans ce terrain clapoteux, traître et glissant. Si j'atteins les bois, j'ai déjà en tête lesquels de mes arbres seraient les plus immédiats refuges.

Un homme au visage de chien me tend, en pointe de son couteau, un morceau de viande arraché au flanc de ma chèvre. Sans mot, sans visage, je sors ma lame et lui prends la viande. Le jus gicle un peu, du sang chaud suinte, mais l'odeur est forte et séduit mes gencives.

" On me dit la Mouette... monseigneur... (ce dernier mot ne sort qu'avec réticence, ma tête toujours baissée sur mes genoux trempés où goutte la viande). Je suis à Genevray, depuis la reconquête. "

Je détourne un peu la face et commence à questionner ma dureté de caboche. Si je ne baisse pas ma fierté plus bas que ça, je finirai plus mal (peut-être même de beaucoup) que je ne suis lotie à l'heure actuelle. Je ne lui accorde aucune qualité d'homme, et me refuse net à lui trouver quelconque noblesse. Mais il semble me voir sous heureux auspice, si tant est que son souverain mépris et son attitude propriétaire soient mis à part. Je dois lui reconnaître un désir orgueilleux de justesse, même si dépréciative. Je montre clairement l’inspire que j'use pour me gonfler les épaules et relève les yeux vers lui.

" Je crains de ne pas pouvoir vous être de compagnie intéressante. Je n'écoute que les merles et les mouettes. Les brebis ne parlent pas, et si les chèvres me font la conversation, ça se résume toujours à de l'eau, de la mangeaille, ou un abri... " Un temps. " Quand je le peux, j'évite les autres gens, de Genevray ou d'ailleurs. " Je glisse un regard coulé à la compagnie vorace qui me hérisse toujours autant le poil. La chaleur commence de devenir suffocante. Ils ont écorché les deux agneaux, et l'un des bonshommes porte à pleins bras l'énorme panse et autres tripailles fraîches qu'il s'en va jeter dehors. Je me garde de sourire, mais je pense : Capscha sera exemptée de chasse ce soir.
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyVen 11 Fév 2022 - 8:25




Un long moment, Mederich dévisagea la frêlette qui mangeailleait à ses cotés. Un moment durant lequel il mastiqua avec quelques difficultés la viande de chèvre qui, trop cuite, ressemblait à une véritable semelle sous la dent. Habitué à des mets plus délicat, il était pourtant loin d’être un fin gourmet et se satisfaisait en généralement de peu, mais dans le cas présent, la carne mettait à mal sa mâchoire de vieillard. On aurait dit que l’animal mort prenait une dernière revanche sur la vie et sur ses meurtriers ; le Vieux Rab n’aurait pas été surpris de voir un de ces ferrailleurs de bas-étages qui le suivait, finir la gueule ouverte, sans le souffle, terrassé par un morceau mal fagoté dans le glissoir. Les dieux étaient souvent retords et s’amusaient généralement des malheurs des mortels. Les choses les plus improbables tendaient à devenir probable des lors qu’on pensait qu’elles ne le seraient jamais. Autant dire, de quoi vous retournez la caboche en permanence si l’on faisait un brin attention à toutes les saloperies qui pouvaient se mettre en travers de votre route au cours d’une existence. 
Corburg était tombé, Mederich ne pourrait plus jamais subir pis malheur que celui ci.



«  La mouette. » Finit-il par dire, un brin amusé, bien que rien dans son timbre ne l’annonce. Mais il trouvait curieux qu’une enfant de la boue porte elle aussi le surnom d’un oiseau. Ainsi, le corbeau et la mouette dînait aujourd’hui autour de la même flamme ; à n’en point douter que quelques ménestrels bien inspirés trouveraient aisément quelques rimes et autres jolies phrasés pour en créer musique et chansons.
Hors la réalité était loin d’être fantasque : Dans le mince abris, sous le ciel gris menaçant, alors que la nuit était tombée, l’ambiance était à la graille et on y sentait la chèvre morte et la merde. Pas de quoi en chier tout un poème, pour sûr.



« Tu as l’air aussi farouche que l’est ta lice, si tu te comportes ainsi avec tous, j’imagine fort facilement qu’ils soient peu nombreux à réclamer ta compagnie sur le Labret, Mouette. » Grinça t-il, soulevant un rire gras de de Broque. « Néanmoins, c’est cette même bravacherie qui me pousse à t’accorder un peu d’importance. Nous nous rendons à Salers. Serais tu disposé à nous servir d’ouvreuse ? Mes hommes ne sont, pour la grande majorité, jamais sortis des murs de Marbrume, ils savent suivre une route, mais la lande, c’est autre chose. Si tu nous conduis à la ville minière par les courts chemins et nous fait gagner du temps, je te récompenserai. C’est une proposition pas une sommation. »



Bien que, dit entre ses lippes, cela ressemblait grandement à un ordre qu’elle ne devrait pas refuser. De Broque sera sa main ganté sur le pommeau de son épée, il n’avait vraisemblablement pas perdu tout espoir de la sortir ce soir. Dans la salle, les hommes mangeaient sans abuser de l’alcool et en s’étant totalement désintéressé de la jeune donzelle. Prêt du feu, les trois cabots de Mederich agitaient les oreilles, scrutant les ténèbres au delà de la porte.





Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptySam 12 Fév 2022 - 18:21
Le danger frappe de ses petites ailes à mes oreilles comme une mouche. La proposition n'en est pas plus une que ses injonctions précédentes, et se frotter à ces hommes dangereux plus longtemps est plus qu'une mauvaise idée. Je sens freiner à toutes pattes la proie en moi, qui halète ses menaces et ses angoisses sans se prendre le temps de respirer. Je me tends un peu plus, arrondis mon dos pour creuser le ventre, poindre du menton vers le sol. Il est brutal, graveleux, violent, mais pas idiot au point de ne comprendre une excuse quand il en entend une. Le risque qu'il me perce à jour est trop grand. Quoi faire ensuite, face à sa colère.
Je sue un peu, la tension musculaire dure depuis trop longtemps, je ne cesse de jeter des regards de serpent vers la compagnie et ma vision à ras de terre me permet de saisir le poing de l'homme à tête de chien quand il se serre autour de sa lame. Je le prends pour moi, tout de suite, puis me raisonne. Mais d'être ainsi tellement exposée, si désespérément vulnérable enfermée comme je suis dans le terrier des fauves, chaque geste vif, chaque éclat de voix, chaque reflet des flammes dans une lame de couteau me perce comme un dard.

Et puis naît un tout léger sourire sardonique. Les mener à travers bois ? Je pourrais bien en rire un peu... J'explore en esprit les diverses traverses possibles pour atteindre Salers. Nous sommes ici au sud de Genevray. Pour rallier Salers sans prendre les routes, on peut contourner un peu plus au sud encore, puis remonter jusqu'au gros bois, celui des hêtres que j'aime tant. Je peux faire sinuer un peu, pour éviter les fermes, et voir un peu si ces saligauds s'en sortiraient de bon cœur et à pleine dent après avoir passé une nuit dehors sous cette pisse. Je brûle encore de rancoeur. Sans ces deux crétins de voleurs arrogants, je serais déjà rentrée chez moi...

" Soit. Mais de ce que je vois, on irait pas vite... Et par là où je mène, on aura pas d'abri... Alors ça voudra dire... une nuit dehors... "

Je crains l'ire du noble gueulard, je crains une saute dans son humeur de bretteur, ruant dans tout brancard s'il lui en pique le sensible. J'ai encore oublié le monseigneur, et je déglutis avec peine. Je lui ai sans y réfléchir, parlé comme je négocierais avec le boucher du village quand il me veut un agneau...
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 15 Fév 2022 - 8:41




La torgnole sur l’arrière du crâne fut rapide, vive, point trop forte, mais assez pour marquer le coup. Côme de Broque avait dégainé du gantelet en cuir pour l’écraser à la manière d’on on chasse une mouche, sur la tête de la jeunette. Il avait aboyé en suite, plein de colère.



« Montre un peu de respect bouseuse, c’est au Comte de Corburg que tu t’adresses, pas à un traîne misère de ton espèce. » 



Ce fut la première fois qu’une émotion concrète s’afficha sur le visage couturé et délabré du Vieux Rab ; dans les stries sans âges, entre les rides marqués, les traces de véroles et les cicatrices d’une vie de ferrailleur, s’affichait ce qui ressemblait le plus à un hideux, édenté et terrifiant sourire. Une expression qu’il n’utilisait en réalité que rarement, à tel point qu’on aurait put penser que son visage tout entier en était tellement peu familier, qu’il devait chercher loin, la mécanique nécéssaire à ce levage de lippe malfaisant à souhait. Pour la première fois, il braqua ses mires plus d’une demi seconde sur la gueuse, la transperçant de son regard vitreux qui en avait vu déjà bien trop pour une seule existence. Mederich émit un court râle, qui était en réalité un rire gras qui n’arriva qu’avec grande difficulté à franchir son glissoire à gnôle rouillé.
Elle le prenait pour un incapable, elle pensait qu’il était de ceux ayant besoin d’un feu, d’une grosse muraille et d’or et de pierreries pour prospérer. Elle pensait qu’il était un seigneur de pacotille, un joue du nom, un parvenu n’ayant jamais connu la merde, la boue et l’ennuie. Elle le pensait, mais elle se trompait.



«  Nous survivrons à une nocte extérieur. » Finit-il par lâcher, sarcastique.



Lui en avait passé de nombreuses, sa vieille carcasse avait réussit à s’endormir dans des lieux qui feraient frémir de peur n’importe lesquels de ces pisses-laits qui l’accompagnaient. S’ils étaient à peut prêt sur de pouvoir trouver le sommeil, combien de ces merdeux y arriveraient ? Combien essayeraient de tenir éveillé jusqu’à l’aube, par peur de Fange venante ? Combien aurait au lendemain la croupe en morceau pour s’être choisit une mauvaise souche ou crécher ? Combien encore, se serait chier dessus à la seule pensée de ne point avoir un toit au dessus de la trogne ? Des questions que Mederich se posaient et que la bergère devait aussi avoir à l’esprit. L’expérience serait amusante, mais point pour tout le monde.



«  Tu nous serviras donc de guide une fois l’aube venue. Si tu réussis à nous faire gagner une journée, je te payerais de quoi t’acheter un nouveau troupeau. Si tu te joues de nous et que nous perdons du temps, alors, c’est ton troupeau entier que nous prélèverons en dédomagement. Est-ce clair ? » 



Elle n’avait manifestement, pas vraiment le choix. 


A l’extérieur, une brise faible accompagné maintenant la pluie et s’engouffra d’un coup à l’intérieur de la grange en ruine. Les odeurs que charriées par le vent étaient nombreuses et principalement composé de celle des chèvres. Pourtant, il dut y avoir autre chose, car les chiens du Comte se mirent à grogner. Un grognement qui n’annonçait jamais rien de très bon.






Revenir en haut Aller en bas
GuillemettePaysanne
Guillemette



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMar 15 Fév 2022 - 9:04
Je grince sous le coup, et me frotte bruyamment le crâne pour en adoucir le cuisant. Je regarde ma paume, mais elle est sèche. Je n'ose glisser un oeil sur mon agresseur.

Le Comte rit gras comme on racle des glaires, et je gronde sans bruit, ma main toujours sur l'arrière de ma tête, quand une bourrasque vient choquer la porte. Un glas résonne dans mon ventre, mortel, silencieux. Les mâtins grognent, derrière mon épaule. Je tends l'oreille, m'immobilisant tout net : dehors, Capscha a gémi. Je reste figée, suspendue d'un bout de coeur à mon ouïe, de l'autre à mes tripes, et mon cerveau s'enclenche à toute allure. Il n'y a pas deux jours que j'ai croisé une des choses, mais je l'aie vue de mes yeux se faire abattre, près de la Tour sud. On ne les croise pas souvent, depuis les palissades, alors deux arrivages en si peu de temps ?
Mais mon ventre ne nie pas. Je suis même irritée qu'il n'ait réagi avant Capscha, mais je comprends vite : en pareille compagnie... Mais je veux attendre. Si je n'attends, personne ne me croira. J'ai posé sans le voir une main sur mon ventre, et la serre, et mon oreille est braqué sur la porte. La pluie n'a pas baissé sa voix, et j'ai du mal à discerner autre chose que les bruissements d'herbe de mon troupeau qui semble avoir cerclé notre abri. Mais j'entends galoper ma chienne, et c'est toujours mauvais signe. Je m'affole d'un coup : pas d'arbre, ici, pas de planque. Et avec le bordel qu'ils ont fait, impossible de passer inaperçus. Pourtant, avec la pluie et les gifles du vent d'ouest, chargé des jurons de la mer, il m'aurait été facile de me faire disparaître. Le feu, l'odeur, les éclats de voix mâles, tout m'enivre soudain, et je les crois sentir tourner autour de moi.
La main que j'avais sur la tête s'est posée au sol, et je fixe la porte, les poumons bloqués à vide.

J'attends.

Capscha bat la campagne, s'immobilise, repart. Je la suis de l'oreille. Elle faisait ça, toujours, aux pieds de mes arbres, pendant les débuts de la fange. Comme pour moi, mon actuelle état de situation a fait bondir son degré d'angoisse hors de contrôle. Le froid s'étend dans mes tripes, je le sens descendre envahir le bassin, grimper ses fils vers l'intérieur des épaules. Je cherche mes arbres, mon corps réclame de la hauteur, comportement acquis devenu réflexe à l'arrivée de ce gel bien connu maintenant.
Je ne peux plus douter.

Les mastifs se mettent soudain à aboyer à gueule fendue, et je bondis comme une sauterelle sur mes pieds. Je me jette derrière l'épaule du Comte qui s'est redressé aussi sec que moi, et je m'accroupis. Ils sont là. Juste là, dehors. Et ils viendront, pas de doute. On est tous là comme un furoncle sur une prêtresse. Je me sens dévorée par la terreur.
Revenir en haut Aller en bas
Mederich de CorburgComte
Mederich de Corburg



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette EmptyMer 16 Fév 2022 - 8:46




Les grognements des vieux dogs se transformèrent en aboiement sourd, gras, violent. Ils tiraient de concert sur les longes qui les maintenaient attachés à un poteau de pierre autrefois prévu pour y passer l’attache d’un cheval ou d’un mulet. Le petit cercle de fer battait, crissait, sous les ruades des pisteurs qui s’échinaient à en perdre l’haleine. Bien sur, ce spectacle parlant avait attiré l’oeillade de tout les hommes d’armes présents. Le cuisinier avait arrêté de tourner sa viande, les chamailleurs ne se chamaillaient plus, le fredonner lui avait prestement fermer sa grande clappe et avalé sa langue. Autrement dit, les hommes étaient devenus silencieux, certains semblant avoir perdu en taille, s’être recroquevillé comme des insectes essayant de ne plus dépasser de terre. Mederich était debout, de Broque de même et le Comte n’avait même pas fait attention à la jeune donze qui avait choisi pour abris son ombre de vieux saule tordu.

D’un doigt levé, le Vieux Rab se fendait les lippes, signant de l’autre main quelques codes que les hommes avaient dut apprendre à l’entrainement : deux doigts baissés tendus direction gauche pour requérir l’attention général, puis un poing se fermant sèchement traduisant l’ordre simple d’être prêt à sortir le fer de son fourreau. Ce que le Comte fit, lentement en posant en suite sa paluche sur le manche de son fidèle compagnon « Fendcrâne » ; un bec de corbin sortie des forges de Corburg et d’on le pique stylisé représenté un corbeau au bec pointue. L’emblème de sa maison, l’emblème des siens, l’emblème d’un monde perdu et bientôt oublié que la Fange avait emporté avec elle.



«  Ca approche » Murmura le chevalier de Broque à Mederich entre deux gueuseries canines.



Le vieux Rab opina du chef, car malgré le bruit des chiens il pouvait entendre des cognements sourds sur les pans de bois vermoulus de la grange. Le vent et la pluie masquait encore certains grognements venus de l’extérieur, mais tous pouvaient sans conteste comprendre qu’au dehors, dans les ténèbres, on se mouvait en direction de la porte. 

Cette nuit allait semble t-il être bien plus formatrice que n’importe laquelle qu’ait passé les jeunes recrues dans les murs de la cité. Aucuns n’avaient vécus le Chaudron, aucuns n’avaient vécus la mort venue vous sucer l’orteil. En son fort intérieur, Mederich sut qu’au moins, cela aurait pour effet de faire le tri, séparer le bon grain de l’ivraie, mettre en avant les talentueux et rejeter à la boue les faibles. Une bonne chose, tant qu’il ne faisait pas partis des vaincus. Car il y aurait des vaincus, la Fange prenait toujours son lot d’âme et de vie. Cette dernière pensée lui en souleva une autre : comment était ce possible, qu’on retrouve des ions-morts aussi loin dans les terres ? Des terres qui bénéficiaient d’une certaine sureté aujourd’hui ? Les patrouilles ne remplissaient-elle plus leur rôle ? Quelque chose clochait dans l’organisation du Labret, à n’en point douter. A moins que…



«  Chibremoue, qu’y hurle toujours les grognards dedans. Oh hé, oh hé, ça renifle bon, tenez vos lardons. On rentre. »



La voix vint de l’extérieur. La Fange n’avait pas de voix. C’était une voix humaine. Mederich en lâchant un pet de soulagement, il fut presque certains que certains des Hardis en avait chié une poutrelle. L’instant d’après, un homme gras se dessina dans l’entrebâillement. Il avait l’allure du margoulin et portait sur lui, trop de cuir et d’acier pour être un simple marchand.



«  Oh bah tiens. Voici donc. C’est qui a du beau monde ici. Vous me direz ce que vous branler chez moi ? Parce que c’est mon bouge ici, ma cabane, mon coin, mon rinrin. C’est pas bien de venir sans ma permaille, c’est pas bien du tout. Maintenant, va falloir décaniller, et vite, parce que si vous sortez pas, j’vous sors, mais va falloir choisir hein ?! Et pas de louperie hein, mes gas à moi vous on déjà dans l’oeil, le premier qui fait du maroufle, on lui perçe le fion comme une tête d’épingle, noté ? Dans tout les cas, va falloir raquer. A, salut à toi la bergère, salut.  » 



Tandis qu’il caquetait, d’autres hommes étaient venus lesté le gros. Des hommes qui, avaient tout de malandrins accomplit. Mederich pesta dans sa barbe en apercevant le reflet métallique de flèche ou de carreau dépassant de certaines lattes de bois pourries. On avait tendance à oublier que, les hommes aussi pouvaient être dangereux. Le Comte n’avait pas retiré la main de son arme, mais il siffla à la jeune femme.



«  Des connaissances à toi, la Mouette ? Nous aurez tu tendus traquenard ? Car cela y ressemble, manifestement.  »

C’était la voix plein de colère, que le Vieux Rab s’exprimait. 







Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé



Malins & Caprins - Guillemette Empty
MessageSujet: Re: Malins & Caprins - Guillemette   Malins & Caprins - Guillemette Empty
Revenir en haut Aller en bas
 
Malins & Caprins - Guillemette
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 1 sur 3Aller à la page : 1, 2, 3  Suivant

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Marbrume - Forum RPG Médiéval Apocalyptique :: ⚜ Alentours de Marbrume ⚜ :: Plateau du Labret-
Sauter vers: