Marbrume


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 Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 1:59
L’occasion se présenta le quatrième jour. Alors que par les petites fenêtres de la taverne, le soleil couchant donné à la salle une étrange aura, presque inquiétante. La jeune femme se leva, titubante sans pour autant avoir finie la première bière posée devant elle. Elle avait passée la majeure partie de l’après midi à fixer un point invisible, perdu dans des songes qui n’appartenaient qu’à elle.
Il avait vu une larme rouler sur sa joue sèche, comme une goutte de pluie solitaire choisissant de disparaître au cœur d’un infini désert.

Bientôt la nuit serait couchée, et il ne pourrait plus agir, le couvre-feu limitant grandement ses mouvements dernièrement. Pourtant ce soir, au lieu de se diriger vers la chambre qu’elle habitait depuis le début de la semaine, l’herboriste laissa ses pas la guider vers l’entrée de l’établissement, et la franchir ensuite.
Un long instant passa, et l’ombre de l’homme s’engouffra à sa suite sans un bruit, sans attirer un regard. Tel était Marbrume, un endroit où les gens ne voyaient que ce qu’ils acceptaient. Il aperçu la silhouette disparaitre au tournant, s’enfonçant dans une ruelle. Ses grands pas silencieux prirent le même chemin et il pencha la tête par-delà le mur. Elle était là, à quelques pas, sa main posée sur la pierre froide pour s’aider à restée debout. Il s’était attendu à la voir rendre le peu de chose qu’elle avait grignotée, mais fier comme elle était, elle luttait contre sa nausée, inspirant de grandes goulées d’un air très relativement frais. Ses pieds étaient bottés de chaussure simple mais solide, un brin de lavande un peu Sali était cousu sur leurs talons.
Il faillit relâcher un long soupir, que ses lèvres parvinrent cependant à réprimer.

Son corps haut et puissant avala la distance entre eux et un bras large et puissant ganté de noir ceintura le buste de la jeune femme. Sans violence presque tendrement mais sans faille il la bloqua dans l’étau de sa prise la soulevant complètement du sol, et sa main libre appliqua un torchon humide sur la bouche et le nez de la jeune.
Il ne fallut que quelques secondes pour que les mouvements et les gémissements laissent place à une respiration continue et tranquille. Mais pour lui l’expérience fut une torture millénaire. Se murant dans son professionnalisme, Jehan souleva le corps de la femme qu’il aimait, et le porta jusqu’à la petite charrette qui l’attendait non loin.

***

La porte s’ouvrit dès les premiers signes de réveil de la jeune femme. Elle s’était assurée que le somnifère n’aurait aucun effet secondaire, de peur d’une réaction dangereuse avec ce que l’herboriste prenait déjà. L’ombre glissa dans la chambre, mais pas aussi silencieusement que le pouvait l’homme d’arme qu’était Jehan. Le tintement très léger de l’argent contre la porcelaine résonna dans la pièce, presque comme un mirage sonore, irréel et pourtant persistant.
Elle connaissait parfaitement cette pièce, comme chacune de sa demeure. Aussi n’eut-elle aucun mal à venir déposer la tasse chaude et fumante sur la petite table de chevet malgré la profonde noirceur de la pièce que ne parvenait pas à chasser la porte à moitié ouverte. Alors que le corps s’agiter doucement sous les draps frais, sans doute conscient d’une présence soudaine, ainsi que de l’odeur épicée et sucrée du breuvage.

L’ombre poursuivit son chemin à travers la pièce et contourna le lit à pas léger. Quelques bruits de tissus amples qu’on agite, un cliquetis. Et la lumière pénétra la pièce avec une clarté presque aveuglante tandis que les deux lourds pans de rideaux glissaient pour dévoiler une grande fenêtre. L’ombre se matérialisa sous la forme d’une jeune femme aux cheveux d’argent retenue dans un complexe chignon par de grande plume de cygnes d’un blanc immaculé. Une mèche de chaque coté du visage tombaient en torsade sur les épaules nue à la peau blanchâtre. Une robe bustière noire comme le plumage d’un corbeau cintrait sa taille fine avant de s’élargir avec extravagance, chutant en cascade jusqu’au sol. Elle donna presque l’impression de glisser sur le sol tant le tissu floutait ses pas. Elle trouva place sur une petite chaise face au grand lit et attendit que son occupante émerge pleinement de son sommeil provoqué, triturant machinalement un ruban noué à son poignet.
Lorsque leurs yeux se croisèrent, elle sourit.

-« Ne vous a-t-on pas dit que la pire chose qui pouvaient arrivée en faisant une offrande aux dieux, c’était que ceux-ci décident de vous envoyer une réponse ? »


Irène, comtesse de Valis, faillit rire de la propre vérité cruelle de sa remarque, mais son cœur n’avait pas la place pour autant de dérision à cet instant. Elle indiqua d’un geste la petite table où se trouvait à portée de main de l’herboriste, la tasse fumante d’herbe purgative, et un couteau d’argent terriblement aiguisé.

-« Une fois encore je viens bouleverser votre quotidien. Mais cette fois, j’ai décidé de vous offrir une alternative. Vous avez visiblement pris la décision de vous nuire. Chaque fois un peu plus n’est-ce pas ? Juste pour oublier, encore un peu, s’éloigner, quelques secondes encore. Et qui sait, peut-être ne plus revenir du tout ? »

Plus aucun sourire n’éclairait son jeune mais si triste visage. Elle poursuivit sans interruption.

-« Ce couteau me semble bien assez aiguisé pour mettre définitivement fin à vos souffrances si c’est tout ce que vous espérez. Ou aux miennes si cela peut vous soulager. Le thé, lui, vous purgera progressivement de tout ce que vous avez habitué votre organisme à prendre. Vous ne quitterez pas cette maison avant d’être sevrée, morte, ou meurtrière. »


La comtesse croisa les mains sur ses genoux, observant avec une intensité colossale le visage encadré de long cheveux sombre.

-« Allons Flore Maisonfort, montrez-moi si ce petit bateau de bois à définitivement coulé, ou s’il brave toujours les flots agités. »


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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 10:29
Quatre jours.

Cela faisait maintenant quatre jours que je vivais, dormais, mangeais à la taverne. Je voyais avec une angoisse inquiète la fin du séjour approcher. On s’habitue vite au confort, mine de rien, et l’idée de devoir quitter cet endroit chauffé, pourvu d’un lit et dans lequel je mangeais à ma faim assombrissait mon humeur. Je n’ai pas rencontré beaucoup de gens, me tenant souvent à l’écart, par crainte, par timidité, par besoin de voir avant de me lancer. Il y a eu cet étrange personnage en haillons, quelques clients, la tenancière, mais pour le reste…Rien. Je pensais retrouver un peu de courage, je pensais peut-être m’aventurer dehors, peut-être même revoir, sur un malentendu, ce tailleur au sourire ravageur rencontré quelques semaines plus tôt. Qui sait…Les Dieux ont des plans tellement bizarres, parfois. Mais non. Rien que le fait de me promener dans les rues sans répugnance est déjà un exploit. Je n’ai jamais caché mon aversion pour la cité, si remplie de misère et de gens sur le point de franchir l’ultime barrière. Je suis donc là, devant un broc de bière, à regarder les petites bulles de mousse blanche crever une à une, sans que j’y touche. Je n’ai pas très faim. J’avais dépensé quelques petites pièces pour acheter une oublie à un vendeur des rues, avant de revenir à la taverne pour la soirée, et la pâtisserie menaçait de prendre le chemin inverse. Prendre l’air me sembla alors une idée pertinente. Inutile de prendre ma cape, je n’en aurai pas pour longtemps.

Dehors, l’air est frais et me fait immédiatement du bien. J’inspire à grandes goulées, afin de calmer les aigreurs de mon estomac malmené. Une crise plus importante que les autres me força pourtant à prendre appui sur un muret, tandis que je posai une main sur mon ventre, le cœur au bord des lèvres. Dans la venelle, il y avait des fenêtres à travers desquelles je voyais quelques scènes de vie familiale, des scènes charmantes. J’aime beaucoup regarder les gens, de cette façon. Je ne peux pas avoir ce qu’ils vivent, bien sûr, mais voilà, c’est un peu comme vivre une vie par procuration. Voir les autres heureux, enlacer les personnes qu’ils aiment, sourire, c’est déjà bien. Quand je rentrerai, je demanderai de l’eau chaude pour pouvoir boire ma tisane, comme je l’ai fait ce matin et cet après-midi. De cette façon, moi aussi, je pourrai, comme tous les soirs depuis des semaines, rêver sans troubles, sans colère, sans peine et sans larmes.

Cette ravissante perspective me fit me redresser, j’allais me remettre en route mais je n’en eus pas l’occasion. Un étau puissant venait de se refermer sur moi, plaquant quelque chose sur mon visage. La surprise, puis la peur se manifestèrent en des cris étouffés et des mouvements erratiques qui me firent m’agripper au bras de la personne qui me retenait si fort, cherchant à me libérer de cette étreinte brutale. C’était peine perdue. Il est bien trop fort, c’est à peine s’il a bougé.

Je me sens faible soudain. La fenêtre devant moi se floute peu à peu, nimbant le mur de torchis d’une douce lueur dorée. Je sens mes bras, mes jambes s’engourdir, je n’ai plus peur, je vais mourir.

Est-ce donc cela, la mort ?

Est-ce que j…



***
**
*

Dans l’obscurité tintèrent des clochettes. De ravissantes, douces et jolies clochettes qui vrillèrent pourtant mes oreilles aussi sûrement que les griffes d’un fangeux sur le mur de pierre de ma maisonnette. Une douloureuse pulsation traverse ma tête de part en part tandis que le bruit s’approche avant de cesser tout à fait. Une odeur inconnue vint chatouiller mes narines. Une odeur qui rappela douloureusement à mon estomac que manger n’est malheureusement pas une option. Qu’est-ce que ceci…Je n’ai jamais demandé qu’on m’apporte à boire dans ma chambre, j’ai justement demandé qu’on me laisse en paix, afin de pouvoir rêver tranquillement. Un mouvement des jambes, un autre des bras, je me sens nauséeuse, faible. Que s’est-il passé ? Ai-je bu plus que de raison ? Je suis à peu près dans le même état qu’après cette beuverie avec ce Merrick, le mal de tête en sus. Pourtant je ne me rappelle pas avoir bu beaucoup…J’allais lever la tête et grommeler qu’on me laisse tranquille mais je n’en eus pas le temps. Quelqu’un venait de violemment rompre les ténèbres en ouvrant les rideaux. Une intense lueur se répandit dans la pièce, ce qui me fit pousser un cri. Je ne pus que me cacher sous les draps, recroquevillée, percevant soudain la qualité de ce même drap qui me recouvre. Je ne suis plus à la taverne. Qu’est-ce que…

- …C’est quoi ça…

Les yeux à moitié collés, j’extirpe ma tête de sa cachette et vois alors une silhouette drapée de noir, auréolée de blanc. A contre jour, je ne parviens pas à distinguer ses traits, mais elle a l’apparence de ces monstres magnifiques qui font les histoires du soir. Le souvenir de la veille me revint, un peu. La venelle. Ces gens qui s’enlacent. Puis cette violente étreinte. Et…maintenant ça…Je ne parviens pas à appréhender mon environnement, quelque chose ne va pas. Il me semble voir une personne disparue, une silhouette qui prend place tout près et qui me regarde. Je la regarde aussi, sans comprendre.

- Est-ce que je suis morte ?

Ma propre voix me donna la nausée. Je portai ma main à ma gorge avant de tousser avec violence, ce qui m’éveilla tout à fait. Un autre regard, tandis que la silhouette parlait enfin, et je sentis alors le sang se retirer de mon visage. Cette voix…Je demeurai là, à moitié assise dans ce grand lit, à regarder cette femme si belle m’admonester comme si nous nous étions vues la veille. Ce qui est impossible. Irène est morte. Jehan est mort. Je leur ai fait mes adieux, et je tente, chaque jour, de me guérir de leur absence. J’entends à moitié ses paroles, jusqu’à ce qu’elle me parle d’un couteau. De mettre fin à mes souffrances. A-t-elle vu mes poignets ? Je ne sais…Sans la quitter des yeux, persuadée de faire face à un monstre surgi de nulle part pour me faire du mal, je tends la main, maladroitement vers la table de chevet, renversant la tasse brûlante sur mes doigts, ce qui me fait hurler de douleur. La fine porcelaine s’écrase au sol, tout autant que le couteau alors que je me recroqueville dans le lit, le plus loin possible de cette apparition, enveloppant mes doigts rougis dans la manche de ma chemise, le cœur battant.

- Vous n’êtes pas Irène. Irène est morte. Quelle est cette sorcellerie ??

Et pourtant, tout semble si réel. Elle est toujours aussi belle, froidement belle. J’observe, paniquée, la fragile élégance de cette femme que j’ai aimé de tout mon cœur, la meilleure amie que j’ai jamais eue, l’arrondi de son épaule presque diaphane, tout son maintien de noble dame rehaussé par une robe sombre qui lui va à ravir. Je me cache à moitié derrière le drap, de fines gouttes de sueur perlant sur mon front. Je suis à deux doigts de me sentir mal, je sens les pulsations de mon cœur jusque dans mes oreilles et des petits points noirs s’affoler devant mes yeux.

- C’est impossible…Vous ne pouvez pas être là…Je ne peux pas être là…Je…

Le choc est trop important. Je me sens partir, le souffle court, avant de finir par m’écrouler sur le lit, sombrant à nouveau dans l’obscurité la plus totale, choquée au-delà de toute commune mesure.
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Irène de ValisComtesse & Modératrice
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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 12:51
Le cœur de la comtesse battait la chamade tandis qu’elle observait les réactions erratiques de Flore avec le calme tout apparent d’un monolithe dissimulant une tempête. Elle faillit se précipiter en la voyant s’écrouler sur son lit et perdre connaissance, mue par l’inquiétude.
Mais elle s’imposa encore une fois le calme. Elle savait que cela pouvait arriver, le choc, elle était si affaiblie. Même quelques jours de repas chaud et de lit entretenu ne pouvaient dissimuler une vie de privation et le traitement qu’elle imposait à son corps pour l’oublier.

Elle se redressa et s’approcha tout doucement du lit. Elle s’assura du bout des doigts que la respiration de Flore était normale. Toucha son cou pour sentir le cœur battre rapidement mais sans désordre. Elle soupira de soulagement et écarta délicatement une mèche de cheveux sombre venu se coller en travers de son visage, lui caressant la joue avec délicatesse.

-« Sans doute aurait-il mieux valu que vous ayez raison ma chère…»

Elle sourit sans joie, remonta le drap sur son corps pour la réchauffer et entreprit de ramasser les morceaux de tasse. Elle ne quitta la pièce que l’espace d’une minute, revenant avec un objet identique au précédent, tant par sa forme que par son contenu. Elle la déposa sur la table, cette fois-ci un peu plus loin, afin d’obliger Flore à se pencher pour s’en saisir, évitant un nouvel accident. Elle reposa le couteau à son côté.

Se dirigeant vers l’un des meubles, qu’elle ouvrit, révélant une petite bibliothèque, elle extirpa l’un des livres et repris sa place sur la petite chaise, feuilletant les pages dans la lumière matinale. Alice, avec son efficacité habituelle débaroula dans la pièce munie d’un plateau recouvert de victuaille froide. Des fruits, des légumes, des noix, un peu de viande, un potage. Tout ce qu’un estomac difficile pourrait accepter ou non selon ses envies. La tâche liquide au sol disparu tout à fait sous son œil d’experte et elle déposa sur les genoux de la comtesse une petite boite de baume contre les brûlures avant de quitter la pièce sous le regard reconnaissant de sa maîtresse.

Irène vint s’asseoir sur le moelleux du lit près de sa captive infortune. Elle extirpa doucement sa main du drap avant d’appliquer sur la peau très légèrement rougie de ses doigts la crème aux relents d’eucalyptus. Rien de grave, le liquide n’était pas assez chaud pour la brûler réellement, tout au plus aurait-elle les doigts sensible le reste de la journée. La comtesse se donna tout de même la peine de lui bander d’une fine bande blanche.

A plusieurs reprises elle sentit plus qu’elle ne vit une grande ombre passer devant la porte. Elle ne s’en offusqua pas. Elle avait déjà bien assez demandé de sacrifice à cet homme pour le privé du droit de simplement s’inquiéter pour une personne qu’il considérait comme plus importante que toute la création des trois.
S’il n’avait pas été si loyal envers sa personne, il aurait été là pour elle, pour la rendre heureuse, pour la sauver de son quotidien et accomplir ses rêves. Au lieu de cela il n’avait plus que la honte pour seule compagnie.

Une pointe sournoise et violente de culpabilité s’enfonça de quelques centimètres supplémentaires dans l’âme d’Irène. Elle trouva cela ridicule, elle avait trompé, trahit, tué pour ses objectifs et voilà qu’un amour qu’elle ne partageait même pas venait nuire à sa volonté. Malgré cela….
Elle lâcha la main de la jeune femme comme si c’était elle qui se brûlait à son contact. Doucement elle secoua la tête et retourna prendre place sur la chaise, ramassant le livre qu’elle avait posé négligemment au sol. Elle lut, à voix basse, le poème sous ses yeux.

« Au courant de l'amour lorsque je m'abandonne,
Dans le torrent divin quand je plonge enivré,
Et presse éperdument sur mon sein qui frissonne
Un être idolâtre.

Je sais que je n'étreins qu'une forme fragile,
Qu'elle peut à l'instant se glacer sous ma main,
Que ce cœur tout à moi, fait de flamme et d'argile,
Sera cendre demain ;

Je ne faiblirais pas. Fort de ma douleur même,
Tout entier à l'adieu qui va nous séparer,
J'aurais assez d'amour en cet instant suprême
Pour ne rien espérer. »
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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 14:43
Pour la première fois depuis des semaines, aucun rêve, aucun cauchemar ne vint troubler mon inconscient. J’avais l’impression diffuse de flotter dans un néant silencieux, d’être ballotée de mur sombre en mur sombre, ricochant sur les ténèbres comme un galet lisse à la surface de l’eau. Ce n’était pas douloureux, c’était par contre affreusement malaisant. Je n’eus aucune conscience de ce qu’il se passait autour de moi jusqu’à ce qu’une odeur forte de baume m’irrite les narines. Je rouvre alors les yeux, pour voir à demi cette silhouette qui venait de reprendre place sur sa chaise, un livre à la main. Aussitôt, je ferme mes paupières, avant de prendre une grande inspiration. Un feu se déchaîne en moi, brûlant mon estomac, tordant mon ventre, un mal atroce qui me fait grimacer. Il me faut ma tisane. Il n’y a que ça qui m’apaise et là…j’ai plus que jamais besoin d’apaisement. Je me sens totalement démunie et vulnérable, au milieu d’un lit trop grand, dans une pièce trop belle, en compagnie d’un rêve fait chair.

Est-ce réellement Irène ? La créature en a l’apparence, la voix, l’allure. La somptueuse beauté également. J’aimais regarder Irène, parce qu’elle représentait tout ce que je ne serais jamais. Les paupières entrouvertes, le crâne traversé par des douleurs que je ne connaissais pas, le corps en train de brûler, je regardais la fragile esquisse de ce visage magnifique qui n’avait pas changé du tout. La créature respire. La créature se met même à lire, et je l’écoute, totalement incrédule, subjuguée, anéantie. Ai-je pris ma tisane ? Est-ce le fruit de mon imagination ? Une illusion destinée à endormir ma méfiance ? Elle lit des phrases qui n’ont aucune cohérence, étrangement tournées. Des phrases qui parlent d’amour. Irrémédiablement, toutes mes pensées se ruèrent vers un fol espoir : est-il en vie, lui aussi ? Je détourne la tête, sentant un flot de larmes arriver et menacer de crever la surface trop sèche d’yeux qui ont trop pleuré.

- J’ai espéré…en vain.

Je venais de parler d’une voix rauque et l’effort me fit intensément tousser, m’obligeant à me recroqueviller sous les draps. La douleur est intense, une douleur diffuse qui me broie l’intérieur du corps, comme si un brasier s’y déchaînait. Une affreuse suée venait de s’emparer de tout mon être, il n’y a pas de temps à perdre. Il me faut mes herbes. Tout de suite.

- Mes herbes…Il me faut mes herbes. Donnez moi mes herbes.

Les paupières lourdes, le souffle court, je remarquai que les contours de la pièce semblèrent se déformer, les meubles se gondoler, la voix de la créature perdre en intensité. Je me redressais sur un coude, ma poitrine se soulevant sous l’effort ou l’effroi – c’est pareil -, la tête lourde dodelinant avant d’à nouveau m’effondrer sur le lit, les cheveux et la chemise trempée de sueur. Un haut le cœur violent me fit me tourner sur le côté, par réflexe, pour soulager mon estomac pourtant vide. Haletant comme l’animal qui a trop travaillé, la gorge en feu, les larmes aux yeux, je demande :

- Par pitié…Laissez moi prendre mon remède.

Un affreux rire s’échappa de ma gorge. Un rire triste, sans joie, absolument ignoble. Mes herbes sont à la taverne, je n’en ai pas dans mes vêtements. Evidemment. Quel serait l’intérêt de se promener avec de telles substances en sachant que de toute façon je pouvais en avoir autant que je le souhaite dans ma chambre à l’auberge ou dans le taudis qui me sert de maison ? Je le regrette maintenant. Je suis sortie sans rien, on m’a honteusement enlevée en plein milieu d’une venelle, je ne peux rien faire, à part demander. Supplier. Toujours recroquevillée, la suée rendait le tissu presque transparent, laissant apparaître mon dos mutilé aux yeux de la créature. Un tremblement incontrôlable me fit claquer des dents. Je brûle et pourtant…je meurs de froid. Pourquoi ? Pourquoi m’imposer cela, à moi ?

- Je vous en supplie…Laissez moi rentrer à l’auberge. Laisse- moi prendre ce dont j’ai besoin. Je ne dirai à personne que vous m’avez enlevée. Je ne dirai à personne que vous êtes là. Je ferai tout ce que vous voudrez mais…ne me laissez pas brûler. Pitié Irène…

La créature a l’apparence d’Irène, elle a la voix d’Irène, autant l’appeler ainsi, peut-être qu’elle sera plus conciliante à mon égard.

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Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 15:37
Elle la laissa émergée à nouveau, gémissante, telle une âme en peine face au chemin de la voûte mais craignant sa lumière divine. Elle semblait si faible, fragile. L’étreinte autour du cœur d’Irène se renforça encore. Elle supplia, dans un délire qui n’appartenait qu’à elle, négociant, désespérant. Une part d’Irène eut envie de répondre à ses espoirs. De lui demander qui se soucierait de son enlèvement. Qui irait confronter une noble pour les accusations d’une femme du peuple. Quel monde se donnerait la peine de réagir à une injustice de plus alors que tout son fonctionnement reposait sur l’iniquité.
Même elle, puissante parmi les puissants ne pouvaient que subir un destin bien plus fort et cruel qu’elle ne le serait jamais. Tout juste pouvait-elle choisir les maux qu’elle subirait.

Mais à quoi bon accabler une personne si proche du désespoir ? Si ce n’était pour essayer d’attirer au fond de son puit de ténèbres une autre âme pour lui tenir compagnie. La solitude, rempart et fardeau. Elle se contenta de dire d’une voix douce.

-« Non, Flore. »

Elle laissa son affirmation pénétrait dans l’esprit embrouillé et fuyant de son interlocutrice tandis qu’elle se levait pour venir près du corps contracté dans une position rappelant celle d’un nouveau-né. Irène ne s’attarda pas sur les marques et le corps dévoilé presque indécemment par la suée de la malade. Même si inconsciemment elle ne pouvait nier que cette image s’imprimait dans son esprit, à cet instant elle n’avait d’yeux que pour l’âme que cette enveloppe charnelle contenait avec si peu de volonté.

Elle attrapa la tasse et la garda près d’elle sans cesser d’observer l’herboriste en souffrance, subissant le contre poids d’un mal dont elles étaient toutes deux en partie responsable. Elle pressa doucement l’épaule de la jeune femme sans chercher à la faire bouger, lui signalant simplement la réalité de sa présence. L’inexorabilité de leur face à face.

-« Si c’est être soulagée que vous souhaitait, alors buvez. Cela calmera vos muscles et votre estomac pendant que votre organisme se purge du mal qui vous afflige. Si c’est vous oublier dans vos plantes que vous espérez, vous devrez y renoncer. Ce temps là est fini, d’une façon ou d’une autre. »

Son regard glissa sur le couteau toujours posé non loin. Le choix serait sien, mais elle le ferait sans être sous l’influence d’une substance quelconques. Sa main était toujours sur l’épaule tremblante de sa captive. Elle l’ôta avec précaution, de peur d’avoir trop abusée de sa proximité pour assouvir ses plus sombres besoins.

-« Ma mère disait toujours que l’amour était la plus merveilleuse des choses. Et que la présence des êtres qui nous sont cher et la seule chose qui peut combler le vide de nos cœurs dans nos derniers instants. J’en vient parfois à espérer qu’elle avait raison, et qu’un jour, je comprendrais la force que cache l’amour. »


Elle regardait devant elle, observant un paysage qui n’était pas là. Une prairie étouffée par un manteau de neige épais. Un regard rendu cruelle par la folie la traquant comme une proie. Le sang, rouge sombre sur la neige immaculée, les cris, les crocs. Voilà ce que représentait l’amour à ces yeux.

-« Elle est morte seule, sans amour, et sans personne pour l’accompagner. Ces rêves disparaissant dans le vent du froid de l’hiver. Elle avait tort. »

Il était rare qu’elle parlât si directement de la disparition de sa génitrice. Mais Flore était si proche d’elle et pourtant d’un univers si différent. Rares étaient les personnes aussi à même de pouvoir l’entendre parler honnêtement.

-« Je ne crois pas être très différente d’elle. Mais je crois que vous l’êtes. Même à cet instant, je vois ce qu’elle n’a jamais eu, et ce que je n’aurais jamais. Là juste sous mes yeux. Buvez Flore. Prouvez-moi que quelque part dans ce monde, les mots de ma mère possédaient une once de vérité. »



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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 20:59
Cette main posée soudain sur mon épaule me rappelle à une réalité que je ne voulais pas voir, en cet instant. Irène est vivante. Irène. Est. Vivante. Rien que le fait de prononcer ces trois mots dans mon esprit tourmenté ne fait qu’augmenter mon malaise. C’est bien elle. Il n’y a qu’elle pour me parler de la sorte, pour parvenir à lire en moi de cette façon. Cela relève presque de la sorcellerie, en fait. Comme si tout le temps qui s’était écoulé depuis son – leur- départ n’avait été qu’une espèce de parenthèse enchantée pendant laquelle j’ai flotté entre deux mondes, goutant au meilleur comme au pire de l’humanité. Est-il possible que cette femme soit envoyée par les Trois, ces Dieux que j’ai si souvent priés sans avoir la moindre grâce en retour ? Comme si j’en étais indigne ? Est-il possible qu’elle soit l’instrument de leurs desseins ? Je tournai alors la tête vers elle, le front inondé de sueur, les cheveux collés à ma peau. Je sentais mes yeux brûler d’un feu intense, de ce feu qui empêche les larmes de couler. Ils doivent être rouges, à l’heure qu’il est, je le sens.

Tous rouges qu’ils soient, je ne peux m’empêcher de détailler avec un voracité déplacée chaque millimètre de son visage poupin, comme si c’était la plus belle chose qui soit en ce monde – et en soi, je ne suis pas très loin de la réalité, en ce qui concerne la beauté d’Irène. Ses cheveux magnifiques, son regard triste, toute son aura si intense comme si elle n’était que fureur contenue…Je me remplissais de cette vision comme un assoiffé face à un abreuvoir après une longue traversée sans eau. Je devais être particulièrement dérangeante en fait, mais je n’en avais strictement rien à faire. Je voulais être sûre, je voulais être certaine que cette vision ne m’échappe pas. Qu’elle ne m’échappe plus.

Elle tient une tasse à la main, ce qui m’amène à regarder la mienne, bandée avec d’infinies précautions. Une nouvelle nausée s’empare de mon estomac, je me hâte de cacher mon visage dans les draps, autant pour dissimuler mon mal être que mon trouble grandissant. Entendre Irène parler d’amour, c’est un peu comme entendre mes voisins parler de principes moraux. C’est…douloureux. Immanquablement, je ne pus que me rappeler les longues soirées passées à pleurer en silence devant un tout petit feu, une petite statuette de cavalier à la main pour seul réconfort. Ce souvenir, par-dessus la centaine d’autres tout aussi douloureux, finit par crever la barrière brûlante qui asséchait mes yeux. Je sentis le tissu qui couvrait la couche s’imbiber d’eau sous ma joue, sans que le moindre sanglot ne secoue mes épaules.

- Vous ne pouvez vous figurer…à quel point le vide a tout envahi. Votre mère avait raison.

Je rouvris les yeux et la regardai à nouveau, tremblant comme une feuille, avant de regarder la tasse. Elle me propose une libération. Rien de plus, rien de moins. Je sais qu’Irène possède des notions d’herboristerie, je m’en souviens fort bien. L’odeur de ce breuvage m’est parfaitement étrangère mais ce n’est pas ce qui m’inquiète le plus pour l’instant. J’ai froid, j’ai mal, partout, et surtout une question me brûle les lèvres, une question que je n’ose poser pour le moment, par crainte d’une réponse funeste. Il n’est pas là, je l’aurai remarqué, dans cette pièce inondée de lumière. Donc…c’est qu’il a sans doute mieux à faire. Ou qu’il est définitivement parti. Je n’ose demander. Et pourtant, je ne désire que cela. Savoir s’il est en vie. S’il est heureux, quelque part. C’est tout ce que j’ai jamais voulu pour lui. Au-delà de cela, je voulais aussi savoir une chose, quelque chose que j’ai du mal à exprimer parmi toutes mes douleurs, mais il le faut :

- A quoi ça va me servir, de me purger de ce mal, comme vous dites…si je dois encore vivre ce que j’ai vécu pendant votre absence…Je n’aurai pas la force…de revivre ça. C’est trop dur. Ce breuvage, ces herbes, c’est ce qui m’a maintenue en vie…

Je ne fais que dire avec une stricte exactitude les réalités d’une vie privée de l’amour qu’on m’avait si bien promis. Si bien dépeint. Et encore tais-je les souffrances, les larmes, les douleurs morales, physiques, les insultes, les coups que l’on m’a portés, les humiliations et les abandons successifs de ceux qui « me voulaient du bien ». Evoquer cela maintenant n’aurait aucun sens, je n’en ai de toute façon pas la force. Pas maintenant. Plus tard, peut-être, mais pas maintenant.

- Qui me dit que demain, vous serez toujours là ? Qui ?

Je la regarde à nouveau, levant péniblement ma main vers son visage. Un visage trop éloigné pour que j’y parvienne et pourtant, il le faut. Je veux m’assurer qu’elle est là, je voudrais toucher cette vision, sentir sous ma main que tout ceci est vrai. Que je ne suis pas en train de devenir folle. Que je peux, peut-être, me remettre à espérer.
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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 22:08
Irène étouffa la tristesse qui agita l’intérieur de son être alors que Flore faisait un triste descriptif de la réalité du monde en la fixant intensément. Elle ne pouvait s’imaginait à quel point le désespoir qui l’habitait était similaire au sien. Depuis ses plus jeunes années elle avait vu grandir se vide au point de ne plus savoir réellement le distingué de qui elle était. Aujourd’hui Irène n’était qu’un pâle reflet de cette noirceur qui grossissait dans le cœur du monde.
Elle prit conscience du geste de la jeune malade et tandis la main pour supporter la sienne, faible et imprécises. Elle avait la peau brûlante, recouverte d’une fine couche de sueur froide, signes évidents de son état. Elle guida cependant sa main jusqu’à sa joue comme cela semblait être son objectif premier, la laissant apprécier ou non, la réalité de son interlocutrice.
Elle parla d’une voix douce, teintée d’une pointe de tristesse et pourtant d’une certaine force. Elle voulait lui dire les mots qu’elle-même n’avaient pas entendu ces dernières dizaines d’années.

-« Personne ne pourra vous faire cette promesse Flore. Le monde peut disparaître dans les minutes qui viennent. Rien ne vous sauvera de ce que les trois ont prévue pour nous. Pas même la plus forte des volontés. »

Elle serra doucement ses doigts sur les siens, renforçant l’acuité de leur contact charnel, presque intime.

-« Mais que faire alors Flore ? Devons-nous tout abandonner, tous autant que nous sommes ? Devons-nous cesser de nous battre car la bataille est déjà perdue ? »

Son regard plongea dans celui fiévreux et rougit de la plus humaine de ses ennemies, de la plus aimée de ses victimes. Elle espérait tellement pour cette jeune femme alors que le reste de son être ourdissait la fin de leur race.

-« Vous souffrez car vous aimez Flore et que vous savez être aimée en retour, le breuvage atténue peut être cette souffrance à vos sens, mais cela ne soigne pas la trahison, ni l’abandon. Car cela ne tue pas l’espoir d’un jour retrouver la sensation perdue. Cette étrange sensation de chaleur qui s’infiltre jusque dans notre âme et nous laisse seule et asséchée lorsqu’elle se retire. Mais encore à présent, une part de vous se bat pour qu’à nouveau les flots de cette chaleur abondent alors même que vous souffrez de sa disparition. »


Elle reposa la main de Flore sans pour autant la lacher. Son autre main se débarrassa de la tasse sur le meuble pour venir avec les gestes d’une sœur surveillant sa cadette malade, dégager les mèches de cheveux collées à sa peau brûlante de fièvre, dévoilant complètement un visage magnifique malgré sa fatigue et ses manques.
Elle déposa ses lèvres fraîches sur son front en un baiser de réconfort.

-« Vous pouvez abandonner Flore, si c’est là ce que vous souhaitez, si c’est là que la vraie vous qui se cache au-delà de votre peine veut. Ou vous pouvez choisir de vous battre, encore une fois, d’écouter cette voix qui veut encore aimer et être aimée même en sachant qu’elle peut en souffrir aux caprices du destin et des hommes. »

Elle soupira et pencha la tête, regardant le sol avec les yeux voilés de tristesse.

-« Cette voix que vous ne voulez pas entendre. Que vous ne voulez pas laisser s’exprimer de peur qu’elle ne se trompe, ou pire, qu’elle ait raison. Celle qui vous dit que Jehan n’a pas menti, qu’il vous a aimé cette nuit-là, qu’il vous aime encore aujourd’hui. Que je vous aime. Elle ne ment pas. Deux personnes qui vous aiment sincèrement vous ont fait souffrir atrocement. C’est cette vérité que vous devez maintenant accepter et que vos plantes ne peuvent dissimuler plus longtemps. »

Lorsque son visage se redressa, des larmes au éclats d’argent coulaient depuis ses yeux brillants. Pourtant aucun soubresaut ne secouait son corps, pas même une voix brisée. Comme si son corps n’avait aucune conscience de sa tristesse qui parvenait avec difficulté à tracer son chemin jusqu’à la réalité physique de son être.

-« Il y aura peut-être encore des malheurs avant la fin, mais il peut y avoir aussi des merveilles. La seule et unique façon de le savoir est de vivre. »

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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMar 3 Mar 2020 - 23:16
Ce contact, c’est comme une récompense, un trophée durement gagné, une récompense inestimable. Pouvait-elle deviner ce qui se passait présentement en mon cœur ? Je ne le crois pas. Tout au plus prendra-t-elle cet accès de fièvre pour un symptôme de mon état. Sauf qu’il n’en est rien. Pouvoir toucher un rêve, ce n’est pas fréquent, ça n’a pas de prix, et je préférais cent fois ce geste tout simple à cent coffres remplis de pierres précieuses. Il signifie tout simplement que je ne suis pas folle, que je peux enfin remettre ma vie en ordre et passer à autre chose. La libération ne viendra pas du breuvage qu’elle a fait préparer, non. Elle viendra de gestes comme celui-là, ma main sur sa joue, tandis qu’elle reste là, sans répugnance pour mon état désastreux, à me regarder toujours avec cette tristesse infinie.

- J’ai essayé de me battre…J’ai essayé. J’ai échoué. Je suis toujours celle que vous connaissiez. Il m’a été impossible d’évoluer, d’apprendre. De vivre, tout simplement. Tout ce que j’ai pu faire…c’est fuir.

Fuir dans des mondes imaginaires, remplis de fééries, de jardins ensoleillés, pleins de tout l’amour que j’éprouve encore pour lui. Fuir la réalité atroce de cette vie, faite de luttes quotidiennes, d’âpres combats pour la survie. Fuir mon environnement en demeurant cloîtrée chez moi jusqu’à ce que la faim m’oblige à faire contre mauvaise fortune bon cœur en me rendant au Temple pour obtenir un peu de pain ou en proposant des remèdes contre un peu de nourriture. Un geste sur ma joue, afin d’en évacuer l’humidité persistance, me fit me rappeler la petite cicatrice rougeâtre sous mon œil gauche. Le caillou lancé par ce petit garçon avait laissé sa marque sur mon visage, malgré tous mes bons soins et ceux de la sergente de Rivefière. Ce n’était pas tant la cicatrice qui me faisait souffrir que l’acte en lui-même, initié par un si petit être, conditionné par des parents ignobles. On lui avait appris à me détester. C’était donc normal de vouloir me faire du mal. Ce jour-là, alors que je m’étais effondrée dans la boue du chemin à cause de ce croc-en-jambe d’un des frères Gorlois, la joue en sang, mon panier écrasé sous leurs bottes, mes petits remèdes perdus à cause de la boue, j’avais vraiment perdu tout espoir. Si la sergente n’avait pas déboulé ce soir-là, il est plus que certain que je ne serais pas ici, à dévorer Irène des yeux. Mais de cela aussi, il est bien trop tôt pour en parler. Je me sens tellement mal, par les Trois, que même ce baiser sur mon front me donne l’impression d’être brûlée.

- Ce que je craignais par-dessus tout, c’était de recevoir quelque chose que j’ai attendu toute ma vie et qu’on me le reprenne. Gouter au bonheur…puis ne plus être rien. Vivre dans un doute permanent, dans le remord et les regrets…dans l’incertitude absolue. J’ai souffert, plus que je ne saurais le dire.

Je ne voulais pas accabler Irène. Je voulais tout simplement lui dire à quel point son absence a été cruellement ressentie comme une injustice. Mais je ne suis pas en état de discourir, une crampe plus violente que les autres me fait me plier en deux, tandis que je sens une douleur terrible vriller ma tête. Je ne peux d’ailleurs réprimer un cri, serrant la main fine et délicate de la noble dame qui reste à mes côtés. Le souffle court, les yeux clos, je l’écoute, tremblant de tous mes membres jusqu’à ce que j’entende les paroles que j’attendais. Il est vivant, elle en a parlé au présent. Par la Grâce des Trois, il est vivant. Et cette nouvelle qui aurait du me combler de joie finit de m’achever. Serrant les doigts encore plus fort, du moins autant qu’il m’est possible de le faire, je retiens une plainte douloureuse. Je peux mourir en paix en sachant qu’il est quelque part et qu’il vit.

- Merci de m’avoir dit cela…

Je la vis pleurer. Jamais je n’ai vu Irène se laisser aller à pleurer devant moi. C’est un spectacle d’une telle tristesse que je décide, malgré la douleur, de faire quelque chose pour elle. Je tire tout doucement ses doigts afin qu’elle se penche vers moi. Elle ne semble pas opposer de résistance. L’attirant contre moi, je passe mon autre bras autour de son torse pour la garder un peu contre mon cœur dont les battements erratiques pulsent à mes oreilles. Je suis si fatiguée. J’ai tellement mal, et pourtant…pourtant je passe ma main blessée sur ses cheveux et murmure faiblement à son oreille :

- Ne pleurez plus…Tout va bien se passer maintenant. Je prendrai votre boisson…mais pas là…Je suis…fatiguée.

La douce chaleur de ce corps contre le mien m’apaise, je sens le sommeil poindre, tandis que mon corps se rebelle moins, fatigué lui aussi. Les paupières lourdes, le cœur gros, je m’endormis à nouveau, épuisée, tenant dans mes bras un des seuls êtres à avoir compté dans ma vie, m’agrippant à elle comme un noyé à sa planche de bois.

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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMer 4 Mar 2020 - 2:44
Encore et toujours Flore ne pouvait, même au cœur de sa peine et de sa solitude, dissimuler toute la compassion de son âme. Dans les bras fragiles de la jeune femme, Irène se laissa prendre malgré sa détermination.
Le souffle de l’herboriste s’alourdit presque instantanément tandis qu’elle sombrait une nouvelle fois dans l’inconscience, son corps usé exigeant du repos pour affronter sa faiblesse. La comtesse voulue se redresser afin de la laisser profiter de ce sommeil réparateur mais sans trouva bien incapable, une douce chaleur se diffusait dans son être et engourdissait ses membres.

-« Juste une minute. » se promit-elle à voix basse tandis qu’elle fermait les yeux.

Une odeur capiteuse rappelant de la fumée la tira de son sommeil. Elle sût immédiatement à son estomac que de nombreuses heures avaient dû passer. Quelqu’un avait refermé les rideaux pour protéger leur sommeil, le drap les couvrant était changé de frais, et une bougie se consumait très lentement près d’elles afin d’apporter une touche de lumière dans la pénombre. A coté de celle-ci Irène reconnu une sorte d’encens qu’elle avait vu utiliser de nombreuses fois par Jehan lorsque l’un de ses hommes avait passée une nuit trop arrosée. Elle croyait se souvenir que la fumée ainsi crée avait le don de détendre les muscles.
Ce qui expliquait sans doute en partie sa propre léthargie. Presque à portée de main, sur le rebord du meuble trônait une fleur d’hiver fraichement coupée dans un petit broque d’eau, ses pétales faisant face à Flore.

Irène envia malgré elle ce sentiment qu’ils partageaient et qui pourtant les mettait au supplice depuis des mois. Elle avait pourtant bien assez de souffrance pour ne pas en chercher de nouvelle. Mais son désir de partager un lien si puissant avec quelqu’un n’en demeurait pas moins vrai.
Elle s’extirpa doucement de l’étreinte de la jeune femme et celle-ci se recroquevilla presque instantanément sur elle-même comme si sa chaleur la quittait.
Cette vision fit mal au cœur de la comtesse. Son regard glissa vers la porte. Il lui suffisait de sortir, elle pourrait la voir demain. Elles pourraient parler à ce moment-là, en toute quiétude. Cela serait tellement plus simple si elle s’évitait d’approfondir encore sa relation avec elle. Plus leur lien serait ténu, plus facile il serait de le trancher le jour elle mettrait son plan à exécution. Si elle s’inquiétait pour elle à ce moment-là, faiblirait-elle ? Abandonnerait-elle le châtiment qu’elle avait promis à ce monde injuste ?

Ses yeux alternèrent entre le lit et la porte à plusieurs reprises et elle soupira. Elle fit quelques pas vers la grande commode près de l’entrée en dégrafant le dos de sa robe qui chuta au sol dans un froissement de tissu, la laissant nue comme un vers. Elle extirpa l’une des chemises de nuit identique à celle que Flore portait à présent et la fit glisser par-dessus sa tête. Elle défit les attaches des immenses plumes qui ceignaient sa coiffure. Ses cheveux d’argent tombèrent en cascade sur ses épaules descendant jusque bas dans son dos.
Depuis la mort de son époux-père elle les laissait pousser, contrairement au gout de cet homme qu’elle avait respecté des années durant, jusqu’à avoir broyait sa cage thoracique avec une hache.

Elle déposa les deux bijoux de grande qualité sur la chaise qu’elle avait occupée plus tôt et revint vers le lit. Elle souleva doucement le drap et repris place contre Flore, plaçant son corps en cuillère autour du sien tandis qu’elle l’enroulait d’un bras que l’herboriste serra, probablement inconsciemment contre elle. Son souffle ralenti et redevint calme alors que son corps se détendait légèrement.
Irène découvrit un sourire sur ses lèvres qu’elle ne chercha pas à s’expliquer. Elle ferma les yeux et rejoignit sa compagne de chambrée dans ses songes.

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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMer 4 Mar 2020 - 8:51
Je ne sais ce qui me réveilla mais la nuit était tombée depuis un bon moment à en juger par toutes les coulées de cire qui ornaient la petite bougie déposée près de moi…Un mouvement que je fis m’empêcha de me lever, comme je le désirais. Quelqu’un est allongé à côté de moi. Une petite panique fit accélérer mon cœur en voyant qu’il s’agit d’Irène. Il fait sombre, personne ne pourra le voir mais je rougis jusqu’aux yeux. Que fait donc dans mon lit, accrochée à ma taille, la noble comtesse de Valis ? Elle est profondément endormie, son visage détendu et apaisé par le sommeil a l’apparence d’un visage d’enfant rêvant à des mondes féériques. Elle est tout simplement magnifique. Comment se fait-il qu’une telle créature soit seule ? Elle a absolument tout pour elle…Je reste de longues secondes là, à la contempler en silence, profitant, un peu honteusement sans doute, de cette chance inouïe de pouvoir observer un tel spectacle. Elle est l’image exacte de la perfection, celle que je cherche à atteindre depuis si longtemps, sans succès. Peut-être ne peut-il y avoir deux perfections en ce monde, que ce rôle est déjà pris, auquel cas je m’incline de bonne grâce. Replaçant tranquillement une mèche de cheveux d’argent derrière une petite oreille délicate, je m’extirpe avec d’infinies précautions de son entrave afin de tenter de me lever.

Je sens parfaitement la faiblesse de mes membres. Assise sur le bord du lit, les cheveux dépeignés et hirsutes, la chemise empreinte d’une odeur détestable de sueur, je frémis alors que mes pieds touchent le sol, un…un tapis. Il n’y a pas de tapis chez moi, le sol est de terre brute sauf à l’étage où le plancher est toujours froid. Je suis tellement contente de toucher autre chose du bout des orteils que je laisse mes pieds jouer un instant avec les boucles serrées qui ornent le sol de cette pièce immense. Il faut pourtant que je me lève, j’ai très soif et il n’y a pas d’eau ici. Je n’ai pas de châle, je suis en chemise, une chemise sale qui plus est mais il fait nuit, je doute de croiser qui que ce soit à une heure pareille.

J’allais tendre la main vers la bougie quand mon regard fut happé par une vision. Une fleur. Une fleur d’hiver. Je tendis la main et pris le récipient pour approcher la petite chose toute fragile de mon visage. Je fermai un instant les yeux, les lèvres pincées, le cœur battant à tout rompre. Il est ici. Il était là. La violence de ce sentiment contenu pendant des mois malmena tellement mon cœur que je sentis immédiatement une nausée serrer mon estomac. J’ai besoin d’eau. Et j’ai besoin d’air. Tout de suite. Je redépose le petit vase sur la table de chevet et me met debout, avec de grandes précautions, avant de faire un pas, puis un deuxième, ma démarche étant camouflée par l’épais tapis de sol. Je reprends la petite bougie, jetant un regard attendri pour la femme merveilleuse qui dort là et me dirige, lentement, vers la porte entrouverte.

Dans le couloir, immense, plongé dans la pénombre, je dois avoir l’air d’un petit fantôme maigrichon guidé par une flamme vacillante. Le manoir d’Irène m’a toujours impressionné. Tout y est beau, tout y est propre, tout y est propice à l’apaisement. Les grandes fenêtres montrent un ciel de nuit sans nuage, parfaitement étoilé. Ce n’est pas souvent que j’ai l’occasion d’admirer un tel spectacle. Mes fenêtres à l’étage sont trop petites et envahies par les plantes pour me permettre d’observer les astres. Et il est bien entendu hors de question de sortir à la nuit tombée. Quel spectacle, par les Trois. M’approchant d’une fenêtre, je suis littéralement fascinée par ce que je vois. Je ne sais pourquoi mais cette froide luminescence stellaire me rappelle Irène. Une lointaine, constante et merveilleuse luminescence. Prenant une grande inspiration, j’emporte à nouveau ma bougie, progressant lentement dans le couloir, sans bruit, cherchant une porte qui pourrait me mener à l’office.

Les gens de sa maison doivent sans aucun doute dormir, eux, je ne veux pas faire de bruit, ni être un poids pour qui que ce soit, mais peut être reste-t-il un ou deux serviteurs prêts à répondre aux demandes nocturnes. Il doit bien y avoir de l’eau, quelque part. Après une progression longue de quelques mètres, je trouve enfin une porte moins élégante que les autres, plus fonctionnelle, toute de bois brut. Sûrement la porte menant aux cuisines ou, à tout le moins, vers des pièces moins belles, plus pratiques. J’actionne le mécanisme d’ouverture et pousse la porte, avançant la bougie afin de mieux voir, ma chemise serrée contre moi. D’une toute petite voix, je dis alors :

- Il y a quelqu’un… ? Pardon de déranger…Je voudrais…Je voudrais un peu d’eau…S’il vous plaît.

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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMer 4 Mar 2020 - 16:25
Il l’observa quitter la pièce, éclairant son chemin à l’aide de la flamme tremblotante d’une bougie. Celle qu’il avait laissé quelques heures plus tôt afin que l’une comme l’autre ne se réveille pas dans le noir complet, même s’il avait espéré qu’elle dormirait jusqu’au matin. Il l’avait surveillé plusieurs jours durant dans cette taverne et il savait que son sommeil n’avait pas eu l’effet réparateur qu’il aurait dû avoir, provoqué qu’il était par les plantes. Elle portait toujours l’ample chemise de nuit et ses pieds étaient nu. Elle ne cherchait pas à fuir discrètement, ou si prenait très mal.
Cette idée le fit sourire malgré lui.
Assis dans un fauteuil de l’autre côté du grand hall, plonger dans l’obscurité de la nuit, il l’observa descendre les grand escalier courbe qui menait au rez-de-chaussée. Ses traits prenez un aspect fantomatique sous la lueur orange donnant à la scène une touche irréelle.
Pourtant elle était bien là, à quelques mètres, il le savait. Il l’avait touché, il avait senti son odeur, le contact de ses cheveux glissant entre ses doigts. Elle était on ne peut plus réelle. Et cela provoquait en lui une peur qu’il n’arrivait que de justesse à contrôler.

Comme elle devait le haïr. Il avait fait des promesses, lui avait promis d’être celui qui serait différent. Et il s’était évaporé comme le plus égoïstes de goujat de basse fausse de cette foutue cité. Sa loyauté lui avait couté un bien si précieux qu’il n’arrivait pas encore tout à fait à l’appréhender.
Comme un membre coupé qu’on a toujours l’impression de sentir. Il n’était pas certain d’être prêt à faire face à la haine de la femme qu’il aimait, ni a la honte qu’il ressentait en sachant que ce serait parfaitement légitime.
Depuis la disparition de son frère il avait toujours fait attention à ne pas s’attacher, à ne pas prendre le risque de perdre encore une fois une chose aussi importante. Mais il avait suffi qu’ils parlent, qu’ils se fréquentent l’espace de quelques heures pour qu’il jette ses bonnes résolutions aux oubliettes et se plongent à corps perdu dans ses sentiments.
Tout cela pour six mois d’une tristesse insondable et de regrets. Une torture. Qu’il avait de plus imposé à celle qu’il voulait protéger.

Son état actuel était la conséquence de ses actes, et de son incapacité à trahir la promesse qu’il avait fait à Irène. Deux formes de culpabilités qui s’affrontaient avec violence dans son être. Mais il ferait face, il encaisserait sa colère et sa tristesse.
Flore s’enfonça dans un couloir en examinant les portes, elle cherchait quelque chose. Il se leva sans et la suivit sans un bruit. Elle trouva finalement son objectif, la cuisine.
Entendre sa voix le fit frissonner, une onde de chaleur remontant son dos. Mais ce n’était pas à lui qu’elle s’adressait, il y trouverait sans doute beaucoup moins de chaleur quand ce serait le cas. Elle poussa la lourde porte qui pivota dans un grincement qui couvrit son approche. Il attrapa le bord du porte chandelle au moment où il parla, qu’elle ne laisse pas tomber la flamme.

-« Alice ne sera pas levée avant une bonne heure, c’est elle qui dirige le personnel. »

Il croisa le regard intense de la jeune femme et ne sut le soutenir. Il baissa les yeux et s’engouffra devant elle dans la pièce, les épaules voutées sous le poids de sa culpabilité. Il s’approcha d’une table en bois épais sur laquelle il posa la bougie et indiqua l’une des simples chaises qui l’entourait.

-« Assied-toi je vais te servir à boire. »

Lui tournant le dos il s’activa dans la pièce en prenant bien garde à ne pas croiser son regard brulant tant il craignait qu’elle en parle. Il trouva un verre et le remplit d’une eau fraîche tirée du puit la nuit même. Quand il revint il aperçu du coin de l'oeil une cascade de fil d'argent disparaissant dans l'ombre du couloir derrière eux. Il déposa le verre près d’elle et prit place sur la chaise la moins éclairée par la bougie pour que la lumière n’éclaire pas son visage fatigué à la barbe mal entretenue. Et avant tout que la honte dans son regard n’agresse pas la jeune femme déjà bien fragilisée par ses actes.

-« Je… »


Il se tut et ne sut reprendre, les jointures de sa main blanchissant tant il serrait le poing posé sur la table.


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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyMer 4 Mar 2020 - 21:29
Le choc est immense.

Le silence qui a suivi ses phrases…assourdissant.

Il s’est emparé de la minuscule bougie, de la fragile lumière, pour la déposer sur une table, éclairant à peine les lieux.

Le choc est total.

Je suis incapable de faire le moindre mouvement. Tout ce que je peux faire, tout ce que je suis en état de faire, là, tout de suite, c’est essayer de le distinguer parmi les ombres de la pièce. L’écho de sa voix chérie résonnait encore à mes oreilles alors même qu’il me montrait une chaise. Une chaise que je ne vis pas, de toute façon. Je ne comprends pas. Je ne comprends plus. Flottant dans une incompréhension infinie, je dus prendre appui sur le mur, près de la porte, un malaise menaçant de me faire choir à tout instant.

Il s’assoit, je crois.

Il ne dit plus rien.

Il n’y a plus un bruit, hormis celui de mon souffle, considérablement raccourci. Je me redresse un peu, avant de faire un pas, puis un autre, encore un autre, approchant de la lumière, livide. Une lumière qui menace de s’éteindre, vacillant sur une chandelle épuisée.

- …Jehan

Le son de ma voix vrille mes propres oreilles. Je ne la reconnais pas.

Je me fiche de ce verre d’eau. Je me fiche de cette obscurité qui menace d’envahir la pièce. Je veux le voir. Je parviens à toucher la table, à prendre appui, maladroitement, ne quittant pas ma cible des yeux ou, à tout le moins, la haute silhouette assise là bas, dans la pénombre. Pourquoi se tait-il ? Pourquoi me laisse-t-il dans le silence ? N’ai-je pas droit à quelques égards ? A quelques mots ? J’ai tant rêvé ce moment, tant de fois ! des nuits entières à pleurer, des jours entiers à rêver ces retrouvailles. Et il se tait. J’ai même l’impression de l’ennuyer. Comme si j’étais une charge, un poids. Comme si ma présence le rebutait. Cette idée me broie l’estomac, je m’arrête un instant pour reprendre mon souffle et continue jusqu’à parvenir à ses côtés, moi debout, lui assis.

- Pourquoi…Pourquoi tu ne dis rien… ?

Je vois les reflets de ses boucles à peine éclairées par la faible lueur de la bougie, je devine les contours de son visage, je meurs d’envie de le toucher, du bout des doigts, afin de m’assurer qu’il n’est pas une ombre ou le fruit de mon imagination. Et pourtant je me retiens. J’ai peur qu’il s’envole et qu’il ne revienne plus jamais. J’ai peur de revivre cet enfer long de plusieurs mois. Le bras que j’avais levé pour le toucher s’abaissa. Il n’est pas…Il n’est pas heureux de me revoir, comme si ma présence n’était pas souhaitée. Les yeux fermés, j’inspire longuement avant de m’éloigner un peu, réinstaurant une distance entre nous. Le verre d’eau. Ce verre ferait une excellente diversion. Il faut à tout prix que je laisse ce cœur s’emmurer dans le silence, mais pas ici. Pas devant lui. Je m’en saisis donc et le garde contre moi, silencieuse. Ce n’est pas du tout ce que j’avais imaginé. Ce n’est pas cela qui était dans mes prières, de froides retrouvailles dans une pièce sombre. J’ai prié pour un mort vivant. J’ai prié pour rien. Je bois une gorgée d’eau et murmure enfin :

- Tu as raison…Il vaut peut-être mieux ne rien dire du tout. Je…Je suis juste heureuse que tu sois en vie. Merci…pour le verre d’eau…

La lumière venait de mourir, nous plongeant tous deux dans une pénombre seulement déchirée par la faible lueur des étoiles et les lumières de la cité, plus bas. Il était temps. Je ne pouvais plus cacher mes larmes, je devais m’en aller avant de m’écrouler ou de perdre la raison, définitivement. Et pourtant mes pieds refusent de se mettre en mouvement. Je maudis en silence cette faiblesse ultime, tout autant que cette idée de venir ici, en pleine nuit.


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Irène de ValisComtesse & Modératrice
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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyJeu 5 Mar 2020 - 2:55
Il gloussa sans aucune joie, et son rire pris la forme d’un sanglot qu’il étouffa.
Oui c’était sans aucun doute pour le mieux, juste du silence, pour aujourd’hui et le restant de leurs jours. Le vent fit bruisser les feuilles d’un arbre qu’on ne pouvait voir d’ici. Etonnamment, ce fut cette autorisation à ne rien dire qui descella les lèvres du capitaine. Il allait dire des choses difficiles, stupides sans doute. Peut-être même qu’elle ne pourrait le comprendre, mais il trouvait encore plus abjecte de se taire uniquement car elle lui offrait une porte de sortie miraculeuse.

-« Que pourrais-je te dire Flore ? Que je suis désolé ? Que je te demande de pardonner l’impardonnable ? Que j’invente une histoire rocambolesque qui t’expliquerait, qui justifierait le mal que je t’ai fait ? »

Il secoua la tête en se maudissant.

-« Je n’ai rien de tout cela pour toi, je n’ai même pas la vérité à te donner. Irène avait besoin de moi, j’ai obéi. »

Il avait fermé les yeux et respirait bruyamment, comme s’il venait de courir une heure durant. Sa main se tendit par-dessus la table et il effleura l’épaule de sa compagne sans oser la toucher vraiment. Tout juste ressentit-il le contact de sa chemise de nuit. Sa paume retomba mollement sur la table.

-« Je t’aime Flore. Je n’ai pas cessé un instant de t’aimer depuis la seconde où tu m’as claquée la porte de ta maison au nez pour enfiler un pantalon que j’avais ramené. »


Il sourit bien malgré lui à l’évocation de ce souvenir, l’impression qu’elle lui avait fait, cette colère passagère, son esprit curieux. Oui, il l’aimait déjà avant qu’elle ne s’offre à lui. Elle était ce qui lui manquait. Elle était si vivante, même désemparée et blessée.

-« Mais j’ai envers elle une dette. Je ne pourrais m’en défaire, elle ne sera remboursée qu’à sa mort, ou la mienne. Irène a payé mille fois le prix de ma loyauté. Mon cœur bat pour toi, mais les chaînes qui l’entourent porte son sceau à elle.
Je suis prisonnier de ces lieux, et les barreaux sont ceux que j’ai moi-même forgé. »


Il souffla, c’était la première fois qu’il exprimait aussi clairement sa situation, encore plus devant une personne extérieure à cette maison. Mais Flore était la seule qui avait le droit d’entendre ce genre de pensée de sa part, car elle était sa moitié, même maintenant alors qu’il lui avait brisé le cœur, elle le demeurait.
Il était désolé de lui faire porter ce fardeau supplémentaire, mais il ne pouvait renier ses sentiments. Elle était la moitié perdue de son âme, et le peu qu’il avait préservé de la sienne avait besoin de se montrer honnête envers elle.

-« Je veux juste que tu le saches. Si je ne t’ai pas toujours tout dit car je n’en avais pas le droit. Jamais je ne t’ai menti. Je n’ai pas abusé de tes sentiments. Je n’ai pas profité de la situation avec une paysanne que je voulais mettre dans mon lit. Tout ce que je t’ai dit était sincère. J’ai simplement cru que je parviendrais à te protéger du reste de ma vie. »

Une seconde de silence passa avant qu’il ne reprenne.

-« On peut dire que j’ai lamentablement échoué n’est-ce pas ? »


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Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyJeu 5 Mar 2020 - 9:04
Trouver un appui.

Vite.

J’avance maladroitement vers le mur plongé dans une obscurité totale, posant ma main libre sur la pierre, alors que l’autre maintient toujours ce verre d’eau stupide contre ma poitrine, comme si c’était en cet instant mon bien le plus précieux. Entendre sa voix est difficile, même si elle a la douceur du miel à mes oreilles privées de ses paroles pendant si longtemps. Tapie dans les ténèbres, je l’écoute, aussi attentivement que le permet mon état de santé, bancal et chancelant. Ce n’est pas ce que j’avais espéré. Je préférais de loin mes rêves chéris, ceux dont Irène semble déterminée de me priver. Dans ces rêves fabuleux, il n’y a pas d’obscurité. Il n’y a pas de mal. Il n’y a que de la lumière. Des couleurs que je ne connais pas, subtils dégradés de rouge, de bleu ou de vert. Il y a le fringuant capitaine que j’aime, celui qui me comble de bonheur, de sourires moqueurs et de baisers tendres. Il y a la mer, un jardin, des enfants. Il n’y a pas cet homme-là, lointain, distant, amer. L’homme de mes rêves se serait levé, il m’aurait prise dans ses bras sans dire un mot, et il m’aurait laissé le temps de reprendre contact, au lieu de maladroitement se justifier en reportant la faute sur quelqu’un d’autre. Appuyant mon épaule contre le mur, je lui tourne le dos, tête basse, regardant le froid scintillement de cette eau qui tremble dans le petit verre. Un tremblement que je ne parviens pas à réprimer. A moins que ce ne soient mes larmes qui viennent mourir dans le petit récipient, troublant ce qu’il avait bien voulu me donner. Impossible de le dire. Un violent mal de tête vrilla mes tempes, avec la rapidité d’un éclair, ce qui acheva de me faire perdre le peu de contenance que j’avais réussi à garder. Le verre, fragile réceptacle de mon désespoir, alla s’écraser sur le mur opposé avec un regain de violence qui me laissa à court de souffle. La poitrine soulevée par l’effort, je me tourne vers lui, indignée.

- Tu mens.

Je ne sais où je trouvai cette force soudain, sûrement la rage. Une rage, une colère immense, que je ne parvenais plus vraiment à maîtriser, alors que j’avançais difficilement vers lui, à nouveau.

- Tu mens, Jehan.

Je fis une courte pause en prenant appui sur la table, à bout de souffle, mes jambes menaçant de céder sous mon poids. Je sentais mes genoux faiblir. « Pitié, pas maintenant », pensai-je. Reprenant une grande inspiration, j’ajoutai :

- Et tu te mens à toi-même. Rien ne t’était plus facile que de me dire que tu t’absenterais. Tu pouvais le faire, tu pouvais me le dire, je n’ai jamais trahi un secret, JAMAIS !

J’ai crié. J’ai tapé du poing sur la table. Mon poing bandé un peu plus tôt par Irène. Une douleur diffuse traversa mes os, avant que je ne reprenne ma marche lente, inexorable vers lui, les yeux flambant de colère et de peine en même temps.

- Pendant des mois, j’ai du survivre comme je le pouvais. Sans vous. Sans toi. Les Gorlois, ces fils de chien que tu as corrigé, se sont vengé au centuple. Ils m’ont privée de mes derniers clients. J’ai du compter sur le hasard afin de pouvoir soigner des gens. J’ai du MENDIER, Jehan, pour pouvoir manger ce que personne d’autre ne voulait. J’ai du m’humilier tant de fois, juste pour ne pas crever de faim, dans ma solitude. Parce que j’étais devenue la catin du Capitaine ! J’ai attendu, comme une conne, le jour où tu reviendrais, où tu passerais ma porte, en me disant que tu ne partirais plus, que tout ça est du passé…Puis j’ai renoncé. Le seul moyen de pouvoir te voir, c’est ce dont vous essayez aujourd’hui de me priver. Regarde…Regarde moi !

Je venais de me saisir de ses épaules, le secouant faiblement, de toute la force qu’il me reste. C’est à peine s’il bouge…Mon cœur est sur le point d’exploser, je sens un feu brûler littéralement mes yeux et une nausée poindre en mon estomac vide. Je sens ma gorge se contracter. La voix qui en sort est enrouée. Horrible.

- J’aurais fait n’importe quoi pour toi. N’importe quoi…Même rester sans te voir pendant des mois, si au moins tu avais eu la décence de me dire ton absence, je n’aurais même pas demandé d’explication, je sais que ton poste ici est important, je le SAIS. Ça aurait TOUT changé…

Il est sous ma main, je pleure deux fois plus, sans pouvoir m’arrêter. Ma main douloureuse quitte son épaule pour se poser sur sa joue. Un mouvement d’une douceur qui me surprit moi-même. C’était comme si l’instinct reprenait le dessus. Mon corps parle pour moi et dit l’exact opposé de mes paroles.

- Quand on aime quelqu’un…on ne fait pas ce que tu as fait…c’est…c’est pas correct. Regarde moi…Je ne suis rien de plus qu’une ombre. J’ai tout perdu.



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Irène de ValisComtesse & Modératrice
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MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] EmptyJeu 5 Mar 2020 - 13:21
Comme il aurait dû s’y attendre elle ne pouvait comprendre ce qu’il lui avait dit. C’était envisageait trop de cruauté pour une personne comme elle si pleine de compassion. Il devait avoir fait cette erreur par lui-même, l’avoir privé de sa dignité et de son bien-être de sa propre personne. Ell n’imaginait pas un lien si fort, une prison si solide, qu’une personne prise dedans pouvaient se retrouver à faire souffrir la personne qui l’aimait et qu’elle aimait, uniquement par la volonté d’une troisième.
Il ne l’avait pas revu, pas prévenu, pas surveillé. Car Irène en avait voulu ainsi. Elle l’avait envoyé au Labret et lui avait interdit le moindre contact avec Flore. Son plan était trop important, et entretenir une relation avec cette apostat comme certain la considérait hors et au sein de la ville, était simplement un risque trop grand tandis qu’elle mettait en place ses pièces au sein du temple. Il avait juste obtenu de la comtesse qu’elle garde un œil même lointain sur elle, pour lui. Elle lui avait accordé, et promis d’intervenir quand la situation aurait évolué, ou si l’état de Flore devenait dangereux. Les deux étaient survenue à la même période.

Mais il ne pouvait lui dire cela. Pas pour Irène non, mais pour elle. Elle avait dans ce manoir une chance de faire ce qu’elle voulait de sa vie, au moins temporairement, le plan d’Irène pouvait mettre des années à s’appliquer. Et malgré sa cruauté latente, elle tenait à Flore, et ferait de son mieux pour l’aider tant qu’elle n’entravait pas ses plans.
S’il lui avait dit elle ne pourrait acceptée l’aide de celle qui l’avait fait souffrir volontairement. Il était déjà entrain de la perdre. Au moins pouvait-il essayer de protéger certain de ses rêves. Il se sentait las, il n’avait pas dormi depuis deux jours entiers et il avait l’impression de tenter de s’arracher le cœur de la poitrine. Flore le secouait par les épaules l’accablant un peu plus de ses erreurs. Oui, mieux valaient qu’elles restent siennes.

Ses doigts fiévreux sur sa joue le firent frissonner comme s’il avait soudain été plongé dans un bain d’eau glacée. Se contact pourtant si désirait était une torture. Comme elle lui demandait, il la regarda dans les yeux. Si seulement elle pouvait voir ce qu’il voyait. Un torrent de lumière et de possibilité sur lequel ses crimes avaient jeté un voile d’obscurité. Il suffisait de le déchirer pour qu’elle se répande autour de sa personne.
Non, elle n’avait rien d’une ombre. Il posa ses grandes mains sur les côtés de son visage, posant son front contre le sien.

-« Je suis tellement désolé… »

Il ne pouvait pas lui mentir, c’était une promesse tacite entre eux. Mais il ne pouvait pas non plus lui dire qu’il avait respecté les vœux d’Irène, ni lui dire qu’il avait été inconscient du mal qu’il lui faisait par son absence. Les trois savaient qu’il y avait pensé chaque instant depuis la dernière fois qu’il l’avait vue.
Alors il se contente de cette phrase, cette pitoyable phrase qu’il haïssait. C’était de la lâcheté.

-« Tu as raison, personne ne devrait faire cela à quelqu’un qu’il aime. Aucune personne étant digne de s’appeler être humain ne devrait faire cela.»

Il se redressa de toute sa taille la dépassant amplement, son regard toujours posé sur elle son pouce caressant sa joue. Une larme coula sur la sienne. Puis il la repoussa doucement.

-« C’est là qu’est le problème Flore, je ne suis pas digne d’un être humain, pas digne de toi. J’ai tué les Gorlois il y a deux jours, alors que tu désespérais mon retour sur le banc d’une taverne. J’ai égorgé ces porcs avec la même main qui te caresse la joue. »

Il l’ôta d’ailleurs avant de poursuivre.

-« Et tu sais ce qui est le plus terrible ? C’est que je n’en ressens pas la moindre honte, pas une once de culpabilité. Je le referais si c’était à refaire. Je souffre de t’avoir abandonné, et pourtant j’ai pris leurs vies sans même y penser. Juste parce qu’il t’avait fait du mal en mon absence. Voilà le genre de chose que je suis Flore, un monstre de la fange qui s’habille en homme et porte une épée. »


Voilà une vérité qu’il pouvait dire, Irène n’avait rien à voir avec ces actes, c’était de sa propre initiative. Il avait été froid et efficace, comme on coupe un membre gangrené, il avait fait couler leur sang et était revenu la surveiller dans cette taverne. Alors seulement son cœur s’était remis à battre comme celui d’un être vivant. Il baissa les yeux, honteux de regarder en face une personne tellement meilleure que lui.
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