Marbrume


Le deal à ne pas rater :
Funko POP! Jumbo One Piece Kaido Dragon Form : où l’acheter ?
Voir le deal
Le deal à ne pas rater :
Funko POP! Jumbo One Piece Kaido Dragon Form : où l’acheter ?
Voir le deal

Partagez

 

 Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas 
Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMar 14 Avr 2020 - 0:57
La comtesse boue de colère et d’inquiétude mais ne parvient pas à l’exprimer. Alors elle se contente d’hocher la tête, incapable d’exprimer son désarroi. Cela lui donne mal au crâne de chercher ce qui ne va pas dans sa réaction. Plus encore alors que Flore, la douce, la colérique, la franche Flore, lui ment autant par omission que directement. Ça fait mal mais sans savoir pourquoi. Elles se sont éloignées, et la Comtesse ne parvient plus à trouver pourquoi. Elle sait que ça devrait être là, évident. Mais ça n’y est pas. Ça ressort pourtant par moment, comme avec ce mot d’accueil, cette étreinte qu’elle a dû se forcer à rompre. Oui c’est là, cela agit à sa place mais sans lui expliquer pourquoi. Elle soupire toute doucement, accablée.
Sa main fait glisser une mèche de cheveux derrière l’oreille de l’herboriste. Encore un geste qu’elle n’a pas commandé, il est arrivé simplement. Tout droit sorti de cet espace vide dans son esprit.

Allez-vous reposer Flore. Vous semblez effectivement en avoir besoin. Quand vous vous réveillerez, nous nous occuperons de vos poignets, et de trouver une meilleure histoire pour Jehan. Je ne crois pas que nous le verrons avant demain soir, cela nous laisse un peu de temps. »

Elle ne fait pas semblant d’en croire un traître mot. Pas semblant de croire à une disparition volontaire, encore moins sans importance. Flore a plongée la main dans un nid de serpent et s’est faîtes mordre. La comtesse ne voit aucun intérêt à se montrer plus stupide qu’elle n’est, ni à la blâmer à présent. Surtout que la jeune herboriste a semble-t-il décidé de la garder en dehors de cet aspect de sa vie. Alors elle lui accordera le silence qu’elle demande, et se contentera de lui donner les armes pour l’entretenir. C’est ce qu’il y a de mieux à faire non ?
Alors pourquoi est-ce si douloureux ?
Elle s’écarte de son chemin pour la laisser accéder à sa chambre, car elle n’a pas sa place sur la route de la jeune femme. La porte se ferme et la comtesse reste là de longues secondes, ne parvenant pas à ordonner à ses jambes de s’éloigner de la surface de bois. Enfin, après un énième ordre mental, ses membres obtempèrent. Elle redescend l’escalier, seule. Et trébuche par deux fois avant de regagner son bureau de travail. Mais elle ne s’assoit pas sur la chaise, elle n’en a plus la force. Elle s’appuie contre la porte et glisse au sol. Ou plutôt tombe lentement, sans contrôle autre que celui de son dos frottant contre le bois.

Elle glousse, mais sans joie, sans même savoir pourquoi. Une fleur sous la pluie. Juste là devant elle. Elle aurait juste à tendre le bras pour la toucher. Mais ses membres sont de plombs. Elle veut crier, elle veut se débattre, elle veut toucher les pétales de la fleur, juste une fois, juste un instant. Un liquide chaud réchauffe ses mains. Quand elle baisse les yeux, elle les découvre couvertes de sang. Alors tout devient claire. Elle est sale, elle est laide, elle est souillée. Même cette pluie fraîche et pure ne peut la nettoyer. Elle ne doit surtout pas toucher la fleur. Elle ne doit pas la tacher…

Quand elle ouvre les yeux, la lumière de l’après-midi est déjà bien avancée. Quand a-t-elle dormit ? La fleur n’est plus là. Il n’y a que le parquet et le tapis devant elle. Elle bouge. Ses membres craquent de l’inconfortable position au point de lui arracher un gémissement douloureux. Elle se sent faible, mais plus reposée. Son rêve trace son chemin dans son esprit. Tout doucement elle déplie la jambe coincée sous elle. Il lui faut plusieurs minutes pour retrouver une circulation normale et assez d’équilibre pour se relever. Elle entrouvre la porte, pour qu’une personne passant devant se sente le droit d’entrer. Elle ne sait pas si elle reverra sa… sa quoi ? Elle ne sait pas si elle reverra Flore ce soir. Son état de fatigue l’emmènera peut-être jusqu’au matin. Elle atteint son fauteuil et s’y enfonce. D’un tiroir sort un petit verre et une bouteille de liqueur. Bien plus fort que son vin habituel. Elle a besoin de se réchauffer les sens.

Que vais-je faire de toi jolie fleur ? Dois-je te cueillir ou te laisser pousser par toi-même ? » Soupire-t-elle en faisant tournoyer un instant le liquide ambré pour finir par le boire d’une gorgée brûlante.
Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMar 14 Avr 2020 - 10:23
Le rouge s’empara de mon visage alors qu’elle disait si tranquillement avoir vu les traces sur mes poignets et affirmait ensuite chercher une meilleure histoire à raconter à mon fiancé. Je suis donc incapable de dissimuler quoique ce soit à Irène, ça en devient absolument terrifiant. Elle n’a pas cru un mot de ce que je lui ai dit, elle me le fait savoir et c’est bien ça qui me gêne terriblement. Presqu’en fuyant, je me détournai alors de la comtesse pour entrer dans ma chambre en murmurant :

- A plus tard, Irène.

Je fermai doucement la porte, avant de m’appuyer contre elle, écoutant les bruits dans le couloir. Elle ne bouge pas durant de longs instants qui me semblent des éternités de silence. Lorsque enfin j’entendis son pas s’éloigner de ma porte, je poussai un soupir de soulagement. Je sus qu’elle ne chercherait pas à en savoir plus pour l’instant et je me dirigeai alors vers mon lit. Jehan doit revenir demain, selon elle. Il ignore donc peut-être tout de ma disparition ce qui me réconforte un peu. Peut-être n’aurai-je donc pas à mentir trop, finalement. Machinalement, j’ôtai la robe et la chemise que j’envoyai négligemment dans un coin de la pièce avant d’aller me réfugier sous les draps, m’enveloppant dans les tissus frais et parfumés qui m’avaient tant manqué.

Le repos fut évidemment immédiat à défaut d’être réparateur. J’ai vécu des heures de silence et de peur dans cette cave, à craindre à peu près tout et n’importe quoi, la violence de La Muraille, les gestes du comte. Dans mon sommeil, je revis avec angoisse son sourire, ressentis à nouveau ses mains sur moi, perçus son odeur de bois et d’épices, subtile et racée à la fois.

Lorsque je m’éveillai, en sueur, au bout de quelques heures, je grelottais dans mon lit. C’est la première fois que cela m’arrive, d’avoir peur à ce point. Peur, non seulement pour moi, mais aussi pour les deux seules autres personnes qui comptent tant. Jehan et Irène. J’ai peur pour lui parce que je sais que si cette histoire parvient à ses oreilles, il est capable du pire, de se mettre en danger pour se venger, me venger. J’ai peur pour elle parce que je sais Irène capable de bien des choses, désormais, dans cette violence qu’elle ne parvient pas toujours à dominer. Imaginer mon Irène en présence de cet ignoble Rougelac me donne une nausée qui m’oblige à m’asseoir dans mon lit. Imaginer le comte agir avec elle comme il a agi avec moi m’oblige à passer mes deux mains sur mon visage, horrifiée.

Je regarde brièvement par la fenêtre, le soleil est déjà à son déclin. Peut-être sommes-nous en fin d’après-midi. Je me lève, me dirigeant vers la cruche d’eau et le petit bassin déposé juste à côté pour passer un peu d’eau fraîche sur mon visage, mes bras, tout mon corps afin de faire disparaître cette affreuse odeur de cave et de sueur qui me recouvre. Machinalement, je vais chercher une chemise propre, toute simple, une robe qui l’est tout autant, avant de passer la brosse dans mes cheveux. Essayer de garder le contrôle est essentiel. Ajustant ma tenue pour paraître impeccable, je sors enfin de ma chambre.
Passant devant la porte entrouverte de son bureau, j’hésite une seconde, avant de prendre une profonde inspiration et d’entrer doucement. J’ai composé mon plus joli sourire pour l’occasion. Elle est là, assise dans son fauteuil, un verre vide à la main. Elle a l’air étrange, perdue dans des pensées. Je toussote un peu, afin de signaler ma présence et dit enfin, en avançant vers elle :

- C’était ouvert. Je ne voulais pas vous déranger. Je voulais juste savoir si nous pouvions revoir les lettres. Mais vous…vous semblez fatiguée. Voulez-vous que je vous laisse en paix pour aujourd’hui ? Nous pourrons voir cela un autre jour.

Je reste là, juste devant elle, les mains sagement nouées sur le devant. Avisant le verre vide, je ne pus m’empêcher de soupirer. Elle a encore bu. Elle a l’air ailleurs. Peut-être même est-elle ivre, je n’en sais rien. Irène est une statue qui respire, au regard lointain posé sur un point invisible. Je murmurai alors, émue de la voir dans cet état :

- Irène, voulez-vous que je m’en aille ?

Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMar 14 Avr 2020 - 12:06
Un soupir. Une critique ? La comtesse se le demande en observant Flore. Pas que cela la vexe. Elle boit depuis des années, pour les meilleures comme les pires raisons, et elle n’espère pas s’améliorer sur ce point ni se soumettre à l’avis d’une tierce personne. Plus jamais elle ne se soumettra à une volonté autre que la sienne pour un sujet qui la concerne. Plus jamais.
Mais elle ne fait qu’extrapoler un soupir qui ne la concerne peut-être même pas. Ses membres faibles ont regagné en force grâce à cet alcool fort, ou du moins lui en donne suffisamment l’impression pour que ses gestes soient fluides. Elle indique d’un geste délicat la chaise de l’autre côté du bureau. Elle sourit, mais ne semble pas exprimer de joie.

C’est justement ce que je me demandais, Flore. Asseyez-vous donc, vous ne me dérangez pas. »

Elle l’observe prendre place et se demande si le masque qu’elle porte est aussi fragile que celui de l’herboriste. En sa présence à elle, peut-être. Flore à cette fâcheuse tendance à la rendre plus transparente. Qu’elle le veuille ou non. Cependant il est important qu’elle garde le contrôle. Flore lui a montré qu’elle n’avait pas droit de se montrer trop honnête en sa présence. Si elle doit partir, alors la jeune Irène ne veut plus la décevoir davantage. Elle ne veut plus se sentir honteuse de vivre en la regardant. Elle se ressert un verre, sans en proposer à sa compagne, pourtant elle pose un deuxième exemplaire du petit contenant près de la bouteille. Une invitation muette pour celle qui comme elle peut avoir besoin de noyer un secret.

J’ai envoyé Jehan en mission, en espérant que ce temps suffise à vous voir revenir. Il dépose un courrier en mon nom au Labret. A Usson plus particulièrement. Je vous ais prévenue le jour de son départ car il n’en a pas eu le temps. Je maquillerais vos poignets le temps qu’ils guérissent. » Elle la balaya du regard avec une question dans les yeux. « Et toutes autres marques que vous estimerez nécessaires. Ce sera à vous de faire en sorte qu’il n’ait pas l’occasion d’y jeter un œil trop expert. Pour ce qui est de vos presque deux jours à combler. Vous devez savoir qu’Alice est partie voir de la famille en ville avec mon accord depuis hier soir. Une nièce qui aurait une mauvaise grippe. Vos affaires de la cruche dorée sont empaquetées dans le petit salon. Je me suis dit que cela pourrait justifier votre sortie le jour de son départ.
Pour le reste je pense qu’une leçon le matin et l’entretien des jardins l’après-midi sera une occupation suffisante pour ne pas éveiller ses soupçons. Nous avons taillé la plupart des rosiers en prévision des climats plus rude de l’hiver à venir. Hier soir, j’ai joué de la harpe, et vous avez travaillé vos exercices d’écritures. N’en faites pas plus que nécessaire. Plus vous ajouterez de détails plus il aura de chance de s’en apercevoir. Ne répondez pas à des questions qu’il ne pose pas. Contentez-vous de lui faire ressentir combien il vous a manqué. Et tenez-vous en à notre petite histoire s’il demande.
»

Elle sortit d’un tiroir l’ardoise et la craie qu’elle gardait maintenant presque en permanence. C’était une sorte de symbole affectif. Un morceau de souvenir d’un instant important partager avec l’herboriste. Une chose qu’elle pouvait regarder pour se souvenir quand celle-ci serait partie avec l’homme de sa vie.
Elle se leva avec lenteur, pour ne pas abuser de ses forces et contourna le bureau. D’un geste nonchalant et qui exprima pourtant une quasi-colère qu’elle ne comprenait pas, elle envoya plusieurs liasses de papiers sur le sol, libérant un espace devant Flore. Elle posa l’ardoise et la craie, et s’assit sur le bord du large meuble. D’une voix douce parée d’un sourire elle reprit.

Il me semble que nous en étions aux sons composés. Comment écririez-vous le mot “cœur“ en vous basant sur ce que vous savez déjà ? Petit indice, cela commence par un c. »

Était-ce cela qu’elle attendait d’elle ? Allait-elle pouvoir combler l’espace vide dans son esprit si elle s’appliquait suffisamment ? Ou était-ce définitivement perdu ? Passerait-elle sa vie à effectuer des gestes qu’elle ne contrôlerait pas ? Comme si une autre elle s’amusait à enfiler sa peau pour agir.
Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMar 14 Avr 2020 - 14:53
C’est justement ce que je me demandais.

Ha. On en est là. Bien. Comme ça c’est clair. Sans répondre un seul mot, je m’assois face à elle, sur la chaise qu’elle indique. En d’autres temps j’aurais certainement baissé les yeux, regardé ailleurs, voire même me serais excusée pour les Trois seuls savent quoi mais pas là, non. Là je me contente de la regarder, puis de regarder ce verre vide à côté de la bouteille. Me rappelant la dernière fois que j’ai bu un peu trop, je préfère éviter toute absorption d’alcool d’autant plus que, à en juger par la couleur que je peux observer, il ne s’agit pas de vin. Je repose donc mon regard sur la comtesse, les mains nouées sur mes cuisses, en essayant de garder le contrôle le plus possible.

Jehan est au Labret. Autre nouvelle. Peut-être aura-t-il ainsi l’occasion de voir si nous pouvons nous installer là-bas, de quelle manière et où exactement. Peut-être même pourra-t-il entrer en contact avec une personne qui pourrait nous guider, nous aider. Je me perds dans mes pensées pendant qu’elle parle, occupée que je suis à songer à d’autres personnes qui pourraient éventuellement avoir besoin de mes services le temps de me constituer un petit bas de laine. Et je ne connais personne sur cette Esplanade d’assez riche ou puissant qui pourrait éventuellement être intéressé par mon savoir.

… et l’entretien des jardins l’après-midi sera une occupation suffisante pour ne pas éveiller ses soupçons.

Mh. Oui. De la harpe. Des exercices de rosiers. De la taille de lettres…D’accord, d’accord.

- Ça a l’air si facile pour vous, de mentir. Merci pour les…suggestions. Je note tout ca dans un coin de ma tête pour son retour, c’est gentil à vous de m’aider à sauver les apparences.

Encore une fois j’ai parlé dans vraiment réfléchir à ce que je dis. Fermant les yeux avant de soupirer à ma propre bêtise, je regarde ensuite ailleurs. Elle est fâchée. Elle est en colère. Elle n’a pas besoin de faire comme si tout ça était parfaitement normal, je le sais, qu’elle est fâchée. Non, je ne lui parlerai pas de ces autres traces situées à mes chevilles. Quant à son maquillage, je m’en occuperai seule. Tant pis. Je sens bien que je la gêne, elle ne prend même pas la peine de le dissimuler correctement. Toute son attitude hurle le désarroi et la frustration contenue. Et pourtant…Je ne peux pas lui dire. Je ne peux pas lui expliquer. Elle serait en danger. Je refuse qu’Irène approche le comte de Rougelac et si pour ça je dois mentir et m’en aller, et bien je le ferai.

Elle se lève, elle contourne le bureau et débarrasse violemment son bureau de quelques feuilles qui y trainaient, preuve, s’il m’en fallait une, qu’elle ne se contrôle qu’avec difficulté, ce qui me fait une peine immense. Elle dépose l’ardoise devant moi sur son bureau, ainsi que la craie, de petits objets que je regarde, d’un air morne. La comtesse s’assoit sur le bord du bureau et me suggère le mot « cœur ». Je regarde la comtesse, je regarde l’ardoise, puis je regarde mes mains et murmure :

- Si je vous dis que vous aviez raison, vous arrêterez d’être en colère ?

Je prends l’ardoise, la craie et me concentre alors sur ce que je dois écrire. C’est un mot difficile, avec une lettre qu’on ne prononce pas mais je ne sais plus laquelle. J’ai du mal à me concentrer en ressentant toute son aura de colère brûler jusqu’à moi. Traçant un « c » plus que correct, je murmure à nouveau :

- Je n’aurais pas du revenir ici. J’aurais du repartir dans les faubourgs pour ne plus vous ennuyer. Puisque vous y avez songé aussi…c’est que je ne dois plus avoir ma place ici.

Je ne la regarde plus, je me demande quelle lettre écrire par la suite. C’est un « e », j’en suis presque certaine. Je trace la lettre avec application, avant d’enchaîner sur le « o » puis le « u », avant d’écrire un « r » tout à fait satisfaisant, selon moi. M’en aller. Peut-être est-ce en effet la dernière chose qu’il me reste à faire pour qu’elle soit en paix. Ma présence l’irrite pour une raison que j’ignore et je me dis que j’ai sans doute abusé de sa patience. Je lui tends l’ardoise et la regarde, en prenant une profonde inspiration.

- Est-ce que c’est comme ça que ça s’écrit ?
Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 3:07
Son regard se fait plus dur. Plus distant. Elle peut accepter beaucoup de chose, le mensonge, la colère, le dégout, même le rejet mais pas l’hypocrisie.

Oui je mens, je mens à tous sauf à Jehan et pourtant aujourd’hui je me retrouve contrainte de le faire. Pour vous, pour lui. Car je ne veux pas le voir pendu au bout d’une corde sous prétexte que vous voulez vous prouver quelque chose à vous-même. Alors si vous ne voulez pas de mon aide, si vous trouvez que cela est trop immoral ou trop malsain de profiter de ma capacité à mentir. Alors soit, gérez cela seule, ainsi que ses conséquences. Je ne m’en mêlerais plus. Mais n’ayez pas l’audace de sous-entendre que vos mensonges et vos motivations sont plus légitimes que les miennes. »

La comtesse porta ses mains à ses tempes, les massant doucement pour chasser ses maux de tête. Comme si cela était possible. Elle avait presque tout le temps mal au crâne depuis quelques temps. C’était devenu si commun que parfois elle n’y pensait même plus.

Si vous voulez repartir chez vous, alors partez. J’ai fait montre de bien assez d’efforts pour vous prouver que je voulais votre bonheur. Je vous ai sacrifié mon seul compagnon de route et pourtant encore à présent je dois me justifier. Je dois vous convaincre.
Oui je pense à vous tenir loin de moi. Cette maison a semble-t-il une mauvaise influence sur vous, comme elle l’a sur moi. J’ai espéré que vous soyez ici chez vous. J’ai voulu que vous vous sentiez à l’aise. Pourtant aujourd’hui, vous mentez, à moi, à Jehan. Dans l’unique but de fuir mon influence. De ne pas être dépendante de ma bienveillance. Même quand j’essaie de suivre vos règles, je ne suis pas digne de vos attentes. Vous m’avez demandé de l’honnêteté, et quand je vous l’ai donnée, vous l’avez broyée sous vos pas. Sans même chercher à me comprendre. Quand vous me contraignez au silence par le vôtre, et que je m’y applique et tente de vous faciliter la tâche, sans question, sans jugement, là non plus je ne trouve pas grâce à vos yeux. Pire, vous oseriez presque me reprocher d’être inquiète pour vous et de vouloir vous aider. Vous et mon capitaine.
Si je voulais trouver qui vous a fait du mal, j’aurais un nom d’ici ce soir Flore. Pourtant je ne fais rien, car vous ne voulez pas que je le fasse. Car vous pensez me protéger d’un quelconque fléau.
»

Soudain elle fut sur ses pieds. Le verre qu’elle avait à la main vola et explosa en une pluie de morceaux cristallins en percutant le mur face à elle. Mille reflets en mouvement éclairèrent la pièce alors que les rayons rasant du soir frappaient les éclats de verre en chute.

Dans cette cité, je suis le fléau. » Dit-elle très calmement.

Elle contourna le bureau et se servit dans le verre resté vide avant de la prendre en main, là où son alter ego se tenait un instant plus tôt. Elle saisit l’ardoise qui a entre temps retrouver une place sur le bureau. Flore l’a-t-elle lâchée ? Elle n’a pas fait attention. La fatigue sans doute.

Voilà pourquoi je pense à vous éloigner Flore. Car quoi que je fasse, je n’arrive jamais à être digne de celle que vous voulez que je sois. Et vous ne voulez pas voir ce que je suis. Si je dois vous tenir loin de moi pour vous protéger de vous-même et de moi. Je n’hésiterais pas. Mais n’allez pas vous justifier de vos actes en pensant que c’est moi qui vous rejette. Car au contraire de vous, je vous aime pour ce que vous êtes, le bon comme le pire. Les mensonges comme la vérité la plus crue. Je vais continuer à mentir Flore, je vais manipuler, faire du mal, baiser avec des câtins, boire, essayer de protéger les gens que j’aime, prendre des bains nue et entretenir des fleurs. Je vais faire tout ça et bien plus encore car c’est autant moi que le reste. Irène est la comtesse Flore. Je ne vais pas monter sur le piédestal que vous m’avez bâti. Car ce n’est pas à moi qu’il est destiné. Je ne me reconnais pas dans celle que vous voyez en moi.
Vous devez choisir Flore, soit m’accepter comme je suis, soit partir. Une vie vous attend avec Jehan. Une vie heureuse, loin de moi. Vous pouvez la saisir dès demain. Je vous ferais une place sur le premier convoi en partance pour le Labret, avec assez de ressource pour ne jamais avoir à revenir à Marbrume, ni me contacter. Vous n’aurez qu’à intercepter Jehan sur la route et lui dire que je le libère de toutes ses obligations. Vous serez libres, tout les deux et en mesures de commencer une nouvelle vie. Difficile sans aucun doute par les temps qui cours, mais bien à vous.
»

Elle but son verre d’une seule gorgée. La brûlure était moins forte.

Vous avez une place ici, à mes côtés. Mais elle ne pourra se bâtir sur l’espoir que vous nourrissez de me voir devenir la meilleure part de moi-même. Ce qu’il y a de bon en moi est salit depuis trop longtemps. Il est indissociable du reste. Je peux aimer, je peux soutenir, je peux même espérer une vie meilleure. Mais jamais je ne me débarrasserais de ce que la vie a fait de moi. Pas plus que je ne pourrais m’arracher le cœur et le déposer devant vous pour vous prouver mon amour. »

Quelques coups de craies sur la pierre noire et elle retourna l’ardoise vers Flore.

« “Cœur“, c’est ainsi que cela s’écrit. Le miens est sombre Flore, à vous de choisir si vous pouvez l’accepter ainsi. Sinon, vous pouvez partir. Pour le Labret, pour les faubourgs, ou tout autre endroit de votre choix. Ma maison n’est une prison que pour moi. »
Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 11:45
- Mais…Je n’ai pas dit ça…

Le flot de paroles de la comtesse m’empêche de m’exprimer pour lui répondre. Elle parle, parle, dit des choses horribles, terribles, des choses que je ne comprends pas, des choses qui font mal. Devant tant de rancœur et de propos affreux, je me tais donc. Le temps qu’elle se masse les tempes, probablement soumise à un effort intense et une fatigue immense, je profite du court laps de temps pour dire quelque chose, dans un souffle ému :

- Je disais juste que pour vous c’est facile de raconter des histoires, parce que je sais pas faire ça moi. Quand j’essaye, vous le voyez tout de suite, j’en ai encore eu la preuve ce matin en rentrant. J’ai jamais dit quoi que ce soit d’autre…j’ai jamais pensé une seule seconde que votre aide serait immorale…ou…ou malsaine. Pourquoi je penserais ça, ça n’a pas de sens…

Je pensais que la comtesse s’en tiendrait à cela mais c’est bien pire juste après. Prise d’un mouvement de fureur froide qui me donna des frissons, je ne pus que me taire totalement cette fois, complètement sous le choc de ses propos si plein d’acrimonie. Presque de haine. Qu’est-ce qui lui prend de me dire des choses pareilles ? Est-ce que réellement ce que je suis pour elle ? Un boulet qu’elle essaye de rendre heureux ? Elle se trompe, beaucoup, trop. Devant de si terribles paroles, totalement fausses qui plus est, je baisse la tête, essuyant la tempête en silence. Mon propre cœur est en ce moment un vaste terrain en chantier sur lequel tout le monde piétine, sans savoir où se diriger en sécurité. Et Irène est en train, en ce moment, de piocher la terre tellement fort que ça me fait mal. Au geste de violence qui suit son explication, je ne peux m’empêcher de me protéger instinctivement la tête, comme si je m’attendais à ce qu’elle me frappe.
Je suis bouleversée comme jamais encore je ne l’ai été. Je gère mal les conflits, j’ai tendance à m’en éloigner et ne pas insister quand la personne qui me fait face s’emporte et use de la violence mais je suis pourtant incapable de bouger. Parce que je sais que si je sors de cette pièce sans rien dire comme je le ferais d’ordinaire, Irène sera définitivement un souvenir.

Elle me dit que je ne l’aime pas pour ce qu’elle est, ce qui me ramène inévitablement à cette terrible conversation que nous avons eue le jour de mes fiançailles. Relevant la tête, je la regarde, terriblement peinée, triturant mes doigts de manière frénétique sans parvenir à dire quoique ce soit tant elle est en train de vider son cœur sur le tapis, en ce moment même. Jehan m’avait expliqué la victoire que c’était pour Irène de prendre possession de son corps comme elle l’avait fait. Et moi je l’ai mal vécu, pas parce qu’elle donne son corps à une dame, mais parce qu’elle le donne à une personne qui n’en a rien à faire d’elle. C’est ça, qui m’a fait de la peine. Beaucoup de peine.

Quand elle me retourne l’ardoise pleine de fautes, avec des ratures et des coups de craies, je regarde le petit support noir, gardant le silence pendant de longues secondes, avant d’à nouveau baisser la tête. Je dois répondre. Je dois lui dire. Je ne peux pas garder cela pour moi après un tel flot de paroles véhémentes et sans aucun sens. La gorge sèche, pas bien assurée, sans seulement oser lever la tête vers elle tant j’ai peur d’y lire de la colère ou encore de la haine, je dis alors :

- Je ne sais pas dire de belles choses de la même façon que vous, Irène, je ne sais pas m’exprimer correctement, avec de beaux mots, de belles phrases. Je dis ce que j’ai dans mon cœur, pas toujours adroitement. Souvent même, il arrive qu’on comprenne même l’inverse de ce que je dis. Je suis pas bien maline, je le sais.

Une profonde inspiration, toujours tête baissée, et je murmure alors :

- J’voulais juste faire en sorte qu’on soit fier de moi. Faire en sorte de ne pas être une charge, pour personne. Toute ma vie, j’ai été une charge. Pour mes parents, pour tout le monde, même pour le Temple quand j’étais au plus mal et à deux doigts de renoncer de vivre. Toujours à servir, toujours à demander, toujours à genoux pour obtenir ce que je veux. Je ne demande pas tant, pourtant…Je veux juste faire en sorte qu’on soit content de moi. Apporter quelque chose à quelqu’un. Devenir quelqu’un. Pas être un second rôle dans la vie de tous.

Est-ce du sang là sur ma paume ? Peut-être. J’essuie d’un mouvement du pouce, la gorge enrouée, sans regarder la comtesse qui, si ça se trouve, n’en a rien à faire de mes pauvres petites explications de rien du tout. Pourtant, je dois continuer, pour qu’elle ne pense plus ce qu’elle vient de dire et qui me fait si mal au cœur.

- Je n’ai jamais demandé que vous suiviez des règles, je ne sais même pas de quoi vous parlez en disant ça. Tout ce que je voulais, moi, c’est faire quelque chose, n’importe quoi qui vous aurait rendue fière. Quelque chose qui vous aurait montré que je peux m’en sortir, que tout votre enseignement et vos bontés à mon égard n’ont pas été inutiles. Peu de gens ont cru en moi comme vous l’avez fait. Mais là aussi, visiblement j’ai échoué. Je ne suis même pas fichue d’écrire un tout petit mot sans faire de fautes…alors essayer de faire quelque chose par moi-même…quel désastre…

Et pourtant j’ai tellement à apporter. Tellement à donner. Pourquoi donc est-ce que je me sens si mal ? Parce que je lui ai fait de la peine, sans le vouloir. Mes yeux brulent, je le sens, et toujours je n’ose pas la regarder. Je pense que je préfère regarder mes mains abîmées plutôt que de voir Irène en colère, fâchée, une Irène fâchée contre moi pour des propos dont je ne comprends pas tout.

- C’est comme…comme ce jour-là où vous m’avez dit que vous…que vous baisez avec des catins, comme vous dites. Jehan m’a expliqué la victoire que c’est pour vous. Et je me suis sentie mal après, parce que vous m’avez dit quelque chose d’important et que j’ai été incapable de voir le positif que vous tiriez de cela. J’ai été affreusement égoïste, sans le vouloir. Parce que je vous aime, que je voulais vous voir heureuse et que je ne peux pas imaginer qu’on puisse être heureux comme ça…

La brûlure s’estompe alors qu’une larme tombe sur ma main blessée. Je ne cherche même pas à l’effacer.

- Et c’est aussi parce que je vous aime que je n’ai rien dit à ce noble qui m’a retenue dans sa cave après avoir été…brutal. Il a essayé de me soutirer le nom de ma bienfaitrice, il a tout essayé, je n’ai rien dit. Parce que l’imaginer en votre compagnie me donne la nausée. Parce qu’il est fourbe, méchant et calculateur. Parce qu’il vous fera du mal si vous l’approchez et que je ne veux pas que ses mains se posent sur vous de la même façon qu’il les a posées sur moi. Alors oui, je vous ai menti et je mentirai à Jehan, parce que vous m’avez prévenue, que j’ai quand même essayé, que je me suis perdue en chemin et que vous n’avez pas à en subir les conséquences…Ce n’est que cela…Je voulais juste….Je voulais juste vous protéger. Tous les deux.

Une deuxième larme rejoint la première, en silence, alors que je dis enfin :

- Mais je ne suis pas bien maline. Au lieu de ça, je vous ai blessée. Vous pensez des choses qui n’ont aucun sens pour moi parce qu’elles n’en ont effectivement aucun. Je voulais vous prouver que je peux faire quelque chose sans votre aide. Je voulais faire quelque chose toute seule. Et tout ce que j’ai réussi à faire, c’est vous mettre en colère.

Essuyant mes yeux du revers la main j’ajoute, vaincue :

- Je vous demande pardon…pour tout. J’ai jamais voulu vous faire de la peine ou vous faire du mal. J’ai jamais voulu que vous changiez, ou quoi que ce soit d’autre. Je vous aime, Irène. Je voulais juste vous le montrer comme ça. En essayant, avec mes petites ressources, de faire quelque chose qui vous aurait rendue fière de moi. En voulant vous protéger d’un homme qui vous fera du mal. Qui fera du mal à tout le monde. Je ferais n’importe quoi pour vous. N’importe quoi. Même mentir maladroitement. Parce que vous m’êtes précieuse. Une part de lumière dans un monde sombre. Et si votre cœur est sombre, alors je ferai avec. Je le prends quand même et j’en prendrai soin jusqu’à ce que vous trouviez la personne qui lui rendra peut-être sa lumière.

Passant mes doigts sur la blessure que j’avais ouverte en grattant frénétiquement la plaie, je dis enfin, tête baissée :

- Mon monde à moi est sombre et plein de violences. Et dans ce monde affreux, je n’ai que deux flammes pour me garder sur le chemin que j’essaye de prendre. Celle de Jehan. Et…la vôtre.
Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 12:54
La comtesse soupire profondément. Elle n’arrive pas à faire entendre ses mots à Flore, même en criant, même en rage. Non, même ainsi Flore pense être entrain de la protéger. D’être entrain d’essayer de la satisfaire par ses actes. Il es si terrible que deux personnes se portant une telle affection parviennent si peu à se comprendre. A se parler. Elle repose le verre intact sur le bureau pour éviter de le voir finir au même endroit que le précédent. Ses yeux fixent la main de Flore où des gouttes de sang sont perceptibles. Quand s’est-elle blessée ? La comtesse se retient de courir s’occuper de sa blessure. Elles parlent, à cœur ouvert pour une fois, même si elles ne parviennent pas à se comprendre. Elle a besoin de dire ce qu’elle a sur le cœur, même si Flore semble incapable d’en percevoir le sens.
Elle dit vouloir l’accepter, elle dit vouloir rester. Mais c’est impossible si elle reste ainsi à ne voir en elle qu’une petite chose brisée qu’elle espère voir réparée avec son aide ou celle d’un autre. Une chose qu’elle doit protégée.

J’ai déjà vécu tout ce que votre geôlier pourrait me faire. J’ai vécu la plus noire des nuits, les douleurs, les infamies, et cela alors que je n’étais même pas encore en âge de les comprendre. Je ne crains absolument pas votre noble. Je ne suis pas sans défense Flore, je ne suis pas à la merci de la volonté d’un autre, et quand bien même cela devait arriver, je me fiche parfaitement de ce qui peut advenir de ce corps. Il n’est qu’un boulet que je me traîne depuis vingt années déjà. »

Elle inspira et reprit avec un ton plus doux, plus tranquille.

Vous ai-je jamais demandé la moindre preuve de vos capacités ou de votre volonté Flore ? Vous assurez vouloir me rendre fière, vouloir me prouver que mon aide n’a pas été veine. Mes seules leçons à votre égard sont celle des lettres et que l’esplanade est dangereuse. Pensez-vous me rendre fière en bravant inutilement ce danger ? Croyez-vous que j’attende ce genre de chose de vous ? Qu’ai-je fait pour vous faire penser que votre existence et votre bonheur ne suffisaient pas à ma satisfaction ? »

Elle regarda un instant la bouteille et hésita à se servir un verre. C’était tentant, mais stupide à cet instant. Elle rejeta doucement l’idée. Au moins pour le moment.

Je connais toutes les pourritures de l’esplanade, j’en fréquente la plupart. Je fais partie de leur cercle Flore. Vous pensez me protéger de quelqu’un. Mais il est bien possible que dans quelques mois cette personne soit sur la liste de ceux que je compte épouser pour mon bénéfice personnel. Parfaitement consciente des risques. C’est mon monde Flore, vous ne pouvez pas m’en protéger, pas plus que vous ne pouvez essayer de sauver une goutte d’eau dans un torrent en furie. »

Elle centra son regard dans celui de son herboriste. Oui, son herboriste à elle. Sa Flore.

D’ici quelques temps nous seront soit des inconnues l’une pour l ‘autre, soit des amies. Mais aucunement en nous comportant comme si nous pouvions protéger l’autre de tout. Si je croyais un seul instant que c’était possible, je vous aurais enfermée dans votre chambre à double tour pour vous empêcher de quitter ma demeure, de prendre le moindre risque. Mais vous êtes une fleur sauvage Flore, et vous dépérirez si je vous enferme dans un vase. Alors je vous laisse faire vos erreurs, vos essais, et je suis là quand pour vous soutenir quand vous en souffrez. Là pour vous écoutez quand vous voulez parler. Même si je ne parviens pas toujours à vous comprendre. Vous ne pourrez pas me rendre fière Flore. C’est impossible. Vous n’êtes pas un vague projet que j’espère voir aboutir, donner des résultats.
La fierté n’a rien à voir avec les sentiments que je vous porte. Je n’attends rien d’autres de vous que votre amitié. Et que vous appreniez à me voir pour ce que je suis, en surface comme en profondeur.
»

Elle se releva doucement et fit rouler sa nuque. Elle reprit avec un sourire fatigué mais chaleureux.

Maintenant venez, allons mettre quelque chose sur votre main avant que vous ne gouttiez du sang dans toute la maison et que Jehan me pense encore responsable. »

Elle contourna son bureau et tendit la main à son amie, pour la soutenir en cas de besoin. Pour lui montrer que malgré toute la colère et la tristesse qu’elles se causaient parfois l’une à l’autre, elle était là pour elle.
Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 14:34
Si la comtesse avait déjà vécu pareilles infamies, il n’en allait pas de même pour moi. L’impression qu’a faite le comte de Rougelac dans ma chaire comme dans mon esprit sont indélébiles. Pour plusieurs raisons. J’étais venue en paix pour apporter un soutien à un homme qui souffre. J’étais venue aussi afin de proposer un marché à cet homme, un marché honnête où il n’avait rien à perdre et tout à gagner. En plus de ne plus avoir aucun accord avec lui, désormais, j’y ai laissé quelque chose, une chose à laquelle je tenais beaucoup : une espèce d’innocence naïve qui me permettait de voir le meilleur chez les gens avant d’en appréhender la noirceur. Cette faculté là est restée dans ce lit et cette cave sordide. Au-delà de ça…J’ai ressenti quelque chose, une attirance honteuse pour cet homme, un désir totalement inavouable, même à Irène, un désir soulevé par une odeur de bois et d’épices, irrésistible, flattée que j’ai été d’avoir pu capter l’attention d’un homme aussi puissant que ce comte. Quelle idiote… J’ai honte, rien que d’y songer. Et ce désir s’est mué en terreur, j’ignorais même que cela pouvait être possible…J’ignore tellement de choses, sur les grands de ce monde, sur les gens en général, sur ce qui est convenable ou pas, sur ce qui est bien ou pas. Tout ce que je sais, je l’ai appris ici. Tout ce que je sais du monde, des gens, de la ville, de ce que je suis capable de faire ou pas, je ne le sais que parce que j’ai rencontré les deux amours de ma vie.

- Je sais que vous n’êtes pas sans défense, mais…je ne pourrai jamais vraiment m’empêcher de faire ce que je pense juste pour vous éviter de souffrir. Laissez-moi au moins cela, Irène.

A ses questions successives, je ne pus répondre. Elle avait raison, bien entendu. Jamais elle ne m’a demandé quoi que ce soit. Elle s’est contentée de donner sans rien demander en retour. C’est de ma propre initiative que j’ai agi, pour lui prouver des choses que je n’avais sans doute pas besoin de lui prouver. Je dis alors, tout bas :

- Vous êtes brillante, je suis obscure. Peut-être qu’en recevant votre approbation, j’aurais reçu un peu de votre lumière en échange de tous mes efforts. Beaucoup de gens m’ont prises pour une incapable, un animal…quelque chose se situant entre l’humain et la bête, les griffes en moins. Pas vous. Alors je voulais vous montrer à vous que je ne suis pas…que je ne suis pas une imbécile et que vous n’aviez pas perdu votre temps avec moi.

J’aurais pu en rester là mais l’information du mariage qu’elle venait de dispenser me fit pâlir plus que je ne l’aurais voulu. Que dit-elle ? Epouser… ? Pour un bénéfice personnel ? Est-elle sérieuse ??? J’ouvre de grands yeux tous ronds en la regardant me dire cela comme s’il s’agissait de quelque chose de tout à fait normal, d’une logique imparable. Non. Elle n’est pas sérieuse. Personne ne peut sérieusement songer à épouser un homme tel que ce comte, même pour en tirer un bénéfice personnel. Et je ne dis rien. Je ne peux pas. Elle aura peut-être changé d’avis d’ici quelques mois. Peut-être. Je l’espère. Par les Trois, je l’espère sincèrement. Elle serait malheureuse au dernier degré avec un homme comme celui-là…

- Je serai là pour vous, quand vous aurez besoin d’une épaule ou d’une oreille. Je serai là pour vous écouter. Tout comme vous avez été là pour moi.

Je relève la tête et la suit du regard tandis qu’elle approche et me tend la main. Je m’en empare, évidemment mais au lieu de la suivre, je la retiens et noue mes bras autour de sa taille si fine, pour déposer ma tête sur son épaule, avant de la serrer contre moi. Je la sais parfaitement capable de se défendre seule, elle ne m’a pas attendue pour vivre des épreuves terribles, je le sais, je ne le sais que trop bien mais…Je ne peux m’empêcher de me dire que la comtesse d’argent a le droit, elle aussi, de vivre un peu de bonheur, et cela, elle ne le trouvera certainement pas à l’endroit d’où je reviens. Les yeux fermés, je me contentai de dire, bouleversée par l’idée qu’Irène s’en aille :

- Promettez-moi juste une chose…Juste une…Et je vous laisserai tranquille. Par pitié, soyez prudente. Infiniment plus prudente que je ne l’ai été…C’est tout ce que je vous demande. Vous voulez bien me promettre au moins ça, Irène, dites ?


Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 22:21
Les bras l’entourèrent avec douceur mais volonté, et elle n’essaya aucunement de s’y soustraire. C’était tout Flore, et elle ne pouvait nier qu’elle aimait cette spontanéité. Cette audace qu’avait la jeune femme à venir à contact, alors même qu’elles venaient de se faire souffrir. L’affection de Flore semblait sans limite, même dans les moments de peine.

Je vous en fais la promesse. »

Elle aussi glissa ses bras autour de la taille menue de sa compagne, prenant bien garde à ne pas parcourir son dos, contact pourtant naturelle mais que Flore trouvait déplaisant de par les atrocités que cela lui remémorait. Elle pressa le corps aussi fragile que le sien contre elle, et elles restèrent ainsi de longue seconde. Une minute pleine. S’apaisant mutuellement. Du moins était-ce le cas pour la comtesse. Elle finit par relever le visage de Flore entre ses mains pour observer ses yeux. Puis elle l’embrassa. Pas comme dans la bibliothèque, pas comme Jehan. Une sorte de partage, sans cette passion dévorante qu’elle avait pu lui montrer, sans ses doutes, sans la honte d’être ce qu’elle était. C’était un simple geste intime entre deux personnes qui s’aimaient. A mi-chemin entre sœur et amante. Sans définition précise.
Elle glissa ses doigts entre ceux de Flore, prenant bien garde à ne pas se saisir de la main blessée.

Vient. » Lui dit-elle simplement, sur un ton tout aussi intime.

Elles avaient traversé une tempêtes ces derniers jours. Elles avaient crié, elles avaient pleuré, elles s’étaient fait peur, et tendu le lien qui les unissait jusqu’à la rupture. Mais il avait tenu, et d’une certaine façon lui semblait sur le point de se renforcer. Irène avait ouvert toutes les portes pour permettre à Flore de la quitter, en toute légitimité, même avec des moyens de la détester pour se justifier. Mais l’herboriste était encore là. Volontairement à présent. Plus de services, plus de sauvetage, plus de dettes. Elles étaient ensemble car elles en avaient fait le choix.
Le passage au tutoiement lui semblait la chose la plus naturelle au monde à présent. Elle se demanda si Sydonnie serait fière de la voir se faire une véritable amie vu leurs échanges récent. Ou si elle la soupçonnerait de vouloir l’utiliser dans un plan machiavélique…
Sans doute un peu des deux vu le tempérament de la noiraude.

Elle emmena Flore dans la cuisine mais ne la força pas à s’asseoir cette fois, se contentant à regret de lâcher sa main. Elle prit un chiffon qu’elle humidifia légèrement et vint se poster devant la jeune femme pour tamponner légèrement les éraflures dans sa paume. Des coups d’ongles. Elle faillit se sentir coupable de l’avoir mise dans un tel état de stress, mais elle ne voulait plus que leur relation soit empreinte de culpabilité. Elle la porta à ses lèvres et souffla très doucement dessus, comme une fleur caressée par le vent du printemps. Rien de grave heureusement, ça ne saigné déjà plus, il suffirait de le laisser à l’air. Elle en profita pour examiner le poignet de la jeune femme avec des gestes doux. Ces marques-là, il leur faudrait surement plusieurs jours pour guérir, même si elles s’atténueraient rapidement. Flore en avait surement parfaitement conscience, plus au fait des soins qu’elle.

Nous somme obscure toutes les deux Flore. Cela ne nous empêche pas de briller. Moi je crois en toi, je crois en ta force. J’ai su que je ne perdais pas mon temps avec toi dès que tu m’as ouvert ton étrange porte. Et si tu dois être animal Flore, sache que tu es une tigresse. Tu as déjà vu un tigre ? J’ai des images. Ce sont des créatures rares et magnifiques, mais qui ne vivent pas dans nos contrées. »

Elle déposa un baiser sur le bout de ses doigts, un peu comme le faisait Alice avec elle quand elle se blessait enfant. Et elle sourit à Flore, son premier sourire parfaitement sincère depuis des jours eut-elle l’impression. Elle lui rendit sa main, ou du moins lui laissa l’occasion de l’ôter en la gardant posée sur la sienne.

Tu veux encore te reposer ? Tu dois être épuisée. »
Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMer 15 Avr 2020 - 23:57
Elle a promis. Je m’inquiète donc très nettement moins et, blottie dans ses bras, l’apaisement est immédiat. C’est très exactement pour avoir attendu ce genre de moment que je reste sans bouger, juste à profiter de sa présence, malgré les disputes, malgré les cris, malgré toutes les horreurs dont ces murs ont été les témoins silencieux ces dernières minutes. Je me sens éminemment privilégiée de pouvoir serrer une telle femme dans mes bras, un privilège que je ne compte pas perdre inconsidérément. Elle a promis, je me promets à mon tour d’être là pour elle, quand elle en aura besoin. En attendant, je me contente d’être là. Et je garderai un œil attentif sur elle, sans que ça ne se voit trop. Enfin, du moins j’essayerai. Parce qu’Irène sait et voit tout.

Quand elle releva mon visage entre ses mains pour me regarder, je sus. Je ne me dérobai pas, au contraire. Il s’agit d’une signature, quelque chose qui n’appartient qu’à nous, loin de la tendresse de Jehan, loin de la passion de la bibliothèque. Non, c’est autre chose. Un geste naturel. Sincère. Et totalement partagé. Je n’ai absolument aucune gêne, au contraire, j’y trouve un certain réconfort, une douceur bienfaisante. Je posai ma main valide dans la sienne, avec un sourire complice et la laissai m’entraîner hors de la pièce, sans dire un mot, heureuse de l’entendre me tutoyer de la manière la plus simple et la plus naturelle du monde.

Arrivées dans la cuisine, elle s’occupe une nouvelle fois de moi, observant ma main avant de tamponner les éraflures et coups d’ongles que je me suis infligées dans le bureau pour éviter de perdre mon sang froid. Je ne lui explique pas, ça ne servirait qu’à installer un malaise totalement malvenu. Je me contente de sourire à ses soins, à ses paroles et à sa comparaison qui ne m’évoque rien du tout.

- Non, je n’ai jamais vu de tigresse, qu’est-ce que c’est ? Un animal sauvage ?

Les soins finis, je gardai sa main dans la mienne parce que je n’avais tout simplement pas envie qu’elle s’en aille. Je viens de rentrer à la maison, j’ai passé deux jours d’absolue solitude et d’angoisse dans un endroit sans lumière et à la merci d’à peu près tout, je voulais juste un peu de contact humain pour me rassurer. Juste un peu. Même si rien ne l’y oblige, à la vérité.

- Je suis fatiguée oui…Ces derniers jours ont été difficiles. J’ai mal à la tête, et mal un peu partout. J’ai faim et pourtant je ne peux rien avaler. J’ai l’estomac en miettes…

Regardant mes doigts noués aux siens, j’ajoute :

- Je vais aller m’allonger un peu, peut-être pas pour dormir mais pour me détendre un peu, ne pas rester debout, juste…ne rien faire. Et toi..., dis-je dans un murmure, heureuse de pouvoir la tutoyer à mon tour, que comptes-tu faire ? Tu as peut-être du travail qui t’attend…Des comptes à faire…Des lettres à écrire… ?

J’aimerais qu’elle reste un peu, jusqu’à ce que je m’endorme, mais je la sais très occupée et je ne veux pas être un poids attaché à sa cheville. En parlant de cela d’ailleurs, il faudra que je trouve une explication valable pour justifier ces traces là à Jehan. Ou faire en sorte qu’il ne remarque rien. Ce qui est également peine perdue. Je sais qu’après quelques jours d’absence, Jehan n’aura aucun contrôle et qu’il voudra m’observer sous tous les angles comme il sait si bien le faire. Cela me navre le cœur de devoir lui mentir mais…je n’ai pas vraiment le choix. C’est soit un petit mensonge, soit une catastrophe et un cyclone libéré sur l’Esplanade en direction du manoir Rougelac. Jamais je ne prendrai le risque de lui faire courir un danger. Donc je trouverai quelque chose à lui raconter. J’ignore encore quoi précisément mais je sais que je trouverai.

- C’est juste que…Je n’ai pas envie de rester toute seule dans le noir…le crépuscule arrive vite, et il est encore trop tôt pour me coucher…

Je baisse un peu la tête, gênée. Je ne sais pas si je dois lui raconter. Je n’ose pas. Ce n’est pas très joyeux et il me faudra du temps pour ne plus y penser.
Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyJeu 16 Avr 2020 - 1:01
Oui, le plus sauvage qui soit. » Dit la comtesse avec un sourire, heureuse de sentir que les doigts de Flore n’ont pas plus envie de rompre le contact que les siens.

Elle alterne cependant et s’empara à nouveau de celle qui n’est pas blessée, pour soulager sa compagne. Elle replace naturellement une mèche brune derrière son oreille, un geste qu’elle a l’impression d’avoir fait cent fois mais qui a une saveur toute différente à présent. Elle voit toute la solitude et la crainte voilée dans les yeux de son amie. Les deux derniers jours qu’elle a vécu ressemblent furieusement à ceux de la jeunesse de la comtesse. Cela l’aurait mis hors d’elle à tout autre instant, mais pour le moment elle veut juste alléger le fardeau de sa compagne. Elle comprend parfaitement l’horreur qu’elle peut ressentir à s’imaginer seule, dans le noir. Même en se sachant en sécurité. Comme de montrer une bougie à un brûlé.
Elle ne s’imagine pas la laisser dans ces doutes, dans cette peur.

Je ne peux pas écrire de lettres, ni faire de compte. Je dois te montrer ce qu’est une tigresse. Il faut savoir reconnaître les priorités non ? Hum, attends une seconde ! »

Elle lâche sa compagne juste un instant et dégote rapidement une miche de pain et un petit pot contenant une sorte de liquide jaune ambré, à la texture crémeuse et l’odeur sucrée. Elle posa le tout dans le bras de Flore libre de Flore et repris sa main pour l’entrainer dans le couloir et regagner le hall. Elle s’arrêta une nouvelle fois, devant la bibliothèque et fit signe à Flore de l’attendre d’un léger mouvement des doigts. Il lui fallut moins d’une minute pour ressortit avec un grand livre à la couverture d’un cuir coloré en bleu et plus large que son buste qu’elle tenait appuyé contre elle pour se soulager de son poids. Elle repris la main de Flore, et retrouva immédiatement son sourire, comme si le contact lui-même suffisait à l’alimenter.
Toutes deux fatiguées, elles gravirent les escaliers à un rythme tranquille, d’ailleurs elle fit un arrêt au milieu des marches pour indiquer le jardin à sa compagne.

Tu vois les bulbes oranges, tout gonflés à une vingtaine de mètre de l’enceinte ? Juste dans l’axe du grand arbre ? Ce sont des œillets. Je pense qu’ils vont fleurir demain, il ne faut pas qu’on rate ça, c’est un spectacle magnifique. On pourrait boire le thé devant et profiter du soleil. Il n’y a pas de nuage ce soir, la journée devrait être douce. »

Elles reprirent leur route, mais Irène ne s’arrêta pas devant la chambre de Flore, elle poursuivit jusqu’au double battant de sa propre chambre et entra, emmenant l’herboriste à sa suite d’un geste confiant, fermant derrière elles. Elle posa son livre sur un meuble et s’empressa d’aller ouvrir en grand chaque rideau de la chambre, laissant entrer le plus de la lumière crépusculaire qu’elle put. Elle se dirigea ensuite vers le lit et tira d’un coup l’épaisse couverture, la faisant s’étaler comme un tapis moelleux sur lequel elle jeta tous les coussins qu’elle put trouver, même ceux des chaises. Elle récupéra son ouvrage ainsi que la collation dans les bras de Flore et se laissa tomber à genoux sur sa confortable création, déposant don fardeau devant elle.
Elle tapota doucement la place près d’elle, invitant Flore à s’y glisser si elle le voulait.

Lumineux et confortable, mais pas vraiment un lit. Cela te convient Flore ? »

Elle déboucha le pot dans un plop bruyant et presque immédiatement une odeur piquante et sucrée presque entêtante emplit la pièce. Elle arracha un bout de pain à la miche et le trempa dedans, le ressortant imbiber du liquide ambré et épais.

C’est du miel sauvage parfumé aux épices. Tu as déjà gouté ? » Demanda-t-elle en le tendant à Flore, comme une invitation à remplir son estomac ne serait-ce que pour sa santé, sans pour autant la forcer. Il est des nœuds qu’on ne défait pas par simple volonté. Mais elle se devait d’essayer. « J’en raffolais étant petite, et Alice trouve toujours le moyen de m’en dégoter un pot. »

Elle serra contre Flore, leurs jambes collées au travers du tissu de leurs robes. Comme si la proximité était la chose la plus essentielle à cet instant. Elle ne fit pas semblant d’un incident, ni de ne pas s’en apercevoir. Elle avait volontairement glissé sur le côté pour être au plus près d’elle. Elle passa un doigt sur l’ouvrage et lut le titre en prenant bien le temps de souligner chaque lettre pour son étudiante en herbe.

De l’étude des faunes exotiques. »

Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyJeu 16 Avr 2020 - 11:25
Avec un soulagement que je peine à dissimuler, je regarde la comtesse s’agiter dans l’office, cherchant quelque chose du regard, avant de trouver un petit pot de ce qui semble être du miel ainsi que du pain. Je n’ai pas faim. Vraiment pas faim. A la limite je pourrais faire un effort pour un morceau de pain mais le miel…et pourtant j’aime tout ce qui est sucré même si j’ai rarement l’occasion d’y gouter. Nous sortons donc de la cuisine, nous dirigeant vers le grand hall, et Irène en profite pour entrer dans la bibliothèque. J’attends sagement et la vois enfin revenir avec un livre aussi large qu’elle, tout bleu. J’esquisse un sourire à la voir peiner de la sorte à porter un livre aussi lourd juste pour me montrer une image.

Nous prenons la direction de l’étage avant de faire un arrêt et là Irène me montre le jardin, ce jardin que j’aime tellement. J’avais remarqué les bulbes dont elle parlait et m’étais interrogée sur la nature même de ces plantes. Je pense que je n’en ai jamais vu de telles. Bien sûr, je sais que certaines catégories de fleurs sont issues de gros oignons qu’on plante à même le sol à la sortie de l’hiver mais j’ignorais que cette variété pouvait fleurir si tard dans l’année. Les jours raccourcissent et les fleurs sauvages se font rares. La nature va commencer sa période de repos avant d’affronter le rude hiver que je n’aime pas. L’hiver est la saison que j’aime le moins, tout est mort, tout est froid et tout est gris. Cette année, j’aurai toutefois le plaisir de passer un hiver différent. Au chaud. En compagnie de ceux que j’aime et dont je suis aimée en retour. Il peut pleuvoir tout l’hiver que je m’en ficherais en fait…

- J’ai hâte de voir cela…J’adore les fleurs.

J’allais m’arrêter devant la porte de ma chambre mais Irène ne l’entendait pas ainsi. Elle a pris la direction de son immense chambre, dans laquelle elle me fait entrer avant de s’affairer à disposer au sol tout ce qu’il faut pour passer un moment confortable dans la lumière crépusculaire. Cela me touche énormément. Elle n’est pas obligée d’en faire tant, après tout. Je pouvais tout aussi bien m’asseoir sur un fauteuil, ou m’allonger dans mon lit, cela lui aurait évité de devoir tout chambouler. Je souris en coin à l’expression faussement menaçante d’Alice si elle voyait ce capharnaüm au sol. Je commence à bien connaître la dame qui s’occupe de tout ici et il faudra tout ranger avant son retour si on ne veut pas être réprimandée.

- Ça me convient très bien, merci Irène,
dis-je en m’installant confortablement à ses côtés. C’est exactement ce qu’il me faut.

La comtesse s’empresse de tremper un morceau de pain dans le miel mais…l’odeur…j’adore le miel mais…j’ai un mouvement de recul que je ne parviens pas à expliquer. La vue de ce miel coulant sur le pain me serre l’estomac un peu trop fort. Je préfère secouer la tête poliment, avant de prendre un morceau de pain vierge de toute substance. Autant la rassurer comme cela. Je mastique lentement avant de déposer le reste non loin, impossible d’avaler quoi que ce soit de plus. Je préfère de loin rester tout près d’elle et ne plus bouger, réconfortée par sa présence et tous ses gestes pleins de prévenance, écoutant sa voix alors qu’elle lit un titre que je juge bien savant. Les faunes exotiques.

- Montre moi une tigresse, que je vois à quoi ça ressemble.

Je me recroqueville contre elle, à la recherche d’un abri, cet abri qui m’a tant manqué pendant ces deux horribles journées. Je voulais oublier ce lit, cette cave, ces hommes intimidants, les gestes…Je voulais juste un eu de chaleur humaine et oublier. Ne plus penser. Et je ne pense qu’à cela, pourtant, même ici, dans cette chambre si tranquille.

- Est-ce qu’on peut la mettre en cage, une tigresse ?

Les mots se sont échappés sans que je ne parvienne à les retenir. Je préfère ne pas regarder Irène, je cherche plutôt un comparatif qui lui correspond, en fonction de ce que je connais. Et je ne connais malheureusement pas grand-chose. Juste des plantes et les animaux de la forêt. Et aucun n’arrive à représenter Irène.

- Toi, tu ressembles aux princesses des histoires que lisait Mère. Les jolies fées qui se déplacent sans un bruit, toujours belles, toujours à exaucer les vœux. Il y a des jours où je me dis que tu n’es pas de ce monde, que tu viens d’ailleurs, déposée ici sur un nuage magique avec comme robe un arc-en-ciel. C’est bête hein…
Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyVen 24 Avr 2020 - 13:52
Ce n’est pas tant bête par la description qu’elle en fait que par le fait que cette description n’englobe pas toute la personnalité de la comtesse. Mais elle n’a pas l’envie de débattre à ce sujet. Elles se sont déjà disputées plus tôt, et il faudra surement du temps pour que l’une comme l’autre se perçoivent dans leur entièreté. Peut-être ne cela n’arrivera-t-il jamais. Qu’une vie d’homme est trop courte pour cela. Ce soir elle est avec une amie, presque une parente. L’amour qu’elles se portent est sincère, et cela lui suffit.
Elle gobe le miel et le pain afin d’en privé la vue de Flore que cela semble déranger. Jamais très agréable de voir de la nourriture quand notre estomac se rebelle. Mais son herboriste fait l’effort de manger un peu de pain, cela la rassure. Et elle se presse un peu plus contre elle.

Certains si sont essayé en effet, rare sont ceux qui réussissent. C’est un animal sauvage depuis si longtemps. Même après une vie derrière des barreaux leur flamme ne s’éteint pas, et la moindre inattention peut coûter la vie à l’idiot qui garde un tel animal enfermé. »

Elle ouvre l’ouvrage en grand et le feuillette très vite croyant se souvenir globalement où se trouve l’animal. Bien sûr, vite est un terme très relatif quand il s’agit de page aussi grande et usée, elle aime les livres et ne les brusquerait jamais inutilement. Disons juste alors qu’elle ne s’attarde pas à chaque page. Son regard s’illumine quand elle reconnait la forme orange parcourue de rayure d’un noir profond. Elle aplanit bien la page.
Plusieurs représentations la recouvrent, certaine presque grotesque, d’autres si juste qu’on a l’impression de pouvoir passer sa main sur le poil de l’animal. Des annotations naviguent entre les images avec forces détails dont certains sont surement complétement inventés. La comtesse en pointe un du doigt avec un air d’enfant satisfait.

Celui que j’ai vu étant petite ressemblait presque exactement à celui-là. Quel animal magnifique… Exactement comme toi. Beau, calme en apparence, mais sauvage. »

Elle glissa sa main dans celle de Flore, ses doigts s’entremêlant aux siens et la serra tendrement.

Ces animaux la existent Flore, contrairement aux fées et aux princesses des légendes, elles sont bien là, réelles. Ce ne sont pas des mensonges, pas des subterfuges pour te faire croire à mieux. Non, elles, elles vivent de vraies vies, en communion avec le monde qui les entoure, leur esprit est libre. Et aucune cage, qu’elle soit d’or ou de fer ne leur enlèvera jamais cela. »

Elle lève son regard et fixe Flore intensément mais avec douceur.

Tu es une tigresse Flore, ton esprit est aussi libre que celui de cet animal. Aucun barreau ne pourra t’en priver. Pas même ceux que tu pourrais choisir volontairement. » Dit-elle très sérieuse avant de lui sourire avec tendresse. « Allez regardons en d’autres ! »

Et elle se mit en quête de trouver d’autres animaux étranges, presque mythique afin d’occuper l’esprit de sa compagne avec des choses plus légère que son passé ou son futur. Juste un instant à deux, hors du temps et des préoccupations. Loin de leurs prisons respectives.

***

Les jours suivant se passèrent étrangement, comme une sorte de rêve décalé. Les deux acolytes parvinrent à dissimuler le vécu de Flore à son compagnon avec suffisamment de subtilité pour que celui-ci n’émette qu’un léger doute, et que Flore ne se retrouve pas à devoir lui mentir éhontément. Chose qui, la comtesse en était certaine, lui ferait du mal. Elles passaient des instants merveilleux ensemble que cela soit pendant les leçons ou les moments dans le jardin. Pourtant, petit à petit, elle sentait un doute s’insinuer entre elles. Malgré la volonté affirmée de Flore de rester à ses côtés, Irène la surprenait souvent le regard perdu dans le bleu du ciel par-delà la cité. Ou devait réattirer son attention sur leur activité. Comme si une pensée taraudait l’inconscience de la jeune femme sans qu’elle ne s’en aperçoive. Son regard s’éteignait.

Elle finit par se rendre à l’évidence. Flore Maisonfort dépérissait en sa compagnie. Pas par sa présence, ni pas leur relation qui lui semblait au contraire s’être renforcée. Non, Flore, telle une fleur qu’on aurait mis dans un vase, fanait au sein de la cité.
Un triste constat. Si leur différence n’avait pas réussi à les séparer, la nature même de Flore s’en chargeait lentement. Elle avait besoin d’enfouir ses racines dans un sol vierge de la corruption humaine, et de respirer un air qui ne transporte pas l’odeur du bois et de la pierre taillée. Elle avait besoin de liberté.

Alors la comtesse fit ce qu’une véritable amie fait sans doute. Elle fit en sorte que Flore puisse trouver le bonheur qu’elle cherchait. Même si cela devait la priver de sa présence. Jehan lui avait parler d’un petit domaine non loin d’Usson qui correspondait parfaitement à l’image qu’elle et lui se faisait d’une maison où le bonheur pourrait régner. Il n’y avait presque pas de travaux pour la maison elle-même, bien que le terrain demanda, lui, plus de temps pour en tirer quelque chose. Mais il était certain de pouvoir leur faire passer l’hiver au chaud.

Elle se chargea donc des négociations avec le propriétaire, un bourgeois de moindre envergure qui ne prenait de toute façon aucune peine à s’occuper du terrain. Trop dangereux pour lui que le Labret. Il tenta pourtant de négocier au-delà du prix raisonnable et Irène du se montrer moins courtoise qu’à l’accoutumée. Elle lui accordant cependant de participer à un marché de peau qu’elle mettait en place au port. Histoire qu’il ne soit pas sur un mauvais apriori. Elle fit mettre l’acte de propriété non pas au nom de Jehan, mais à celui de Flore. Ils le partageraient de toute façon une fois marier, mais en attendant elle voulait que Flore soit chez elle là-bas.

Un jour elle invita les deux tourtereaux devant la demeure, une charrette attendait là. Pas assez remplie pour un voyage vers Usson et un changement de vie. Mais assez pour le laisser amorcer si c’était vraiment le besoin de Flore. Elle avait la gorge serrée en posant la main sur le drap qui recouvrait l’arrière du véhicule. Mais elle se força à sourire, elle faisait cela pour le bonheur d’une amie. Cela devait lui suffire à elle.
Elle le souleva pour révéler le contenu au couple. La porte de la maison de Flore était posée là, bien à plat, entourée de son cadre sans aucun dégât sur l’étrange mécanisme ainsi que le peu de bien qui restait dans sa demeure des faubourgs, soigneusement empaqueté.
Reconstruire une vie ne voulait pas dire tout abandonner de la précédente, et la comtesse avait pensé que l’herboriste voudrait cette part de son passé avec elle.
Elle se retourna vers eux et vint saisir les mains de Flore, les pressant fort entre les siennes.

Tu m’as promis d’être là pour moi, de me soutenir, de me prêter ton épaule et ton oreille. Alors voilà ce que je veux que tu entendes Flore. Tu auras toujours une place ici. Mais tu n’es pas heureuse, je le vois, je l’entends. Je crois que tu aspires à autre choses. Et je ne veux pas être celle qui t’empêche de le vivre. »

Elle glissa l’acte de propriété dans l’une de ses mains et l’autre dans celle plus large de Jehan. Acceptant implicitement de ne pas être liée à ce futur bonheur qu’ils pouvaient partager.

Avec ce papier, tu deviens propriétaire d’une petite maison près d’Usson. Un nouveau départ loin de Marbrume, loin de ceux qui t’ont honni sans te comprendre. Tu pourras faire ce que tu veux, avec l’homme que tu aimes. Vivre vraiment, sans la noirceur de cette ville sur tes épaules. Rien ne t’oblige à partir Flore, mais rien ne t’oblige à rester. Pas même moi. Je ne veux que ton bonheur. Et si tu crois pouvoir le trouver ailleurs, tu te dois de le faire. »


Revenir en haut Aller en bas
Flore MaisonfortHerboriste
Flore Maisonfort



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptySam 25 Avr 2020 - 15:48
- On dirait un monstre, quand je t’écoute, je vois une créature dangereuse et hostile…

Tout mon contraire. Quoique…Quand j’y songe, je ne suis pas très loin de cette réalité là aujourd’hui. La faute à la vie paysanne en milieu inhospitalier et à toute cette ambiance délétère qui a fini par pervertir la gentille et douce petite Flore des Faubourgs. La faute à cette pauvreté crasse dans laquelle j’ai grandi et vécu jusqu’à il y a peu, la faute à ces inégalités et ces injustices honteuses contre lesquelles je ne me suis jamais rebellée parce que cela n’aurait strictement rien changé. Au mieux, on m’aurait ri au nez avant de me jeter une pièce pour le spectacle divertissant que j’aurais offert. Au pire, quelques coups de fouet bien appliqués pour me rappeler ma place. Je suis devenue dangereuse sur plein de points et hostile envers beaucoup de monde, parce que je n’en peux plus de devoir me battre pour tout et surtout de devoir me battre pour rien. Irène ajoute qu’un moment d’inattention peut couter la vie à qui garde un tel animal enfermé. Cela n’est pas très loin de la vérité également. J’aurais profité de la moindre faiblesse du comte pour enfoncer mes ongles dans ses yeux. Effacer son sourire suffisant à coups de dents. Plonger n’importe quel objet tranchant dans sa gorge. Ces pensées si noires et si sombres ne s’atténuent pas, même en voyant les représentations de la tigresse qui me laissent insensible.

J’observe tout. Le pelage d’une couleur étrange, les rayures, toute l’attitude bestiale et pourtant si captivante de l’animal sauvage prête à fondre sur sa proie. Je n’ose pas toucher le livre, par respect, je sais que de telles œuvres sont inestimables, je n’ai pas envie de les corrompre. Me blottissant au plus près de la comtesse, je dis dans un souffle :

- On dirait un gros chat. Un gros chat avec des oreilles de mulot…

La main de la comtesse vient chercher la mienne, je la presse avec fièvre, heureuse de trouver un petit point d’appui, quelque chose de tangible pour m’ôter de l’esprit le regard du comte de Rougelac que je vois dans cette tigresse féroce, prête à fondre sur moi pour prendre ce que je lui refuse. Un tremblement m’agite, je me pelotonne contre Irène, avant d’ajouter :

- Mère me racontait des histoires de pirates. Des histoires de bateaux merveilleux, de voiles qui claquent au vent, des histoires de lutte, de sang et de guerre, tout en me parlant de la mer, des reflets du soleil sur l’eau, comme si l’océan était paré de millions de diamants…Je ne sais pas ce que c’est, un diamant, mais ça doit briller beaucoup. C’était comme si elle y avait été elle-même…Elle m’en parlait souvent, au milieu de tous les comptes de fée que j’aime tant. Les pirates existent, je le sais…alors les contes de fées aussi. Et je le sais parce tu es là.

Je ne cherche nullement à la flatter. Je suis parfaitement sincère dans ce que je dis. A mes yeux, Irène est cette marraine venue du ciel pour récompenser la jeune fille honnête et gentille toujours prête à aider les autres. Cependant, j’ignore si je mérite toujours une telle bienfaitrice. Mon esprit libre, comme elle le dit, me pousse toujours vers d’autres horizons et pour la première fois de toute mon existence, mon horizon est vaste, il n’est plus limité à la noirceur d’un mur de pierre orné d’étagères. Non…Mon horizon est rempli de Jehan, de notre vie future, de tous nos projets. J’aime cet homme plus que ma vie elle-même, je serais capable de tout pour lui…Et je remercie les Trois d’avoir permis qu’il soit sur ma route, ce grand homme au regard tendre et au sourire moqueur.

- Je ne veux plus de barreaux…Irène, ma vie entière a été une vie de prison…Je ne veux plus vivre comme ça…La vue d’une fenêtre barrée me fait me sentir mal…

La discussion qui a suivi a été longue, les images, magnifiques. Pourtant, je ne pus résister à l’attraction invincible du sommeil. Tout ce que je voulais, c’est dormir en sécurité. Avec une personne aimée à mes côtés. La voix d’Irène se perdit en un écho dans mes rêves, tandis que je disparaissais dans un monde rempli d’arbres aux branches chargées d’oiseaux magnifiques, de tigresses sublimes et d’autres animaux embarqués sur un bateau fendant des rivières de pierres précieuses luisant au soleil.

****

Les jours qui ont suivi cette douce soirée ont été à l’image de notre conversation : sages et tranquilles, paisibles. Le retour de mon bien-aimé à la fin de son séjour au Labret m’apporta la consolation du cœur, Irène s’étant déjà chargée de mon âme. Je serrai cet homme dans mes bras avec force, enfouissant mon visage dans son cou avec un délice que je ne cherchais même plus à dissimuler, impudique, me fichant bien de ce que pourraient penser les gens. Les retrouvailles avaient été telles que je les supposais, Jehan ne pouvant s’empêcher de me détailler sous toutes les coutures. Je dus trouver une histoire convaincante, pour expliquer les traces encore visibles sur mes chevilles et mes poignets. Et Jehan eut l’intelligence de les accepter telles quelles même si je savais qu’un jour il me demandera probablement la véritable explication. Quoiqu’il en soit, il eut l’occasion, durant chacun des jours qui ont suivi de me démontrer son amour vif et croissant, par des nuits à la sensualité douce et pourtant si intense. Je pensais avoir atteint le sommet du bonheur.

Ce ne fut rien en comparaison de ce que Irène avait manigancé en secret. Me rendant sur son invitation devant le manoir, je vis la charrette, chargée de choses invisibles, ce qui me fit hausser un sourcil. J’eus un regard vers Jehan, mais bientôt Irène dévoila ce qu’elle avait tramé.

A l’arrière de la charrette, sous le drap, je reconnus immédiatement, lorsqu’elle le souleva, la porte de ma maison, cette œuvre d’art magnifique, ouvrage de mon père qui lui avait demandé tant d’heures de travail. Les deux mains sur ma bouche, j’approchais pour ensuite toucher les motifs, du bout des doigts, en silence. Voir cette porte ici, c’est apporter un peu de ce qui m’appartient chez Irène, c’est totalement indéfinissable comme sentiment. Il y a de la gratitude, de la joie, de l’inquiétude aussi, alors que je contourne chaque détail du bout de mon index, vérifiant que chaque encoche est encore à sa place. Hormis le plaisir de voir ma porte ici, je me demandais bien évidemment ce que cela pouvait bien signifier, d’autant plus que je vis d’autres petits paquets dans la charrette, des petits paquets dont je ne pouvais deviner le contenu.

- Irène…Je…

A vrai dire, je n’eus pas vraiment le temps de terminer ma phrase, la comtesse d’argent parlait tout en me glissant un parchemin dans la main. Je ressentis une boule se former dans ma gorge, j’étais incapable de dire quoi que ce soit. Ce qu’elle me dit me semble si irréel et si fantastique que j’ai du mal à y croire.
Je suis propriétaire d’une maison. Une maison à moi. Une maison à nous. A Usson. Je ne pouvais lire le parchemin qu’avec de grandes difficultés mais je reconnus mon prénom et mon nom de famille là-dessus. Les yeux plein de larmes de joie, mon premier regard fut pour Jehan. Pour lui. Qui allait partager ma vie désormais. Notre vie. Je sentis une chaleur envahir ma poitrine, je dus prendre appui sur lui, ce qui m’arrive fréquemment ces derniers jours, surtout quand je suis émue. Et je suis émue souvent, en ce moment…

Nous allons avoir notre vie. Notre nid. Loin des malheurs de la cité. Ce ne sera pas facile, je le sais, mais nous serons deux. Et à deux, nous deux, ensemble, nous irons loin, parce que c’est ainsi que je l’ai décidé. Personne ne viendra m’enlever mon bonheur. Personne.

Le parchemin à la main, je ne dis rien, je m’avance et sans un mot enlace la comtesse si fort qu’elle aurait pu ne faire qu’un avec ma personne. Une fragrance de violette envahit mes poumons avant que je ne me redresse et que je ne dépose un baiser sur sa joue, ne trouvant rien de plus à dire qu’un :

- Merci, mon amie…

Je me dirige alors vers Jehan et saute dans ses bras, en riant, comme un enfant. Je lui donnai un baiser tendre, avant de dire :

- Il nous faut nous marier avant…Je ne veux pas arriver là bas sans être ton épouse, mon amour. Tu es d’accord ?

Je revins vers la porte, les joues rouges, les yeux brillant, le cœur battant à un rythme frénétique. Sur le point de me sentir mal. Trop de bonheur d’un coup. Mon rêve à portée de doigts. La radieuse perspective de voir enfin tous mes vœux être exaucés…C’est…trop. Je me cramponne à la charrette, avant de dire :

- Tu ne pouvais faire un plus bel hommage à ma famille qu’en conservant cette porte, Irène, c’est…d’une telle gentillesse, d’une telle noblesse, par les Trois. Je ne pourrai jamais te rembourser ceci, jamais.

Revenir en haut Aller en bas
Irène de ValisComtesse & Modératrice
Irène de Valis



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 EmptyMar 28 Avr 2020 - 19:23
La comtesse a un doute. Peut-être s’est-elle trompée. Peut-être Flore n’envisage-t-elle pas une seconde de s’éloigner d’elle. De la laisser seule ici avec elle-même. Mais à la façon dont elle l’écrase presque dans ses bras, elle sait que c’est la vérité. Flore veut d’une vie à elle, à la manière dont elle l’a imaginée, libre et naturelle. Loin des beaux atours et des parfums, loin des jeux de pouvoir. Et si Irène peut lui offrir cela, ce ne sera en aucun cas avec elle dans sa vie. Car vivre près de la comtesse signifie vivre cela.

Elle retient ses larmes et sourit. N’est-ce pas une belle action que de sacrifier sa propre volonté au profit du bien être d’un proche? Pas par obligation, pas par éducation. Mais juste pour le voir s’épanouir et être heureux. Elle n’a pas encore de réponse à cette question. Mais est sur le point de le découvrir. Elle sait qu’elle a bien agit. Elle encaissera les sentiments qui accompagneront ce choix.

Le capitaine, lui aussi heureux visiblement de ce départ, de cet éloignement, soulève sa douce dans ses bras et la fait tournoyer en riant de joie. Un vrai rire sans sarcasme, sans noirceur. Cela fait des années qu’il ne rit plus ainsi. C’est une libération pour lui. Des années de fardeau sous ses ordres à suivre un objectif qui n’est pas le siens, uniquement par loyauté et culpabilité. C’est dur de le voir si heureux. Dur et bon.

Si je m’écoutais, je t’épouserais dans l’instant mon amour ! Mais oui, nous partirons unis, et commencerons notre nouvelle vie ensemble. »

La comtesse ne peut s’empêcher de se demander si l’herboriste saura faire face à un prêtre le temps d’une union devant le clergé. Elle est parfois si pleine de colère, de haine. Et contrairement à son hôte, elle ne sait le dissimuler avec efficacité. Pourtant ils ont raison. Que ce soit pour leur bien être ou les rumeurs qui ne tarderont pas à courir sur eux au Labret. Les gens ne peuvent s’empêcher de s’imaginer tout un tas de choses sur les inconnus qui vivent près de chez eux. Alors autant ne pas ajouter d’eau à leur moulin en arrivant non marié.
Elle sourit et secoue la tête à son amie, sa presque sœur. Qui s’en va.

Tu ne me dois strictement rien Flore, rien du tout à part la promesse de continuer à te battre pour être heureuse. Le reste n’est que poussière dans le vent pour moi. Seul ton bonheur compte. »

Elle caresse doucement la porte au mécanisme complexe, effleurant le bois et le métal.

C’est vraiment un magnifique ouvrage. Je pense que toi et Jehan sauraient parfaitement la mettre en place sur place, mais au besoin vous trouverez bien un artisan capable de comprendre l’œuvre de ton père. Ça aurait été sacrilège de laisse un tel objet loin de sa propriétaire. Les reste des sachets contient les plantes que tu avais encore chez toi et les affaires qu’y restait sur place. Tu devras faire le tri toi-même, je préférais éviter que des inconnus choisisse pour toi ce qui méritait d’être gardé. »

Elle prit la main de ses deux compagnons et les unit dans les siennes, les pressant doucement. Elle parla d’une petite voix. Loin de son assurance habituelle, mais parfaitement honnête.

Vous êtes aujourd’hui les deux personnes les plus importantes de ma vie. Et par chance, vous vous aimez. Infiniment. Je suis heureuse de cela. Je vous souhaite sincèrement de trouver ensemble la vie qui vous correspond, et le bonheur qui ira avec. »

Bien sur il y avait Sydonnie, mais elle était à part, même pas encore vraiment dans sa vie. Elle était une enseignante, une menace et un espoir. Mais pas encore une proche. Tant mieux. Elle n’aurait pas supporter d’en perdre trois à la fois. Elle pressa fort leur main.

Je suis heureuse que vous vous soyez trouvés. Et plus heureuse encore de pouvoir apporter ma pierre à votre édifice. Venez, allons dîner, nous avons nombre de chose à discuter pour votre départ. Et je pourrais vous parler de la maison ! »

Elle entraina ses deux compagnons avec elle.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé



Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
MessageSujet: Re: Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]   Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort] - Page 7 Empty
Revenir en haut Aller en bas
 
Parfois, les dieux nous répondent[ft. Flore Maisonfort]
Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut 
Page 7 sur 7Aller à la page : Précédent  1, 2, 3, 4, 5, 6, 7

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Marbrume - Forum RPG Médiéval Apocalyptique :: ⚜ Cité de Marbrume - Quartiers populaires ⚜ :: Quartier de la milice :: Place des Chevaliers :: La chope sucrée-
Sauter vers: